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Or : au Burkina Faso, trois nouvelles mines vont doper la filière en 2021

| Par - à Ouagadougou
La mine d’or de Mana (ouest), exploitée par Endeavour, depuis son opération de fusion-acquisition avec Semafo, en 2020.

La mine d'or de Mana (ouest), exploitée par Endeavour, depuis son opération de fusion-acquisition avec Semafo, en 2020. © Renaud VAN DER MEEREN /EDJ

 

Avec 17 mines industrielles exploitées et 60 tonnes produites en 2020, la filière aurifère est en pleine forme malgré les crises sécuritaire et sanitaire.

Avec une production de 60 tonnes (t) en 2020 – contre 35 t en 2015 – et un chiffre d’affaires estimé à plus de 2 000 milliards de F CFA (plus de 3 milliards d’euros), la filière aurifère burkinabè poursuit sa croissance, portée par l’entrée en phase d’exploitation de nouvelles mines, comme celle de Sanbrado (par une filiale de l’australien West African Resources), par l’extension de gisements déjà en activité, ainsi que par la bonne tenue des cours de l’or.

Maintien de bonnes performances opérationnelles

Cette année, trois nouvelles mines devraient entrer en phase de production, l’une développée par la compagnie canadienne Roxgold à Boussoura (sud-ouest), près de Batié, et les autres par Riverstone Karma et Houndé Gold, détenues par un autre minier canadien, Endeavour Mining, qui, en novembre 2020, a racheté son compatriote Teranga Gold, moyennant 1,86 milliard de dollars.

Cette opération, combinée à la fusion-acquisition, quelques mois auparavant, de la Société d’exploitation minière en Afrique de l’Ouest (Semafo), place désormais Endeavour parmi les plus grands producteurs d’or cotés à Londres, avec 1,5 million d’onces produites par an (soit plus de 42,5 t).

« Ce sont autant de facteurs qui ont permis à notre secteur de maintenir la production et de se montrer résilient face à la pandémie de Covid-19 », explique Tidiane Barry, président de la Chambre des mines du Burkina (CMB). Malgré la crise sanitaire, les compagnies minières ont en effet maintenu de bonnes performances opérationnelles en 2020, certaines dépassant même leurs objectifs de production, comme Roxgold, qui a extrait de sa mine de Yaramoko (Ouest), qu’elle exploite depuis juin 2016, plus de 133 940 onces (environ 3,8 t) d’or, au lieu des 120 000 onces prévues.

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BOMBORÉ DEVRAIT PRODUIRE 1,6 MILLION D’ONCES SUR UNE DURÉE DE VIE DE TREIZE ANS

La production attendue pour 2021 devrait être similaire à celle de 2020, même si l’entrée en phase de production de la mine de Bomboré (Centre) a été reportée à 2022. Selon l’étude de faisabilité, Bomboré devrait produire 1,6 million d’onces sur une durée de vie de treize ans, avec une moyenne annuelle de 133 800 onces pendant les dix premières années d’exploitation.

La junior canadienne Orezone Gold poursuit donc le développement de la mine, financé par Coris Bank. « C’est la preuve que le secteur financier local est capable d’accompagner des projets miniers d’envergure », souligne Tidiane Barry.

Éponger la dette

En attendant, la CMB multiplie les négociations avec le ministère des Finances pour éponger la dette de l’État envers les sociétés minières, dont le montant total est estimé à plus de 100 milliards de F CFA. « Avec plus de 40 milliards de F CFA de TVA dus au retard de remboursement, la situation demeure critique », assure le président de la chambre des mines.

De son côté, l’ONG Orcade remarque que, alors que le pays compte désormais 17 mines d’or industrielles en exploitation, la contribution du secteur en matière de recettes directes, environ 300 milliards de F CFA, est relativement faible.

« L’État n’a pas su créer les conditions pour suivre et contrôler l’activité minière, ni former une masse critique de compétences et de PME, capables d’occuper les postes clés et de proposer des services de qualité aux sociétés minières », regrette Jonas Hien, directeur exécutif d’Orcade.

[Tribune] L’Afrique ne doit pas laisser le Covid-19 annuler des décennies de progrès dans la santé

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Mis à jour le 09 avril 2021 à 11h41
 
 

Par  Helen Clark

Ancienne Première ministre néo-zélandaise, présidente du conseil d’administration du Programme des Nations unies pour le développement

 

Par  Muhammad Ali Pate

Directeur pour la santé, la nutrition et la population à la Banque Mondiale et ancien ministre nigérian de la Santé

Les femmes et les enfants subissent de plein fouet les effets collatéraux de la crise sanitaire, comme Noluvuyo Gadela et sa fille Siamtanda à Khayelitsha, dans la banlieue du Cap
Les femmes et les enfants subissent de plein fouet les effets collatéraux de la crise sanitaire,
comme Noluvuyo Gadela et sa fille Siamtanda à Khayelitsha, dans la banlieue du Cap © Tommy Trenchard/PANOS-REA

La crise liée au coronavirus menace les avancées enregistrées pour faire reculer la mortalité et la pauvreté dans le monde. Les pays africains et la communauté internationale doivent donc faire de l’accès aux soins des plus vulnérables une priorité.

Alors que le monde s’interroge sur la manière de reconstruire les sociétés et les économies à la suite de la pandémie, il est urgent d’adopter des politiques et des engagements financiers pour s’attaquer de front aux inégalités qui frappent le plus durement les populations vulnérables. L’accès aux soins de santé essentiels dans les pays les plus pauvres du monde, en particulier pour les femmes, les enfants et les adolescents, constitue un volet prioritaire dans ce domaine.

Si rien n’est engagé, les ravages causés par la pandémie annuleront des années, voire des décennies, de progrès en la matière, laissant pour compte une génération entière. Les progrès réalisés dans le domaine de la santé mondiale, sous l’impulsion de différentes nations et avec le soutien de la communauté internationale, ont été durement acquis – mais ils restent précaires.

Cascade d’impacts secondaires

Les taux de mortalité maternelle dans les nombreuses zones de conflit dans le monde sont en hausse, et non en baisse. Par ailleurs, la récession économique provoquée par la pandémie signifie que la pauvreté mondiale devrait augmenter pour la première fois depuis 1998, la Banque mondiale estimant qu’entre 143 et 163 millions de personnes basculeront dans l’extrême pauvreté d’ici à la fin de l’année 2021.

Ce constat repose notamment sur le sous-financement chronique des services de santé essentiels, phénomène qui ne constitue pas seulement un obstacle majeur à la maîtrise du coronavirus, mais qui provoque également une cascade d’impacts secondaires qui entraînent des privations dans toutes nos sociétés.

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LE COVID-19 AMPLIFIE LES INÉGALITÉS DANS UN MONDE OÙ 4 MILLIARDS DE PERSONNES N’ONT PAS DE PROTECTION SOCIALE

Depuis le début de la crise sanitaire, le Mécanisme de financement mondial (GFF), un partenariat hébergé par la Banque mondiale, estime que l’accès aux interventions sanitaires vitales pour les femmes, les enfants et les adolescents dans 36 des pays les plus pauvres du monde – dont 26 en Afrique – a chuté de près de 25 %. Cela équivaut à 4 millions de femmes qui ne peuvent recevoir de soins à l’accouchement, à 17 millions d’enfants qui ne sont pas vaccinés et à plus de 5 millions de femmes et d’adolescents qui perdent accès aux contraceptifs.

Ces problèmes ne sont pas seulement dus au virus, mais aussi à la réponse des gouvernements et aux réactions individuelles, des ressources au préalable destinées aux soins de santé essentiels étant détournées vers la lutte contre la pandémie.

Par ailleurs, de nombreuses personnes craignent de se rendre dans les centres de soins par peur d’être infectées. Les répercussions sont considérables : les enfants tombent malades faute d’avoir été vaccinés, les jeunes femmes ne bénéficient pas d’accès à la santé sexuelle et reproductive, les accouchements sans personnel soignant sont inutilement dangereux. Les difficultés économiques aggravent un peu plus les problèmes de nutrition et de santé et notamment l’incapacité de payer pour des traitements vitaux.

Les femmes en première ligne

Bien évidemment, ce sont les femmes qui subissent de manière disproportionnée les conséquences collatérales de cette crise sanitaire. Leur emploi est plus menacé que celui des hommes, notamment en raison de l’impact de la récession sur le secteur des services, tandis que les restrictions sociales draconiennes et les difficultés économiques les rendent plus vulnérables aux violences domestiques.

Cette «  féminisation  » de la privation est un exemple frappant de la façon dont le Covid-19 amplifie les inégalités dans un monde où l’on estime que 4 milliards de personnes n’ont accès à aucune forme de protection sociale.

Dans ce contexte, le Partenariat pour la santé de la mère, du nouveau-né et de l’enfant (PMNCH) a lancé un « appel à l’action Covid-19 », au nom de ses 1 000 partenaires, et a présenté un programme en sept points pour protéger la santé et les droits des femmes, des enfants et des adolescents vulnérables. Cet appel et les efforts de mobilisation associés visent à stimuler les engagements politiques sous la forme de réformes et de financements qui peuvent s’attaquer aux causes de cette privation.

Priorité aux besoins essentiels

Les pays, aujourd’hui plus que jamais, doivent adopter des politiques et des mesures financières qui donnent la priorité aux soins de santé essentiels  : services de santé sexuelle, reproductive, maternelle, néonatale, infantile et adolescente, et de nutrition. Ils peuvent notamment y parvenir en utilisant des outils qui ont fait leurs preuves tels que l’approche partenariale du GFF, qui permet d’augmenter et de coordonner les ressources publiques et privées, nationale et internationale pour répondre aux besoins des pays.

Le GFF vise à lever 1,2 milliard de dollars américains cette année, sur un besoin de financement total de 2,5 milliards de dollars d’ici à 2025, afin de soutenir ces services. À l’horizon 2030, cet investissement permettra de mobiliser près de 53 milliards de dollars, de réduire de plus d’un tiers le nombre de décès, sauvant ainsi près 13,5 millions de vies, et de baisser de près d’un tiers la mortalité maternelle, soit plus d’un million de vies sauvées.

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L’AFRIQUE ET LE MONDE NE PEUVENT PAS SE PERMETTRE D’ASSISTER EN SILENCE À LA SOUFFRANCE DES PLUS VULNÉRABLES

Les cinq prochaines années seront cruciales pour contrer les effets de la pandémie. Les nations, et notamment les pays Africains, n’ont pas d’autre choix que de répondre aux besoins de santé essentiels des femmes, des enfants et des adolescents. Non seulement parce que c’est la bonne chose à faire, mais aussi parce que c’est la chose intelligente à effectuer. Faire du capital humain la colonne vertébrale d’une relance résiliente promet de produire des avantages sociaux et économiques substantiels notamment pour le continent africain.

C’est pourquoi nous appelons les pays à augmenter et à renforcer les financements nationaux et internationaux pour protéger les femmes, les enfants et les adolescents. L’Afrique et le monde ne peuvent pas se permettre d’assister en silence à la souffrance des personnes les plus vulnérables.

Mali : à un an de la présidentielle, l’Adema peut-elle faire sa révolution ?

| Par 
Tiémoko Sangaré, président de l’Adema, en 2018

Tiémoko Sangaré, président de l'Adema, en 2018 © EMMANUEL DAOU BAKARY

Candidature interne ou parrainage pour la présidentielle de 2022, reconduction de Tiémoko Sangaré ou élection d’un nouveau chef de file fin mai… Les débats font rage au sein de l’Adema, faisant resurgir le spectre du rendez-vous manqué de 2018.

Nouveau scrutin, mêmes problématiques. Depuis qu’elle a quitté le pouvoir en même temps qu’Alpha Oumar Konaré, en 2002, l’Alliance pour la démocratie au Mali-Parti africain pour la solidarité et la justice (Adema-PASJ) se divise autour de la même question : doit-elle présenter un candidat aux couleurs du parti ou apporter son soutien à une tierce personne ?

C’est cette deuxième option qui a été retenue du temps d’Amadou Toumani Touré (ATT) puis sous la présidence d’Ibrahim Boubacar Keïta (IBK). Et elle a valu au parti de l’abeille nombre de départs, ses cadres goûtant peu d’être durablement cantonnés à un rôle de simple allié du pouvoir.

Un candidat Adema ?

À moins d’un an de l’élection présidentielle qui doit venir clore la transition en cours, l’Adema étudie ses options afin d’éviter de se retrouver dans la même situation qu’en 2018, quand ses membres se déchiraient entre les partisans d’une candidature de l’Adema, les pro-IBK et les soutiens de Soumaïla Cissé, à l’époque poids lourd de l’opposition malienne.

Et plusieurs camps se dessinent. « Comme toujours à l’approche d’un scrutin, l’Adema fait face à un risque réel de morcellement entre ceux qui voudraient promouvoir une candidature interne et ceux qui estiment que le parti n’en a pas les moyens », estime Abdoul Sogodogo, vice-doyen de la faculté de sciences administratives et politiques de Bamako.

Prochaine étape décisive pour le parti : l’organisation, fin mai, d’un congrès (initialement prévu fin mars), au cours duquel les militants devront élire leurs dirigeants.

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NOUS SOMMES OUVERTS À TOUTE HYPOTHÈSE ET NOUS NE SOUHAITONS FRUSTRER AUCUN ALLIÉ POTENTIEL »

Pour Tiémoko Sangaré, président sortant de l’Adema et candidat à sa propre succession, la ligne à suivre est claire : « Les militants veulent un candidat Adema pour la présidentielle de 2022 ». C’est donc « une coalition formée autour d’un projet Adema » que soutiendra l’ancien ministre s’il est réélu à la tête du parti. « On nous a régulièrement fait le reproche de soutenir des candidatures qui n’étaient pas les nôtres et les militants en sont frustrés. À l’époque, le contexte le justifiait. Aujourd’hui, l’Adema ne peut plus se permettre de soutenir un candidat hors de ses rangs », poursuit-il.

« L’Adema a l’emballage, mais pas le produit »

Face à lui, plusieurs ténors du parti se montrent plus nuancés. Parmi eux, l’ancien ministre de la Communication Yaya Sangaré estime qu’il faut ménager les futurs alliés de l’Adema. « Nous ne pouvons pas nous permettre une quelconque arrogance à l’endroit d’autres leaders politiques en affirmant que l’Adema aura un candidat interne et rien d’autre. À ce stade, nous sommes ouverts à toute hypothèse et nous ne souhaitons frustrer aucun allié potentiel. L’Adema doit travailler avec modestie et humilité pour asseoir un vaste rassemblement et faire en sorte que personne ne s’en sente exclu », recadre-t-il.

Alors que sa position va à l’encontre de celle du président de l’Adema, Yaya Sangaré plaide en faveur d’un renouvellement à la tête du parti. « Je pense que les militants ne sont pas satisfaits de la gestion des affaires. Pour beaucoup, l’Adema a raté le coche lors de tournants décisifs de l’histoire du Mali », tance-t-il.

Une frustration qui pourrait coûter sa place à Tiémoko Sangaré. Face à lui, les noms de plusieurs potentiels challengers circulent. « On compte déjà quatre clans pour prendre la présidence du parti. Celui de Tiémoko Sangaré, le seul à revendiquer son envie d’un candidat Adema. Ceux des caciques Adama Sangaré, maire de Bamako, et Moustapha Dicko, ancien ministre de l’Éducation. Et celui du jeune loup Adama Noumpounon Diarra, dont la campagne a déjà commencé », décrypte le journaliste et analyste politique Alexis Kalambry.

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ON RISQUE DE REVIVRE DES ÉVÉNEMENTS SIMILAIRES À CEUX QUI AVAIENT MENÉ AU DÉPART D’IBK OU DE SOUMAÏLA CISSÉ »

À cette pression interne s’ajoutent les appels du pieds de plus en plus pressants de candidats extérieurs, officiellement déclarés ou non. Bien implanté sur l’ensemble du territoire et comptant de nombreux militants dans ses rangs, l’Adema, longtemps considéré comme un faiseur de roi, reste un soutien de poids.

« Malgré tous les maux dont peut souffrir le parti, il est l’un des seuls à avoir un ancrage national et local. Mais il souffre d’un manque de leadership », poursuit Alexis Kalambry. « L’Adema a l’emballage mais pas le produit. Nous nous avons le produit, mais pas l’emballage », renchérit le proche collaborateur d’un ancien ministre qui a des vues sur Koulouba et cherche à obtenir le soutien de l’Adema.

La fin du parti ?

Candidat interne ou parrainage ? La direction à prendre pourrait être déterminée par les finances de la formation. Lourdement endettée, l’Adema dépendra pour faire campagne du soutien financier de certains de ses alliés. Elle pourrait ainsi soutenir dès le départ un candidat extérieur en contrepartie de postes-clés si ce dernier est élu. « Mais de plus en plus de voix reprochent à l’Adema son mercantilisme et veulent se choisir un leader qui rompe avec cette tradition », nuance Alexis Kalambry.

Autant de questions qui seront tranchées lors du congrès de la fin mai. L’enjeu ? Trouver un leader consensuel capable de fédérer autour d’un projet commun ou, à défaut, creuser un peu plus les dissensions existantes. « Ce congrès doit consacrer l’amélioration de l’organisation et la responsabilisation du parti, estime Tiémoko Sangaré. Il n’y a pas d’enjeux personnels. Sans organisation forte, aucun leader ne peut aller nulle part. »

« S’il n’y a pas d’entente, on risque de revivre des événements similaires à ceux qui avaient mené au départ d’IBK ou de Soumaïla Cissé, met en garde l’enseignant-chercheur Abdoul Sogodogo. La formation pourrait ne pas résister à une nouvelle scission. Si de grands noms devaient encore quitter le parti, cela pourrait être la fin de l’Adema. »

[Infographie] Golfe de Guinée : des pirates toujours plus professionnels et plus agressifs

| Par 
Mis à jour le 08 avril 2021 à 18h13
Patrouille navale des forces de sécurité béninoises.
© Patrouille navale des forces de sécurité béninoises.

Le golfe de Guinée est de loin la zone maritime la plus dangereuse au monde. Et les attaques y sont de plus en plus violentes et sophistiquées. La preuve en infographies.

Les assaillants sont lourdement armés, et leur opération remarquablement coordonnée. Le 23 janvier dernier, lorsqu’ils se lancent à l’abordage du Mozart, un porte-conteneurs appartenant à l’armateur turc Boden Denizcilik A.S. battant pavillon libérien, les pirates nigérians mettent tout en œuvre pour atteindre leur objectif : capturer les membres de l’équipage.

Lorsqu’ils se hissent à bord du navire, un mastodonte de 220 mètres de long parti de Lagos pour rejoindre Le Cap, les assaillants percent les parois des quartiers des marins, où ces derniers se sont réfugiés. Un ingénieur azeri est tué dans l’assaut, quinze marins sont enlevés, tous sont turcs. Les trois derniers membres de l’équipage laissés à bord ramèneront tant bien que mal le navire à Port-Gentil, au Gabon.

Un mois plus tard, mi-février, les quinze marins turcs sont finalement libérés par leurs kidnappeurs, au terme d’une « médiation » menée par une équipe européenne. Les détails de la transaction – et en particulier le montant de la somme versée par l’armateur – n’ont pas été dévoilés.

Cette attaque meurtrière est loin d’être une première dans le golfe de Guinée, qui connaît désormais la triste destinée du golfe d’Aden, aux larges des côtes somaliennes, qui était jusqu’en 2019 le point névralgique de la piraterie mondiale. Au cours de l’année 2020, 130 marins ont été enlevés au large des côtes ouest-africaines, au cours de 22 attaques.


Au fil des années, les pirates ont gagné en expérience. Voire en expertise. Ils se sont professionnalisés. Le modus operandi est désormais bien rôdé. Les attaques – souvent réussies – ont lieu de plus en plus fréquemment en haute mer, loin de la mangrove du delta du Niger d’où partent les assaillants. Ils utilisent désormais des chalutiers comme navires « mères », qui viennent en appui aux petites embarcations rapides qui servent à lancer les abordages.

Une technique qui leur permet d’attaquer plus loin des côtes, et de lancer des opérations plus longues, et plus complexes. L’assaut mené contre le Mozart a ainsi duré six heures en tout. Ils se concentrent en outre sur les enlèvements jugés plus rentables, et ciblent les navires dont les compagnies d’assurances sont réputées pour verser des rançons afin d’obtenir la libération des équipages.


Pour tenter d’endiguer le phénomène, et apporter un soutien aux forces navales ouest-africaines aux moyens limités, l’Union européenne a lancé, le 25 janvier, une cellule de coordination et a fait du golfe de Guinée la première zone maritime d’intérêt européen. Le Danemark a promis l’envoi, en novembre 2021, d’une frégate dotée d’un équipage de 175 marins et d’un hélicoptère pour une durée de trois mois.





Les pirates qui opèrent dans le golfe de Guinée sont presque exclusivement des Nigérians installés dans le delta du Niger, région riche en pétrole mais dont les retombées économiques n’ont que très peu profité aux populations locales.

Un sentiment d’exclusion économique qui a servi de terreau aux gangs. Les kidnappings peuvent en effet rapporter gros : de 40 000 à 50 000 dollars par otage en moyenne, selon les experts en sécurité maritime de Bimco et Dryad Global.

Togo : Sandra Ablamba Johnson, l’experte ès réformes de Faure Gnassingbé

| Par - à Lomé
Mis à jour le 09 avril 2021 à 10h57
Sandra Ablamba Johnson est économiste du développement et experte en développement du secteur privé.

Sandra Ablamba Johnson est économiste du développement et experte en développement du secteur privé. © Présidence de la République togolaise

Chargée de la cellule du climat des affaires depuis 2019, la jeune quadragénaire a été nommée en septembre dernier secrétaire générale de la présidence. Sa grande connaissance des enjeux économiques africains l’a vite rendue indispensable auprès de Faure Gnassingbé.

Ministre chargée de la cellule climat des affaires (CAA) et secrétaire générale de la présidence de la République, Sandra Ablamba Johnson entoure Faure Gnassingbé dans bien des domaines. Habituée des questions financières et cheville ouvrière des réformes qui ont valu au Togo des performances remarquées dans le classement Doing Business, elle fait partie du think tank A New Road sur la dette africaine.

Économiste-planificatrice

C’est au ministère de la Planification, du Développement et de la Coopération, rattaché dans le gouvernement actuel à la présidence de la République, que Sandra Ablamba Johnson a démarré sa carrière dans l’administration. Au sein de la direction de la coopération internationale, elle a participé à l’élaboration de la défunte Stratégie de croissance accélérée et de promotion de l’emploi (SCAPE 2013-2017) et a ensuite été chargée du suivi de l’aide et de la production du rapport de l’aide publique au développement.

Disposant d’un diplôme d’études supérieures spécialisées (DESS) en sciences économiques obtenu à l’université de Lomé, d’un diplôme de programmation et politiques financières de l’institut du Fonds monétaire international (FMI) à Washington, et d’un diplôme de l’économie de l’emploi de l’académie du Bureau international du travail à Turin, Sandra Ablamba Johnson est économiste du développement et experte en développement du secteur privé.

Réformes

En 2012, elle intègre l’équipe de la présidence togolaise au sein de l’Unité Millenium Challenge Account en qualité de senior économiste. Elle gravit ensuite les échelons pour atteindre le rang de Public Procurement Leader. Sandra Ablamba Johnson est à l’origine des réformes économiques qui ont conduit à l’éligibilité du Togo en 2016 au Millenium Challenge Corporation (MCC) des États-Unis. La validation des critères du programme Seuil permettent au pays de bénéficier d’une enveloppe de 35 millions de dollars destinée à améliorer l’accès aux TIC et à clarifier les droits fonciers coutumiers afin d’élargir l’accès à la terre pour tous.

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EN DEUX ANS, LE TOGO A GAGNÉ 59 PLACES DANS LE CLASSEMENT DOING BUSINESS DE LA BANQUE MONDIALE

En 2017, elle devient conseillère du président de la République au rang de secrétaire d’État chargée du climat des affaires avant d’être promue, deux ans plus tard, ministre déléguée, coordonnatrice de la cellule climat des affaires. En 2019, les réformes engagées par le pays ont permis un bond de 19 places du Togo dans le classement Doing Business de la Banque mondiale. L’année suivante, la progression a été plus forte : 40 places. En deux ans, le pays est passé du 156e rang mondial, en 2018, derrière Djibouti (154), au 97e rang, en 2020, devant les Seychelles (100) et la Côte d’Ivoire (110).

Première femme secrétaire générale de la présidence

L’ascension a été spectaculaire pour celle qui a regagné les rangs du personnel de la présidence de la République il y a huit ans. L’annonce de sa nomination en octobre dernier en tant que secrétaire générale avec rang de ministre en remplacement de Patrick Daté Tévi-Benissan, décédé le 2 septembre 2020, a été chaleureusement et unanimement applaudie, en particulier par le secteur privé, avec lequel elle a étroitement collaboré. À ce poste, elle assure la direction du cabinet civil du chef de l’État, instruit, suit et surveille la bonne marche des affaires.

Femme de réseaux

Habituée des cercles de pouvoir, Sandra Ablamba Johnson fait partie du tout nouveau think tank A New Road, créé à l’ initiative d’Anne-Laure Kiechel, consultante chez Global Sovereign Advisory, et de Nicolas Jean, associé et membre du comité exécutif du cabinet d’avocats d’affaires Gide Loyrette Nouel pour réfléchir à l’accès aux capitaux du continent.

Très présente aux évènements consacrés à la finance et à l’économie aux niveaux africain et mondial, elle est notamment proche du patronat français. Le 18 mars, elle est intervenue au Forum Afrique du CIAN – rendez-vous annuel des dirigeants et cadres d’entreprises d’Afrique et d’ailleurs –, aux côtés de Élisabeth Medou Badang, senior vice-présidente Afrique et océan Indien d’Orange, de Hughes Mbadinga Madiya, ministre du Commerce et de l’Industrie du Gabon, et de Richard Bielle, PDG de CFAO.

Forum Togo-Union européenne

L’évènement économique organisé à Lomé les 13 et 14 juin 2019 est marqué de son empreinte. De la mobilisation des 600 participants – parmi lesquels de très nombreux chefs d’entreprise et des officiels européens et africains – à la sélection des projets économiques nationaux, Sandra Ablamba Johnson était là. La moisson des investissements a abouti à une promesse ferme de 1,3 milliard d’euros, soit environ 852 milliards F CFA. Pour Sandra Ablamba Johnson, ce fut une « réussite totale ».