Justice et Paix

" Je suis homme, l'injustice envers d'autres hommes révolte mon coeur. Je suis homme, l'oppression indigne ma nature. Je suis homme, les cruautés contre un si grand nombre de mes semblables ne m'inspirent que de l'horreur. Je suis homme et ce que je voudrais que l'on fit pour me rendre la liberté, l'honneur, les liens sacrés de la famille, je veux le faire pour rendre aux fils de ces peuples l'honneur, la liberté, la dignité. " (Cardinal Lavigerie, Conférence sur l'esclavage africain, Rome, église du Gesù)

 

NOS ENGAGEMENTS POUR LA JUSTICE T LA PAIX
S'EXPRIMENT DE DIFFÉRENTES MANIÈRES :

En vivant proches des pauvres, partageant leur vie.
Dans les lieux de fractures sociales où la dignité n'est pas respectée.
Dans les communautés de base où chaque personne est responsable et travaille pour le bien commun.
Dans les forums internationaux pour que les décisions prises ne laissent personne en marge.

Dans cette rubrique, nous aborderons différents engagements des Missionnaires d'Afrique, en particulier notre présence auprès des enfants de la rue à Ouagadougou et la défense du monde paysan.

 

Dominique Strauss-Kahn en Afrique : enquête sur ses réseaux et sa stratégie

| Par Jeune Afrique
Dominique Strauss-Kahn, à la Rotonde Montparnasse, Paris le 22 mai 2019.

Chefs d’État, hommes d’affaires, communicants, ex-collaborateurs… Jeune Afrique a mené l’enquête sur les hommes du premier cercle africain de l’ex-patron du FMI et sur ses méthodes de travail.

Après l’affaire du Sofitel de New York, l’ancien patron du FMI Dominique Strauss-Kahn (DSK), 71 ans, s’est reconverti en tant que consultant en Afrique, spécialisé dans les questions de finances publiques. Il sillonne le continent où sa notoriété lui ouvre les portes des palais présidentiels francophones.

L’ex-ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie de Lionel Jospin (1997-1999) est actuellement sous contrat avec le Congolais Denis Sassou Nguesso et le Togolais Faure Essozimna Gnassingbé. En 2017, associé à la banque de conseil Arjil de son ami Wladimir Mollof, avec qui il demeure lié par un contrat non exclusif, il a également aidé à mettre sur pied le Forum d’investissement Tunisie 2020 (coorganisé par Jeune Afrique Media Group).

Si l’économiste français a démarché en vain le Sénégal, le Mali, le Bénin ou encore le Burkina Faso, la réforme du franc CFA et dernièrement la crise liée à l’épidémie de Covid-19 lui ont donné l’occasion de faire un retour remarqué dans les médias.

DSK n’en reste pas moins d’une discrétion absolue sur ses propres affaires. Contacté, il n’a pas donné suite à nos sollicitations. Selon nos sources, il a par exemple été consulté pour la mise en place du statut Casablanca Finance City (CFC), qui offre des avantages fiscaux à certaines entreprises implantées au Maroc, dont la sienne. Via sa société Parnasse International, il a engrangé plus de 20 millions d’euros de bénéfices exonérés d’impôts entre 2013 et 2018.

Jeune Afrique vous dévoile les personnalités qui l’entourent et l’aident à faire prospérer ses activités.

  • Les anciens de Bercy

Pour l’organisation et la gestion de sa société Parnasse International, Dominique Strauss-Kahn se repose sur Philippe Valachs, qui l’accompagne souvent lors de ses déplacements en Afrique. Les deux hommes ont appris à travailler ensemble au début des années 1990, quand ce dernier s’occupait de la communication et de la presse en tant que chef de cabinet adjoint de DSK, alors ministre de l’Industrie et du Commerce extérieur.

Avant de devenir son bras droit, ce titulaire d’un DEA en sciences économiques, qui possède sa propre société de conseil (Archimède Consultants), a également été chef de cabinet de Jean-Marie Messier lorsque celui-ci était à la tête de Vivendi. Il a été le directeur général d’une des premières Web TV européennes, CanalWeb, qui a fait faillite en 2002.

Pour faire avancer les dossiers de Parnasse, DSK peut compter sur le réseau de Philippe Valachs dont fait partie l’énarque Pierre-François Couture, qui s’est rendu en mission pour Parnasse au Togo à la fin de 2019. À la demande de Valachs, ce spécialiste des finances publiques et des matières premières, également expert associé au cabinet de consulting Lysios fondé par Jean-Luc Archambault, a fait jouer son carnet d’adresses parmi les anciens des ministères français pour muscler les ressources nécessaires à la gestion des dossiers congolais et togolais.

Sur le continent, l’ex-patron du FMI a retrouvé d’autres anciennes connaissances de Bercy, dont son ex-conseiller Matthieu Pigasse, qui fut jusqu’à la fin de 2019 le directeur général délégué de la banque Lazard. À la fois proches et concurrents, les deux hommes ont eu pour mission de gérer avec les autorités locales l’épineux dossier de la dette congolaise ; DSK, en froid avec Christine Lagarde, s’est focalisé sur la restructuration des créances dues à Pékin et aux entreprises chinoises. L’arrivée de Kristalina Georgieva à la direction générale du FMI en septembre dernier pourrait changer la donne.

Fin 2019, Matthieu Pigasse, qui a rejoint la banque américaine Centerview, a laissé la place sur ce dossier à l’énarque et normalien Thomas Lambert, directeur du département dette souveraine de Lazard. Mais il est toujours actif au Congo où il est officiellement et à titre personnel conseiller de la République pour les négociations avec le FMI et les autres institutions. Une lettre de mission lui a été remise par le Premier ministre Clément Mouamba au premier trimestre 2020.

  • Les chefs d’État

Ses contrats de conseil aux États, DSK les signe directement avec les présidents africains. « Il vient challenger les ministres des Finances et cela crée souvent des tensions », confie un proche. Reconnu pour son expertise, l’ancien patron du FMI est connecté chez de nombreux chefs d’État en exercice auxquels il parle avec franchise.

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Le président togolais Faure Gnassingbé, en 20 janvier 2017 © Présidence togolaise

Au Congo, Denis Sassou Nguesso, qui le connaissait déjà, l’a recruté en 2016. C’est Jean-Paul Pigasse, propriétaire du journal Les Dépêches de Brazzaville et oncle de Matthieu Pigasse, qui l’a introduit auprès du président congolais. L’an dernier, Strauss-Kahn a obtenu la restructuration de la dette chinoise. Le pays ne bénéficie actuellement pas de la facilité d’urgence du FMI, qui n’a pas totalement fermé la porte mais attend des avancées dans la restructuration de la dette due à Glencore et Trafigura et des efforts de transparence concernant le budget 2020.

DSK est également sous contrat au Togo. Il a d’abord approché le président Faure Essozimna Gnassingbé pour le compte du groupe suisse Sicpa, leader mondial des solutions de traçabilité et fournisseur de l’encre infalsifiable des billets de la zone euro, avant de décrocher un contrat de conseil portant sur la « modernisation de la gestion des finances publiques ». Selon des sources proches du dossier, le courant entre les deux hommes passe particulièrement bien.

À la recherche d’autres contrats, il a aussi démarché Macky Sall (il s’était positionné sur le Plan Sénégal émergent), Ibrahim Boubacar Keïta et Roch Marc Christian Kaboré, sans succès. Ses bonnes relations avec Alassane Ouattara ne lui ont pas non plus permis pour le moment de concrétiser ses ambitions en Côte d’Ivoire.

  • Les communicants

Pour diversifier son réseau africain, DSK peut compter sur ses amitiés chez les communicants. Au Maroc, il s’est rapproché ces derniers mois d’Omar Alaoui, l’ancien directeur de cabinet de Salaheddine Mezouar, à l’époque où ce dernier était encore le patron des patrons du royaume.

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Le communicant marocain Omar Alaoui © Twitter

L’an dernier, sa présence avait été annoncée à la surprise générale à l’université d’été de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM), avant qu’il ne décline cette invitation. Très récemment, à la demande d’Alaoui, qui a rejoint en novembre 2019 le cabinet de lobbying ESL & Network dirigé par Alexandre Medvedowsky, il a contribué à une réflexion sur la mobilisation du secteur privé africain face à la pandémie de Covid-19.

Le Français est également proche du Franco-Tunisien Karim Guellaty, patron de la société Infolink et du média en ligne Business News. Tous deux se connaissent depuis le début des années 1990 par le réseau de la Mnef, mutuelle étudiante dissoute après un scandale d’emplois fictifs et de détournements. En juin 2014, ce dernier l’avait invité en Tunisie pour une journée de travail afin de muscler le programme économique du futur président de la République, Béji Caïd Essebsi.

Enfin, DSK peut aussi compter sur les réseaux de ses amis intimes comme Stéphane Fouks. Le patron d’Havas Worldwide avait participé à sa campagne lors des primaires socialistes de 2006, puis à celle pour la direction générale du FMI. En 2010, il a également collaboré avec Laurent Gbagbo en Côte d’Ivoire, avant de conseiller l’homme d’affaires mauritanien Mohamed Ould Bouamatou.

DSK et Fouks sont par ailleurs très proches de Jean-Marie Le Guen, ex-secrétaire d’État français au Développement et à la Francophonie, également actif en Afrique.

  • « Marrakech connexion »

Propriétaire d’un riad à Marrakech, DSK y passe depuis 2013 une partie de l’année avec son épouse, la communicante marocaine Myriam L’Aouffir. Ensemble, ils ont créé l’association MekkiL’, qui finance des actions destinées à protéger les mères et les enfants.

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Mohamed BouamatouTar Debates© Thomas Preston © Mohamed Bouamatou Tar Debates © Thomas Preston

Avec l’appui de Mohamed Ould Bouamatou, DSK pourrait vendre ses services au président Ould Ghazouani

Dans la ville ocre, l’économiste, qui fréquente d’autres Français habitués des lieux comme le philosophe Bernard-Henri Lévy, s’est aussi rapproché de Mohamed Ould Bouamatou. Tous deux ne se connaissaient pas, avant que le Mauritanien n’achète une villa voisine de la sienne. Ce dernier a donné de grands dîners chez lui, consolidant ainsi leurs carnets d’adresses.

L’homme d’affaires avait investi 5 millions d’euros dans la société de gestion Leyne Strauss-Kahn & Partners (LSK), qui a fait faillite en 2014. Mais cela n’a pas entaché leur amitié.

Après dix ans d’exil, Bouamatou est rentré à Nouakchott en mars. Un important appui que DSK pourrait utiliser dans les prochains mois pour vendre ses services au président Mohamed Ould Ghazouani, également courtisé par les banques d’affaires Lazard et Rothschild. Au Maroc, le patron de Parnasse entretient aussi des relations amicales avec les ex-ministres Salaheddine Mezouar et Nizar Baraka, lequel est aujourd’hui secrétaire général du parti de l’Istiqlal.

 
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L'OMS plus fragile que jamais à la veille de son assemblée générale

Le directeur général de l'OMS Tedros Adhanom Ghebreyesus en conférence de presse à Genève, en Suisse, le 11 mars 2020.
Le directeur général de l'OMS Tedros Adhanom Ghebreyesus en conférence de presse à Genève, en Suisse, le 11 mars 2020. Fabrice COFFRINI / AFP

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) tient son assemblée générale du 17 au 21 mai alors qu’elle affronte la plus grande crise de son histoire. Attaquée et critiquée par ses États membres, elle aborde ce grand rendez-vous plus fragile que jamais, au plus mauvais moment.

C’est une histoire d’e-mails envoyés le jour de la Saint-Sylvestre. Ce 31 décembre 2019, la Chine, via la commission sanitaire municipale de Wuhan, prévient officiellement l’OMS de la survenue de plusieurs cas de pneumonie non identifiée. Un nouveau coronavirus est ensuite identifié. Cette maladie émergente peut-elle se transmettre d’homme à homme ? Les autorités chinoises affirment que non. Pourtant, Taïwan certifie avoir alerté l’organisation le même jour sur le risque d’une telle transmission. Il faudra attendre le 20 janvier 2020 pour que l’OMS reconnaisse que cette nouvelle maladie se transmet bien entre êtres humains.

Trois semaines ont-elles été perdues ? Il s’avère que l’OMS ne reconnaît pas Taïwan comme l’un de ses États membres, en grande partie à cause de l’opposition de la Chine, ce qui expliquerait qu’elle n’ait pas tenu compte de cette alerte. De fait, les rapports entre Pékin et l’organisation cristallisent la majeure partie des critiques faites à son encontre à l’occasion de cette crise pandémique. Le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, le patron de l’organisation, est-il sous la coupe des Chinois ? « L’OMS a vraiment tout raté », tweetait Donald Trump le 7 avril, résumant là une bonne partie des griefs retenus contre l’OMS. « Elle est majoritairement financée par les États-Unis, mais pourtant très centrée sur la Chine. » Si le président américain a ainsi justifié sa décision de se retirer de l’organisation, cette critique n’en est pas moins caricaturale.

L’OMS dépendante

« L’OMS est une agence intergouvernementale : c’est le nœud du problème », explique Auriane Guilbaud, du centre de recherches sociologique et politique de l’Université Paris 8. « L’outil principal sur lequel s’appuie l’organisation, c’est le règlement sanitaire international adopté par ses États membres, en 1951 et révisé depuis. Il stipule que les États membres doivent rapporter les événements de santé publique qu’ils ont repéré sur leur territoire. L’OMS dépend donc de ses États membres et de la fiabilité de leurs informations. »

Dès lors, les informations fournies par les autorités chinoises sur ce début d’épidémie ont-elles été fiables ? « L’OMS a été un peu induite en erreur », a déclaré John MacKenzie au quotidien britannique The Guardian. Le conseiller auprès du comité d’urgence de l’organisation relève ainsi que lorsque la Chine informe l’OMS le 31 décembre, ses scientifiques avaient déjà séquencé le génome du virus et savaient déjà qu’ils avaient affaire à un nouveau coronavirus. Pourtant, les autorités de Pékin ne le confirmeront officiellement que le 7 janvier, et le génome entier ne sera partagé à la communauté internationale que le 12 janvier. De même, John MacKenzie s’interroge sur le bilan communiqué par la Chine : 59 cas pour la première semaine de 2020, « très, très loin de ce à quoi on pouvait s’attendre ».

Dans ce contexte, que pouvait faire l’OMS ? « L’organisation étant intergouvernementale, il lui faut solliciter l’État membre », explique Auriane Guilbaud. L’OMS a ainsi demandé à la Chine l’autorisation d’envoyer une équipe de scientifiques dans la province du Hubei, l’épicentre de l’épidémie. Pékin refusa. « Et l’OMS n’a pas pouvoir de sanction », ajoute la chercheuse. Ce n’est que le 8 février que les autorités chinoises autorisèrent sur leur territoire une équipe d’observateurs de l’OMS.

Le Dr Tedros n’a ainsi jamais fait état publiquement de la réticence de la Chine à coopérer. Il fit même l’inverse le 28 janvier en rencontrant Xi Jinping à huis clos et en louant deux jours plus tard les efforts chinois pour contenir la maladie : « Un nouveau modèle de contrôle d’épidémie. » C’est pourtant ce même 30 janvier que l’OMS déclare le Covid-19 comme étant une urgence sanitaire de portée internationale. Pour Auriane Guilbaud, dans cette séquence, « l’OMS a joué un rôle d’acteur diplomatique pour préserver ses relations avec ses États membres, dont la Chine. C’est une ligne pragmatique, il fallait préserver les relations ».

L’exemple du SRAS

De fait, étant dépendante de ses informations, l’Organisation mondiale de la santé a toujours ménagé la Chine lors de cette crise. Elle n’a pourtant pas toujours joué ce rôle. En novembre 2002, le gouvernement chinois découvre sur son sol une nouvelle maladie respiratoire, le SRAS, et n’en informe pas l’OMS. Mais à l’époque, sous l’impulsion de sa directrice générale d’alors, Gro Harlem Brundtland, l’organisation surveillait les forums médicaux chinois et avait donc connaissance de cette pneumonie atypique. Ces informations en main, l’OMS est allée voir les dirigeants chinois, qui l’ont officiellement notifiée peu après.

Gro Harlem Brundtland n’a alors pas eu peur d’accuser publiquement la Chine d’avoir gardé ces informations pour elle, empêchant ainsi de contenir l’épidémie « si l’OMS avait pu intervenir plus tôt et envoyer ses équipes sur place ». À la suite de ces déclarations, Pékin coopéra rapidement.

Pourquoi l’OMS n’a-t-elle pas adopté la même ligne près de vingt ans plus tard ? Sans doute parce qu’elle a perdu de son aura. En 2003, alors que l’épidémie de SRAS se répandait dans plusieurs pays (Hong Kong, Vietnam et Canada), l’organisation a pour la première fois rendu un avis déconseillant de voyager vers les zones touchées. Bien que l’OMS n’ait pas effectivement le pouvoir de clouer les avions au sol, cet avis a été suivi.

À la suite de cette épidémie, la réponse de l’OMS a globalement été jugée comme un succès. Seuls 26 pays ont été touchés par la maladie et moins de 1 000 personnes en sont mortes. « Brundtland a fait des choses pour lesquelles l’OMS n’avait pas de mandat », se souvient David Fidler, consultant pour l’organisation. Pour cause : ce ne sont ni les traitements, ni les vaccins qui sont venus à bout du SRAS, mais l’échange d’information à l’échelle mondiale, les restrictions de voyage, des politiques de dépistage et d’isolement des malades.

L’occasion manquée

Malheureusement cet essai ne sera pas transformé. Il y avait pourtant une opportunité : « Le règlement sanitaire international de 1951 a été révisé à la suite du SRAS », explique Auriane Guilbaud. D’aucuns ont poussé pour donner plus de latitude à l’OMS, mais c’est finalement la ligne inverse qui l’a emporté. Plusieurs pays avaient en effet la crainte de devoir affronter les mêmes restrictions qu’a eu à subir la Chine si jamais ils venaient à se retrouver dans sa situation. Ainsi, sur la question de la fermeture des frontières, le règlement sanitaire international révisé stipule désormais que « les États membres s’engagent à prévenir la propagation internationale des maladies et à y réagir avec des mesures sanitaires proportionnées sans entraves inutiles aux déplacements et aux commerce international ». Pour Auriane Guilbaud, cette résolution en demi-teinte s’explique par deux choses : « Tout d’abord, il ne faut pas que les États se sentent discriminés, sinon ils pourraient hésiter à rapporter des événements de santé publique. Ensuite, ils ne veulent pas être mis au ban de la communauté internationale parce qu’on aurait interdit tout commerce avec eux. »

L’OMS est devenue inaudible

Ainsi, pour l’épidémie d’Ebola en 2014 comme pour celle du Covid-19, l’OMS n’a pas appelé à la fermeture des frontières. « En 2014, certains États les avaient fermées », se souvient Auriane Guilbaud. « L’OMS les avait alors critiqués estimant que cela faisait plus de mal que de bien. » Pour l’épidémie d’Ebola, l’OMS avait également mis plusieurs mois à déclarer une urgence. David Fidler estime ainsi que cela a retardé d’autant une aide internationale pourtant essentielle, et grandement affaibli le leadership de l’OMS. Ce manque est criant aujourd’hui : « De nombreux États ne suivent plus les recommandations », analyse Auriane Guilbaud.

Richard Horton, le rédacteur en chef de la prestigieuse revue médicale The Lancet va plus loin : « Les États, et particulièrement les États occidentaux n’ont pas écouté. Plutôt : ils n’ont pas cherché à comprendre ce qui se passait en Chine au début de l’année 2020 ». On peut ainsi considérer que la déclaration d’une pandémie le 11 mars était purement rhétorique pour pousser les États membres de l’OMS à faire plus, étant donné que l’urgence sanitaire de portée internationale les obligeait déjà à réagir.

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L’organisation a en effet toujours répété quelques principes simples que doivent appliquer les États : réduire l’exposition du public à la maladie, en particulier en identifiant toutes les chaînes de contamination. « Il faut tester, tester, tester », ne cesse de marteler le Dr Tedros depuis plusieurs mois. Il n’a donc pas été écouté puisqu’à l’exception de la Corée du Sud et de l’Allemagne, la plupart des pays occidentaux se sont illustrés par leurs carences en la matière jusqu’à un confinement devenu inévitable – certains pays pariant même sur une putative immunité de population à rebours de toutes les recommandations.

L’OMS doit également faire face à une disparition presque complète de la coopération internationale en matière sanitaire – excepté sur le plan scientifique. Des images de gouvernements réquisitionnant des masques au détriment d’autres pays, d’autres voulant s’arroger la primeur d’un éventuel vaccin… Les exemples ne manquent pas et il y a bien sûr le retrait américain de l’organisation. Il s’agit pour l’instant d’une suspension, mais les États-Unis fournissent 15 % du budget de l’OMS. Cela impactera donc forcément les programmes tout en donnant paradoxalement plus de latitude à la Chine – précisément ce que dénonce Washington avec ce retrait. En matière épidémique, la coopération internationale est pourtant essentielle : « Faire circuler l’information est essentiel, et c’est un défi. Il faut faire travailler 194 États membres ensemble et il faut bien quelqu’un pour remplir ce rôle. L’OMS est la seule organisation de santé à vocation universelle », rappelle Auriane Guilbaud.

Une assemblée générale sous le signe du Covid-19

C’est donc avec ce rôle affaibli que l’Organisation mondiale de la santé va aborder son assemblée générale du 17 au 21 mai. D’ordinaire consacrée aux questions de gouvernance, elle risque d’être entièrement dédiée à la pandémie de Covid-19. De plus, « cela devrait être une assemblée virtuelle », anticipe Auriane Guilbaud. « C’est dommage car en temps normal, beaucoup de discussions ont lieu entre deux portes, ce ne sera pas possible. Elle sera tout de même très intéressante à suivre, il faudra voir comment les États membres se positionnent par rapport au Directeur-Général, s’il est soutenu. »

Après chaque épidémie, l’OMS réalise toujours une évaluation sur les événements passés. Des leçons sont tirées et conduisent à des mesures de plus ou moins grande ampleur. L’organisation apparaît aujourd’hui plus fragilisée que jamais. Qu’en sera-t-il demain ? Ses États membres accepteront-ils de lui laisser plus de latitude ? « Nous sommes toujours en pleine crise. Ces mesures, ce sera pour après », conclut Auriane Guilbaud.

 
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[Tribune] Le laboratoire, héros négligé du continent africain

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Par

Vice-président Afrique chez bioMérieux

Tests du coronavirus, dans un laboratoire de Nairobi, Kenya

Mis en lumière par l’actuelle pandémie de coronavirus et la nécessité de tester les patients présentant des symptômes, les laboratoires de diagnostic restent, hors temps de crise, les parents pauvres des systèmes de santé africains. Il est temps d’y remédier.

En Afrique, comme ailleurs dans le monde, la pandémie de Covid-19 a drastiquement rappelé à l’ensemble des acteurs le rôle vital du diagnostic dans la lutte contre les maladies infectieuses épidémiques. Les gouvernements reconnaissent officiellement cette activité comme essentielle face à une telle pandémie virale et se sont décidés à tester à grande échelle en écho au message de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) : « tester, tester, tester ».

Dès lors, deux questions cruciales se posent ici. D’abord, comment l’Afrique, dans sa très grande hétérogénéité, pourrait-elle tester ses populations alors que les infrastructures de laboratoire restent faibles et vulnérables dans la majorité des pays ? Ensuite, quelles leçons pourront être tirées de cette situation afin de mieux préparer le continent à affronter de futures épidémies ou pandémies, tout en assurant le diagnostic de routine des pathologies infectieuses courantes au sein des populations ?

Par le passé, l’Afrique s’est beaucoup reposée sur l’assistance technique internationale avec la mise en place ex nihilo de laboratoires peu ou pas intégrés dans le système national, comme c’était le cas lors de l’épidémie Ebola en 2014. Mais avec le Covid-19, première pandémie majeure du XXIe siècle qui touche simultanément l’ensemble des pays, on observe une rupture fondamentale dans les pratiques habituelles.

Un continent sous-équipé

Les pays qui auraient traditionnellement soutenu la mobilisation de la réponse épidémique dans les pays à faible revenu se sont refermés sur eux-mêmes, et il s’avère impossible de déployer sur le continent des ressources humaines internationales. Cette situation oblige les décideurs africains à agir immédiatement, de manière décisive, afin de mettre fin à la négligence chronique des systèmes et services de laboratoire et aux pratiques d’improvisation réactives.

Créé à la suite de l’épidémie d’Ebola en Afrique de l’Ouest, le Centre africain de contrôle et de prévention des maladies de l’Union africaine (UA) a récemment joué un rôle important dans le renforcement des capacités de surveillance et de détection des épidémies à travers les réseaux mis en place dans les différentes régions. Malgré ces efforts très louables, l’Afrique reste très largement sous-équipée en infrastructures de laboratoire et contribue peu au développement des connaissances sur les agents pathogènes au niveau mondial. Une surveillance et une détection précoce des épidémies s’appuient inévitablement sur des réseaux de laboratoires, mais également sur le diagnostic chez les patients.

Malgré un rôle crucial, la généralisation du diagnostic biologique en Afrique souffre d’importants obstacles structurels

Aujourd’hui, il existe sur le continent trop peu de laboratoires pour assurer une couverture adéquate de la population à tous les niveaux. Comparativement, le ratio est de 0,2 test par habitant et par an en Afrique subsaharienne et de 1,2 en Afrique du Sud, contre 2 au Brésil et 18 au Royaume-Uni. Ces ratios sont encore plus faibles en excluant les laboratoires financés par l’aide internationale affectée aux trois grandes endémies (paludisme, tuberculose et VIH).

Des tests peu fiables

Cet état de fait a déshabitué les soignants africains à travailler avec les tests de laboratoire et rendu fréquentes les erreurs de diagnostic. En effet, les patients sont souvent soumis à des tests peu fiables et inexacts, entraînant des dépenses inutiles dans des régions déjà en proie à des pénuries de ressources.

À titre illustratif, une enquête annuelle mondiale a été conduite indépendamment par l’Université d’Anvers, en 2018, sur la prévalence de l’utilisation des anti-infectieux dans les structures sanitaires (Global-Point Prevalence Survey, G-PPS). Cette enquête a montré que 60 % des patients africains (140 sites répartis dans 16 pays) ont reçu au moins un anti-infectieux au cours de leur hospitalisation alors que seuls 5 % de ces traitements étaient précédés d’un test de susceptibilité aux antibiotiques. Cette lacune conduit très fréquemment à la prescription d’antibiotiques non appropriés tout en aggravant une situation déjà préoccupante de résistance aux antibiotiques sur le continent.

De quoi le diagnostic biologique en Afrique souffre-t-il ? Le résultat d’un tel test est généralement le premier élément d’information non clinique dont un médecin a besoin avant de décider d’un traitement. Il permet également d’optimiser le reste du parcours de soins d’un patient ainsi que l’utilisation efficiente des ressources. Il guide 60 à 70 % des décisions cliniques tout en représentant seulement 5 % des coûts hospitaliers selon les données internationales.

Malgré ce rôle crucial, la généralisation du diagnostic biologique en Afrique souffre d’importants obstacles structurels qui sont principalement une main-d’œuvre insuffisante, une éducation et une formation inadéquates, une infrastructure de qualité médiocre, une faible coordination stratégique au niveau des pays et des sous-régions et réglementation inadéquate des tests, un fardeau fiscal et logistique, y compris la gestion de la chaîne d’approvisionnement, entraînant un surcoût considérable avec des tests deux à trois fois plus chers en Afrique subsaharienne qu’en Europe.

Cinq propositions

Afin de véritablement disposer de services de laboratoire adaptés, accessibles à tous et capables de gérer les analyses de routine appropriées tout en étant pertinents lors des épidémies, nous proposons :

• L’appropriation et l’intégration – dans les budgets nationaux – d’investissements importants, durables et sanctuarisés autour des services de laboratoire, de sorte à éliminer les errances liées à la disponibilité ou non des dons internationaux.

• Le renforcement massif de l’éducation et de la formation des acteurs clés de santé en tirant profit, par exemple, des centres de formation et d’excellence créés par les acteurs privés. L’entreprise française spécialisée dans le diagnostic in vitro bioMérieux dispose d’ailleurs de deux centres de formation sur le continent (Afrique du Sud et Côte d’Ivoire).

• La mise en place de partenariats public-privé en capitalisant sur les expertises et forces de tous les acteurs pour améliorer l’accès aux services de base de laboratoire.

• La décentralisation des structures de laboratoires en favorisant les technologies  intégratives multi-diagnostic qu’apportent les nouveaux dispositifs moléculaires.

• L’application de politiques fiscales incitatives à l’importation ou à la production locale pour l’ensemble des diagnostics essentiels.

Le diagnostic médical est un puissant outil qui mérite de retrouver sa place dans les stratégies nationales et régionales de santé sur notre continent. L’engagement et la réactivité de nos chefs d’État africains face à cette crise sanitaire sont exemplaires, et il faut capitaliser sur cet élan pour améliorer en profondeur et de manière durable nos infrastructures de santé.

BioMérieux joue un rôle de premier plan en Afrique dans la lutte contre les maladies infectieuses et continuera de s’engager durablement aux côtés des États et organisations régionales. L’Afrique peut et doit devenir autosuffisante dans le domaine de la santé publique.

 
 
 
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[Tribune] Aucun pays ne doit avoir à choisir entre sauver des vies
et rembourser des dettes

| Par Jeune Afrique
Un agent d'entretien désinfecte une mosquée à Dakar, au Sénégal, le 1er avril 2020.

Les ministres des Finances et du Développement de 16 pays africains signent cet appel à doter l’Afrique de moyens pour amortir l’impact de la crise et amorcer une reprise rapide et vigoureuse.

La tribune est co-signée par les ministres des Finances et/ou les ministres du Développement des pays suivants : Angola, Cameroun, Djibouti, Égypte, Éthiopie, Gambie, Ghana, Kenya, Mali, Namibie, Niger, Rwanda, Sénégal, Seychelles, Sierra Leone et Tunisie.

Alors que la pandémie de Covid-19 frappe le monde entier, elle envoie en chute libre de nombreuses économies africaines qui enregistrent de très bons résultats depuis plusieurs années. Le Fonds monétaire international (FMI) prévoit que la croissance mondiale se contractera de 3 %, et les pays développés seront les plus touchés, enregistrant une contraction deux fois supérieure (6,1 %). L’économie mondiale est en crise et des mesures audacieuses dans tous les secteurs sont nécessaires pour appuyer le retour à la croissance.

Ce ne sont pas seulement les économies africaines dans leur ensemble qui sont touchées par les conséquences de la pandémie, mais tous les secteurs productifs – y compris le tourisme qui fournit des recettes fiscales et des devises fortes à de nombreux pays et emploie des millions de personnes en Afrique -, souffrent. L’effondrement des prix des matières premières et des envois de fonds a encore aggravé la situation de nombreux pays dont les réserves s’épuisent rapidement.

La Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique (CEA) prévoit que, dans toute l’Afrique, la croissance se contractera de 1,8 % en 2020 et environ 28 millions de personnes supplémentaires tomberont dans la pauvreté, tandis que le chômage augmentera encore de 40 %.

Les gouvernements ont besoin de liquidités et ils en ont besoin maintenant

Les conséquences sur les économies seront graves, des moyens de subsistance seront détruits sur tout le continent et la cohésion sociale sera menacée si des moyens et des politiques ne sont pas mis en place d’urgence pour planifier et engager de manière coordonnée la réaction à ces pressions.

Le défi à relever d’urgence aujourd’hui pour les décideurs politiques sur le continent est de contenir les effets immédiats de la crise et de commencer à jeter les bases de la relance. Il faudra pour cela des actions nationales rapides, complétées par le soutien de la communauté internationale.

Répondre aux besoins de liquidités des pays africains

Les gouvernements ont besoin de liquidités et ils en ont besoin maintenant. Les pays africains ont lancé des politiques d’auto-assistance pour gérer la crise. Les mesures prises consistent notamment à résoudre les problèmes dans le secteur de la santé, à réduire l’impact sur les familles vulnérables grâce à des filets de sécurité sociale supplémentaires, à accorder des exonérations ou des exemptions fiscales aux entreprises, ainsi que des facilités de financement bon marché pour les entreprises touchées, notamment les PME. Les banques centrales africaines ont pris des mesures pour accroître les liquidités et faciliter les moratoires ou la restructuration des prêts aux entreprises et des prêts aux particuliers.

Des plans de relance généreux ont déjà été initiés par les gouvernements, représentant en moyenne 2 à 10 % du PIB dans de nombreux pays, de l’Égypte à l’Afrique du Sud, du Sénégal à Djibouti. Ces mesures de relance budgétaire, dans un contexte de blocage économique – où aucune recette supplémentaire n’est perçue – exercent une pression indue sur des budgets déjà très sollicités.

Par conséquent, les gouvernements doivent mobiliser massivement des ressources nouvelles et supplémentaires auprès de partenaires multilatéraux, bilatéraux et commerciaux. D’où la nécessité de suspendre le service de la dette pendant deux ans, jusqu’à ce que l’ampleur de la pandémie et de la crise économique soit pleinement comprise. Aucun pays ne doit être contraint à choisir entre sauver des vies et rembourser des dettes.

Avant la crise, de nombreux gouvernements se concentraient sur des actions essentielles, à savoir construire des sociétés prospères en améliorant les services d’infrastructure, l’énergie, la connectivité, la technologie et l’éducation. Au cours de la décennie précédente, l’accès à l’énergie est passé d’environ 30 % à 70 % au Kenya, au Sénégal et en Côte d’Ivoire par exemple. Le chemin de fer qui relie Djibouti à l’Éthiopie a amélioré la connectivité dans la Corne de l’Afrique, tout comme le pont Sénégambie. Du port de Mombasa, au Kenya, au port de Lomé, au Togo, et au port de Tema, au Ghana, l’activité portuaire a doublé alors que l’activité économique s’est intensifiée sur le continent.

Le moratoire sur la dette bilatérale est un premier pas, il faudra aller plus loin

Les ministres des Finances de pays africains ont appelé à des mesures de relance budgétaire représentant 100 milliards de dollars. Le FMI a déjà accordé un allègement de la dette aux 17 pays à faible revenu du continent et a versé, par le biais d’autres mécanismes, plus de 17 milliards de dollars en financement d’urgence pour aider les pays à faire face au Covid-19. Le G20 a approuvé un moratoire de neuf mois sur la dette bilatérale de certains pays émergents jusqu’à la fin de l’année 2020, ce qui constitue un bon début.

Pour faire écho aux appels de plusieurs dirigeants africains et internationaux, une annulation de la dette publique de certains pays sera nécessaire

Mais nous devons aller plus loin, comme l’ont demandé les ministres, et inclure 2021 dans ce moratoire, car il est peu probable que les économies soient entièrement remises sur les rails l’année prochaine. Pour être pleinement effective, cette offre de moratoire qui est sur la table doit être précisée et améliorée à plusieurs égards. Pour faire écho aux appels de plusieurs dirigeants africains et internationaux, une annulation de la dette publique de certains pays sera nécessaire. Il faudrait que puissent s’ouvrir sans tarder des négociations au niveau bilatéral et au cas par cas.

Le cas de la dette commerciale internationale

S’agissant de la dette commerciale, il faut également agir car une part importante du service de la dette souveraine de l’Afrique est constituée de la dette commerciale contractée par nos pays auprès des marchés des euro-obligations et des banques commerciales internationales. Pour le continent, cela représente un service de dette de quelque 17 milliards de dollars en 2020. L’Afrique doit protéger son accès chèrement acquis aux marchés financiers internationaux en évitant tout défaut de paiement, qu’il soit volontaire ou non.

À ce jour, plus de 21 pays africains ont émis des euro-obligations. Leurs émissions sont passées de 2,5 milliards de dollars en 2010 à plus de 50 milliards de dollars en 2020. Grâce aux investissements publics massifs permis par ces capitaux et aux réformes qui ont attiré davantage d’investissements privés, y compris des investissements directs étrangers, nous avons créé davantage d’emplois et sorti des millions de personnes de la pauvreté, et nous avons progressé dans l’indice de développement humain.

L’accès aux ressources des marchés financiers internationaux doit être préservé. L’Afrique, comme les pays développés, a besoin des marchés financiers pour se développer. Grâce à la discipline et à de solides acquis de politique macroéconomique, l’Afrique a réalisé de grands progrès, mais il reste encore beaucoup à faire. La crise ne doit pas remettre en cause ces acquis, ni ébranler la confiance des marchés envers l’Afrique.

Le secteur financier a souvent été un foyer d’innovation en temps de crise, cela peut être encore le cas ici. Un instrument permettant aux pays africains d’assurer le service de leur dette en temps voulu, d’éviter les défauts de paiement, de s’acquitter pleinement de leurs obligations envers leurs créanciers commerciaux tout en ayant accès à des liquidités serait la meilleure option pour tous. Nous encourageons la communauté du développement, le FMI, la Banque mondiale et les autres institutions financières à travailler avec l’Afrique et les marchés pour soutenir ce plan.

Une ou plusieurs structures relais adéquates (véhicules ad hoc) financées de façon appropriée et garanties par des partenaires multilatéraux et bilatéraux pourraient être mises en place, avec comme objectif de refinancer les échéances de la dette commerciale des pays africains tombant en 2020 et 2021, moyennant une conversion de ces dernières en échéances longues à des conditions de faveur ou semi-concessionnelles afin de libérer une marge de manœuvre budgétaire bien nécessaire au cours des deux prochaines années. Ces structures pourraient bénéficier d’un rehaussement de crédit adéquat afin de réduire les coûts de financement.

Nous pourrions également envisager l’utilisation de droits de tirage spéciaux (DTS) combinés à l’effet des garanties afin d’obtenir une structure de financement optimale. Il n’y a aucun doute que nous pouvons surmonter les contraintes applicables et atteindre l’objectif visé si nos partenaires bilatéraux et multilatéraux y travaillent avec nous.

Une solution de prise en charge du service de la dette commerciale pourrait procurer à l’Afrique une marge budgétaire de plus de 44 milliards de dollars en 2020, fournissant ainsi des liquidités immédiates aux gouvernements – une transition immédiate bien nécessaire pour relancer la croissance en Afrique et maintenir la contribution de notre continent à la croissance de l’économie mondiale.

Donner à l’Afrique les moyens d’amortir l’impact de la crise et de jeter les bases d’une reprise rapide et vigoureuse est tout aussi urgent que les efforts déployés pour éradiquer le coronavirus.

Amnesty International France _ Indépendant grâce à vous, efficace avec vous !
Russie : la journaliste Elena Milachina en danger !

Le 13 avril, le président de la Tchétchénie Ramzan Kadyrov a publié sur Instagram une vidéo dans laquelle il menaçait de mort la journaliste russe Elena Milachina. Cette menace faisait suite à la publication d’un article de la journaliste à propos de la pandémie de COVID-19 en Tchétchénie.

Ce n’est pas la première fois qu’Elena Milachina est menacée en raison de son travail en Tchétchénie. Elle est aujourd’hui en grand danger et les autorités russes doivent de toute urgence prendre des mesures pour veiller à sa sécurité.
J'AGIS
Le 12 avril, le journal indépendant, Novaïa Gazeta, a publié un article d’Elena Milachina à propos de la pandémie de COVID-19 en Tchétchénie. Le lendemain, le président tchétchène appelait sur Instagram le gouvernement russe et le Service fédéral de sécurité (FSB) à « arrêter ces non-humains qui écrivent et provoquent [son] peuple ». Il a également annoncé que si les autorités russes n’agissaient pas, quelqu’un en Tchétchénie devra commettre un crime pour réduire la journaliste au silence.

Exigez des autorités russes qu’elles condamnent publiquement ces menaces de mort et qu’elles prennent des mesures pour protéger Elena Milachina.

Merci de votre soutien,
Katia Roux
Chargée de plaidoyer "Libertés"
chez Amnesty International France
 
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