Dialogue interreligieux

« Lorsque nous travaillons pour les âmes, nous ne pouvons user que de persuasion et d'amour... Nous ne pouvons rien faire tant que nous n'avons pas persuadé les gens autour de nous qu'ils sont aimés... » (Cardinal Lavigerie, 1885)

« Nous croyons qu'en toute religion il y a une secrète présence de Dieu, des semences du Verbe qui reflètent un rayon de sa lumière... » (Chapitre 1967)

« Nous célébrons et partageons cette vie avec Dieu lorsque nous allons à la rencontre des cultures et des religions... nous réjouissant de la foi vivante de ces croyants et les rejoignant dans leur quête de la Vérité, cette Vérité qui nous rend tous libres. » (Chapitre 1998)

Missionnaires, nous sommes appelés à faire les premiers pas pour rencontrer les personnes, qu'elles que soient leurs convictions, leur religion.

Au Burkina Faso, cette réalité se traduit surtout dans la rencontre respectueuse et évangélique avec les adeptes des religions traditionnelles et avec les musulmans.

Dans cette rubrique, nous étudierons divers aspects de ces religions, particulièrement de l'islam.

Nigeria : deux morts dans l’attaque d’une église évangélique 

Les faits 

Dimanche 16 octobre, une chapelle chrétienne évangélique a été attaquée dans l’État de Kogi, dans le centre-nord du Nigeria. Deux femmes ont été tuées dans ce nouvel épisode de violences contre un lieu de culte, le septième depuis le début de l’année.

  • Lucie Sarr, 
Nigeria : deux morts dans l’attaque d’une église évangélique
 
L’attaque du lieux de culte de l’Église du Christianisme Céleste est la septième répertoriée au Nigeria depuis le début de l’année (Image d’illustration).CC/ESTRILDA/WIKIMEDIA COMMONS

Une nouvelle attaque au Nigeria et cette fois-ci, c’est un lieu de culte évangélique qui a été visé. Dimanche 16 octobre, des assaillants à moto ont attaqué un lieu de prière appartenant à l’Église du christianisme céleste dans l’État de Kogi, à 105 kilomètres de la capitale nigériane, Abuja. Cette attaque qui a été perpétrée en plein culte a fait deux morts : une femme et sa fille.

Selon Jerry Omodara, le plus haut responsable de la sécurité de l’État de Kogi, l’hypothèse privilégiée à cette étape de l’enquête est celle d’une attaque préméditée. « Il semble que cela avait été organisé contre cette église en particulier, car leur autel a été brûlé avec de l’essence apportée à cet effet », a-t-il souligné. L’Église évangélique du christianisme céleste a été fondée en 1947 au Bénin, par le pasteur Samuel Biléhou Oshoffa qui en fut également le premier responsable mondial. Elle est également présente en Côte d’Ivoire et au Nigeria où elle compte de nombreux adeptes.

Tous les cultes visés

L’attaque de ce lieu de culte est la septième répertoriée au Nigeria depuis le début de l’année. La plus meurtrière cette année est celle de la Pentecôte, à l’église catholique Saint-Francis à Owo, dans l’État d’Ondo, dans le sud-ouest du pays. Quelque 40 personnes avaient perdu la vie dans cette tuerie attribuée aux djihadistes.

En réalité, les attaques dans les lieux de culte ont commencé depuis une douzaine d’années et touchent aussi bien les mosquées que les églises. « Ils tuent aussi dans les mosquées, les écoles et les villages, la question est plus que religieuse », avait ainsi rappelé le cardinal John Olorunfemi Onaiyekan, archevêque émérite d’Abuja au lendemain de l’attaque de la Pentecôte.

«Plus aucun endroit ne semble sûr »

Mi-septembre, à l’ouverture de la deuxième assemblée plénière de l’épiscopat nigérian, Mgr Lucius Iwejuru Ugorji, président de la Conférence épiscopale, avait une fois de plus sonné l’alarme sur l’insécurité qui n’épargne pas les lieux de culte. « Plus aucun endroit ne semble sûr, avait-il déploré. Les maisons, les terres agricoles, les marchés, les autoroutes, les lieux de culte et les presbytères ont tous été transformés en territoires d’enlèvement et de meurtre. »

Concernant les lieux de culte catholiques en particulier, ceux-ci ont été victimes de graves attaques ces dernières années. Parmi les principales, celle du 1er janvier 2018 à la cathédrale d’Ilorin, au cours de laquelle 17 personnes ont perdu la vie. La même année au mois d’avril, dans le diocèse de Markudi, au centre du Nigeria, deux prêtres et au moins seize fidèles étaient en pleine célébration eucharistique. Le 24 décembre 2011, 44 personnes étaient tuées au cours d’une attaque de Boko Haram à l’église Sainte-Thérèse de Madalla, dans les environs d’Abuja.

Programme et logo du voyage du Pape François au Bahreïn

Promouvoir la paix et le dialogue entre les religions

 
 Promouvoir la paix et le dialogue entre les religions  FRA-041

 

 

13 octobre 2022
 

«Paix sur terre aux hommes de bonne volonté». C’est de l’Evangile de Luc (2, 14) qu’est tirée la devise du voyage que le Pape François accomplira au Bahreïn du 3 au 6 novembre prochains, à l’occasion du «Bahrain forum for dialogue: east and west for human coexistence». C’est ce qu’a annoncé le 6 octobre la salle de presse du Saint-Siège, avec le programme détaillé et le logo du voyage, le 39e international du pontificat.

L’évêque de Rome se rendra pendant trois jours dans le royaume insulaire du golfe persique à Awali, où se trouve la cathédrale catholique, et passera le quatrième jour également dans la capitale, Manama, prononçant six discours, une homélie et une méditation à l’Angelus.

Il partira dans la matinée du jeudi 3 de l’aéroport romain de Fiumicino pour la «Sakhir Air Base» d’Awali, où aura lieu dans l’après-midi l’accueil officiel. Suivront la visite de courtoisie à Sa Majesté le roi Hamad Bin Issa Bin Salman Al Khalifa au «Sakhir Royal Palace» et la cérémonie de bienvenue dans la cour du palais, avec la rencontre réservée aux autorités, à la société civile et au corps diplomatique, au cours de laquelle est prévu le premier discours du voyage.

Vendredi 4, dans la matinée, François participera à la clôture de la rencontre interreligieuse qui est à la base du voyage, sur la place Al-Fida’ au sein du complexe du palais royal d’Awali, où se trouve également la résidence papale. C’est là qu’est prévue dans l’après-midi une rencontre privée avec le Grand imam d’Al-Azhar qui précède celle avec les membres du «Muslim council of elders» à la mosquée du «Sakhir Royal Palace» et la rencontre œcuménique avec la prière pour la paix à la cathédrale Notre-Dame d’Arabie.

Comme lors de sa précédente visite au Kazakhstan du 13 au 15 septembre derniers, dans ce cas également, la communauté de baptisés constitue un «petit troupeau» par rapport à la majorité musulmane de la population: sur environ un million et demi de personnes, en effet, les catholiques sont à peine 161 mille, pour la plupart des travailleurs migrants, dont le soin pastoral est confié à un évêque, vingt prêtres (treize diocésains et sept religieux), un consacré non prêtre, sept religieuses, environ quatre-vingt dix catéchistes et un séminariste. L’Eglise gère deux écoles maternelles et primaires ayant 987 élèves, et un collège et un lycée ayant 328 étudiants.

Et c’est précisément pour les catholiques du pays que le Pape célébrera la Messe dans la matinée du samedi 5 novembre au «Bahrain National Stadium», tandis que dans l’après-midi est prévu un rendez-vous avec les jeunes à l’école du Sacré-Cœur, toujours à Awali.

Dimanche 6, le Pape se rendra dans la capitale Manama pour une rencontre de prière et la récitation de l’Angelus avec les évêques, les prêtres, les personnes consacrées, les séminaristes et les agents de la pastorale à l’église du Sacré-Cœur, dernier rendez-vous public du voyage. En fin de matinée, il rentrera à Awali pour la cérémonie de congé à la «Sakhir Air Base». Le décollage est prévu pour 13h00 heures locales et l’atterrissage à Rome-Fiumicino aux alentour de 17h00.

Le logo de la visite est constitué par les drapeaux du royaume de Bahreïn et du Saint-Siège, représentés sous forme stylisée comme deux mains ouvertes, signifiant également l’engagement des peuples et des nations à se rencontrer sans préjugés, comme des «frères et sœurs». Le fruit de la rencontre fraternelle est le don de la paix, symbolisé par la branche d’olivier représentée au centre.

L’inscription «Pape François» est en bleu pour indiquer que le voyage est confié à l’intercession de la Vierge Marie, vénérée sous le titre de Notre-Dame d’Arabie, en particulier dans la cathédrale d’Awali, don du royaume du Bahreïn à l’Eglise catholique du pays.

Vous pouvez avoir accès à un certain nombre de vidéos sur ce sujet en cliquant sur le lien ci-dessous.

Bonne lecture et bonne écoute !

 (Pensez à ne pas écouter toutes les annonces plublicitaires !)

https://www.youtube.com/watch?v=awrJRLsmo2k

 

 

Pour les 60 ans de Vatican II, le pape renvoie dos à dos « progressisme » et « traditionalisme » 

Analyse 

Au cours de la messe célébrant les 60 ans du début du concile Vatican II, mardi 11 octobre, le pape François a vivement critiqué la « tentation de la polarisation » au sein de l’Église catholique.

  • Loup Besmond de Senneville (à Rome), 
Pour les 60 ans de Vatican II, le pape renvoie dos à dos « progressisme » et « traditionalisme »
 
Le pape François célèbre une messe à l'occasion du 60e anniversaire du début du concile Vatican II, à la basilique Saint-Pierre de Rome, le 11 octobre 2022.ANDREAS SOLARO/AFP

La division est un mal qui empoisonne l’Église. C’est le message qu’a voulu faire passer le pape François, mardi 11 octobre, alors qu’il célébrait, dans la basilique Saint-Pierre de Rome, une messe pour les 60 ans de l’ouverture du concile Vatican II.

Devant 500 prêtres, dont une trentaine de cardinaux de la Curie, tous arrivés en procession pour rappeler l’entrée dans la basilique de 2 000 évêques le 11 octobre 1962, le pape a mis en garde, tout au long de son homélie, contre la tentation de faire passer les intérêts particuliers avant le bien de l’Église.

« Égoïsmes pélagiens »

« Il y a toujours la tentation de partir de soi plutôt que de Dieu, de faire passer nos agendas avant l’Évangile, de nous laisser emporter par le vent de la mondanité pour suivre les modes du temps », a ainsi affirmé François.

Le pape a en particulier alerté contre « le progressisme qui s’adapte au monde » et « le traditionalisme qui regrette le monde passé ». Renvoyant dos à dos ces deux attitudes, qui « ne sont pas des preuves d’amour (de l’Église), mais d’infidélité », le pape a aussi critiqué ces « égoïsmes pélagiens, qui font passer les goûts et les projets personnels avant l’amour qui plaît à Dieu ».

Affrontements, poisons et polémiques

Plaidant pour une Église « amoureuse du Christ » n’ayant pas de temps à consacrer aux « affrontements », aux « poisons » et aux « polémiques », le pape a prié Dieu pour qu’il « nous délivre d’être critiques et intolérants, amers et en colère ».

« Le diable, a-t-il averti, veut semer l’ivraie de la division. Ne cédons pas à ses flatteries, ne cédons pas à la tentation de la polarisation. »

Vive critique de la polarisation

« Combien de fois a-t-on préféré être “supporteur de son propre groupe” plutôt que serviteurs de tous, “progressistes” et “conservateurs” plutôt que frères et sœurs, “de droite” ou “de gauche” plutôt qu’appartenant à Jésus ? », a poursuivi François. « Nous sommes tous l’Église. Tous. Tous », a insisté François, sortant de son texte.

Cette vive critique de la polarisation de l’Église dans certaines régions du monde, en particulier lorsqu’il s’agit de parler du concile Vatican II et de son application, s’est doublée d’une recommandation aux catholiques « d’être dans le monde avec les autres sans jamais se sentir au-dessus des autres ».

« Revenir au Concile »

Soixante ans jour pour jour après l’ouverture du processus qui mena au grand « aggiornamento » de l’Église catholique, le pape François a invité ceux qui l’écoutaient à « revenir au Concile ».

« Frères et sœurs, revenons au Concile qui a redécouvert le fleuve vivant de la Tradition sans stagner dans les traditions », a résumé le pape. Ce Concile, a rappelé le pape François, est l’événement par lequel, « pour la première fois », l’Église s’est « interrogée sur elle-même ».

Cette démarche renvoie directement au « Synode sur la synodalité » lancé par le pape François à l’automne 2021 afin de réfléchir à l’avenir de l’Église, à travers une consultation mondiale. Les organisateurs de ce Synode, qui doit s’achever en octobre 2023, avec une réunion d’évêques et de laïcs du monde entier, à Rome, ne cessent d’ailleurs de se placer dans la continuité de Vatican II.

« Éloge de la religion » : plaidoyer pour un cadre indispensable de la foi 

Critique 

Alors même que les religions sont discréditées, le philosophe jésuite en fait l’éloge, car elles constituent un cadre indispensable à l’expression de la foi.

  • Dominique Greiner, 
« Éloge de la religion » : plaidoyer pour un cadre indispensable de la foi
 
Le jésuite témoigne qu’il est possible de parler rationnellement et posément de religion, tout en assumant son ancrage dans sa tradition d’appartenance, le catholicisme.PAUL - STOCK.ADOBE.COM

Éloge de la religion

de Paul Valadier

Salvator, 200 p., 18 €

Le titre de ce nouvel ouvrage de Paul Valadier est un brin provocateur. Comment peut-on faire l’éloge de la religion à une époque où les diverses traditions religieuses sont suspectées d’être cause de violence? Cette réputation sulfureuse n’en épargne aucune : « Les crimes commis au nom de l’une d’elles rejaillissent sur toutes les autres aux yeux de l’opinion publique », relève le philosophe jésuite. Même la critique philosophique s’en prend au concept de religion. Certains en viennent alors à défendre la voie de l’athéisme, d’autres celle d’une spiritualité sans Dieu. D’autres encore disent leur préférence pour une foi délestée de la religion, comme ces chrétiens qui veulent se passer des institutions ecclésiales pour retrouver « le côté tranchant et” révolutionnaire” du message évangélique ».

Au fil de ses chapitres, Paul ­Valadier examine les différents griefs adressés à la religion et y répond. À ceux qui se disent plus attachés à la foi –« terme censé être plus spécifique et moins entaché d’ambiguïté » –, il rappelle qu’une foi totalement déconnectée du religieux risque bien de tomber du côté du subjectivisme, source de violences et de manipulations. « Une foi religieuse qui n’est pas soutenue et encadrée par une religion risque de rester vide ou de verser dans le sentimentalisme… », prévient-il. À ceux qui se méfient de la religion mais font bon accueil à « la spiritualité », il dit l’exigence d’une authentique vie spirituelle qui n’est « pas une aventure banale et sans risques » et qui est bien autre chose qu’un « enthousiasme sentimental pour la beauté des choses ou pour le mystère de la nature ».

Observateur attentif et critique

Le spécialiste de Nietzsche interpelle également ceux qui prônent l’athéisme qui dans bien des cas ne fait que substituer aux divinités reniées ou refusées d’autres croyances profanes comme le progrès, la science, l’argent, la réussite sociale. Mais il souligne surtout « l’échec de l’athéisme à être créateur d’un univers commun viable ». Il donne en exemple « l’impuissance de l’athéisme à créer un art digne de ce nom. En effet, la création artistique suppose toujours une inspiration qui va au-delà de toute forme de matérialisme (…). Or les arts inspirés par les athéismes d’État se sont révélés d’une indigence remarquable… »

Les références à des livres récents ainsi qu’à des articles de presse montrent que Paul Valadier, qui aura 90 ans en janvier 2023, reste un observateur attentif et critique de notre époque. Au passage, il n’hésite pas à dénoncer la légèreté ou la platitude dont font preuve certains auteurs en vue qui semblent avoir mis la rigueur intellectuelle au placard quand ils parlent de religion ou de spiritualité, même parmi les philosophes. Avec cet écrit, le jésuite témoigne qu’il est possible de parler rationnellement et posément de religion, tout en assumant son ancrage dans sa tradition d’appartenance, le catholicisme. Sans l’exalter « comme la vraie et unique religion », il précise ce qui à ses yeux la caractérise, notamment son souci de l’universel, une espérance messianique qui ouvre l’avenir à l’histoire collective, la beauté de sa liturgie… Un éloge à la religion chrétienne qui est aussi une confession de foi qui ne tait pas les « questions pendantes » au sujet de la crise que traverse l’Église catholique.