Dialogue interreligieux

« Lorsque nous travaillons pour les âmes, nous ne pouvons user que de persuasion et d'amour... Nous ne pouvons rien faire tant que nous n'avons pas persuadé les gens autour de nous qu'ils sont aimés... » (Cardinal Lavigerie, 1885)

« Nous croyons qu'en toute religion il y a une secrète présence de Dieu, des semences du Verbe qui reflètent un rayon de sa lumière... » (Chapitre 1967)

« Nous célébrons et partageons cette vie avec Dieu lorsque nous allons à la rencontre des cultures et des religions... nous réjouissant de la foi vivante de ces croyants et les rejoignant dans leur quête de la Vérité, cette Vérité qui nous rend tous libres. » (Chapitre 1998)

Missionnaires, nous sommes appelés à faire les premiers pas pour rencontrer les personnes, qu'elles que soient leurs convictions, leur religion.

Au Burkina Faso, cette réalité se traduit surtout dans la rencontre respectueuse et évangélique avec les adeptes des religions traditionnelles et avec les musulmans.

Dans cette rubrique, nous étudierons divers aspects de ces religions, particulièrement de l'islam.

À Paris, les débuts du judaïsme « orthodoxe et moderne » 

Myriam et Émile Ackermann, rabbins en formation, ont célébré dimanche 25 septembre le premier office de Roch Hachana, le Nouvel An juif. Ensemble, ils ont fondé une nouvelle communauté Kéhila Ayeka,qui s’inscrit entre le judaïsme du Consistoire et le courant libéral.

  • Juliette Paquier, 
À Paris, les débuts du judaïsme « orthodoxe et moderne »
 
Émile et Myriam Ackermann espèrent implanter durablement en France ce nouveau courant du judaïsme.CORINNE SIMON/HANS LUCAS

Quelques chaises en plastique, des paravents en tissu blanc, et des bibliothèques remplies de livres en hébreu composent le décor de la première synagogue de la communauté « orthodoxe et moderne » de France, au dernier étage d’un immeuble de l’Est parisien. Ce dimanche 25 septembre, au premier soir de Roch Hachana, le Nouvel An juif, une quinzaine de fidèles sont rassemblés autour de Myriam et Émile Ackermann, les fondateurs d’une nouvelle communauté Kéhila Ayeka, installée en juillet.

Cette célébration marque l’aboutissement d’un parcours commencé en 2017, lorsque les deux rabbins en formation, alors âgés de 20 ans, se rencontrent, se fiancent et se marient. Ils décident très vite de créer un groupe d’étude à destination de « ceux qui n’avaient pas accès à l’étude approfondie des textes fondateurs du judaïsme, notamment les femmes », retrace Émile Ackermann.

Portés par leurs amis et face à l’absence d’une orthodoxie moderne en France – un courant surtout développé en Israël et aux États-Unis –, ils décident de créer leur communauté pour implanter cette sensibilité du judaïsme dans le pays, proche de la tradition et du respect des règles de la loi juive (halakha), tout en ouvrant aux femmes l’étude, la possibilité d’officier ou de lire la Torah. Une forme de « troisième voie » entre le judaïsme porté par le Consistoire israélite de France, institution créée par Napoléon pour représenter le culte juif en France, et le courant libéral, davantage ouvert sur la société et la réinterprétation de la tradition.

En ce premier soir de Roch Hachana, leurs soutiens de la première heure, comme Alicia, 40 ans, ont répondu présent à l’invitation. Mère de trois enfants en bas âge, elle est venue avec son mari, inspirée par cette mouvance du judaïsme qu’elle avait découverte en Israël et qui « manquait en France »« Dans les communautés françaises, soit la tradition est adaptée de manière trop légère et il y a une perte, soit il faut accepter que la femme soit derrière, dans un espace séparé, avec une position de spectatrice », déplore-t-elle. Sans être « dogmatique », Alicia affectionne l’« équilibre » trouvé par Kéhila Ayeka.

C’est cet équilibre qui a poussé Fanny, 32 ans, à venir dimanche, bien qu’elle ne se rende d’habitude pas à la synagogue pour le premier soir de Roch Hachana. Elle, qui n’est « pas issue d’une famille religieuse », ne se sentait « pas accueillie » dans les synagogues traditionnelles et salue cette vision « moins fermée » du judaïsme. À ses côtés Julia, 33 ans, se réjouit d’« avoir désormais le choix ». Ayant déjà étudié le Talmud et la Torah dans un centre d’études de Jérusalem, elle apprécie d’être autorisée à « interpréter les textes », tout en ayant un « cadre » qui permet de « maintenir la tradition, la culture et l’histoire juives ».

Arnaud, lui, a entendu parler de la communauté « par hasard », habitant dans la rue d’à côté. « À partir du moment où l’office n’est pas consistorial et est égalitaire, ça me convient », sourit simplement ce quinquagénaire. Lui non plus n’est pas un habitué de la synagogue, qu’il fréquente habituellement pour Kippour (fête du Grand Pardon, célébrée dix jours après Roch Hachana), chez les libéraux de Judaïsme en mouvement.

« Les Ackermann ont cristallisé une demande, face à l’ultra-orthodoxie qui gagne le Consistoire », considère la sociologue émérite Martine Cohen, spécialiste du judaïsme au CNRS, convaincue que « beaucoup de juifs de France sont mécontents des dérives antimodernes et intolérantes de l’institution ». À ses yeux, un terreau propice à l’émergence d’une telle communauté en France s’est développé depuis une dizaine d’années, avec la multiplication des initiatives de lecture de textes par les femmes sous l’égide de la chercheuse et talmudiste Liliane Vana, ou de Joëlle Bernheim, l’épouse de l’ancien grand rabbin de France.

Si Émile Ackermann, son bébé dans les bras, mène l’office, en tant que fin connaisseur de la liturgie ashkénaze – il est le petit-fils du chantre de la communauté orthodoxe de Strasbourg –, c’est sa femme Myriam qui conclut ce temps de prière, par une explication de la « techouva », ce processus de repentance central en ce mois de Tichri.

Heurts répétés entre hindous et musulmans dans une ville du centre de l’Angleterre 

Les faits 

De violents affrontements entre hindous et musulmans ont conduit à près d’une vingtaine d’interpellations, samedi 18 et dimanche 19 septembre, à Leicester, dans le centre de l’Angleterre. Ces incidents, alimentés par la diffusion sur les réseaux sociaux de vidéos parfois falsifiées, témoignent d’une influence du contexte politique indien sur la diaspora.

  • Juliette Paquier, 
Heurts répétés entre hindous et musulmans dans une ville du centre de l’Angleterre
 
Ces affrontements entre hindous et musulmans s’inscrivent dans un contexte de tensions récurrentes entre les deux communautés depuis plusieurs semaines.JONATHAN STUTZ/STOCK ADOBE

Dix-huit arrestations ont eu lieu après des affrontements, samedi 18 et dimanche 19 septembre, entre des membres des communautés hindoue et musulmane de Leicester, une ville du centre de l’Angleterre. Les tensions ont émergé après la publication d’une vidéo sur Twitter, largement partagée, dans laquelle on voit un homme retirer le drapeau d’un temple hindou de la ville.

Plusieurs hommes hindous se sont d’abord retrouvés samedi dans un quartier de l’est de la ville, pour une « manifestation non prévue », selon la police locale. Le lendemain, une autre manifestation a eu lieu, en réponse à celle de la veille, donnant lieu aux affrontements et interpellations. Dans la foulée, lundi 19 septembre, la Haute Commission indienne, représentation de l’Inde au Royaume-Uni, a fermement condamné, sur Twitter, « la violence perpétrée contre la communauté indienne de Leicester et le vandalisme des lieux et symboles de la religion hindoue ».

Infox

De son côté, le maire de la ville, Peter Soulsby, a mis en garde, auprès de la BBC, contre la désinformation diffusée sur les réseaux sociaux, qui a « déformé » les causes de ces tensions. Une version corroborée par la police du comté, qui a estimé que les vidéos relayées relevaient d’une infox. « Nous avons vu des publications sur les réseaux sociaux selon lesquelles une mosquée est attaquée. Les agents sur le terrain ont confirmé que ce n’est pas vrai », ont écrit les forces de l’ordre dans une publication en ligne.

Ces affrontements entre hindous et musulmans s’inscrivent dans un contexte de tensions récurrentes entre les deux communautés depuis plusieurs semaines. Fin août, plusieurs interpellations avaient eu lieu lors de la diffusion d’un match de cricket opposant l’Inde au Pakistan dans le cadre de la Coupe d’Asie, à Dubaï. Quelques jours plus tard, le 5 septembre, des heurts avaient à nouveau opposé des membres des deux communautés.

Prétendue manifestation

Selon la police du comté, ces tensions n’étaient pourtant pas fondées initialement sur la religion. « Un incident a été partagé sur les réseaux sociaux, affirmant qu’un musulman était attaqué par des hindous. C’était faux – la victime était en fait sikhe et soutenait la même équipe que les personnes qui l’ont attaquée », a fait savoir un porte-parole de l’institution au Guardian.

Dans un communiqué du 14 septembre, la députée de Leicester Est, Claudia Webbe, dénonçait également les faux posts sur les réseaux sociaux, dont une prétendue « manifestation pacifique » qui aurait été planifiée le 11 septembre contre les « crimes de haine à l’égard des musulmans », un événement « entièrement faux et haineux ».

Influence de la politique indienne

Par ailleurs, selon une information du Guardian, près de la moitié des manifestants du week-end dernier n’étaient pas originaires du comté, mais venus d’ailleurs en Angleterre. Pour le maire Peter Soulsby, interrogé par le média britannique, « cela suggère qu’il y a des gens ayant d’autres batailles à mener qui viennent à Leicester pour les mener ». Plusieurs vidéos mettent en scène des manifestants hindous scandant un chant antimusulman tristement célèbre en Inde, où le BJP, parti nationaliste hindou du premier ministre Narendra Modi, au pouvoir depuis 2014, orchestre la répression des minorités religieuses, dont les musulmans.

Selon Gurharpal Singh, professeur émérite d’études sikhes et pendjabies de l’université Soas, interrogé par le Guardian« ces tensions font maintenant partie d’un changement social plus large qui se produit dans la ville », sur fond d’influence croissante du contexte politique indien au sein de la diaspora.

Suicide assisté : les religions s’en inquiètent, avec des nuances 

Explication 

Le Comité consultatif national d’éthique a estimé, dans un avis très commenté, qu’il pourrait exister « une application éthique d’une aide active à mourir », sous strictes conditions. Les responsables religieux s’inquiètent, avec des nuances, de la possible légalisation du suicide assisté.

  • Juliette Paquier, Marguerite de Lasa et Benoît Fauchet, 
Suicide assisté : les religions s’en inquiètent, avec des nuances
 
Mardi 13 septembre, le Comité consultatif national d’éthique a ouvert la voie à « une application éthique de l’aide active à mourir » en France : christianisme, judaïsme et islam s’inquiètent d’une éventuelle légalisation du suicide assisté.ADOBE STOCK

« Il existe une voie pour une application éthique de l’aide active à mourir, à certaines conditions strictes » : tel est l’avis rendu public par le Comité consultatif national d’éthique, mardi 13 septembre. Qu’en disent les doctrines des principaux cultes, et comment réagissent leurs responsables ou spécialistes des questions d’éthique ?

« Du brouillard sur la réflexion »

► Du côté des confessions chrétiennes, l’Église catholique oppose une réprobation morale à l’assistance au suicide. « Nous devons accompagner les personnes jusqu’à la mort, mais ne pas la provoquer ni favoriser le suicide assisté », soulignait le pape François lors d’une méditation sur la mort, en février dernier.

Archevêque de Rennes et responsable du groupe de travail « Bioéthique » de la Conférence des évêques de France (CEF), Mgr Pierre d’Ornellas a regretté dans un communiqué, mercredi 14 septembre, que l’avis du CCNE « jette du brouillard sur la réflexion. Il utilise le même mot “fraternité” pour qualifier à la fois l’aide active à mourir et l’accompagnement par les soins palliatifs. Mais comment appeler fraternel le geste qui donne la mort à son frère qui la demanderait ? ».

Tout en jugeant « prudent » l’avis du comité d’éthique, la Fédération protestante de France (FPF) a dit, elle, partager la « crainte » que « l’évolution législative proposée soit principalement motivée par des raisons économiques ou idéologiques ». Dans un communiqué diffusé mercredi 14 septembre, la FPF a rappelé les « principes structurants qui guident sa réflexion éthique à propos de la fin de vie », parmi lesquels « la compassion fraternelle avec les plus vulnérables ».

Associé au Conseil national des évangéliques de France (Cnef), le Comité protestant évangélique pour la dignité humaine a, lui, estimé que le CCNE cherchait « à se donner bonne conscience » en plaidant pour le renforcement des soins palliatifs. « Comme si permettre à la solidarité et aux soins de se développer devait excuser - et rendre acceptable par ailleurs - la violence d’un acte meurtrier », relève son communiqué, diffusé vendredi 16 septembre.

« Aux yeux de l’Église orthodoxe, la société se trompe en croyant voir dans l’euthanasie une
solution à la souffrance humaine », disait pour sa part devant les parlementaires, en 2014, Mgr Emmanuel, alors métropolite grec-orthodoxe de France. Il considérait aussi que le suicide assisté était « une violence et pas un acte de liberté ».

► Le judaïsme s’oppose au suicide assisté, contraire à l’interdit de tuer. « Les textes sont clairs : aider à l’agonie ou effectuer une action qui pourrait provoquer un décès plus tôt que prévu est considéré comme un meurtre, explique le rabbin Yeshaya Dalsace, du courant massorti. C’est un interdit radical. »

L’un des versets du Deutéronome énonce en ce sens la primauté de la vie sur le consentement de la personne : « Tu choisiras la vie. »« Contrairement à d’autres conceptions religieuses, la mort, dans le judaïsme, n’est pas perçue comme un accomplissement mais comme un renoncement à la vie concrète », illustre le rabbin.

Respect de la vie et atténuation de la souffrance

Il existe toutefois une ligne de crête entre le respect de la vie et l’atténuation de la souffrance humaine, point sur lequel les interprétations rabbiniques peuvent diverger. Pour le grand rabbin de Paris, Michel Gugenheim, un orthodoxe strict, « arrêter de nourrir une personne est considéré comme un meurtre ». En ce sens, « la loi Claeys-Leonetti est déjà en contradiction avec la loi juive », selon lui.

Pour le rabbin Yann Boissière, du courant libéral, « s’il y a des éléments qui empêchent la mort naturelle, il faut supprimer ces éléments pour laisser la personne mourir » . Dans cette conception, le judaïsme autorise la sédation profonde et continue, légalisée par la loi Claeys-Leonetti de 2016.

Une loi que le grand rabbin de France, Haïm Korsia, juge « formidable d’humanité et d’équilibre ».« Il n’y a nul besoin d’aller plus loin », estime-t-il, en considérant la possible légalisation du suicide assisté comme une « rupture anthropologique tragique ».

► Sur les questions de fin de vie, lislam« converge avec le christianisme et le judaïsme », souligne Sadek Beloucif, membre du conseil d’orientation de la Fondation de l’islam de France et chef du service d’anesthésie-réanimation à l’hôpital Avicenne de Bobigny (Seine-Saint-Denis).

« Plusieurs passages du Coran indiquent que seul Dieu est le détenteur de la vie et de la mort », indique également Omero Marongiu-Perria, sociologue spécialiste de l’islam. La sourate 3, verset 145 du Coran dit : « Il n’appartient à aucun être vivant de mourir qu’avec la permission de Dieu selon un délai écrit fixé à l’avance. »

Dans le cas de l’aide à mourir, Sadek Beloucif, qui fut membre du CCNE de 1999 à 2007, insiste sur l’importance donnée par l’islam à l’intentionnalité des actes, citant un hadith (propos ou acte prêté au prophète de l’islam Mohammed) en ce sens.« Cela signifie que même si l’acte a une conséquence négative, il est valide s’il est effectué de bonne foi et avec un bon esprit », explique-t-il.

Pour le médecin, ce principe permet d’éclairer la distinction entre sédation profonde maintenue jusqu’au décès – permise par la loi Claeys-Leonetti – et le fait de donner la mort. « Dans la sédation, l’intention est de soulager le patient, même si je peux prévoir un risque de hâter son décès », développe-t-il.

La question de l’euthanasie fait tout de même l’objet d’un débat au sein du monde musulman. Omero Marongiu-Perria, de tendance libérale, estime que « le texte ne peut pas tout conditionner », et qu’« on ne peut pas sacraliser une interprétation du texte au détriment de la dignité d’un être humain ».

Les responsables de culte vont-ils parler d’une même voix dans le cadre de la large consultation citoyenne sur la fin de vie qui doit s’ouvrir en octobre, en vue de l’établissement d’un possible nouveau cadre légal d’ici à la fin 2023 ?

Une prochaine réunion des responsables de culte

En mars 2015, avant le vote de la loi Claeys-Leonetti, cinq représentants des trois grandes traditions religieuses monothéistes (le cardinal Philippe Barbarin, le pasteur François Clavairoly, le métropolite orthodoxe Emmanuel, le grand rabbin Haïm Korsia et le responsable musulman Mohammed Moussaoui) avaient dit leur souhait d’un « débat serein, démocratique et respectueux de la personne humaine et de sa dignité » sur ce sujet sensible, et mis en garde contre « la tentation de donner la mort, sans l’avouer, en abusant de la sédation », dans une tribune commune.

Cette fois encore, les responsables de culte ont prévu d’échanger leurs points de vue sur l’avis du CCNE. « Si on provoque une réunion, peut-être qu’on entrera avec une parole commune dans ce débat », a confié à La Croix le pasteur Christian Krieger, président de la FPF.

Chine, Ukraine, euthanasie, voyages… Ce que le pape François a dit dans l’avion au retour du Kazakhstan 

Les faits 

Dans l’avion qui le ramenait du Kazakhstan à Rome, le pape François a admis, jeudi 15 septembre, que la distribution d’armes en Ukraine pouvait être « morale », à certaines conditions.

  • Loup Besmond de Senneville (à bord de l’avion papal), 
Chine, Ukraine, euthanasie, voyages… Ce que le pape François a dit dans l’avion au retour du Kazakhstan
 
De retour du Kazakhstan, le pape François a abordé jeudi 15 septembre plusieurs sujets parmi lesquels l’euthanasie, la guerre en Ukraine et les relations avec la Chine.ALEXANDER ZEMLIANICHENKO/AP
 

Après trois jours d’un voyage « dense » au Kazakhstan, le pape François a répondu aux journalistes, au cours d’une conférence de presse de 45 minutes, dans l’avion qui le ramenait jeudi 15 septembre de Noursoultan à Rome.

► Ukraine. Dialoguer avec la Russie ? « Cela sent mauvais, mais on doit le faire »

Il faut continuer à dialoguer « avec tous ». Envers et contre tout, a affirmé, en substance, le pape. « Je crois qu’il est toujours difficile de comprendre le dialogue avec les États qui ont provoqué la guerre », a-t-il admis. Avant, toutefois, de défendre cette option.

« Je n’exclus pas le dialogue avec un pays en guerre, quel qu’il soit, même s’il est l’agresseur », a insisté François, sans citer la Russie. « Le dialogue se fait comme cela. Mais on doit le faire. Cela sent mauvais, mais on doit le faire. »

Également interrogé sur la possibilité pour un pays de se défendre, le pape a admis que la distribution d’armes à l’Ukraine pouvait « être morale », à condition de respecter certains critères. « Se défendre est non seulement licite, mais c’est aussi une expression d’amour de la patrie. Si on ne se défend pas, on n’aime pas. Si l’on aime, on se défend », a poursuivi le pape.

Pour François, le jugement moral à porter sur la distribution d’armes dépend donc des « motivations » de celle-ci. Un jugement qui avait déjà été porté par Mgr Paul R. Gallagher, le « ministre des affaires étrangères » du pape, ou par le cardinal Pietro Parolin, secrétaire d’État, mais jamais aussi clairement par François.

Mais « cela peut être immoral si cela est fait avec l’intention de provoquer plus de guerres, de vendre plus d’armes, ou de se débarrasser des armes qui ne servent plus », a précisé l’auteur de l’encyclique Fratelli tutti. Qui a par ailleurs renouvelé sa ferme condamnation de la fabrication d’armes. « Un commerce assassin », a-t-il dit.

► L’euthanasie ? « Tuer, ce n’est pas humain »

Interrogé sur l’euthanasie, alors que les débats sur la fin de vie s’intensifient en France, François a rappelé en peu de mots la position classique de l’Église catholique sur le sujet. « Tuer, ce n’est pas humain. Point, a-t-il répondu. Si tu tues avec des motivations, tu finiras par tuer de nouveau. Ce n’est pas humain. Tuer, laissons cela aux bêtes. »

► Comprendre la Chine, « cela prend des siècles, c’est un peuple d’une patience infinie »

Alors que le Vatican et Pékin négocient actuellement activement le renouvellement de l’accord sur la nomination des évêques en Chine, qui doit arriver à échéance en octobre, le pape a défendu « la voie du dialogue » entrepris avec la Chine.

« Cela prend des siècles de comprendre » la Chine, a-t-il jugé. « Il existe une commission bilatérale vaticano-chinoise, qui avance bien, lentement, a ajouté le pape. Parce que le rythme chinois est lent. Eux, ils ont une éternité pour avancer. C’est un peuple d’une patience infinie. » Cette voie de la compréhension mutuelle passe par des discussions avec Pékin, a poursuivi François. « Il n’est pas facile de comprendre la mentalité chinoise, mais elle doit être respectée. »

Ombres chinoises sur voyage kazakh

Interrogé sur le sort du cardinal Zen, archevêque émérite de Hong Kong, qui doit comparaître devant les juges chinois lundi 19 septembre, le pape François a semblé vouloir faire preuve de prudence. « Le cardinal Zen est un aîné qui va être jugé ces jours-ci, n’est-ce pas ? a prudemment interrogé le pape. Il dit ce qu’il sent, à savoir que là-bas, il y a des limitations (à la liberté religieuse) », a poursuivi François, sans plus de commentaire.

► Prochains voyages : Bahreïn, Soudan du Sud, RD-Congo

François n’a pas renoncé aux voyages. Même s’ils demeurent « difficiles », a-t-il admis, « parce que le genou n’est pas encore guéri ». Le directeur de la Salle de presse du Saint-Siège a confirmé un « projet de voyage » au mois de novembre à Bahreïn.

Mais François a aussi évoqué la possibilité d’un prochain voyage au Soudan du Sud et au RD-Congo, où il devait se rendre en juillet, avant que le Vatican n’annule le voyage en raison de son état de santé.

Face aux Congolais de Rome, la forte exhortation du pape François à la paix

« J’ai parlé, l’autre jour, avec Mgr Welby et nous avons identifié comme possibilité en février pour aller au Soudan du Sud », a confirmé François, en mentionnant le nom de l’archevêque de Canterbury, Justin Welby, primat de l’Église d’Angleterre (anglicane). « Nous devons (y) aller tous les trois, le chef de l’Église d’Écosse, Mgr Welby et moi », a ajouté François. Une visite au Soudan du Sud qui sera jointe, comme cela était prévu en juillet, à un voyage au RD-Congo, a précisé le pape.