Justice et Paix

" Je suis homme, l'injustice envers d'autres hommes révolte mon coeur. Je suis homme, l'oppression indigne ma nature. Je suis homme, les cruautés contre un si grand nombre de mes semblables ne m'inspirent que de l'horreur. Je suis homme et ce que je voudrais que l'on fit pour me rendre la liberté, l'honneur, les liens sacrés de la famille, je veux le faire pour rendre aux fils de ces peuples l'honneur, la liberté, la dignité. " (Cardinal Lavigerie, Conférence sur l'esclavage africain, Rome, église du Gesù)

 

NOS ENGAGEMENTS POUR LA JUSTICE T LA PAIX
S'EXPRIMENT DE DIFFÉRENTES MANIÈRES :

En vivant proches des pauvres, partageant leur vie.
Dans les lieux de fractures sociales où la dignité n'est pas respectée.
Dans les communautés de base où chaque personne est responsable et travaille pour le bien commun.
Dans les forums internationaux pour que les décisions prises ne laissent personne en marge.

Dans cette rubrique, nous aborderons différents engagements des Missionnaires d'Afrique, en particulier notre présence auprès des enfants de la rue à Ouagadougou et la défense du monde paysan.

 

Nouvelle jeunesse pour les fonds de pension africains

Renflouées grâce à plusieurs réformes des régimes de pension, les fonds de retraites affichent de nouvelles ambitions, tant dans leurs stratégies d’investissements que dans l’extension de la couverture sociale des travailleurs.

Mis à jour le 2 juin 2022 à 15:04
 

 

La Conférence interafricaine de la prévoyance sociale (Cipres) rassemble les caisses de retraite de seize pays africains. Ici, son siège, à Lomé, au Togo. © FDIMPACT.

 

La gestation a été complexe, mais la naissance s’est déroulée sans difficulté. À la fin d’avril, le Fonds d’investissement africain (FIA) a obtenu son agrément auprès de la Financial Services Commission, régulateur financier de Maurice, où il est enregistré. En préparation depuis 2016 à l’initiative de la Conférence internationale de la prévoyance sociale (Cipres), qui rassemble les caisses de retraites de seize pays africains, ce fonds doit récolter et investir une partie de leurs réserves, dans l’ensemble des pays de la zone et à travers une très large gamme d’actifs (finance, agro-industrie, télécommunications).

Le projet particulièrement complexe – 16 pays, 25 institutions et cinq zones monétaires – est conseillé par le cabinet Finactu, fondé et dirigé par Denis Chemillier-Gendreau. « Le FIA a reçu un engagement d’investissement de plus de 50 milliards de F CFA  [76 millions d’euros] et vise un objectif de 150 milliards de F CFA d’actifs sous gestion à moyen terme pour sa première levée de fonds », expliquent ses promoteurs. Le nouveau fonds d’investissement doit permettre « une meilleure sécurisation et un meilleur rendement » des réserves de sorte à assurer aux caisses de retraite « un taux d’intérêt au moins égal au meilleur taux du marché » selon la Cipres, dont la secrétaire exécutive est la Camerounaise Cécile Gernique Bouba Djukam.

Prise de conscience

La création du FIA découle d’une prise de conscience de l’impasse vers laquelle nombre de fonds de retraite africains se dirigeaient ces dernières années. « Dans la zone Cipres, une grande partie des ressources à long et moyen terme des établissements bancaires proviennent des organismes de prévoyance sociale », selon le régulateur panafricain, qui regrette qu’en dépit de ce poids les caisses de retraite « restent des acteurs passifs » dans l’utilisation de leurs fonds.

Plus grave, estime l’institution, l’essentiel des placements réalisés par ces structures sont « des dépôts à terme [et] accessoirement des souscriptions d’obligations ». Au manque de diversification s’ajoutent « des taux de rentabilité peu rémunérateurs qui oscillent entre 1 % et 6 % ». Pour ne rien arranger, les « investissements lourds » réalisés par ces caisses de retraite dans le secteur immobilier « ont occasionné des déficits qui ont notablement érodé les réserves de certaines institutions ».

LE TAUX MOYEN DE LA POPULATION ACTIVE AFRICAINE COUVERTE PAR UN RÉGIME DE PENSION EST INFÉRIEUR À 15 %

Le FIA participe à la résolution de ce problème. Le pilotage a été confié à l’Ivoirien Youssouf Traoré-Kouao, formé en économie et en assurances en France et passé par le Royaume-Uni, qui conseillait le Cipres sur ce projet depuis 2020. L’équipe de gestion sera basée à Abidjan. L’existence même de cette structure est un signe du chemin parcouru depuis une dizaine d’années par les caisses de retraite africaines. Au début des années 2010, la plupart d’entre elles étaient gravement déficitaires dans la région – plusieurs le demeurent.

Adopter une vision long-termiste

Entre 2005 et 2011, la CNPS ivoirienne avait accumulé 200 milliards de F CFA de déficit, aime à rappeler Charles Kouassi, son actuel directeur général. À la suite d’une réforme du régime de pension mise en œuvre par le président Alassane Ouattara (rallongement de l’âge de départ à la retraite, hausse des taux de cotisation…), les finances de l’institution, comme celles de sa consœur dévolue au secteur public, la CGRAE, sont au beau fixe. La CNPS engendre chaque année plus de 100 milliards de F CFA d’excédents (cotisations supérieures aux paiements de retraite) et son portefeuille financier de plus de 500 milliards de F CFA à la fin de 2020. Fin 2021, Charles Kouassi a annoncé l’objectif de 2 000 milliards de F CFA en 2030.

« Avec le passage du déficit à l’excédent, le métier des caisses de retraite change », explique Denis Chemillier-Gendreau, dont le cabinet a conseillé plusieurs de ces institutions sur le continent. « Il faut se transformer, avoir une vision de très long terme et s’assurer que le portefeuille d’actifs permettra de répondre aux besoins futurs des cotisants », complète cet expert. Selon lui, la CNPS a su adopter cet « état d’esprit différent », renforçant ses équipes, sa structure IT et surtout en adoptant « une démarche de gestion actifs/passifs », autrement dit un pilotage stratégique, impliquant gestion des risques et planification active et de long terme.

Aussi, la CNPS et plusieurs de ses consœurs vont, chaque fois davantage, au-delà des investissements dans les titres obligataires publics. La caisse de retraite ivoirienne contrôle près de 20 % respectivement de NSIA Banque Côte d’Ivoire, de la Banque nationale d’investissement et de Bridge Bank, à Abidjan. Elle contrôle également 4,7 % du gestionnaire de services publics ouest-africains Eranove. Selon son DG, les revenus tirés de ces investissements ont atteint 26 milliards de F CFA en 2021 contre 1 milliard en 2012. Ils couvrent aujourd’hui toute la masse salariale.

Pénurie de titres investissables

Cette appétence nouvelle pour l’investissement encourage d’ailleurs les fonds – encouragés par certains États – à développer des régimes complémentaires de pensions par capitalisation. En Côte d’Ivoire, la CGRAE comme la CNPS ont lancé au cours des derniers mois de tels régimes. La caisse de retraite privée travaille d’arrache-pied à un ambitieux programme d’enrôlement au sein d’un régime de pension des travailleurs non-salariés (9 millions en Côte d’Ivoire, contre environ 800 000 affiliés à la CNPS). Une avancée nécessaire alors qu’à peine 13 % à 15 % de la population active en Afrique est couverte par un régime de pension, expliquait en avril Jaqueline Irving, économiste à IFC (filiale de la Banque mondiale dévolue au secteur privé) durant un webinaire organisé par Africa CEO Forum*. L’experte a pointé les progrès réalisés dans certains pays comme le Kenya, où ce taux de couverture a crû de 15 % à 20 % entre 2015 et 2019, grâce au volontarisme des autorités, des régulateurs et des gestionnaires de fonds.

Ce nouvel activisme et ces ambitions sont souvent limités, pointe Jacqueline Irving, par le manque de produits d’investissement locaux adaptés à leurs besoins, notamment en termes de maturité. Une « pénurie de titres investissables » qui s’explique par le fait que « les gestionnaires d’actifs approchent les fonds avec des produits prêts à l’emploi », sans consultation préalable. « Sur les marchés où les fonds de pension sont engagés de manière active avec les banquiers d’affaires locaux à un stade précoce du développement des produits d’investissements, ces derniers sont susceptibles de mieux répondre aux besoins des investisseurs », a complété l’experte d’IFC.

« On commence à avoir des acteurs importants dans la gestion et l’investissement dans la région », tempère Denis Chemillier-Gendreau. « Il revient aux fonds de retraite d’organiser des appels d’offres, de mettre ces acteurs en concurrence pour qu’ils gèrent ces ressources. Et se concentrer sur leur métier et devenir un investisseur institutionnel », recommande le président de Finactu. Reste à savoir si ces messages seront entendus par les sociétés de gestion d’actifs, banques d’investissements et régulateurs africains.

*Africa CEO Forum est affilié à Jeune Afrique Media Group.

Gaz, pétrole, charbon : l’Afrique peut-elle désamorcer ses « bombes climatiques » ?

Quatre cent vingt-cinq mégaprojets d’extraction d’énergie fossile risquent de faire capoter les maigres espoirs d’éviter un chaos climatique. Pour l’Afrique, qui n’est responsable que d’une infime part des émissions de gaz à effet de serre et dont l’urgence est au développement, arrêter ces projets n’est pas forcément une priorité. Décryptage en infographies.

Mis à jour le 2 juin 2022 à 19:41


Site de Hassi Messaoud dans la province d’Ouargla, Sahara algérien, exploité par la Sonatrach. © Photomontage JA / J-F ROLLINGER / ONLY WORLD / Only France via AFP

 

Nouvelles mines de charbon en Afrique australe, gigantesque projet gazier dans le bassin du Rovuma, au Mozambique, gisements de pétrole dans le désert libyen… Vingt-deux projets géants d’extraction de ressources fossiles ont été identifiés, sur le continent, par la revue Energy Policy comme étant des « bombes climatiques ». Leur point commun ? Ils peuvent chacun potentiellement émettre plus d’une gigatonne de CO2 durant leur existence, soit l’équivalent de ce que le continent entier a émis en dioxyde de carbone au cours de la seule année 2019.

Publiée à la mi-mai, cette étude de la revue scientifique américaine contribue à déstabiliser un peu plus le marché international de l’énergie, déjà affecté par une « guerre du gaz » qui se joue en Europe et dans laquelle l’Afrique compte tirer son épingle du jeu en hâtant la mise en œuvre de projets dans les énergies fossiles pour les substituer à l’offre russe.

Dans ce contexte, le projet de gazoduc, long de 5 660 km, entre le Nigeria et le Maroc a franchi une étape décisive, ce 1er juin.

425 « bombes carbones »

Grâce aux données de Rystad Energy (une société d’analyse indépendante de l’industrie pétrolière et gazière) et de l’ONG Global Monitor Energy, les chercheurs ont repéré 425 projets d’exploitation de pétrole, de gaz et de charbon, dont l’extraction n’a pas commencé pour 40% d’entre eux, et qui à eux seuls vont potentiellement rejeter 1 182,3 gigatonnes de CO2. C’est plus que le double du budget d’émissions de carbone qu’il reste à la planète pour limiter le réchauffement à 1,5°C.

Ce constat s’ajoute à celui déjà dressé par l’association Leave it in the Ground, qui préconise que 84% des réserves fossiles identifiées dans le monde restent enfouies pour le bien des générations futures.

Se développer, sans creuser ?

Si l’Afrique fait office de bon élève comparé à la Chine et ses 141 « bombes climatiques », de nombreux projets controversés, comme le pipeline chauffé EACOP en Ouganda (sur lequel travaille TotalEnergies) ou les récentes découvertes en Namibie n’ont pas été pris en compte dans l’étude et pourraient, à terme, aggraver la situation. Surtout, ces révélations mettent une fois de plus les gouvernements du continent face à un dilemme : comment se développer… sans creuser ou forer.

Cette « injustice climatique » est souvent dénoncée, notamment par le chef de l’État sénégalais, Macky Sall, qui assure en ce moment la présidence tournante de l’Union africaine. Il a récemment plaidé pour que les pays africains, qui n’ont jusqu’ici que très peu profité de leurs immenses ressources et subissent de plein fouet les conséquences du réchauffement climatique, se voient donner une sorte de passe-droit « extractif ».

De son côté, le Congo-Brazzaville se dit prêt à sanctuariser la partie de la forêt du bassin Congo qui lui appartient ainsi que ses tourbières (elles abriteraient des riches réserves d’hydrocarbures), mais pas sans contreparties financières…

Où se trouvent ces fameuses « bombes » ? Quelle attitude adoptent les pays du continent ? Décryptage en infographies.

Niger: la situation sécuritaire s'aggrave dans le Tillabéri, alerte Ocha

 tilaberi

La situation sécuritaire s'aggrave dans le Tillabéri, cette région dans le sud-ouest du Niger, à la frontière avec le Mali et le Burkina Faso, selon le dernier rapport d'Ocha, le Bureau de coordination des Affaires humanitaires des Nations unies

135 incidents violents ont été dénombrés depuis le début de l'année contre 93 pour l'ensemble de l'année 2021. « Ces attaques viennent en particulier, cette année, du Burkina, qui font des incursions au niveau du Niger, donc tout ce qui est de la rive droite du fleuve Niger – Gothèye, Todiri, Téra- qui est concernée », expliqueEmmanuel Gignac, le représentant du Haut-commissariat pour les réfugiés de l'ONU à Niamey.

Et cette hausse de l'insécurité provoque une grave crise humanitaire. « Depuis le début de l’année, il y a des mouvements de populations internes qui quittent leur village parce qu’ils ont été menacés. Plus de 58 000 personnes auraient été déplacées de cette façon-là », rajoute le représentant de l’ONU. Ocha estime que le plan de réponse humanitaire pour le Niger nécessitera, en 2022, une enveloppe de plus de 550 millions de dollars. À cette heure, seuls 10% de cette somme ont été fournis.

Selon Ocha, la situation est étroitement liée avec les développements dans la sous-région et le départ des forces françaises du Mali. « Au Mali, il y a eu aussi des mouvements de réfugiés du Mali vers le Niger suite à des combats entre des groupes terroristes et des groupes Touaregs. Du côté du Burkina, différents groupes islamistes s’opposent dans des combats territoriaux. Mais clairement, il y a une offensive qui vise aussi à déstabiliser des villages qui se trouvent dans la zone frontalière entre le Niger et le Burkina. Il y a également eu cette année, et c’est peut-être ce qui fait un petit peu la différence, des opérations conjointes entre les forces armées nigériennes et les forces armées burkinabè », conclut-il.

 

Algérie : le gaz, une arme à double tranchant

« Algérie-Maroc : la guerre du gaz » (1/3). Comme ce fut le cas dans les années 1970, Alger se sert aujourd’hui de cette ressource comme d’une arme diplomatique et géostratégique.

Mis à jour le 30 mai 2022 à 16:12

 

Le président algérien Abdelmajid Tebboune © Montage JA

 

Difficile, en Algérie, de distinguer la gestion des hydrocarbures des impératifs politiques. Déjà à la fin des années 1960, soit quelques années après l’indépendance, le président Houari Boumédiène, déterminé à obtenir la révision à la hausse des prix du pétrole et du gaz, entame un bras de fer mémorable avec la France pendant presque quatre ans avant de décider de nationaliser les hydrocarbures un certain 24 février 1971.

Depuis, cette journée est commémorée comme un événement qui marque l’histoire de l’Algérie indépendante. Un motif de fierté nationale, deux ans avant le choc pétrolier de 1973. Près de cinquante ans plus tard, le gaz redevient une arme diplomatique dont les autorités algériennes n’hésitent pas à user dans leur conflit avec le Maroc. Une arme d’autant plus efficace que le monde entier est à la recherche de fournisseurs alternatifs après le déclenchement de la guerre en Ukraine.

Le premier acte de cette stratégie s’est dessiné en août 2021, peu de temps après la rupture des relations diplomatiques entre Alger et Rabat et le rappel de l’ambassadeur algérien au Maroc. À couteaux tirés avec le voisin de l’ouest accusé de mener des « actions hostiles », le président Tebboune menace alors de ne pas renouveler le contrat du Gazoduc Maghreb-Europe (GME), qui dessert l’Espagne et le Portugal à travers le territoire marocain.

Force de frappe

Objectif : punir le Maroc et l’asphyxier économiquement dans la mesure où le gaz algérien acheminé en Espagne via le royaume permet à ce dernier d’assurer 97 % de ses besoins énergétiques. En outre, le prélèvement sur le droit de passage fournit au Trésor marocain une manne annuelle estimée à 50 millions de dollars.

Le deuxième acte intervient le 31 octobre lorsque le président algérien ordonne le non-renouvellement du contrat du GME, en service depuis 1996. Le royaume ne reçoit plus un seul mètre cube de gaz algérien.

Là encore, la décision de recourir à l’arme du gaz obéit à des considérations politiques. Le chef de l’État, qui claironne en septembre 2021 devant les caméras de la télévision nationale que l’Algérie a « une force de frappe que le monde entier reconnaît », justifie ainsi la fermeture du robinet gazier par les « pratiques à caractère hostile du Maroc ».

Depuis la fermeture en 1994 des frontières terrestres entre les deux pays et les multiples crises qui ont jalonné leurs relations, jamais les Algériens n’étaient allés jusqu’à couper le gaz aux Marocains. Et cette arme sera à nouveau utilisée dans la crise diplomatique qui oppose Alger et Madrid. En cause : encore et toujours la question du Sahara occidental.

En représailles à la décision de l’Espagne de soutenir le plan d’autonomie marocain pour le règlement de ce conflit qui dure depuis 1975, Alger décide de rappeler son ambassadeur en mars. Une première étape. Les pressions algériennes vont aller crescendo.

Menace

En avril, dans le contexte de la guerre en Ukraine, le PDG de Sonatrach affirme ne pas exclure de recalculer le prix du gaz livré à l’Espagne, très dépendante des approvisionnements en provenance d’Algérie.

Précision de taille : le patron du groupe pétrolier algérien n’a fait mention, dans cette éventuelle révision des prix, que du client espagnol sans faire référence aux autres partenaires européens comme la France ou l’Italie.

Décodé, le message est plutôt clair. Les Algériens ont les moyens de faire pression sur les Espagnols en guise de représailles à leur revirement sur la question du Sahara occidental.

Ils le font savoir officiellement le 27 avril par la voix du ministre de l’Énergie, Mohamed Arkab, lequel menace ses clients espagnols de rompre le contrat du gazoduc sous-marin Medgaz qui relie l’Algérie et l’Espagne sous prétexte que celle-ci rétrocéderait une partie de ses approvisionnements gaziers algériens au Maroc.

En dépit des assurances données par les Espagnols sur le fait que le gaz livré au Maroc n’est en aucune manière d’origine algérienne, la menace d’une rupture de ce contrat de 12 milliards d’euros et dont l’échéance arrive en 2032 plane toujours.

Lundi 9 mai, l’ambassadeur d’Algérie en Italie, Abdelkrim Touahria, indique que son pays est prêt « à couper l’approvisionnement en gaz naturel de l’Espagne dans le cas de non-respect des accords conclus entre Alger et Madrid ».

Gros risque

Quelle est la marge de manœuvre des autorités algériennes dans ce dossier hautement sensible ? Sont-elles capables d’aller jusqu’au bout de ces menaces et quel en serait le prix à payer ? En cas de rupture unilatérale de ce contrat, la bataille judiciaire risque d’être longue et pas forcément en faveur de Sonatrach.

« Il n’y a aucun fondement juridique pour arrêter de fournir du gaz aux Espagnols sous prétexte que ces derniers en cèdent une partie au Maroc, tranche Roger Carvalho, analyste et directeur du cabinet SPTEC, spécialisé dans les hydrocarbures en Afrique et au Moyen-Orient. Prouver que le gaz vendu aux Marocains est d’origine algérienne est quasiment impossible. »

Le gaz, arme à double tranchant ? Le risque de perdre cette bataille juridique et de régler une facture qui peut se chiffrer en milliards de dollars est donc gros pour Alger.

Pour punir l’Espagne, qui diversifie désormais ses partenaires pour ne plus dépendre de Sonatrach, notamment auprès des États-Unis, l’Algérie ambitionne de jouer un rôle prépondérant sur le marché gazier international. À l’aune de la guerre Russie-Ukraine et de la flambée des prix des hydrocarbures, elle renforce ainsi sa coopération avec l’Italie en multipliant par deux ses livraisons via le gazoduc Transmed.

Ce partenariat avec Rome est jugé tellement stratégique que le président Tebboune devrait effectuer une visite en Italie dans les semaines qui viennent. Ce serait son premier déplacement officiel en Europe depuis son élection en décembre 2019.

Limites et contraintes

Le gaz comme arme diplomatique et géostratégique ? Le levier énergétique a ses limites et ses contraintes. Sonatrach n’a pas les moyens et les capacités d’approvisionner davantage l’Europe dont elle assure déjà 11 % des importations de gaz. Elle en a d’autant moins les capacités que la consommation énergétique interne est en hausse de 10 % par an en raison du développement économique et de la démographie.

Le volume de consommation locale dépasse d’ailleurs aujourd’hui celui des exportations. Difficile d’inverser la tendance à moyen terme ou à court terme, quand bien même Sonatrach annoncerait un plan d’investissement de 40 milliards de dollars entre 2022 et 2026 pour explorer, produire et raffiner le gaz.

De là à ce que le groupe pétrolier couvre les besoins du marché local, se positionne comme un acteur principal sur le marché international et permette ainsi aux dirigeants du pays d’actionner le gaz comme une arme, il y a loin de la coupe aux lèvres.

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