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Burkina : démission du Premier ministre Christophe Dabiré

Par Jeune Afrique
Mis à jour le 9 décembre 2021 à 10:53
 

 

Le Premier ministre burkinabè Christophe Joseph Marie Dabiré, ici devant l’Assemblée nationale le 4 février 2021, a démissionné le 8 décembre. © Sophie Garcia / Hans Lucas

 

Cette démission, acceptée par le président Kaboré, entraîne automatiquement celle de l’ensemble du gouvernement. Elle survient alors que depuis plusieurs semaines, la colère montre contre l’exécutif, accusé de ne rien faire contre la dégradation de la situation sécuritaire.

Le Premier ministre, Christophe Dabiré, a remis mercredi 8 décembre sa démission au président Roch Marc Christian Kaboré, qui l’a acceptée. « Il est mis fin aux fonctions de Premier ministre de M. Dabiré », a déclaré sur la télévision publique le secrétaire général du gouvernement, Stéphane Wenceslas Sanou, lisant un décret présidentiel. Cette démission entraîne automatiquement celle du gouvernement, selon la loi burkinabè.

Conformément aux textes, « les membres du gouvernement sortant assurent l’expédition des affaires courantes des départements ministériels jusqu’à la formation d’un nouveau gouvernement », a précisé Stéphane Wenceslas Sanou.

Manifestations

« J’invite les Burkinabè, dans leur ensemble, à se mobiliser, pour soutenir le président du Faso et le nouvel exécutif qui sera mis en place. Je reste convaincu que c’est dans une unité d’action que nous pourrons relever les défis auxquels notre pays et notre peuple sont confrontés », a déclaré Christophe Joseph Marie Dabiré sur sa page Facebook.

Depuis plusieurs semaines, la colère montait contre l’exécutif. Le 9 novembre, l’opposition avait ainsi exigé des « mesures urgentes » face à la « dégradation de la situation sécuritaire », dans un délai d’un mois. Le 27 novembre, des centaines de manifestants étaient descendus dans la capitale, Ouagadougou, pour dénoncer « l’incapacité » du pouvoir à contrer la violence jihadiste qui frappe le pays.

Des organisations de la société civile avaient exigé à cette occasion le départ du chef de l’État. Une dizaine de personnes, dont un enfant et deux journalistes, avaient été blessées lorsque ces marches avaient été dispersées.

Les autorités burkinabè sont confrontées au ras-le-bol de la population face aux attaques jihadistes qui frappent le pays chaque semaine. Elles ont fait environ 2 000 morts et 1,4 million de déplacés depuis 2015.

L’attaque perpétrée le 14 novembre contre un détachement de gendarmerie stationné à Inata (Nord), l’une des plus meurtrières contre les forces de sécurité, a choqué le pays : au moins 57 personnes, dont 53 gendarmes, ont été tuées par des jihadistes. Deux semaines avant, les gendarmes d’Inata avaient alerté l’état-major sur leur situation précaire, disant manquer de nourriture et s’alimenter grâce au braconnage.

Le Burkina Faso est pris depuis 2015 dans une spirale de violences attribuées à des groupes jihadistes, affiliés à Al-Qaïda et à l’État islamique. Les attaques qui visent civils et militaires sont de plus en plus fréquentes et en grande majorité concentrées dans le nord et l’est du pays.

Opération mains propres

Fin novembre, le président Kaboré avait annoncé de nouvelles mesures, soulignant « la nécessité de constituer, au plan gouvernemental, une équipe resserrée et plus soudée ». Il avait aussi annoncé le lancement d’une « opération mains propres, pour vider tous les dossiers pendants de corruption et éclaircir toutes les affaires qui polluent le quotidien des Burkinabè épris de bonne gouvernance et de démocratie ».

En poste depuis janvier 2019, Christophe Dabiré, ancien commissaire chargé du commerce, de la concurrence et de la coopération de l’Uemoa, avait été reconduit en janvier 2021, après la réélection du président Kaboré pour son second et dernier mandat.

Roch Marc Christian a été élu en novembre 2015, un an après que son prédécesseur Blaise Compaoré, au pouvoir depuis 1987, a été chassé par la rue. Mais il a été confronté dès sa prise de fonction à une dégradation progressive de la situation sécuritaire dans le pays qui n’a, pour l’heure, pas pu être enrayée.

Forum de Dakar: face aux crises économiques et sanitaires, «l’urgence est là»

Le président sénégalais Macky Sall au forum de la Paix à Paris le 11 novembre 2018 (Image d'illustration). AFP/Yoan Valat

La 7e édition du Forum de Dakar sur la paix et la sécurité en Afrique s’ouvrait ce lundi 6 décembre. Un rendez-vous qui réunit de nombreux acteurs politiques, institutionnels, issus du monde humanitaire et de la recherche. Les présidents du Sénégal, Macky Sall, d'Afrique du Sud, Cyril Ramaphosa, du Niger, Mohamed Bazoum, et de Guinée-Bissau, Umaro Cissoco Embalo, sont présents. Au menu des échanges : les questions de sécurité et de développement, mais également le Covid-19.

Avec notre envoyé spécial à Dakar, Pierre Firtion

« L’urgence est là », a annoncé ce lundi matin à la tribune le président sénégalais. « Il nous faut faire face aux effets néfastes d’une double crise sanitaire et économique, a déclaré Macky Sall. Double crise à laquelle s’ajoute pour l’Afrique la vulnérabilité particulière au changement climatique, l’intensification des attaques terroristes et la recrudescence des coups d’État. »

En matière de sécurité, la situation sur le continent n’est guère reluisante, pour parvenir à obtenir de meilleurs résultats dans ce domaine… Macky Sall a plaidé pour une hausse des moyens. « La sécurité n’a pas de prix, mais elle a un coût », a-t-il insisté, avant d’ajouter : « Face à la montée de la menace terroriste, il nous faut plus de flexibilité budgétaire. »

Le président sénégalais a également appelé à s’interroger sur les opérations de maintien de la paix sur le continent, opérations qui engagent 75 000 soldats, mais dont les résultats ne sont pas à la hauteur des attentes.

 

"Qu’avons-nous fait pour être aujourd’hui le continent où le terrorisme s’étend et les changements constitutionnels se multiplient presque sans coups férir ? Il est grand temps de se poser la question simple mais fatale : pourquoi en sommes-nous arrivés là ?"

Moussa Faki Mahamat, président de la commission de l’Union africaine

La crise du Covid-19 également évoquée

L’hôte de ce forum a conclu son propos par un message de soutien à Cyril Ramaphosa : «  soler un pays qui a séquencé un nouveau variant et qui a fait preuve de transparence, c’est non seulement discriminatoire, a estimé Macky Sall, mais aussi contre-productif parce que c’est inciter les autres à ne pas publier les résultats. »

Sans répondre directement sur ces interdictions de voyage, Charles Michel, président du Conseil européen, a tenté de se défendre en rappelant les initiatives prises par l’Union européenne pour venir en aide au continent dès le début de la pandémie : « L’Union européenne, depuis le premier jour de cette crise a été l’une des grandes régions dans le monde parmi les seules à produire des vaccins qui a décidé de maintenir massivement les exportations de vaccins. »

Une réponse qui n’a pas convaincu Cyril Ramaphosa. Après avoir salué les messages de solidarité venus du continent, le président sud-africain s’en est pris à l’union européenne et à Charles Michel : « de l’Europe, j’ai juste reçu un message disant : nous interdisons les voyages. Merci. Au revoir. A plus tard. Ce n’est pas la façon de maintenir une relation. Nous devons nous respecter entre nous ». 

Cyril Ramaphosa a enfoncé le clou en dénonçant l’attitude des pays développés au sujet de l’approvisionnement des différents pays en vaccins. « La rapacité dont ils font preuve est particulièrement décevante, surtout quand ils se disent nos partenaires », a annoncé, amer, le président sud-africain.

Préparatifs à la présidence sénégalaise de l'UA

La cybersécurité, la lutte contre la désinformation, la coopération entre États, le contrôle des espaces maritimes ainsi que la démographie, seront aussi évoqués lors de ce forum. La position sénégalaise sur tous ces sujets sera d’autant plus scrutée que Dakar prend début février la présidence tournante de l’Union africaine.

En marge des échanges publics, ce rendez-vous devrait d’ailleurs donner lieu à de nombreuses rencontres bilatérales. Et pour cause, un sommet entre l’Union européenne et l’Union africaine doit se tenir mi-février à Bruxelles. Ce qui explique la venue à ce forum de Charles Michel, le président du Conseil européen.

"On doit ensemble, européens et africains, évaluer la situation dans le Sahel et on voit que les menaces subsistent, que la zone des trois frontières reste une zone avec beaucoup d’insécurité et d’instabilité et on voit une pression sur les Etats côtiers. Cela nous a amené à réfléchir et à voir comment on peut adapter avec les différents membres de l’UE et des Etats africains dans la région nos capacités d’offrir une réponse qui est la plus efficace possible."

Charles Michel, président du Conseil européen

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Il reste encore quatre pages que je n'ai pas été dans la possibilité de publier... Désolé.  Pierre Béné

« Couscousgate » : quand les tensions entre le Maroc et l’Algérie se font culinaires

Mis à jour le 4 décembre 2021 à 16:35
 
Damien Glez
 

Par Damien Glez

Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.


Damien Glez © Damien Glez

Le ministre marocain de la Culture a-t-il rouvert une plaie suturée par l’entrée du couscous « maghrebin » au patrimoine immatériel de l’Unesco ? Mehdi Bensaïd souhaite un « label » spécifiquement marocain…

16 décembre 2020. Les fronts maghrébins perlés d’une sueur fiévreuse s’assèchent. C’est grâce à un front commun du Maroc, de l’Algérie, de la Mauritanie et de la Tunisie que la recette du couscous obtient enfin la reconnaissance suprême de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco), via l’inscription au patrimoine immatériel de l’organisation onusienne.

Le « hourra » poussé est d’autant plus un « ouf » que l’union des quatre candidats semblait de circonstance, suite à des divergences politiques, mais aussi des philosophies culinaires éparses. Au niveau de la recette, si chacun s’accorde sur une base de semoule, une sauce et une cuisson à la vapeur, un tel insiste sur les oignons tandis que tel autre promeut les légumes.

Quant à l’apport en protéines, il peut provenir, selon les écoles gastronomiques, de poulets, de têtes d’agneau, d’escargots et même de poulpes. Si la présence de céphalopode dans le couscous n’avait pas empêché le Sénégal de remporter, quelques semaines avant le sacre onusien, la 22e édition du « Cous Cous Fest », c’est le « lit de mangues » du mets primé qui avait fait grincer quelques dents…

Crispation culinaire

Il fallait donc s’attendre à ce que les susceptibilités nationales refassent surface. C’est sur la chaîne de télévision semi-publique 2M que le ministre marocain de la Culture vient de revendiquer un « label » spécifique pour le couscous marocain dans les registres patrimoniaux de l’Unesco. Mehdi Bensaïd souhaite une définition précise de « ce qui entre dans le patrimoine marocain » pour « interagir avec les institutions internationales, parmi lesquelles l’Unesco, afin d’obtenir une reconnaissance internationale du patrimoine marocain et de l’histoire marocaine ».

La substitution d’une logique de « bande à part » au front commun gastronomique n’est-elle qu’un climax anecdotique dans les tensions récentes entre l’Algérie et le Maroc ? Au mois d’août dernier, les deux pays sont allés jusqu’à rompre leurs relations diplomatiques. L’Algérie a depuis fermé le gazoduc qui passait par le Maroc, avant d’accuser Rabat d’être impliqué dans la mort de trois de ses ressortissants au Sahara. La guerre diplomatique sera-t-elle alimentée par une bataille du « cousksi », « barbucha » ou encore « seksu » ?

Lors de son intervention « culinaire » aux allures de crispation identitaire, Mehdi Bensaid s’est bien gardé de citer l’Algérie : « L’idée est de créer un “label Maroc” pour mettre fin au débat sur la question de savoir si le couscous est marocain ou tunisien ». Exit la présentation de 2020, devant l’Unesco, du couscous comme « le symbole privilégié de l’art de recevoir, de la commensalité et de la convivialité chez toutes les familles marocaines et maghrébines ». Il reste à savoir si l’Algérie aura « l’art de recevoir » la pique du ministre marocain. Attention à ne pas s’étouffer avec la semoule de blé dur ou les pois chiches…

Côte d’Ivoire, Burkina, Rwanda : quand la Turquie accélère en Afrique

Mis à jour le 2 décembre 2021 à 10:29
 

 

Troisième Forum d’économie et d’affaires Turquie-Afrique, à Istanbul, le 22 octobre 2021, en présence d’Emine Erdogan et de Denise Tshisekedi, premières dames de Turquie et de RD Congo (au centre, vêtues de rouge). © Murat Kula/Anadolu Agency via AFP

 

Bien implantée en Égypte, en Algérie et en Éthiopie, Ankara lorgne désormais aussi l’Afrique de l’Ouest. Dans des secteurs traditionnels comme la construction et l’énergie mais aussi plus nouveaux comme la défense.

Lorsque Recep Tayyip Erdogan foula le sol africain pour la première fois, en 2005, en Éthiopie, il n’y avait que trois entreprises turques dans ce pays. Elles sont aujourd’hui 225. « Le bouche-à-oreille a fonctionné. Les Turcs sont appréciés, car ils ne se contentent pas de faire du business, mais investissent et s’établissent ici », résume Yaprak Alp, l’ambassadrice de Turquie à Addis-Abeba, qui précise que ces sociétés emploient 20 000 personnes dans des secteurs variés : textile, chaussure, câbles électriques, jus de fruits…

Même dynamisme dans l’Ouest de l’Afrique, en Algérie, où plus de 1 300 entreprises turques sont actives, entre autres, dans la sidérurgie (groupe Tosyali), le textile (Tayal), les produits d’hygiène (Hayat Kimya), l’énergie (accord entre Botas et Sonatrach).

Quadrillage

En l’espace de vingt ans, la Turquie est devenue une puissance qui compte sur le continent. Le volume de ses échanges commerciaux avec l’Afrique, qui représentaient 5,4 milliards de dollars en 2003, s’élève aujourd’hui à 25,3 milliards. C’est peu comparé aux 180 milliards d’échanges de la Chine avec l’Afrique, mais les progrès sont constants. Durant la même période, les exportations d’Ankara à destination du continent sont passées de 2 à 15 milliards de dollars, et ses importations de 3 à 10 milliards de dollars. Ces dernières portent pour l’essentiel sur des produits bruts (hydrocarbures, produits alimentaires et miniers).

HABILETÉ COMMERCIALE, QUALITÉ DES PRODUITS ET, SURTOUT, RESPECT DES DÉLAIS

Si moins de 10% du total des exportations de la Turquie est dirigé vers l’Afrique, loin derrière l’Europe (56%) et l’Asie (26%), la 17e puissance économique mondiale a bien l’intention de se tailler une place plus importante sur le marché africain. Reste une inconnue : les difficultés économiques qu’elle traverse aujourd’hui pourraient freiner, au moins temporairement, certains projets ou investissements, déjà différés en raison de la crise sanitaire planétaire.

Il n’empêche : pour l’heure, tous les secteurs sont quadrillés par des conglomérats très offensifs auxquels s’ajoute une pléiade de PME, qui n’hésitent pas à prendre des risques techniques et financiers. La clé du succès ? Habileté commerciale, qualité des produits, prix raisonnables, et, surtout, rapidité d’exécution et respect des délais.

Autre caractéristique : la Turquie élargit son périmètre géographique. D’abord essentiellement implantée dans la Corne de l’Afrique (Éthiopie, Somalie, Soudan), elle se tourne résolument vers l’Afrique de l’Ouest et lorgne avec insistance l’Afrique australe.

Potentiel sous-exploité

L’Égypte, avec qui les relations politiques sont pourtant difficiles, reste son premier partenaire commercial en Afrique, avec un volume d’échanges de 4,8 milliards de dollars, et l’Algérie le deuxième, avec 3,8 milliards. Il y a ensuite des États avec lesquels le potentiel – en particulier la coopération énergétique – est encore sous-exploité, comme le Nigeria (754 millions de dollars) et l’Angola (176 millions). Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si la dernière tournée présidentielle, à la mi-octobre, leur était destinée.

Et puis il y a tous les autres pays avec lesquels les échanges s’envolent. C’est le cas de la Côte d’Ivoire : 630 millions de dollars en 2020 (+67% en deux ans) ; du Rwanda : 81 millions de dollars (contre 35 millions en 2019) ou du Burkina : 72 millions pour les neuf premiers mois de 2021 (+65% par rapport à 2020).

PALAIS DES CONGRÈS, HÔPITAUX, HÔTELS, STADES FLEURISSENT SUR LE CONTINENT

Les États théâtres de conflits n’échappent pas à cette tendance. En Somalie, dont elle soutient la reconstruction depuis 2011, la Turquie a remporté de nombreux marchés. En Libye, les entreprises turques (qui avaient dû partir en 2011, laissant pour 19 milliards de dollars de projets inachevés) reprennent hardiment pied, profitant de la proximité des autorités d’Ankara avec le gouvernement de Tripoli.

Reste le « cas » de l’Afrique du Sud, un gros marché peu exploité (1,46 milliard de dollars d’échanges) et difficile d’accès, au point que la Turquie y accusait en 2020 un déficit commercial de plus de 300 millions de dollars. Pretoria réclame en effet la création de coentreprises et l’augmentation des investissements locaux. Le textile est soumis à des taxes dissuasives, et les exportations de ciment sont limitées, entravant l’essor des compagnies de BTP : elles ne sont que trois sur place. Une singularité, tant la construction est un secteur leader pour la Turquie.

Concessions aéroportuaires

Palais des congrès, centres commerciaux, hôpitaux, hôtels, stades, aéroports, routes, centrales électriques… Toutes ces infrastructures fleurissent sur le continent, signées par des compagnies telles que Limak, Rönesans, Mapa, Summa ou Yenigün, laquelle vient de livrer le luxueux stade Japoma, à Douala. Cette fièvre édificatrice concerne aussi les mosquées, comme en témoignent celles construites au Soudan, à Djibouti et à Bamako. À Accra, une fondation turque a même financé une réplique de la Mosquée bleue, d’Istanbul.

Plusieurs groupes détiennent par ailleurs des concessions aéroportuaires, comme TAV, en Tunisie (Monastir et Hammamet), Summa, à Niamey, ou le tandem Limak-Summa, à Dakar (aéroport Blaise-Diagne). Albayrak, lui, a obtenu la concession du port de Mogadiscio et d’une partie de celui de Conakry.

PARMI LES ACHETEURS DE DRONES TURCS : LA TUNISIE, LE MAROC, L’ÉTHIOPIE, ET BIENTÔT LE NIGER

Les Turcs ont également construit ou font fonctionner des centrales électriques, à tourbe ou solaire (Çalik, au Sénégal ; Hakan Enerji, au Rwanda ; Desiba, au Gabon…). Avec ses navires-centrales, Karpowership, qui vient de signer un accord avec l’Afrique du Sud, fournit 100% de l’électricité de la Guinée Bissau, 80% de celle de la Sierra Leone et 15% de celle du Sénégal.

Sans surprise, le textile reste une valeur sûre pour la Turquie, dont les entreprises concurrencent les producteurs marocains ou tunisiens – au point que Rabat a obtenu, en mai, un rééquilibrage de l’accord de libre-échange signé avec Ankara, qui lui était défavorable.

Compagnie reine

D’autres secteurs élargissent la palette : les mines, l’agroalimentaire et les machines agricoles, la santé, le tourisme, et l’armement. Car s’il est un nouveau secteur d’exportations vers lequel tous les yeux se tournent, c’est bien celui de la défense, où sept sociétés turques se sont hissées en peu de temps parmi les cent premières au monde. La Tunisie, le Maroc, l’Éthiopie, et bientôt le Niger, font partie des acheteurs des drones des firmes TAI ou Bayraktar ; le Burkina, qui a déjà acquis des véhicules Cobra de la société Otokar, a commandé du matériel de déminage à la firme publique Afsat ; le Kenya va recevoir en 2022 des blindés Hizir, de la compagnie privée Katmerciler.

Reste la compagnie reine : Turkish Airlines, qui, bien qu’affectée par la crise sanitaire, compte bientôt retrouver un rythme normal. Avant la pandémie, elle assurait pas moins de trente-cinq vols hebdomadaires avec l’Algérie, sept avec la Côte d’Ivoire, le Gabon ou le Burkina, cinq avec l’Afrique du Sud… Le Togo attend la finalisation d’un accord pour sa desserte, et les ambassadeurs turcs des rares États africains où « TA » n’a pas encore déployé ses ailes espèrent ardemment sa venue tant celle-ci est source d’expansion des relations commerciales, touristiques et, tout simplement, humaines.