Dialogue interreligieux

« Lorsque nous travaillons pour les âmes, nous ne pouvons user que de persuasion et d'amour... Nous ne pouvons rien faire tant que nous n'avons pas persuadé les gens autour de nous qu'ils sont aimés... » (Cardinal Lavigerie, 1885)

« Nous croyons qu'en toute religion il y a une secrète présence de Dieu, des semences du Verbe qui reflètent un rayon de sa lumière... » (Chapitre 1967)

« Nous célébrons et partageons cette vie avec Dieu lorsque nous allons à la rencontre des cultures et des religions... nous réjouissant de la foi vivante de ces croyants et les rejoignant dans leur quête de la Vérité, cette Vérité qui nous rend tous libres. » (Chapitre 1998)

Missionnaires, nous sommes appelés à faire les premiers pas pour rencontrer les personnes, qu'elles que soient leurs convictions, leur religion.

Au Burkina Faso, cette réalité se traduit surtout dans la rencontre respectueuse et évangélique avec les adeptes des religions traditionnelles et avec les musulmans.

Dans cette rubrique, nous étudierons divers aspects de ces religions, particulièrement de l'islam.

En Autriche, catholiques et juifs critiquent la «carte de l’islam»

Alors que le gouvernement a présenté jeudi 27 mai une « carte de l’islam » dans le pays, disponible sur Internet, recensant les mosquées et associations musulmanes dans le cadre de la lutte contre l’« islam politique », catholiques et juifs ont rejoint les musulmans pour critiquer cette initiative.

« Pourquoi une religion a-t-elle été pointée du doigt ? ». Dans une tribune publiée dans le journal Heute, l’influent cardinal Christoph Schönborn, archevêque de Vienne, a critiqué, vendredi 4 juin, la présentation par le gouvernement autrichien d’une « carte de l’islam » en ligne.

Lire la suite : Arnaud Bevilacqua: En Autriche, catholiques et juifs critiquent la «carte de l’islam», La Croix Africa, 08.06.21

Le CFCM, en soutien aux Palestiniens, veut engager musulmans et mosquées de France

 

Le Conseil français du culte musulman (CFCM) s’est exprimé, mercredi 19 mai, sur la situation au Proche-Orient, qui ne cesse de se dégrader depuis le 10 mai. L’instance musulmane, dirigée par Mohammed Moussaoui, s’est fendu d’un communiqué pour alerter sur une « situation tragique sur tous les plans » qui « vient nous rappeler une fois de plus les souffrances qu’endurent les populations palestiniennes depuis des décennies ».

Condamnant « avec la plus grande vigueur les crimes de guerre perpétrées notamment contre les populations civiles », le CFCM appelle « toutes les forces éprises de paix et de justice à tout mettre en œuvre afin d’obtenir un cessez-le feu immédiat et à construire une paix juste et durable dans cette région du monde ».

Lire la suite : Lina Farelli: Le CFCM, en soutien aux Palestiniens, veut engager musulmans et mosquées de France, Saphir News, 19.05.21. Lisez aussi les commentaires qui donnent une bonne idée de la difficulté du dialogue… de sourds entre certaines personnes.

France: La dérogation au couvre-feu du matin de nouveau accordée pour prier à la mosquée

A la demande du Conseil français du culte musulman (CFCM), une dérogation avait été accordée pendant le mois du Ramadan par le ministère de l’Intérieur afin de permettre aux musulmans qui le souhaitent d’accomplir la prière du matin à la mosquée peu avant 6h du matin. Elle avait pris le dernier jour du mois du Ramadan le 13 mai.

Le CFCM, qui a alors renouvelé sa demande, a annoncé, vendredi 21 mai, que cette dérogation a de nouveau été accordée « dans les mêmes conditions à compter du samedi 22 mai 2021 et jusqu’à nouvel ordre ».

« L’heure de la prière du matin diffère d’une ville à une autre et va continuer d’avancer tous les jours de quelques minutes jusqu’au 22 juin 2021. A partir de cette date la tendance s’inversera jusqu’à ce que l’heure de la prière du matin intervienne après 6h », explique le CFCM, qui recommande aux mosquées de retarder cette prière au maximum et dans la mesure du possible « afin de faire un usage proportionné de la dérogation accordée ».

Lire la suite: Lina Farelli, La dérogation au couvre-feu du matin de nouveau accordée pour prier à la mosquée, SaphirNews, 22.05.21

Un islam « made in Germany » affranchi de l’influence turque ?

Sylvie Toscer-AngotUniversité Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC)

Des imams indépendants de toute influence étrangère, maîtrisant bien la langue et la culture allemandes, tel est le vœu des pouvoirs publics outre-Rhin. Peut-être ne s’agit-il pas seulement d’un vœu pieux, comme en témoigne l’annonce de l’ouverture imminente – en avril 2021 – d’un cursus de formation pratique des imams au sein du centre de formation à l’islam (Islamkolleg), créé en 2019 à Osnabrück.

Alors que les tâtonnements et les difficultés du gouvernement actuel en France pour former des imams « qui défendent un islam pleinement compatible avec les valeurs de la République » semblent traduire un certain désarroi des pouvoirs publics français en matière de formation des imams et des cadres musulmans en général, faut-il en déduire que le voisin allemand aurait quelques longueurs d’avance, du moins pour réduire l’influence turque ?

Des formations scientifiques en allemand pour les enseignants, les théologiens et les imams

En octobre 2010, Christian Wulff, ancien ministre-président de Basse-Saxe et à l’époque président de la République fédérale d’Allemagne, affirmait à l’occasion du vingtième anniversaire de la réunification allemande « l’islam fait partie de l’Allemagne », déclenchant une polémique aux accents particulièrement virulents.

En 2018, Horst Seehofer (CSU), actuel ministre fédéral de l’Intérieur, du Logement et de l’Identité (Bundesminister des Innern, für Bau und Heimat), répondait, quant à lui, par la négative à la question : « l’islam fait-il partie de l’Allemagne ? ». Depuis, Seehofer affiche clairement son ambition de favoriser un islam enraciné en Allemagne, non sans arrière-pensées. Dans un pays qui compte aujourd’hui entre 5 % et 6 % de musulmans, la question de la place de l’islam dans la société demeure un sujet sensible et explosif, souvent associé depuis les attentats de septembre 2001 à des considérations sécuritaires ou relatives à la radicalisation. https://www.youtube.com/embed/sG7SeLsyPvc?wmode=transparent&start=0

Jusqu’à la fin du XXe siècle, la gestion publique de l’islam en Allemagne s’est effectuée essentiellement par l’intermédiaire des services consulaires turcs, reflet de l’ingérence de l’État turc dans le champ migratoire outre-Rhin et de la volonté des autorités allemandes de traiter l’islam comme un « objet » externe, de politique étrangère. Depuis le tournant du XXIe siècle, l’Allemagne tente de faire émerger un islam affranchi des influences et des financements étrangers.

Les pouvoirs publics allemands ont ainsi soutenu la mise en place d’un enseignement religieux islamique en allemand à l’école, au même titre que le cours de religion catholique ou protestant, dans la mesure où l’enseignement religieux est inscrit comme matière scolaire obligatoire à l’article 7-3 de la Loi fondamentale.

L’objectif des pouvoirs publics est aussi de limiter par ce biais l’influence d’États étrangers ou d’écoles coraniques radicales sur les élèves de confession musulmane, d’où les efforts mis en œuvre pour développer des formations universitaires en théologie islamique et en didactique de l’enseignement religieux à destination des futurs professeurs de religion islamique. Depuis 2011, des instituts de théologie islamique – alignés en grande partie sur les facultés de théologie catholique ou protestante – ont vu le jour dans plusieurs universités, à Münster, Osnabrück, Tübingen, Erlangen, Francfort, grâce au soutien financier de l’État fédéral – 20 millions d’euros sur 5 ans, renouvelés en 2016 – et des Länder.

Les tentatives visant à mettre en place des formations universitaires à l’imamat n’ont en revanche pas été couronnées de succès jusqu’à ce jour, alors que la formation des imams représente un enjeu majeur pour les acteurs musulmans comme pour les pouvoirs publics.

Une formation à l’imamat affranchie de la Turquie

Le centre de formation à l’islam (Islamkolleg) d’Osnabrück, qui inaugure à partir d’avril 2021 un cursus de formation pratique en langue allemande – ouvert aux étudiantes et étudiants titulaires d’une licence (Bachelor) de théologie islamique – destiné à de futurs imams, cherche à pallier une lacune dans les formations universitaires existantes. C’est en effet la partie pratique qui manquait jusqu’à présent dans les cursus de religion et de théologie islamique proposés dans les universités. La nouveauté de ce centre tient au fait qu’il a été créé par de petites associations ou fédérations islamiques indépendantes : le Conseil central des musulmans en Allemagne, fondé en 1994, et d’autres plus récentes comme le Conseil central des Marocains, l’Alliance des communautés malékites, la communauté islamique des Bosniaques et la fédération indépendante Musulmans de Basse-Saxe, tandis que les grandes fédérations islamiques jugées conservatrices (Union turco-islamique pour les affaires religieuses (DITIB), Millî Görüş…) n’en font pas partie. Quant à la direction scientifique, elle est assurée par Bülent Uçar, professeur de didactique de la religion islamique à l’université d’Osnabrück depuis 2008, considéré comme l’un des meilleurs spécialistes d’exégèse coranique en Allemagne.

L’un des objectifs de la formation est bien d’assurer la formation des imams en dehors de toute influence étrangère, nommément de la Turquie. Au programme des enseignements figurent non seulement la récitation du Coran, la formation aux prêches, l’accompagnement spirituel, mais également l’éducation politique avec des thématiques telles que la liberté d’opinion, la démocratie, les droits de l’homme, l’égalité entre hommes et femmes. Ce programme est financé pour une période expérimentale de cinq ans – à hauteur d’un million d’euros par an – par le ministère des Sciences et de la Culture de Basse-Saxe et le ministère fédéral de l’Intérieur. Ce dernier en attend à terme une diminution drastique de l’influence turque dans les mosquées allemandes et la réduction du nombre des imams envoyés en Allemagne par l’État turc. Mais la Turquie n’a pas dit son dernier mot.

Concurrence territoriale entre acteurs politiques et acteurs musulmans

Depuis les années 1980, les imams des quelque 900 mosquées gérées par l’Union turco-islamique pour les affaires religieuses (DITIB), sont directement liés à la Turquie par le biais de la Direction des affaires religieuses (Diyanet), créée en 1924 par l’État turc pour défendre un islam sunnite officiel et représentée dans chaque ambassade par un conseiller aux affaires religieuses.

La Dyanet envoie en Allemagne ses imams pour une durée de cinq ans et les rémunère. Dans la ligne de mire des pouvoirs publics allemands depuis la tentative de coup d’État de 2016, la DITIB est fortement soupçonnée d’être le bras religieux du régime d’Ankara, d’espionner les opposants au régime membres de la mouvance Gülen et de freiner l’intégration des personnes d’origine turque. Sous le feu des critiques, elle réagit. En janvier 2020, elle a ouvert, en Rhénanie du Nord-Westphalie, un centre de formation des imams et cadres religieux musulmans qui propose un cursus de deux ans aux titulaires d’une licence de théologie islamique, désormais en concurrence directe avec la formation proposée par le centre de formation d’Osnabrück. Les imams ayant suivi ce parcours seront ensuite recrutés dans des mosquées gérées par la DITIB et rémunérés par l’État turc.

Le soutien financier du ministère de l’Intérieur accordé au centre de formation à l’islam (Islamkolleg) d’Osnabrück montre clairement quelles sont les attentes de l’État allemand. Les considérations sécuritaires ne sont pas absentes de ce projet qui est tout autant politique que religieux. La formation des imams est également perçue par le ministère de l’Intérieur comme un moyen de lutter contre la radicalisation. Les critiques ne se sont pas fait attendre, certaines grandes fédérations islamiques dénonçant une immixtion de l’État dans les affaires des communautés religieuses et une atteinte à la neutralité confessionnelle de l’État. Reste à voir quels seront le succès et les débouchés de cette formation qui devrait débuter avec trente candidats et candidates, étant donné que la DITIB et d’autres grandes fédérations islamiques proposent elles aussi des formations à l’imamat sur le sol allemand, dispensées pour l’essentiel en allemand.

Sylvie Toscer-Angot, Maître de conférences en civilisation allemande (HDR), Université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC)

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Mohamed Mestiri (1964-2021)

Mohamed Mestiri (Muḥammad al-Mestīrī) nous a quitté le vendredi 8 janvier 2020, à l’âge de 57 ans. Spécialiste de la théologie musulmane, Mohamed Mestiri s’est d’abord formé en Tunisie, au sein de l’université Zitouna (Jāmiʿat al-zaytūna) où il obtient une Ijāza (licence) en théologie musulmane (uṣūl al-dīn). C’est à Paris, ensuite, qu’il viendra poursuivre sa formation, au sein de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne.  Ayant obtenu, au sein de celle-ci, une licence et un Magistère (Master) en philosophie, il entame une thèse de doctorat sous la direction de Rémi Brague. Thèse de doctorat qu’il soutiendra en 1994, sous le titre « La conception morale dans les débuts du kalām et de la philosophie islamique d’après les exemples des Mu‘tazilites et de Fārābī  » (Naẓariyyat al-akhlāq fī bidāyat ‘ilm al-kalām wa-l-falsafa : al-mu‘tazila wa al-Fārābī namūdhajan), en deux volumes. Cette thèse de doctorat marquera la production et l’activité intellectuelle de Mohamed Mestiri.
En effet, à la suite de celle, il fonde en 1999 le Centre d’études civilisationnelles de Paris, via lequel il publie Ru’ā (Conceptions), une revue trimestrielle « spécialisée dans la question du renouveau de la pensée islamique ». La revue paraîtra de 1991 (1er numéro) à 2005 (26ème numéro). En 2000, il devient le directeur de l’Institut internationale de la pensée islamique (IIIT France). Il s’agissait de la branche française de IIIT (International Institute of Islamic Thought), fondé aux États-Unis en 1981.

Lire la suite : Mohamed Mestiri (1964-2021), les Cahiers de l’islam, 09.05.21