Justice et Paix

" Je suis homme, l'injustice envers d'autres hommes révolte mon coeur. Je suis homme, l'oppression indigne ma nature. Je suis homme, les cruautés contre un si grand nombre de mes semblables ne m'inspirent que de l'horreur. Je suis homme et ce que je voudrais que l'on fit pour me rendre la liberté, l'honneur, les liens sacrés de la famille, je veux le faire pour rendre aux fils de ces peuples l'honneur, la liberté, la dignité. " (Cardinal Lavigerie, Conférence sur l'esclavage africain, Rome, église du Gesù)

 

NOS ENGAGEMENTS POUR LA JUSTICE T LA PAIX
S'EXPRIMENT DE DIFFÉRENTES MANIÈRES :

En vivant proches des pauvres, partageant leur vie.
Dans les lieux de fractures sociales où la dignité n'est pas respectée.
Dans les communautés de base où chaque personne est responsable et travaille pour le bien commun.
Dans les forums internationaux pour que les décisions prises ne laissent personne en marge.

Dans cette rubrique, nous aborderons différents engagements des Missionnaires d'Afrique, en particulier notre présence auprès des enfants de la rue à Ouagadougou et la défense du monde paysan.

 

L’utilisation de l’étoile jaune ou la perte des repères dans une représentation politique en crise

L’apartheid a apporté sa plus haute expression historique, étatique, à un racisme systémique conjuguant deux logiques : tenir les Noirs à distance, ne pas vivre avec eux, marquer ainsi une différence irréductible, et les inférioriser, les exploiter dans les mines, les usines ou les champs. Le nazisme a fait de la haine des Juifs une politique d’État, là aussi, visant à détruire systématiquement ses victimes – un génocide, la Shoah. Le racisme et l’antisémitisme ont trouvé dans ces deux expériences majeures leur aboutissement spectaculaire.

Michel WieviorkaAuteurs historiques The Conversation France

Et voici que des manifestants hostiles à la stratégie sanitaire du gouvernement arborent l’étoile jaune, héritière de la rouelle et autres marques d’infamie antijudaïque, instrument de la politique criminelle des nazis et de leurs collaborateurs français. Qu’ils se disent victimes d’un apartheid. Et de surcroît, qu’ils comparent le régime français à la dictature chinoise, parlent de tyrannie, de coup d’État.

Ces formulations extrêmes circulaient sur les réseaux sociaux avant les manifestations du samedi 17 juillet dernier, où elles ont été reprises, y compris par quelques ténors d’extrême droite, ou autres. Elles expriment un faisceau d’inquiétudes et d’indignations qui tournent avec elles à une radicalité quelque peu surréaliste : alors que l’extrême droite française, hier maurrassienne et pétainiste, fut souvent antisémite et raciste, voici que des acteurs dont certains en relèvent ou en sont proches dénoncent l’antisémitisme et le racisme ! Eux aussi, à leur façon, sont dans la perte de sens et de repères.

Parmi les manifestants, et ceux qui se reconnaissent dans leur action, certains sont avant tout hostiles à la vaccination, qui est contraire à leurs convictions ; d’autres au passe sanitaire, où ils voient la mise en œuvre de discriminations immédiates, et, à plus long terme, celle d’un contrôle étatique généralisé, éventuellement au service de la finance pharmaceutique. Se mêle au rejet des mesures proprement sanitaires la critique du pouvoir, en général – une critique, qui n’est pas sans fondement quand elle vise sa communication décrite alors comme fallacieuse ou mensongère, qu’il s’agisse des masques, des tests, de la logistique de la vaccination, etc.

Comment se fait-il que des pans, certes minoritaires, de la population puissent inclure ainsi des protestataires dérivant au point de s’identifier aux victimes des pires crimes historiques ? Comment est-il possible que les mots, les repères perdent tout sens, toute mesure ? Que l’on puisse se référer ainsi à un passé terrifiant, et mettre sur le même plan des questions qui n’ont rien à voir, pour finalement banaliser l’horreur d’hier, instrumentaliser ce que les mots évoquent au service d’une contestation, abuser de l’histoire et des souffrances des millions de victimes du nazisme ou de l’apartheid ?

Contexte de peur et d’insécurité

Il faut d’abord rendre justice à ceux que révulsent ces comparaisons, et qui ont raison de rappeler ce que furent les drames historiques qui sont ainsi manipulés. Mais l’indignation ne suffit pas. Il faut aussi expliquer, ou tenter d’expliquer comment notre société a pu en arriver là.

Il est tentant alors de proposer un raisonnement général, à distance de l’évènement proprement dit, mais qui en apporterait le sens. De ce point de vue, l’appropriation abusive et excessive de la Shoah ou de l’apartheid s’inscrit dans un contexte de peur et de sentiment d’insécurité qui a été inauguré il y a près d’un demi-siècle, dans le reflux du mouvement étudiant et ouvrier de mai 68, et dont on peut dater l’émergence visible, dans l’espace public, avec le rapport Peyrefitte de 1977, « Réponses à la violence ». La France ébauchait alors, après les Trente Glorieuses, une longue mutation au cours de laquelle la confiance dans la science et dans l’idée de progrès s’émousse, où « le présentisme » l’emporte sur le sens de l’histoire, passée et à venir, et où il faut bien apprendre à vivre avec le risque, c’est-à-dire les menaces que constituent des évènements non ou peu prédictibles, dont la probabilité qu’ils surviennent est faible, mais dont l’impact, s’ils se réalisent, est considérable : catastrophe industrielle, nucléaire, volcanique, terrorisme, épidémie…

Un système politique moins adapté

En même temps que s’esquissait l’entrée dans une ère nouvelle, le système politique est devenu de moins en moins adapté, la représentation politique est entrée en crise – on l’a vu avec les abstentions aux élections régionales et départementales de juin 2021 -, les médiations syndicales, associatives se sont affaiblies, et le système institutionnel français a perdu de sa superbe : depuis le milieu des années 80, il n’est question que de crise du modèle d’intégration républicain, dont les promoteurs sont sur la défensive. On découvre que notre éducation nationale ou nos universités sont loin d’être en pointe à l’échelle de la planète, que le pays s’est massivement désindustrialisé, qu’il n’a pas été capable de proposer un vaccin contre la Covid-19.

Le doute et la méfiance s’installent, les fake news frayent leur chemin et réseaux sociaux et chaînes d’information en continu aidant, la confiance vis-à-vis des élites politiques se réduit.

La pandémie nous a rappelé le tragique, elle n’a pas nécessairement réarticulé l’expérience vécue, et en particulier celle des dirigeants, avec l’Histoire – ils n’ont connu ni la Deuxième Guerre mondiale, et la Résistance (ou la collaboration), ni les guerres de décolonisation, et il en est de même pour la plupart des Français : ils laissent faire les manipulateurs de l’histoire faute d’en avoir l’expérience vécue. Ils laissent évoquer les pires épreuves de la part de ceux qui pour se faire entendre essaient de frapper l’imagination à coups d’exceptionnel, de sensationnel, de démesuré.

Ce type d’explication permet de contextualiser les évènements récents, mais présente vite ses limites : on parlait ainsi avant les manifestations de samedi dernier, dont ce discours ne peut expliquer vraiment le contenu et la forme.

Le pouvoir et le peuple

Puisque les manifestants critiquent, sans nuance, le gouvernement, les dérapages doivent être lus aussi, au-delà des généralités, sous l’angle du rapport, ou plutôt du non-rapport qui s’est instauré entre le pouvoir et des pans entiers de la population. Ce qui implique de procéder de l’État vers la société, et de la société vers l’État.

Jamais depuis l’avènement de la Ve République les médiations qui permettent au pouvoir gouvernemental d’être en relation avec les attentes et les demandes sociales, qu’elles soient ou non collectives et structurées, n’ont été aussi inconsistantes. Emmanuel Macron a poussé très loin la logique qui consiste à se passer des partis, des syndicats, des associations, des « corps intermédiaires », ce qui a créé un vide entre le sommet de l’État, et d’éventuelles contestations ou protestations.

Dès lors fleurit d’en haut la tentation de la démocratie participative, qui débouche sur des expériences décevantes, grand débat, conférence citoyenne sur le climat, par exemple. Tout ceci favorise la méfiance, et même si la politique sanitaire française se révèle finalement comme convenable, des pans entiers de l’opinion en notent surtout les carences, les erreurs, la communication défaillante. Du côté du pouvoir, il faut admettre qu’il n’a pas créé les conditions d’un retour à la confiance.

Les contestations contemporaines les plus importantes présentent plusieurs caractéristiques qui les distinguent fondamentalement de celles d’hier. Elles sont lourdes d’une subjectivité éventuellement exacerbée ; chacun veut être maître de sa pensée et de son corps, sans nécessairement accepter ce qui en démocratie est la contrepartie de la reconnaissance du sujet personnel : le fait d’accepter pour autrui ce que l’on exige pour soi-même, et donc aussi d’accepter des règles collectives de la vie en société.

Quand elles véhiculent des dimensions culturelles, elles ont un fort tropisme identitaire pouvant aboutir à des logiques de radicalisation, et d’entre-soi, de fermeture du groupe sur lui-même. De telles logiques sont elles-mêmes propices à la naturalisation de la culture et des identités, et peuvent conduire à « la deep ecology » ou à la tentation de la guerre par exemple des races ou des genres. Elles peuvent aussi comporter un fort substrat religieux.

Enfin, les contestations récentes, on l’a vu avec les « gilets jaunes », peuvent être « horizontales », rétives à toute inscription dans un espace politique classique, à tout traitement politique qui ne serait pas obtenu directement, face au pouvoir ; elles résistent à toute structuration, ne veulent ni leader ni organisation. Ce qui encourage le tout ou rien, le jusqu’au-boutisme, et la pénétration de la violence.

Une société désarticulée ?

À bien des égards, les manifestations de samedi 17 juillet relèvent de ces caractéristiques : référence exacerbée à la subjectivité personnelle, et au corps ; radicalisation et excès ; horizontalité, malgré la présence de quelques personnalités notamment d’extrême droite.

De haut en bas, comme de bas en haut, tout converge pour façonner l’image d’une société qui n’est pas articulée à l’État, d’un État qui ne fait rien pour construire des médiations vers la société.

Se profilent dans la défiance mutuelle, dès lors d’une part des menaces liberticides, que bien des juristes, avocats et magistrats constatent, en même temps que certains parlementaires, et d’autre part des excès langagiers préoccupants, et choquants.

Les excès occupent l’espace que désertent la confiance, les médiations et la capacité de conduire des débats argumentés.

Michel Wieviorka, Sociologue, Auteurs historiques The Conversation France

This article is republished from The Conversation under a Creative Commons license. Read the original article.

Edem d’Almeida, patron d'Africa Global Recycling, valorise les déchets du Togo

Edem d'Almeida, fondateur d'Africa Global Recycling.
Edem d'Almeida, fondateur d'Africa Global Recycling. © AGR

Le portrait d'Aujourd'hui l'économie est cette semaine consacré à Edem d’Almeida. Ce Franco-Togolais dirige Africa Global Recycling, une entreprise de collecte et de valorisation des déchets qu’il a créée. D'abord active au Togo, il ambitionne d’en faire une entreprise panafricaine. 

Affable et accessible, Edem d’Almeida a découvert le concept du développement durable après son installation en France au début des années 2000. Il investit à l’époque dans la gestion de projets associatifs et entrepreneuriaux. Mais c’est en 2005 qu’il se passionne pour le secteur du déchet, après avoir été embauché chez Suez Environnement, où il s’occupe du développement commercial et de l’approvisionnement du centre de valorisation en déchets industriels dans l’est de la France. Il change d’employeur après trois ans et devient responsable du pôle filières et négoce de déchets dans son nouveau groupe. Il se met à son compte en 2011, toujours dans le secteur du négoce international de déchets recyclables et de matières premières secondaires.

2 000 tonnes de déchets traités en 2020

Deux ans plus tard, Edem d’Almeida crée Africa Global Recycling pour, dans un premier temps, apporter sa part dans l’assainissement de la capitale togolaise : « Nous n’avons pas la prétention aujourd’hui de répondre à tous les défis. C’est d’abord la démonstration que l’approche que nous avons traditionnellement des déchets, sur l’aspect uniquement de la collecte à la décharge, n’est pas tenable pour nos pays, et que cela doit représenter des opportunités de développement, de création d’emplois et de filières pour l’industrie. »

Bilan de l’année 2020 : 2 000 tonnes de déchets traités dans la capitale togolaise. Edem d’Almeida en est fier. Il explique « modestement » que cette quantité est sortie des décharges de Lomé, où il existe toujours des décharges sauvages. Le Franco-Togolais, qui n’a pas la prétention de résoudre tout le problème des déchets, invite d’autres personnes à s’intéresser à cette filière.

Une activité qui requiert de la persévérance

Aujourd’hui, Edem d’Almeida est lui-même surpris par l’évolution de l’activité qu’il a créée il y a huit ans : « En 2013, je n’avais pas l’ambition de venir m’installer au Togo, je préférais travailler de la France, mais avoir cette satisfaction de faire quelque chose et d’entreprendre. Et en 2015, en plein questionnement sur le retour définitif ou l’arrêt même de l’activité au Togo, parce que les banques ne suivent pas, parce que les industriels ne veulent pas payer pour faire enlever leurs déchets, je me suis dit que ce serait un gâchis de ne pas me battre et de montrer que c’était possible. Je suis très content de ce que nous avons aujourd’hui. »

L’ambition du Franco-Togolais est d’étendre ses activités dans d’autres pays africains. Mais en attendant, Edem d’Almeida s’intéresse à d’autres villes du Togo, à commencer par Aneho, l’ancienne capitale du pays. Après avoir entendu parler d’Edem d’Almeida, le maire d’Aneho, Alexis Aquereburu, a tenu à le rencontrer. Il adhère à la démarche du patron d’AGR : « C’est un excellent professionnel, entrepreneur, créateur d’idées et surtout très volontaire. Parce que la gestion des déchets est une activité particulière et la relation que la population a avec les déchets est complexe. Il a le mérite de rapprocher les réflexions sur les déchets de la population, en ce sens que nous avons commencé un travail pédagogique au niveau des écoles, notamment dans le cadre du projet "Moi je trie". On vient aussi de mettre des éco-box dans la ville d’Aneho, qui servent à échanger des déchets, comme des sachets plastiques, contre des crédits de communication. » 

Laisser une empreinte

Edem d’Almeida ne se contente pas de récupérer les déchets et de les valoriser dans le seul but de développer son entreprise. Il veut aussi laisser une empreinte sur les jeunes générations : « Si je prends le cas du Togo, nous sommes présents dans les écoles avec 30 000 élèves bénéficiaires de nos programmes d’éducation aujourd’hui, mais également sur la possibilité de générer des revenus complémentaires pour bon nombre d’acteurs. N’importe qui a la capacité d’apporter son déchet et il est rémunéré. »

Huit ans après le début de son activité, Edem d’Almeida n’a toujours pas réussi à avoir un crédit auprès d’une banque togolaise. Mais cela ne l’empêche pas de poursuivre son objectif. Il parle volontiers avec passion de ce qu’il fait lorsqu’il est invité dans des conférences et des forums internationaux.

Il a déjà reçu plusieurs récompenses, comme le Prix international de la francophonie pour la jeunesse et les emplois Verts, c’était en 2016 à Moncton au Canada.

«En pourcentage, c'est l'Afrique qui compte le plus de personnes affectées par la faim»

En mai 2021, l'index du prix de la nourriture calculé mensuellement par la FAO était en augmentation pour le douzième mois consécutif, atteignant ainsi son plus haut niveau depuis septembre 2011. En cause, l'augmentation du prix des huiles végétales, du sucre et des céréales (photo d'illustration).
En mai 2021, l'index du prix de la nourriture calculé mensuellement par la FAO était en augmentation pour le douzième mois consécutif, atteignant ainsi son plus haut niveau depuis septembre 2011. En cause, l'augmentation du prix des huiles végétales, du sucre et des céréales (photo d'illustration). © AFP - Ishara S. Kodikara

Lundi 12 juillet, l'ONU a présenté un rapport alertant sur la nette augmentation de la faim dans le monde. La pandémie de Covid-19 et les confinements ainsi que la hausse du prix de certaines denrées qu'elle a entraînée a exacerbé cette situation. Le rapport indique par ailleurs que la faim progresse plus vite en Afrique qu'ailleurs dans le monde. Dominique Burgeon, directeur à Genève du bureau de liaison de la FAO (Organisation pour l’alimentation et l’agriculture) est l'invité de RFI.

RFI : L’objectif de l’ONU d’éradiquer la faim dans le monde d’ici à 2030 ne sera pas atteint. C’est désormais une certitude. La faim chronique touche 10% de la population mondiale. Comment se situe l’Afrique dans ces sombres statistiques ?

Dominique Burgeon : Si en terme de nombre de personnes, c’est effectivement l’Asie qui a le plus de personnes qui sont confrontées à la faim, en matière de pourcentage, c’est malheureusement l’Afrique avec 21% de la population qui compte le plus de personnes affectées par la faim. 21% de la population, 282 millions de personnes sur un nombre total de 768 millions de personnes en 2020 qui étaient confrontées à la faim.

Alors comment expliquer cette progression de la faim dans le monde, et en particulier en Afrique ?

En fait, la tendance globale était à la diminution jusque 2014-2015. Depuis 2015, malheureusement, nous voyons que cette tendance s’est inversée et que le nombre de personnes confrontées à la faim continue à augmenter, avec une augmentation bien plus forte qui a été enregistrée au cours de l’année 2019 liée en particulier aux conséquences indirectes de la pandémie du Covid-19.

Mais en matière de paramètres, on voit qu’on a malheureusement les conflits, les événements climatiques extrêmes, les catastrophes naturelles et les chocs économiques lesquels viennent s’accumuler sur un terreau de grande pauvreté et d’inégalité. Tout cela fait qu’effectivement, on a eu un renversement de cette tendance avec une augmentation forte au cours de la dernière année liée au Covid-19 et, malheureusement, de nouveau, une augmentation qui n’a pas été uniforme entre les divers continents et entre les différents pays.

On voit qu’en Afrique, on a une augmentation de 3%, alors qu’en Amérique latine, on a une augmentation de 2% et en Asie, une augmentation d’un peu plus de 1% du nombre de personnes confrontées à la faim en 2019. Donc, effectivement, on voit des grandes disparités qui ont trait aux chocs auxquels les pays sont confrontés, et à leur capacité d’absorber ces chocs et d’appuyer leurs populations pour qu’elles ne tombent pas dans cette situation d’insécurité alimentaire et de faim.

► À lire aussi : Le nombre de gens qui ont faim dans le monde a considérablement augmenté en 2020

Et sur le terrain, comment cela se traduit-il pour les populations ?

C’est vrai qu’on peut dire que le terme de « prévalence de la sous-alimentation » est un terme très technique, mais concrètement qu’est-ce que cela veut dire ? Cela veut dire que les personnes n’ont pas accès à une alimentation de qualité en quantité suffisante, de manière stable, au cours de l’année afin de leur permettre de conduire une vie saine et productive.

Donc, cela veut dire en gros que, quand elles ont accès à une alimentation, c’est souvent une alimentation qui est très peu diversifiée. Et quand elles sont confrontées à des chocs - on parlait des conflits et des extrêmes climatiques, etc. -, on voit que malheureusement, et à chaque fois, cela complique leur capacité à accéder à une alimentation et qu’elles coupent sur la quantité, sur la qualité pour parfois arriver.

Et malheureusement on voit sur le continent africain qu’il y a beaucoup de crises alimentaires dans des pays comme la République démocratique du Congo qui est en matière d’insécurité alimentaire aigüe la plus grande crise alimentaire au monde, où on a le plus grand nombre de personnes qui sont en insécurité alimentaire aigüe, on voit que si on ne parvient pas à fournir de l’aide humanitaire, mais aussi très vite à enclencher le processus de développement, cela pourrait conduire à des situations de famine.

Il y a des gens qui meurent de faim aujourd’hui en Afrique ?

Il y a des gens qui meurent de faim en Afrique et des conséquences de la faim. Quand vous avez faim, votre capacité à résister aux maladies est beaucoup plus faible. Le problème, c’est qu’on ne doit pas attendre qu’il y ait une déclaration de famine dans un pays pour effectivement agir. Il faut agir bien plus tôt, quand on montre des tendances graves par rapport au nombre de personnes en insécurité alimentaire aigüe.

Quelles sont les solutions que vous proposez à ces problèmes de faim chronique ?

Le rapport met en particulier en évidence six voies possibles vers la transformation des systèmes alimentaires qui ont trait à l’intégration de l’action humanitaire des politiques de développement et de consolidation de la paix, le renforcement de la résilience face au changement climatique et face à l’adversité climatique, aussi qui promeut des interventions le long de la chaine d’approvisionnement en vue de réduire les coûts des aliments nutritifs, de promouvoir des stratégies afin de lutter contre la pauvreté des inégalités structurelles, et enfin de travailler sur le comportement des consommateurs.

Et donc, tout cela, ce sont des solutions qui sont envisagées dans ce rapport. Il est évident qu’il ne s’agit pas de les adopter tels quels, dans leur ensemble pour tous les pays, mais bien d’avoir une analyse détaillée de la situation pays par pays, en appuyant les autorités à faire cette analyse afin de pouvoir proposer des changements politiques et des portefeuilles d’investissement qui seraient capables d’au moins d’inverser la tendance d’ici 2030.

 À réécouter : Journée mondiale contre la faim: la faim gagne du terrain dans le monde (Priorité Santé)

Dans son rapport 2021, la FAO alerte sur un emballement de la faim dans le monde
Dans son rapport 2021, la FAO alerte sur un emballement de la faim dans le monde © FAO
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Dans la communauté des pays lusophones, la Guinée équatoriale sommée d'abolir la peine capitale

Malabo, capitale de la Guinée équatoriale.
Malabo, capitale de la Guinée équatoriale. Wikimedia Commons/Frokor

Le sommet de la Communauté des pays de langue portugaise, dont la France est un membre observateur, se termine ce samedi dans la capitale angolaise. Dans les couloirs, une des questions épineuses reste la peine de mort qui n’a pas encore été abolie par la Guinée équatoriale. 

Avec notre envoyée spéciale à Luanda, Carina Branco

L'Angola prend aujourd’hui la présidence tournante de cette organisation lusophone, composée de 9 États-membres, dont la Guinée équatoriale qui y a adhéré en 2014. Les chefs d’États et de gouvernements des pays membres se réunissent aujourd’hui et la question de la peine de mort reste pourtant en suspens puisque Malabo ne l'a pas encore abolie.

C’est en effet une promesse pas encore tenue et les pays lusophones mettent la pression. La Guinée équatoriale avait pourtant promis d’en finir avec la peine de mort quand elle a intégré l'organisation. C’était même une condition pour son adhésion. Mais pour l’instant il n’y a qu’un moratoire. Le président portugais, Marcelo Rebelo de Sousa, exige le respect des engagements et des valeurs de la communauté. « Nous sommes très déterminés pour convaincre qu’il est nécessaire que les autres pays frères comprennent  l'importance de ces principes et finissent par les appliquer. »

En réponse, le ministre équato-guinéen des Affaires étrangères, Simeón Esono, promet que la peine de mort sera bientôt abolie. « C'est un processus irréversible. Le pays s'est engagé dans ce processus et l'honorera, mais en Guinée équatoriale la peine de mort n’est pas appliquée dans les faits, personne n'est tué. »

Cette question reste délicate aujourd’hui. En 2018, la Guinée équatoriale voulait se porter candidate à la présidence tournante. Elle ne peut le faire tant que la peine de mort n’est pas abolie à Malabo.

Guinée: liberté provisoire pour quatre opposants

Les forces de l'ordre face à des Guinéens opposés à la réélection du président Alpha Condé, dans les rues de Conakry le 21 octobre 2020. (photo d'illustration)
Les forces de l'ordre face à des Guinéens opposés à la réélection du président Alpha Condé, dans les rues de Conakry le 21 octobre 2020. (photo d'illustration) AP - Sadak Souici

Quatre opposant guinéens – d’importants cadres de l'UFDG de Cellou Dalein Diallo incarcérés depuis plusieurs mois – bénéficieront, ce samedi 17 juillet, d’une liberté provisoire surveillée. Une liberté qui leur permettra de se faire soigner, selon un communiqué de l’administration pénitentiaire guinéenne lu sur les médias d’Etat guinéens.

Avec notre correspondant à ConakryMouctar Bah 

Arrêtés en novembre 2020, quelques semaines après l’élection présidentielle contestée par l’opposition et une partie de la société civile, ces quatre responsables majeurs du principal parti d’opposition bénéficient d’une liberté conditionnelle.

La principale condition consiste à ne pas quitter la capitale, Conakry, sans autorisation préalable de l’administration pénitentiaire.

Ils étaient tous hospitalisés pour des problèmes de santé divers depuis plusieurs semaines, dans un hôpital de la capitale guinéenne. Ils rejoindront normalement leurs domiciles respectifs ce samedi.

Ibrahima Chérif Bah, Abdoulaye Bah, Cellou Baldé et Ousmane Gaoual Diallo étaient poursuivis pour, entre autres, «trouble à l'Etat par la dévastation et le pillage, atteinte aux institutions de la République, participation à un mouvement insurrectionnel, diffusion et la mise à disposition d'autrui de données de nature à troubler l'ordre public », des charges que leur défense qualifie de fallacieuses et ne relevant que de l’imaginaire. Pour le moment, la date de leur procès n’est pas connue.

Restent toujours en prison l'opposant Etienne Soropogui et plusieurs centaines de militants, selon l'opposition.

À lire aussi: Guinée: deux arrestations après la création d'une alliance politique d'opposition