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Sénégal: le pont de Foundiougne, fraîchement inauguré, suscite beaucoup d'optimisme

 

Le président sénégalais Macky Sall a inauguré, samedi 26 mars, le nouveau pont de Foundiougne, dans la région centre du Fatick. Cet ouvrage, baptisé pont Nelson-Mandela, a été financé à hauteur de 67 millions de dollars, soit environ 40 milliards de francs CFA. Long de 1,6 kilomètre, il va permettre de désenclaver la zone et va faciliter les échanges entre Dakar et Banjul, en Gambie.

Avec notre correspondant à Dakar, Birahim Touré

Ce pont était attendu depuis longtemps par les opérateurs économiques de la région centre du Sénégal. Désormais, ils pourront même rallier la Gambie et le sud du pays sans passer par la région de Kaolack, qui constituait un long détour. Boly Gueye est le président de l’Association nationale de la chaîne de valeur tourisme. Il s'exprime :

« Nous voyons l'importance de ce pont. (...) Aujourd'hui, en cinq minutes, on peut traverser ce pont et repartir dans toutes les îles ou dans toutes les zones touristiques de la périphérie. C'est un grand avantage. »

Et c'est aussi un rêve qui devient réalité selon les habitants de Foundiougne qui, aujourd'hui peuvent pousser un ouf de soulagement. Souleymane Diouf habite dans le département et confie : « Nos arrières grands-parents et nos grands-parents sont aujourd'hui dans l'au-delà. Si on les réveillait et qu'on leur montrait que l'on a réalisé ici un pont, ils diraient Al Hamdoulillah. 

La traversée du pont de Foundiougne est payante : 500 francs CFA pour les motos et jusqu'à 15 000 francs CFA pour les bus et poids lourds. Des tarifs jugés un peu élevés par certains usagers qui demandent aux vaillantes populations de Foundiougne et du Log. Dieureudieuf, Jookanjal pour votre mobilisation exceptionnelle et votre accueil si chaleureux, en cette terre de vieilles traditions culturelles et d’hospitalité ancestrale.ne revue à la baisse.

Comment l’Afrique de l’Ouest peut se débarrasser des délestages

Mis à jour le 25 mars 2022 à 12:22
 

 

À Lagos (Nigeria), les coupures durent en moyenne de 6 à 8 heures par jour. Ici, dans le district de Yaba en 2020. © Youri Lenquette pour Jeune Afrique.

 

Si la Côte d’Ivoire et le Sénégal ont largement réduit les coupures de courant, la question demeure un fléau ailleurs dans la région. Et il ne suffit pas d’augmenter les capacités de production pour résoudre le problème

Mali, Burkina Faso, Ghana et même Côte d’Ivoire. Ces derniers mois, les délestages se sont multipliés en Afrique de l’Ouest francophone provoquant critiques dans la presse et fatigue au sein du secteur privé. Au Nigeria, « les coupures quotidiennes à Lagos et Abuja sont d’une durée moyenne de 6 à 8 heures », a rappelé le directeur général du Trésor français dans une note de juillet 2021, soulignant que « les délestages récurrents obligent une large partie de la population et la quasi-totalité des entreprises à se doter de moyens d’autoproduction, essentiellement des groupes électrogènes coûteux et polluants ».

Ancien et récurrent, le problème est économique autant que politique : non seulement les coupures de courant coûtent cher aux pays mais, en plus, elles entretiennent le mécontentement social. Les gouvernements comme les sociétés d’électricité – en majorité publiques dans la zone – veulent donc à tout prix les éviter. Mais est-ce possible à court terme et de manière durable ? Au regard de la situation dans la région, on peut en douter. « En Afrique de l’Ouest, le taux d’accès à l’électricité est de 52 % en moyenne, avec des coupures d’électricité pouvant atteindre 80 heures par mois », notait la Banque mondiale (BM) en 2018.

Trois catégories de pays

Même s’il est difficile de dresser un état des lieux exhaustif, on peut établir trois catégories de pays.

Une première, limitée à deux membres, à savoir la Côte d’Ivoire et le Sénégal : ayant fortement développé leurs capacités de production (qui a plus que doublé en dix ans dans le cas ivoirien), ils ont réussi ces dernières années à réduire drastiquement la fréquence et la durée des délestages. Une deuxième catégorie, également composée de deux pays, le Ghana et le Burkina Faso, dont les efforts sont en passe de payer. Une troisième et dernière catégorie, réunissant l’ensemble des autres États, du Nigeria au Mali en passant par la Guinée, où les délestages demeurent un problème structurel et donnent lieu à un partage de la pénurie via différents types de coupures, alternées, par quartier, brutales, à répétition…

SOUFFRANT DE SOUS-INVESTISSEMENT CHRONIQUE, LA PLUPART DES RÉSEAUX ENREGISTRENT UN DÉFICIT DE MAINTENANCE

Face à ce constat peu reluisant, il faut reconnaître que le problème est complexe. Pour rappel, les délestages interviennent dans deux principaux cas de figure : d’une part, en raison de panne technique au niveau de la production, du transport ou de la distribution, d’autre part, lorsque que la demande d’électricité (la consommation) est trop importante par rapport à l’offre (la production). Or, en Afrique de l’Ouest, les pays sont vulnérables sur les deux plans. Souffrant de sous-investissement chronique, la plupart des réseaux enregistrent un déficit de maintenance, ce qui accroît le risque d’incident. En mai 2021, en Côte d’Ivoire, c’est une conjonction de facteurs qui a expliqué la vague de délestages : les conditions climatiques (la sécheresse ayant réduit les volumes d’eau dans les barrages et les capacités de production d’énergie hydraulique), des retards d’investissements dans des centrales à cause du Covid-19 et une panne grave sur une machine de la centrale d’Azito – rappelant que personne n’est à l’abri d’un souci technique.

 

Centrale thermique d’Azito, en Côte d’Ivoire, dont General Electric est exploitant depuis 2017. © Olivier pour JA


Centrale thermique d’Azito, en Côte d’Ivoire, dont General Electric est exploitant depuis 2017. © Olivier pour JA

Motifs d’espoir

Les États sont tout autant en difficulté sur la gestion de l’offre et de la demande, pris dans une course en avant. Face à des besoins énergétiques qui explosent, en raison de la croissance démographique, de l’essor économique et de l’urbanisation, ils ont du mal à tenir le rythme d’investissement adéquat.

« La demande d’électricité augmente de façon linéaire quand la production d’électricité croît, elle, par paliers (au fur et à mesure de la mise en service de centrales). Si vous ajoutez à cela le fait que, malgré l’existence de modèles de prévisions, les projections restent assez aléatoires, c’est presque mission impossible, pointe Hugo Le Picard, chercheur au Centre énergie & climat de l’Institut français des relations internationales (Ifri). Il y a fort à parier que, quoi qu’il arrive, les délestages perdurent ces prochaines décennies. » Car, quand bien même certains mettent le paquet sur l’offre – le Burkina Faso doit gagner près de 200 MW d’énergie solaire à court terme, un bond significatif au regard de sa puissance installée de 357 MW –, encore faut-il s’assurer d’avoir en temps et en heure les lignes de transport et les postes de distribution permettant d’acheminer l’électricité jusqu’au consommateur final.

CET EFFORT GÉNÉRALISÉ SE CONJUGUE AVEC ET EST FACILITÉ PAR L’ESSOR DES ÉNERGIES RENOUVELABLES, AU DÉPLOIEMENT RAPIDE ET AU TARIF COMPÉTITIF.

Pour autant, certains sont optimistes sur la capacité de la région à faire rapidement des délestages un phénomène résiduel. Plusieurs évolutions vont en effet dans le bon sens. Tout d’abord, force est de constater que tous les pays, même les plus instables ou les moins bien dotés financièrement, mettent l’accent sur l’augmentation des capacités de production – on dénombre près d’une dizaine de projets au Mali, par exemple. Cet effort généralisé se conjugue avec et est facilité par l’essor des énergies renouvelables, au déploiement rapide et au tarif compétitif. Sénégal, Burkina Faso, mais aussi Togo, Mali, Guinée et Tchad, entre autres, ont franchi le pas et promettent d’accélérer.

Enfin, l’essor des interconnexions, dans le cadre du système d’échange ouest-africain, joue aussi un rôle crucial en facilitant les achats régionaux d’électricité, moyen de répondre rapidement et à moindre coût à une période de pointe. « Entre 2011 et 2018, l’interconnexion Ghana-Burkina Faso a permis de réduire de 130 à 8 heures la durée annuelle des coupures de courant au Burkina Faso tout en augmentant la capacité d’exportation d’électricité du Ghana de 200 MW », soulignait la BM dans une note de début 2021.

 

Stratégie, management et volonté politique

« Les solutions aux délestages existent. Tout l’enjeu est de savoir si les États sont en mesure de mobiliser les investissements nécessaires pour les mettre en œuvre. Et si le secteur privé est prêt à suivre », avance le ministre burkinabè de la Transition énergétique et des Mines, Bachir Ismaël Ouédraogo. « C’est une question de stratégie, de management et de volonté politique », insiste le consultant en énergie Ahmadou Saïd Bâ, ingénieur formé à l’École nationale supérieure de l’électronique et de ses applications (Ensea) et à Paris-Dauphine PSL, qui appelle aussi à en finir avec « le pilotage à l’aveugle » en investissant « dans des outils de réseau intelligent pour gérer au mieux la production existante et son transport ».

« Une des manières de lutter efficacement contre les délestages, c’est tout simplement de commencer par limiter les pertes, qui sont considérables aujourd’hui », explique Amadou Ly, le fondateur d’Akilee, société sénégalaise spécialisée dans la gestion intelligente de l’énergie (dont la Senelec est actionnaire à 34 %). De fait, si la plupart des sociétés publiques de la zone ont progressé sur l’évaluation de la qualité de service, en intégrant dans leurs rapports annuels les indicateurs d’énergie non fournie, elles tardent encore à prendre le sujet des pertes – pourtant estimées à au moins 20 % de la production – à bras-le-corps.

Côte d’Ivoire : ce qu’Albert Mabri Toikeusse a dit à Alassane Ouattara

Par Jeune Afrique
Mis à jour le 23 mars 2022 à 17:47
 

 

Albert Mabri Toikeusse et Alassane Ouattara le 22 mars 2022, à Abidjan © DR

 

Pour la première fois depuis un an et demi et la brouille entre les deux hommes, le chef de l’État a reçu son ancien allié passé à l’opposition, le 22 mars. Jeune Afrique vous dévoile les coulisses de cet échange.

Plus d’un an et demi après avoir quitté la coalition présidentielleAlbert Mabri Toikeusse a été reçu par Alassane Ouattara au palais, mardi 22 mars, dans l’après-midi. Une première depuis la brouille politique entre les deux hommes.

Sans intermédiaire

Le rendez-vous entre Alassane Ouattara et Albert Mabri Toikeusse a été organisé sans intermédiaire et à l’initiative du président de l’Union pour la démocratie et pour la paix en Côte d’Ivoire (UDPCI). Dimanche 20 mars, celui-ci a appelé le président ivoirien pour lui faire part de sa volonté de le rencontrer. Alassane Ouattara lui a expliqué qu’il n’était alors pas à Abidjan mais qu’il allait lui proposer une date, ce qu’il a fait dès le lundi.

Albert Mabri Toikeusse a d’abord été reçu par Fidèle Sarassoro, le directeur de cabinet du président, qui l’a ensuite conduit auprès de lui. Lors de leur tête-à-tête, les deux hommes ont passé en revue les conclusions du dialogue politique, qui s’est clos début mars. Rouvert sous la houlette du Premier ministre Patrick Achi, il préconisait notamment que le chef de l’État s’entretienne avec les principaux leaders politiques.

La question de la réforme de la Commission électorale independante (CEI) a été abordée. Albert Mabri Toikeusse s’est également dit préoccupé du fait que son groupe parlementaire ne soit pas représenté dans le bureau de l’Assemblée nationale. Il a été rassuré par le président, qui lui a confié avoir un point de vue similaire. L’UDPCI pourrait faire son entrée dans le bureau de l’Assemblée lors de la prochaine session parlementaire prévue en avril.

Enfin, Mabri a saisi l’occasion pour aborder avec le chef de l’État la question du statut du général Robert Gueï, qui avait chassé Henri Konan Bédié du pouvoir lors du coup d’État de Noël 1999. Il a plaidé pour sa « réhabilitation par la République ».

Fortes tensions

Cordiale, cette rencontre marque un rapprochement entre les deux hommes, qui s’étaient brouillés trois mois avant la présidentielle d’octobre 2020. Déjà opposé à la candidature d’Amadou Gon Coulibaly à l’élection, Albert Mabri Toikeusse était devenu, après le décès du Premier ministre, un des fervents détracteurs du troisième mandat d’Alassane Ouattara. Il avait refusé de dissoudre l’UDPCI pour rejoindre le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP).

Juste après le scrutin, au plus fort des tensions entre le pouvoir et l’opposition, Albert Mabri Toikeusse avait même fui Abidjan. Recherché par la justice, il était entré en clandestinité et n’était réapparu qu’en janvier 2021. Les relations entre le chef de l’État et son ancien ministre – qui se connaissent depuis plus de trente ans et ont maintes fois travaillé ensemble – s’étaient depuis quelque peu réchauffées. Ces derniers temps, des messages étaient passés entre eux.

«L'eau va se repositionner parmi les priorités pour la sécurité dans le monde»

 

Le Forum mondial de l'eau ouvre ses portes pour une semaine à Dakar. C'est le rendez-vous le plus important consacré à cette ressource. Il n'a lieu que tous les trois ans et se tient pour la première en Afrique subsaharienne. Créé en 1997 par le Conseil mondial de l'eau, lié aux grandes entreprises de ce secteur, il ne relève donc pas de l'ONU. Explications des enjeux avec Abdoulaye Sene, hydraulicien et secrétaire exécutif de l'évènement.

De notre envoyé spécial à Dakar

RFI : La crise de l'eau va devenir plus aigue à mesure que le changement climatique augmente. Pourquoi la prise de conscience au niveau global tarde-t-elle autant ?

Abdoulaye Sene : Parce que, pendant longtemps, on a considéré cette ressource comme illimitée. On a vu jusqu'à quel niveau les consommations individuelles pouvaient être élevées. Dans certains pays, comme les Etats-Unis, la consommation par habitant peut dépasser les 500 litres par personne alors que la quantité moyenne jugée essentielle pour l'homme est de 50 litres par jour et par personne. Alors que la sécheresse frappe partout, de grands cours d'eaux sont en train de s'assécher et d'assoiffer de grandes villes.

L'eau prend donc aujourd'hui une dimension extrêmement importante dans les préoccupations des pays. On s'est rendu compte qu'avec l'augmentation de la population, avec une ressource limitée et une demande croissante, on va immanquablement vers une situation conflictuelle, si on ne met pas en place une modalité et des mécanismes de gouvernance coopérative et solidaire. Avec l'augmentation du changement climatique, celle de la population et la nécessité d'augmenter la productivité de l'agriculture, principale consommatrice, l'eau va se repositionner parmi les premières priorités pour la paix et la sécurité dans le monde.

 

► À lire aussi: le Forum de l'eau est aussi à la Une de la revue de la presse Afrique du jour

Cette 9e édition du Forum mondial de l'eau se veut un « Forum des réponses ». Mais d'abord, quels en seront les questions et les objectifs ?

Il s'agit de questionner l'importance de la sécurité de l'eau pour la sécurité des nations mais surtout pour le bien-être des populations.

Le forum va également aborder la question de l'eau pour le développement rural. L'agriculture constitue un enjeu extrêmement important, en Afrique en particulier. Dans les années 70 [et jusque dans les années 1990, NDLR], le Sahel a connu l'une des pires sécheresses, redoutable pour le cheptel africain et la sécurité alimentaire. L'eau est le meilleur révélateur du changement climatique et de ses conséquences, qui peuvent aussi se traduire aussi par des excès d'eau, avec des inondations momentanées.

Nous aborderons donc la manière dont nous devons donc sécuriser cette ressource. À travers le stockage - sur les cours d'eau, avec des barrages ou avec la récupération des eaux de pluie avec des programmes de citernes dans le monde rural - mais aussi d'adaptation de l'agriculture à travers des techniques d'irrigation économes en eau. Avec la raréfaction des ressources en eau, il arrive souvent que l'insuffisance des ouvrages hydrauliques soient source de conflit entre les éleveurs et les agriculteurs.

On reproche souvent au forum son manque de relais politique au niveau national et international pour que des mesures efficaces soient prises par des Etats. En attendant, les populations, elles, sont en attentes de solutions concrètes à leurs problèmes. Quelles réponses peuvent-elles attendre de ce rendez-vous ?

On l'a reproché aux éditions antérieures du forum. Mais il y aura, à celui de Dakar, un segment politique de très haut niveau avec des chefs d'Etat, des chefs des grandes institutions internationales, de financement notamment, qui seront présents pour lancer des initiatives concrètes pour l'action au service de l'accès à l'eau.

Les populations sénégalaises, africaines et du monde pourront donc, au sortir de ce forum, bénéficier de nouveaux programmes, de nouvelles initiatives, de nouveaux projets, qui leur permettront d'améliorer l'accès à l'eau et à l'assainissement, qui sont des droits humains, mais aussi à l'eau productive, pour l'élevage, pour l'agriculture.

Ce forum est organisé par le Conseil mondial de l'eau, qui est une émanation du secteur privé et des multinationales, et l'ONU n'est qu'un simple partenaire. Ce sujet capital de l'eau ne devrait-il pas être directement pris en charge par les Nations unies, comme c'est le cas, par exemple, pour le climat, la biodiversité et la désertification ?

Absolument, et c'est pourquoi le Sénégal entend faire du Forum une contribution majeure pour la préparation de la deuxième grande conférence mondiale [de l'ONU] sur l'eau, en 2023. La première avait eu lieu en 1977 à Mar del Plata. Cela traduit la volonté des Nations unies de reprendre en main cette question fondamentale, qui a aujourd'hui une dimension géopolitique particulière. C'est vrai que le Conseil mondial de l'eau a été à l'origine de ce forum. Mais il est aujourd'hui en train de s'ouvrir aux institutions publiques et académiques.

Pourtant,  des acteurs de la société civile contestent la légitimité du Forum mondial de l'eau et craignent la privatisation de cette ressource. En marge de ce forum, il y aura, comme à chaque édition, un forum alternatif mondial de l'eau, mené des ONG, des écologistes, des scientifiques. Que répondez-vous à leurs inquiétudes ?

C'est un point de vue que j'entends, que je respecte, mais je voudrais souligner que le forum de Dakar sera inclusif. Nous aurons un dialogue multi-acteurs avec la société civile qui est largement représentée dans le cadre du processus du forum. Il est évident qu'il ne s'agit pas pour nous qui travaillons pour asseoir la réalité du droit humain à l'eau de parler de privatisation de l'eau. On peut parler de privatisation de services d'eau. Mais la question de l'eau reste essentiellement pour nous une question de patrimoine mondial, national. En aucune manière, il ne peut être question pour nous au Sénégal d'organiser un débat qui pourrait laisser entendre que l'on est en train de faire la promotion de la privatisation d'une denrée aussi irremplaçable, aussi essentielle, aussi vitale que l'eau. D'après ce que j'ai lu et entendu, ce forum risque de rejoindre le nôtre. Nous voulons un forum historique et un forum qui se traduise par des réponses, des engagements. Nous attendons plus d'un millier de participants, toutes catégories confondues.

Le Forum mondial de l'eau est une marque détenue par ce Conseil et les pays qui l'hébergent à tour de rôle doivent payer des droits d'utilisation. Comment le forum de Dakar est-il financé et quelles sont les retombées économiques attendues par l'Etat sénégalais ?

Oui, le Sénégal a versé des droits d'utilisation. Il a aussi recueilli des compensations mais surtout des appuis. Il y a modalités de participation qui vont de la gratuité pour ceux qui ont les moyens les plus limités (les jeunes, les ruraux, la société civile) à des contributions facilitées pour les pays non OCDE et les délégations. L'État du Sénégal a pu compter sur la mobilisation de ses partenaires institutionnels.

Nous avons également mis en place un dispositif de sponsoring pour permettre aux différents acteurs de contribuer. Il  y aura aussi, comme cela s'est toujours fait dans ce genre d'événements, des inscriptions et une exposition. Tout cela va générer des ressources qui permettront de couvrir l'organisation de ce forum.

Un forum pour apporter des réponses concrètes, quotidiennes, aux populations qui en demandent. Il y a des solutions qui existent, elles ne sont pas toujours appliquées sur le terrain. L’eau est un sujet éminemment politique.

Forum mondial de l'eau : les organisateurs promettent un « forum des solutions »

Côte d’Ivoire : face aux Américains, Patrick Achi met l’accent sur l’investissement et la sécurité

Mis à jour le 21 mars 2022 à 18:14
 

 

Rencontre entre le secrétaire d’État américain, Antony Blinken (au premier plan, à gauche), et le Premier ministre ivoirien Patrick Achi (au premier plan, à droite, le 14 mars 2022, à Washington. © Freddie Everett/U.S. Department of State

 

Le Premier ministre ivoirien s’est rendu à Washington pour plaider en faveur d’une aide américaine accrue dans ces deux domaines, alors qu’Abidjan avance dans son programme de croissance inclusive, tirée par le secteur privé.

L’administration de Joe Biden a beau être focalisée sur l’invasion de l’Ukraine par la Russie, les États-Unis ne se désintéressent pas pour autant des réformes menées par le président Alassane Ouattara. Pour preuve, l’entrevue entre le secrétaire d’État américain, Antony Blinken, et le Premier ministre ivoirien, le 14 mars, à Washington. Patrick Achi a également rencontré le président de la commission des affaires étrangères de la Chambre des représentants, Gregory Meeks, ainsi que des représentants de la Banque mondiale, de la Millennium Challenge Corporation (MCC), de l’Export-Import Bank of the United States (Banque américaine d’import-export) et de la Chambre de commerce des États-Unis.

« J’ai eu le privilège de pouvoir rencontrer le secrétaire d’État Blinken et le [député] Meeks, même si le contexte global est vraiment tendu, comme vous le savez », a déclaré le dirigeant ivoirien lors d’un événement organisé par l’Africa Center de l’Atlantic Council, le 16 mars. « Nous avons pu passer en revue toutes les questions-clés qui intéressent le continent africain, ainsi que l’ensemble de la sous-région [de l’Afrique de l’Ouest], notamment celles liées à la sécurité et au développement. Et je pense que nous sommes parvenus à un accord commun selon lequel le continent doit être aidé et la sous-région, soutenue, non seulement sur les problématiques de sécurité, mais aussi sur celles de développement. »

Dans un tweet suivant leur rencontre, Anthony Blinken a noté que la Côte d’Ivoire était l’un des 28 pays africains à avoir condamné l’invasion de l’Ukraine par la Russie aux Nations unies au début du mois.

Objectif huit millions d’emplois créés

Le climat économique de la Côte d’Ivoire figurait en bonne place dans l’ordre du jour de Patrick Achi, alors que le pays cherche à retrouver sa place parmi les économies à la croissance la plus rapide du monde avant la pandémie de Covid. Le dirigeant ivoirien a déclaré que son gouvernement était déterminé à créer huit millions d’emplois et à faire accéder la majorité des Ivoiriens à la classe moyenne grâce au plan stratégique Côte d’Ivoire 2030, soulignant l’ambition du plus grand producteur de cacao au monde de remonter la chaîne de valeur de l’agroalimentaire vers la production de chocolat.

« Nous sommes [au] stade inférieur de cette chaîne, avec des employés qui font la partie la plus difficile du travail, mais qui sont ceux qui gagnent le moins d’argent simplement parce qu’ils ne transforment pas [la matière première] », a-t-il déclaré devant le Conseil atlantique. « Or c’est [dans la transformation] que se trouve la valeur ajoutée, c’est là que réside le revenu, c’est là que se situe la création d’emplois ».

Le secteur du cacao a constitué un point de discorde dans les relations bilatérales ivoiro-américaines, les sénateurs démocrates Sherrod Brown de l’Ohio et Ron Wyden de l’Oregon ayant exhorté, en 2019, le département de la Sécurité intérieure de leur pays à bloquer les importations de fèves ivoiriennes en raison d’informations faisant état d’enfants travaillant dans le secteur. Patrick Achi a reconnu la controverse, mais a déclaré que la croissance économique permettrait de mettre fin à cette pratique. Le Premier ministre ivoirien a également salué les récents efforts législatifs de son pays dans ce domaine.

« Nous avons pris des mesures pour arrêter le travail des enfants depuis quelques années maintenant », a-t-il déclaré en réponse à une question de The Africa Report/Jeune Afrique, lors de l’événement organisé par l’Atlantic Council. « Et cela a plutôt bien fonctionné. Nous avons adopté une loi qui rend obligatoire la scolarisation de tous les jeunes de moins de 16 ans. Donc où que vous résidiez, que ce soit [à la campagne] ou en zone urbaine, si vous avez moins de 16 ans, vous devez aller à l’école, vos parents doivent vous y envoyer, et vous n’avez aucune raison de vous trouver dans un champ. »

EN 2017, L’AGENCE MILLENNIUM CHALLENGE CORPORATION (MCC) A SIGNÉ UN ACCORD DE SUBVENTION DE 524 MILLIONS DE DOLLARS AVEC LE GOUVERNEMENT IVOIRIEN

Dans le cadre de sa visite, Patrick Achi s’est entretenu avec l’agence Millennium Challenge Corporation (MCC), qui a signé un accord de subvention de 524 millions de dollars avec le gouvernement ivoirien en 2017, axé sur l’amélioration des secteurs des transports et de l’éducation. Une enveloppe qui « devrait bénéficier à plus de 11 millions d’Ivoiriens, a expliqué le MCC à The Africa Report/Jeune Afrique, avec, au programme, la réhabilitation des routes, la modernisation du système de gestion du trafic urbain, la construction d’écoles ou encore la création de centres de formation pour l’enseignement technique et professionnel. »

Un porte-parole de l’agence MCC a ajouté que cette dernière évaluait la nécessité de prolonger le programme de subventions en raison des retards liés à la crise du Covid-19, comme l’instance l’a déjà fait pour des pays tels que le Bénin, le Maroc et le Niger.

 

 

Patrick Achi intervenant  devant l’Atlantic Council – un think-tank américain –, le 16 mars, à Washington. © Twitter/Patrick Achi

 

Patrick Achi intervenant devant l’Atlantic Council – un think-tank américain –, le 16 mars, à Washington. © Twitter/Patrick Achi

Assistance logistique et militaire

Outre les questions économiques, Patrick Achi a également évoqué la nécessité d’une assistance logistique et militaire américaine pour aider à défendre son pays contre les retombées du conflit au Sahel ainsi que de la piraterie dans le Golfe de Guinée.

« En ce qui concerne la question de la sécurité, il n’y a pas de doute : lorsque l’on veut développer son pays, on aspire à la paix et à la sécurité. C’est le premier facteur, je dirais, pour que les gens viennent y investir », a-t-il déclaré à The Africa Report/Jeune Afrique. « Dans ce contexte, les [pays] amis, comme les États-Unis ou la France, sont indispensables, et il faut voir avec eux comment ils peuvent vous aider à vous préparer […] à protéger votre pays de toute attaque venant d’où que ce soit. C’est ce que nous sommes venus faire ici. Et je pense que les gens ont reçu notre message à 100%. »