Justice et Paix

" Je suis homme, l'injustice envers d'autres hommes révolte mon coeur. Je suis homme, l'oppression indigne ma nature. Je suis homme, les cruautés contre un si grand nombre de mes semblables ne m'inspirent que de l'horreur. Je suis homme et ce que je voudrais que l'on fit pour me rendre la liberté, l'honneur, les liens sacrés de la famille, je veux le faire pour rendre aux fils de ces peuples l'honneur, la liberté, la dignité. " (Cardinal Lavigerie, Conférence sur l'esclavage africain, Rome, église du Gesù)

 

NOS ENGAGEMENTS POUR LA JUSTICE T LA PAIX
S'EXPRIMENT DE DIFFÉRENTES MANIÈRES :

En vivant proches des pauvres, partageant leur vie.
Dans les lieux de fractures sociales où la dignité n'est pas respectée.
Dans les communautés de base où chaque personne est responsable et travaille pour le bien commun.
Dans les forums internationaux pour que les décisions prises ne laissent personne en marge.

Dans cette rubrique, nous aborderons différents engagements des Missionnaires d'Afrique, en particulier notre présence auprès des enfants de la rue à Ouagadougou et la défense du monde paysan.

 

Lutte contre la corruption : L’audit de l’Assemblée nationale révèle un préjudice financier de plus de 13 milliards de FCFA

Accueil > Actualités > Société • Lefaso.net • jeudi 9 mars 2023 à 22h25min 
 
Lutte contre la corruption : L’audit de l’Assemblée nationale révèle un préjudice financier de plus de 13 milliards de FCFA

 

L’Autorité supérieure de contrôle d’État et de lutte contre la corruption (ASCE-LC) a convoqué la presse ce jeudi 9 mars 2023 pour présenter les résultats de l’audit comptable et de gestion financière des trois grandes institutions du pays. Il s’agit notamment de la Présidence du Faso, de la Primature et de l’Assemblée nationale. Au titre de la représentation nationale, les irrégularités constatées par l’ASCE-LC ont causé un préjudice financier de plus de 13 milliards de FCFA entre 2018 et 2021.

 

L’Autorité supérieure de contrôle d’Etat et de lutte contre la corruption (ASCE-LC) a été saisie par le chef de l’Etat pour réaliser un contrôle approfondi des structures publiques dont les trois institutions que sont la Présidence du Faso, la Primature et l’Assemblée nationale, conformément à l’article 46 alinéa 2 de la loi organique n° 082-20 5/CNT du 24 novembre 2015 portant attributions, composition, organisation et fonctionnement de l’ASCE-LC.

Les rapports de ces différentes opérations de contrôle ont été dévoilés ce jeudi 9 mars 2023 par le contrôleur général d’Etat Philippe Nion. L’objectif de ce contrôle est de s’assurer de la bonne gestion des ressources financières et comptables des structures publiques concernées.
Les domaines concernés par ces opérations de contrôle sont la commande publique, les comptes de dépôt, les régies d’avances, le carburant, les frais de mission, les frais de voyage, les rétributions, les dons au bénéfice des personnes politiquement exposées (PPE).

 


Le présidium lors de cette conférence de presse

Plusieurs irrégularités ont été constatées dans ces trois institutions et ont causé une incidence financière de plus de 16 milliards de FCFA. Au titre de la représentation nationale, les irrégularités constatées par l’ASCE-LC ont causé un préjudice financier de plus de 13 milliards de FCFA, entre 2018 et 2021. Parmi les irrégularités constatées, on peut retenir entre autres, des surfacturations, des non-liquidations des pénalités de retard, des missions fictives, la prise en charge des personnes absentes aux missions, des paiements injustifiés, les sorties irrégulières de carburant, les passations illégales de marchés publics, l’octroi irrégulier d’avantages à certaines personnes, le recours abusif à la procédure d’entente directe, des prises en charge illégales de soins à l’étranger de certaines personnes, etc.

Lire aussi Lutte contre la corruption : L’audit de la Présidence du Faso révèle un préjudice financier de plus de 695 millions de FCFA

 

Au titre de la représentation nationale, le contrôleur d’Etat a rappelé que d’autres objectifs spécifiques ont été définis au regard des constats faits sur le terrain. Il s’agit de l’évaluation du cadre juridique et réglementaire, de l’état d’amortissement des prêts véhicules accordés aux députés et des charges du régime médico-social. Les irrégularités ressorties dans le rapport portent sur les domaines audités.
Au titre de l’évaluation du cadre juridique et réglementaire, le rapport a relevé le non-respect par l’AN des lois régissant la gestion financière et les marchés publics, à savoir la LOLF, la loi portant code de transparence dans la gestion des finances publiques et la loi régissant les marchés publics et leurs textes attenants.

 

Philippe Nion, contrôleur général d’Etat lors du point de presse

Au titre du contrôle de la « commande publique », les irrégularités concernent le recours abusif à la procédure d’entente directe, des surfacturations de 379 377 630 FCFA, la non liquidation des pénalités de retard d’un montant cumulé de 313 039 311 F CFA.
Au titre du « contrôle des comptes de dépôt », le rapport a ressorti une série d’irrégularités portant sur les paiements injustifiés ou pour lesquels aucune justification n’a été apportée. L’incidence financière est de 7 913 856 138 de FCFA, des dépenses effectuées sur décisions de déblocage non justifiés pour un montant total de 1 390 489 248 de FCFA.

On note également des pertes de ressources publiques consécutives à des dépôts de fonds dans une banque commerciale. Par cette pratique, 12 099 000 000 FCFA ont été déposés dans une banque sans intérêt avec des frais de plus de 10 000 000 FCFA. La perte financière, calculée à partir du loyer de l’argent (taux d’intérêt légal de la BCEAO sur la période) donne un montant de 693 742 711 F CFA, imputable à un agent public, selon l’ASCE-LC.

Il y a aussi l’insincérité des situations comptables. Les dépenses d’investissement exécutées telles que ressorties dans les comptes de l’AN ne sont pas sincères, soutient le contrôleur général d’Etat. Sur un taux d’exécution de 99,28%, le rapport ressort en réalité seulement 23% correspondant à des réalisations effectives.
Au titre de la gestion des prêts véhicules, le rapport de l’ASCE-LC ressort un encours cumulé des 7e et 8e législatures de 1 585 650 000 FCFA. Après les relances de I’ASCE-LC, un montant total de 70 415 000 FCFA a été régularisé par des députés et l’encours restant est de 1 515 235 000 FCFA dont 34 740 000 FCFA au titre des députés décédés, selon les explications de Philippe Nion.


Les journalistes mobilisés pour relayer le contenu de ces rapports

Il a profité de cette occasion pour inviter les députés qui restent redevables à l’Etat à se mettre en règle.
L’ASCE-LC a également épinglé le non-respect de la règlementation sur les évacuations sanitaires. Selon Philippe Nion, contrôleur général d’Etat, « une personne qui n’est ni député, ni fonctionnaire parlementaire a bénéficié de cette prise en charge. De même, des frais de mission ont été servis sans justifications pour 61 860 000 F CFA ».

Au titre du contrôle des missions, le rapport a ressorti des paiements pour des missions pour lesquelles il n’existe pas d’ordre de mission. L’incidence financière est de 429 607 000 FCFA en raison de 11 227 000 FCFA pour les missions à l’intérieur et de 418 380 000 FCFA pour les missions à l’extérieur, l’existence d’ordre de mission sans visa dument apposé par les autorités compétentes. L’incidence financière est de 67 132 501 F CFA en raison de 60 452 501 F CFA pour les missions à l’intérieur et de 6 680 000 F CFA pour les missions à l’extérieur.

Lire aussi Lutte contre la corruption : L’audit de l’ASCE-LC révèle un préjudice financier d’environ 2 milliards de FCFA à la Primature

Au titre du contrôle « de la gestion des libéralités », le rapport constate que des libéralités ont été irrégulièrement faites et portant sur les subventions accordées aux groupes parlementaires en raison de 5 000 000 FCFA par député débloqué en cinq tranches. « En 2020, année d’élection, 3 000 000 FCFA supplémentaires ont été alloués à chaque député. Le rapport fait une annotation particulière sur ce financement déguisé des partis politiques et surtout sur le caractère discriminatoire, équivoque et inapproprié de cette libéralité », explique Philippe Nion.

Il y a aussi les appuis divers aux activités des députés, à savoir les journées de redevabilité, les financements des députés accordés par le président de l’AN sur demande individuelle de soutien. Ces appuis sont de 386 463 361 F CFA de 2018 à 2021, selon le rapport de l’ASCE-LC.

 

L’ASCE-LC a également constaté des irrégularités dans le financement du CORONATHON. Le rapport constate que six chèques des six groupes parlementaires ont été officiellement remis au profit du compte « CORONATHON » en raison d’un million (1 000 000) FCFA par député, soit un total de 126 000 000 de FCFA. Par la suite, des chèques ont été émis des comptes de l’AN au profit des six groupes parlementaires avec comme libellé « Subvention accordée aux groupes parlementaires pour la prise en charge de leur contribution à la lutte contre le covid-19 (à titre de régularisation) ».
« Je vous informe qu’un député nous a apporté sa quittance de reversement de la somme d’un million de FCFA suite au communiqué de I’ASCE-LC », se justifie le contrôleur général d’Etat.

 

 



Les participants à cette conférence de presse de restitution des résultats de l’audit de ces trois institutions.

Au titre du contrôle « des rétributions spécifiques », le rapport a constaté que 112 sont irrégulières avec une incidence financière de 787 519 100 FCFA. Ces irrégularités portent sur des dépenses sans pièces justificatives (37 430 000 FFCFA), des dépenses sans actes de création (234 720 000 FCFA) et des dépenses non éligibles (515 369 100 FCFA).
Selon l’ASCE-LC, le montant total de l’incidence financière des irrégularités constatées dans le rapport de contrôle de l’AN est de treize milliards six cent seize millions vingt-huit mille six cent trente-neuf (13 616 028 639) FCFA.

À l’issue de la présentation de ces rapports, des mesures seront prises pour le suivi de ces dossiers. Il s’agit de l’établissement de renseignement judiciaire et mise en œuvre des investigations sur les faits constatés, la saisine de la cour des comptes des faits pouvant être qualifiés de fautes de gestion, la saisine du ministère en charge des finances pour la mise en jeu de la responsabilité pécuniaire des agents mis en cause, la prise de mesures conservatoires afin de préserver l’intégrité des finances publiques et les intérêts de l’Etat et l’élaboration des plans d’actions pour le suivi des recommandations.

Le contrôleur général d’État Philippe Nion et ses collaborateurs souhaitent également que les sommes mises à la charge des différentes personnes visées dans ces trois rapports de contrôle fassent l’objet de recouvrement intégral conformément à la règlementation en vigueur.
Selon Philippe Nion, les périodes de contrôle sont de façon générale de 2020 à 2021, de 2016 à 2021 pour l’Armée et de 2018 à 2021 pour l’Assemblée Nationale. Plus de 150 personnes ont été mobilisées pour la conduite de ces contrôles lancés courant l’année 2022.

Mamadou ZONGO
Lefaso.net

Violence contre les migrants subsahariens en Tunisie : « J’ai mal au cœur », regrette la Tunisienne Dora Bouchoucha

Accueil > Actualités > International • LEFASO.NET • dimanche 5 mars 2023 à 23h16min 
 
Violence contre les migrants subsahariens en Tunisie : « J’ai mal au cœur », regrette la Tunisienne Dora Bouchoucha

 

A la cérémonie de clôture de la 28e édition du FESPACO, ce samedi 4 mars 2023, la Tunisienne Dora Bouchoucha, présidente du jury section long métrage fiction, a regretté ce qui se passe dans son pays avec notamment les violences contre les migrants sub-sahariens.

 

« Beaucoup déjà voulaient diviser l’Afrique du Nord et l’Afrique sub-saharienne. L’Afrique est unique et indivisible. Nous avons beaucoup de similarités. Dans la même famille, il y a des différences. Et j’espère que les choses vont rentrer dans l’ordre. La Tunisie, ça n’a jamais été ça. Je n’arrive même pas à parler tellement j’ai mal au coeur », a-t-elle déclaré à l’issue de la cérémonie.

Notons que plusieurs pays ont organisé des opérations de rapatriement de leurs ressortissants en Tunisie suite aux déclarations du président Kaïs Saïed, prononcées le 21 février 2023 et jugées racistes. Il avait en effet soutenu que la présence des ressortissants de pays d’Afrique subsaharienne était source de « violence, de crimes et d’actes inacceptables ».

 

Ces déclarations avaient provoqué un tollé sur la toile et chez les organisations de défense des droits humains. Dans un communiqué en date du vendredi 24 février, le président de la commission de l’Union africaine, Moussa Faki Mahamat a condamné ces déclarations qui, selon lui, vont « à l’encontre de la lettre et de l’esprit de l’organisation et de ses principes fondateurs ».

Dès le lendemain, l’Ambassade du Burkina à Tunis informait les Burkinabè vivant en Tunisie que des voyages seraient organisés pour ceux qui désireraient retourner volontairement au bercail.

LeFaso.net

 

Vos commentaires

  •  Le 5 mars à 08:43par Yako En réponse à : Violence contre les migrants subsahariens en Tunisie : « J’ai mal au cœur », regrette la Tunisienne Dora Bouchoucha

    Toute la société tunisienne est loin d’être raciste cependant force est de reconnaître qu’à ce niveau de déclaration présidentielle il ya un réel malaise dans la société tunisienne quant à la présence des étrangers noirs sur son sol de peur d’un début du grand remplacement tant craint.Eux Tunisiens, descendants des Phéniciens et des Romains au Nord et d’arabo-berberes au sud élevés dans le mépris du nègre comment peuvent-ils s’accommoder d’une appartenance à l’Afrique noire que tout oppose ethniquement et culturellement ? Il faut être clair,la race noire est victime de son propre malheur dont elle est la seule responsable à commencer d ’abord par le manque d’estime de soi et l’irrationalité congénitale dans le choix de son développement et de tout ce qui va avec. Comment expliquer cette ruée des sub-sahariens vers la Tunisie tantôt pour se soigner tantôt pour y faire des études alors que nous avions presque le même niveau de développement il ya 60 ans ! On importe tout y compris légumes et fruits du Maghreb.Dans ces conditions vous créez de la richesse chez les autres et la misère chez vous outre que le complexe d’infériorité bien encré dans les têtes ( tout ce que vient du blanc même s’il s’agit du blanc-jaune est de qualité supérieure) ! En fin, Soyons fiers de ce que nous sommes et travaillons à faire du continent noir une terre d’espérance C’est à ce prix que les autres changeront leurs regards à notre égard et mériterions respect et considération.L’exemple tunisien ce temps ci montre bien que personne ne veut du pauvre comme voisin et le racisme en est la conséquence ! Yako

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  •  Le 5 mars à 13:29par Salvatore En réponse à : Violence contre les migrants subsahariens en Tunisie : « J’ai mal au cœur », regrette la Tunisienne Dora Bouchoucha

    Tous les pays qui ne font pas Nation naturellement,
    ont fabriqué leur nord et leur sud ; le défense contre l’autre fait alors politique et divertit les faibles esprits .

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  •  Le 5 mars à 21:32par Dedegueba Sanon En réponse à : Violence contre les migrants subsahariens en Tunisie : « J’ai mal au cœur », regrette la Tunisienne Dora Bouchoucha

    Il y a une insuffisance dans l’article. Rapporter juste le côté violence due aux migrants illégaux n’a rien de raciste. Tout au plus on le condamnerait car discriminatoire et utilisant ces migrants comme boucs émissaires pour justifier une politique économique désastreuse.
    Par contre là où il y a vraiment un relent raciste, l’article ne dit mot.
    Car prétendre que cette migration obeissait d’une logique de remplacement de la population arabe de Tunisie, est une transposition des thèses racistes de l’extrême droite française qui parle de grand remplacement.
    Ne nous voilons pas la face le président tunisien dit haut ce que beaucoup pensent bas. Mais personne n’empêche les arabes de "proliferer", en tout cas il n’y a aucune volonté obscure des noirs de "noircir" la Tunisie. Mais le monde est ainsi fait que depuis des temps immémoriaux, ceux qui ont la peau claire ont tendance à se considérer comme supérieurs aux noirs. Tout le Maghreb y compris la Mauritanie est dans cette logique. Le gradient de superiorité met le type caucasien au dessus de toutes les couleurs, et je suppose, les slaves, les arabes, les chinois, etablissent une autre hiérarchie à la suite des caucasiens avant que le noir ne clôture cette hiérarchie. C’est cela la triste réalité du noir..africain.

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  •  Le 6 mars à 08:14par Bajazet En réponse à : Violence contre les migrants subsahariens en Tunisie : « J’ai mal au cœur », regrette la Tunisienne Dora Bouchoucha

    Toute l’hypocrisie de la petite-bourgeoisie tunisienne résumée !
    À l’étranger, je fais de grosses déclarations « de gauche » bien fracassantes, mais dans ma grosse villa hollywoodienne des quartiers huppés, petit palais singeant les demeures marocaines, j’exploite des subsahariens « au noir ». Genre : nounou burkinabè, gardien tchadien, cuisinier sénégalais, maître d’hôtel camerounais. Et le chauffeur ivoirien emmène les enfants à l’école française, section internationale.
    Un pays très hypocrite...
    En Tunisie, l’hypocrisie est comme le sel, on en met dans toutes les sauces sans jamais s’en offusquer.

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  •  Le 6 mars à 09:40par Manna Tunis En réponse à : Violence contre les migrants subsahariens en Tunisie : « J’ai mal au cœur », regrette la Tunisienne Dora Bouchoucha

    Il ne faut pas blâmer les tunisiens ce sont les autorités algériennes qui ont orchestré tout ce rejet, ils le font bien ils chauffent les gens sur les réseaux sociaux à travers des comptes spécialisés en montrant des actes de pillages de ces migrants ou des fake vidéos attestant que le but est qu il n y ait plus la race blanche en Afrique du Nord, ils ont essayé de faire la même chose au maroc mais ils n ont pas réussi la relation étant plus forte. Que dieu apaise les esprits et dommage pour la Tunisie

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Teju Cole dans les pas de James Baldwin

Critique 

À soixante ans de distance, deux auteurs majeurs de la littérature afro-américaine livrent leur réflexion sur le racisme et l’identité noire américaine.

  • Fabienne Lemahieu, 

 

Teju Cole dans les pas de James Baldwin
 
James Baldwin, héraut du mouvement intégrationniste, en 1972 à New York.JACK MANNING/NYT/REDUX/REA

Leukerbad 1951/2014

Un étranger au village, suivi de Un corps noir

de James Baldwin et Teju Cole

Traduit de l’anglais (américain) par Marie Darrieussecq (Un étranger au village) et Serge Chauvin (Un corps noir)

Zoé, 80 p., 15 €

C’est un livre fort et concis, un jeu de miroirs entre deux paroles puissantes, distantes de plus de soixante ans et dont la mise en regard immédiate confère à l’une et l’autre une intensité inédite. D’abord, les mots rageurs de James Baldwin, écrits en 1951 depuis un village isolé aux confins de la Suisse, où il subit quotidiennement des actes de racisme. Plus loin, ceux de Teju Cole, parti en 2014 sur les traces de Baldwin, tandis qu’aux États-Unis se déroulent les émeutes dites de Ferguson, après que des policiers ont abattu un jeune homme noir. Deux approches des ressorts du racisme qui s’éclairent l’une l’autre, se poursuivent et résonnent.

À l’été 1951, James Baldwin séjourne à Leukerbad, en Suisse, où il achève à 27 ans l’écriture d’un premier roman fondateur et autobiographique, La Conversion. Son passage dans ce village de montagne isolé lui inspira également Un étranger au village, repris dans le recueil Chroniques d’un enfant du pays, en 1953. Mais « si Leukerbad fut sa chaire, l’Amérique était sa paroisse », écrit plus tard Teju Cole : par la relation du racisme primaire dont il est victime, Baldwin « s’ouvre bientôt à d’autres enjeux et à une autre voix, pour examiner, en un retournement radical, la situation raciale aux États-Unis dans les années 1950 ».

« Ce monde n’est plus blanc et il ne sera plus jamais blanc »

Le héraut du mouvement intégrationniste y dissèque avec mordant les forces à l’œuvre dans la définition, et la négation, de l’identité noire américaine, prise au piège d’un métissage mal assumé – bien éloignée de la question coloniale qui taraude l’Europe et placerait la question noire dans une lointaine abstraction : « Aucune route, aucune, ne ramènera les Américains vers la simplicité de ce village européen où les hommes blancs jouissent encore du luxe de me voir comme un étranger. En réalité, je ne suis plus un étranger pour aucun Américain vivant. Une des choses qui distinguent les Américains des autres peuples, c’est qu’il n’existe aucun autre peuple à avoir été aussi profondément engagé dans la vie des hommes noirs, et vice versa. (…) ce monde n’est plus blanc et il ne sera plus jamais blanc. »

Pourtant, tandis que Baldwin place la question civilisationnelle comme ferment d’exclusion, tandis qu’il se révèle tourmenté par la fragile « filiation » culturelle avec l’OccidentTeju Cole dans Un corps noir refuse tout sentiment d’aliénation et de dévalorisation. Son pas de côté est admirable, qui refuse « la négation de soi » à laquelle Baldwin se sentait condamné : « Bach, dans sa profonde humanité, est bien mon héritage », assure-t-il, arguant encore : « Je peux très bien m’opposer au suprémacisme blanc et goûter malgré tout l’architecture gothique. »

La colère de Baldwin, « qui s’élève de ses pages comme une vapeur brûlante », objectivée par Cole, ne s’en trouve pas pour autant apaisée. Par une prose discursive, ce dernier déplace la question raciale aux États-Unis de l’enjeu culturel vers celui du « corps noir », victime de racisme systémique, sous le joug des violences policières à répétition. Lui-même reste confronté au racisme, fut-il davantage diffus – « être un étranger, c’est être regardé, mais être noir, c’est être regardé entre tous. » Rejoignant son aîné, il appelle à l’extrême vigilance : « Les gens qui ferment les yeux sur la réalité n’invitent qu’à leur propre destruction, et quiconque s’efforce de rester dans un état d’innocence longtemps après que cette innocence est morte se transforme lui-même en monstre. »

Sénégal: la nouvelle garde à vue d'un journaliste inquiète les défenseurs des libertés

 

Au Sénégal, c’est une nouvelle garde à vue de journaliste qui inquiète. Le chroniqueur judiciaire Pape Ndiaye de Walf TV a été convoqué, puis placé en garde à vue, vendredi 3 mars dans l'après-midi.

Avec notre correspondante à Dakar, Juliette Dubois

Pape Ndiaye est poursuivi pour « diffusion de fausses nouvelles » et « outrage à magistrat ». Dans une émission, il avait affirmé que les dix-neuf substituts du procureur s’étaient opposés au renvoi du politicien Ousmane Sonko devant la Chambre criminelle, dans l'affaire très sensible qui l'oppose à l'ancienne masseuse Adji Sarr. En début d’année, le journaliste Pape Alé Niang avait déjà passé deux mois en prison, lui aussi pour diffusion de fausses nouvelles. Ibrahima Lissa Faye, de la Coordination des associations de presse était avec Pape Ndiaye lors de son audition. Cette garde à vue l’inquiète et il craint pour la liberté de la presse dans le pays.

« Il y a d’autres voies et moyens »

« Je ne comprends pas, dit Ibrahima Lissa Faye. C’est vrai que les magistrats pouvaient être outrés, ou peuvent se sentir offensés. Mais quand même, il y a des mécanismes, il y a d’autres voies et moyens qui permettent de régler ce genre de problèmes quand il y en a. Un démenti ou une mise en demeure auraient suffi, ou bien même une saisie du Cored [Conseil pour l'Observation des règles d'éthique et de déontologie dans les médias]. Et le Cored dispose d’un tribunal de pairs pour trancher ce genre de litige. » 

« Vous mettez la peur dans le camp des journalistes »

« C’est cette judiciarisation à outrance des dossiers qui pose problème et qui quand même, poursuit le président de la Coordination des associations de presse, donne l’impression qu’il y a une tentative de musèlement, et également aussi d’intimidation des journalistes. Parce que là, pour un cas qui demande - au plus - un démenti ou une mise en demeure, vous prenez l’option de la prison. En fait, vous mettez la peur dans le camp des journalistes, une haute censure, qui risquent de se dire : moi, si je dis ceci, je risque la prison. On est dans un contexte où les journalistes doivent faire très attention ».

Si elle n’est pas prolongée, la garde à vue de Pape Ndiaye durera jusqu’à ce soir, dimanche 5 mars. Le journaliste devrait être déféré devant le parquet demain lundi matin.

►À lire aussi Sénégal: la chaîne Walf TV suspendue pour sept jours (12 février 2023)

Près de 300 Ivoiriens et Maliens seront rapatriés de Tunisie ce samedi

Les rapatriements de migrants subsahariens se multiplient en Tunisie après que le récent discours du président Kaïs Saïed a déclenché une vague de xénophobie dans le pays.

Par Jeune Afrique avec AFP
Mis à jour le 3 mars 2023 à 18:07
 
 migrants
 
 
 

Des migrants ivoiriens se pressent devant leur ambassade de Tunis en vue de leur prochain rapatriement. © Yassine Mahjoub / NurPhoto / NurPhoto via AFP


« Un départ sur Air Côte d’Ivoire est prévu samedi à 7h du matin (6h GMT) avec 145 passagers à bord », a déclaré l’ambassadeur ivoirien à Tunis, Ibrahim Sy Savané, interrogé depuis Abidjan. « Le nombre de candidats au retour atteint 1 100 à ce jour », a-t-il poursuivi.

L’ambassade du Mali à Tunis a quant à elle indiqué qu’un avion pouvant transporter 150 personnes avait été affrété sur ordre du chef de la junte, le colonel Assimi Goïta. L’avion quittera Tunis à 8h samedi (7h GMT).

« Prison à ciel ouvert »

Il s’agit des premiers vols de rapatriement en Côte d’Ivoire et au Mali depuis le discours le 21 février du président tunisien Kais Saïed, qui avait annoncé des « mesures urgentes » contre l’immigration clandestine en provenance d’Afrique subsaharienne. Dans ce discours qualifié de « raciste » par des ONG, il avait affirmé que leur présence en Tunisie était source de « violence, de crimes et d’actes inacceptables ».

Selon Ange Séri Soka, responsable d’une association de ressortissants ivoiriens en Tunisie, rentré à Abidjan cette semaine, « la Tunisie est devenue une prison à ciel ouvert aujourd’hui », pour les migrants d’Afrique subsaharienne.

Abus de pouvoir et agressions physiques

« La question de la carte de séjour bloque tout », a-t-il poursuivi lors d’une conférence de presse à Abidjan, affirmant qu’il était quasiment impossible pour les travailleurs migrants d’obtenir ce sésame en Tunisie. « Sans carte de séjour, vous ne pouvez pas aller au poste de police si vous êtes agressé, vous travaillez au noir » et « cela encourage les abus de pouvoir », a-t-il dit.

Un grand nombre des 21 000 migrants originaires de pays d’Afrique subsaharienne recensés officiellement en Tunisie, pour la plupart en situation irrégulière, ont perdu du jour au lendemain leur travail (généralement informel) et leur logement. D’autres ont été arrêtés pour des contrôles policiers et certains ont témoigné d’agressions physiques.

(Avec AFP)