Justice et Paix

" Je suis homme, l'injustice envers d'autres hommes révolte mon coeur. Je suis homme, l'oppression indigne ma nature. Je suis homme, les cruautés contre un si grand nombre de mes semblables ne m'inspirent que de l'horreur. Je suis homme et ce que je voudrais que l'on fit pour me rendre la liberté, l'honneur, les liens sacrés de la famille, je veux le faire pour rendre aux fils de ces peuples l'honneur, la liberté, la dignité. " (Cardinal Lavigerie, Conférence sur l'esclavage africain, Rome, église du Gesù)

 

NOS ENGAGEMENTS POUR LA JUSTICE T LA PAIX
S'EXPRIMENT DE DIFFÉRENTES MANIÈRES :

En vivant proches des pauvres, partageant leur vie.
Dans les lieux de fractures sociales où la dignité n'est pas respectée.
Dans les communautés de base où chaque personne est responsable et travaille pour le bien commun.
Dans les forums internationaux pour que les décisions prises ne laissent personne en marge.

Dans cette rubrique, nous aborderons différents engagements des Missionnaires d'Afrique, en particulier notre présence auprès des enfants de la rue à Ouagadougou et la défense du monde paysan.

 

Tchad : 44 membres de Boko Haram retrouvés morts dans leur cellule de prison

| Par Jeune Afrique avec AFP
Des soldats de l'armée nigérienne, le 7 mars 2015. (Image d'illustration)

Ces éléments de Boko Haram avaient été faits prisonniers au cours d’une récente opération lancée par le Tchad contre le groupe jihadiste. Ils ont été retrouvés morts dans leur cellule à N’Djamena jeudi dernier, selon une annonce du procureur de la République.

« À la suite des combats dans le lac Tchad, 58 éléments de Boko Haram avaient été faits prisonniers et déférés à N’Djamena pour les besoins de l’enquête. Jeudi matin, leurs geôliers nous ont annoncé que 44 prisonniers avaient été retrouvés morts dans leur cellule», a déclaré à la télévision nationale Youssouf Tom, procureur de la République, qui s’est rendu sur place.

«Nous avons enterré 40 corps et remis 4 corps au médecin légiste pour une autopsie», a-t-il précisé.

«La conclusion de cette autopsie indique qu’il y a eu consommation d’une substance létale et iatrogène, ayant produit un trouble cardiaque chez les uns et une asphyxie sévère chez les autres», a ajouté le procureur. L’enquête va se poursuivre «pour déterminer la cause exacte de ce drame», a-t-il indiqué.

Colère de Bohoma

Ces prisonniers avait été arrêtés lors de la vaste opération lancée par le président tchadien Idriss Déby Itno fin mars contre les groupes djihadistes qui multiplient les attaques sur le lac Tchad. Ils avaient été remis à la justice mercredi, avait annoncé le ministre tchadien de la Justice Djimet Arabi. Ils devaient ensuite être auditionnés jeudi puis être jugés par une cour criminelle.

L’opération militaire tchadienne, baptisée Colère de Bohoma s’est déroulée du 31 mars au 8 avril. Selon l’armée, au moins 52 soldats tchadiens et 1.000 djihadistes ont trouvé la mort au cours de cette opération déclenchée pour venger l’armée tchadienne.

Celle-ci avait été la cible d’une sanglante attaque le 23 mars d’éléments de Boko Haram contre l’une de ses bases, tuant une centaine de ses soldats. La pire défaite jamais enregistrée en moins de 24 heures par cette armée.

 
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Mali : Mahamadou Camara remis en liberté, la fin du feuilleton judiciaire ?

| Par
Mahamadou Camara lors du premier conseil des ministres du gouvernement Moussa Mara, le 17 avril 2014

La chambre d’accusation de la Cour d’appel de Bamako a annulé mardi les poursuites à l’encontre de Mahamadou Camara. L’ancien ministre et ancien directeur de cabinet d’Ibrahim Boubacar Keïta était poursuivi pour « complicité de favoritisme » dans l’affaire de la surfacturation de matériel militaire.

Mahamadou Camara a été libéré mardi et a rejoint son domicile à Bamako. La Cour d’appel de Bamako a annulé les poursuites à son encontre. L’ancien directeur de cabinet d’Ibrahim Boubacar Keïta était détenu depuis le 27 mars à la prison centrale de Bamako.

Le procureur de la République près le tribunal de grande instance de la commune III de Bamako, Mahamadou Kassogué, le soupçonnait de « complicité de favoritisme » dans l’affaire de l’équipement militaire, qui avait été classée sans suite en 2018.

Le magistrat, qui a rouvert le dossier ainsi que celui de l’acquisition de l’avion présidentiel en 2014, a dans son viseur plusieurs hommes d’affaires et d’anciens ministres. Il se base, notamment, sur un rapport du bureau du Vérificateur général, qui fait état de « graves manquements à l’orthodoxie financière et comptable » et évoquait, le 27 mars dernier, « des faits de détournements de deniers publics sur fond d’opérations frauduleuses pour un montant de 9 350 120 750 F CFA et de surfacturation par faux et usage de faux pour un montant de 29 311 069 068 F CFA ».

Trois jours pour faire appel

La défense de Mahamadou Camara a insisté sur le fait que leur client était directeur de cabinet au moment des faits et avait donc rang de ministre. Par conséquent, il aurait dû être poursuivi, à l’instar des autres ministres, devant la Haute Cour de Justice.

La décision de la Cour d’appel de Bamako mardi annule de fait tous les actes initiés par le procureur et le juge d’instruction. Mais ce feuilleton politico-judiciaire n’est pas pour autant terminé.

Mahamadou Kassogué a trois jours pour faire appel, soit jusqu’à ce vendredi soir. Le procureur a, en outre, la possibilité d’entamer une procédure devant la Haute Cour de Justice. Dans ce cas, il faudrait cependant au préalable attendre que la future Assemblée nationale, dont les députés viennent tout juste d’être élus, se prononce sur une éventuelle levée de l’immunité des anciens ministres visés par l’enquête du magistrat.

L’arrestation de Mahamadou Camara, un proche d’IBK, a créé des remous dans le gouvernement de large ouverture mis en place à la faveur d’un accord politique en mai. Depuis l’arrivée de Malick Coulibaly à la tête du ministère de la Justice, et la nomination de Mahamadou Kassogué au pôle anti-corruption, plusieurs personnalités réputées proches de l’exécutif font l’objet de procédures dans des dossiers de corruption présumée.

C’est notamment le cas du maire de Bamako, Adama Sangaré, incarcéré en octobre 2019 et du président de l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture du Mali, Bakary Togola, placé en détention préventive le 13 septembre dernier.

 
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Comment l’apprentissage des langues étrangères rend plus tolérant |The Conversation

L’apprentissage des langues étrangères présente de multiples avantages. La recherche prouve, par exemple, que les personnes âgées qui parlent plusieurs langues sont moins susceptibles de développer des symptômes de démence sénile.

Le cerveau bilingue se laisse également moins distraire, et l’apprentissage des langues étrangères améliore aussi la créativité. On sait aussi qu’après voir appris une première langue étrangère, il est moins difficile d’en apprendre d’autres.

Amy Thompson, West Virginia University

Pourquoi apprendre des langues étrangères ? Timothy Vollmer, CC BY-SA

Pourquoi est-il si important d’étudier les langues étrangères à l’université ?

En tant que linguiste de terrain, j’étudie les bénéfices cognitifs et émotionnels de l’apprentissage des langues. Et parmi ces bénéfices, il y en a un qui ne va pas forcément de soi : cela améliore notre tolérance.

Cet effet se manifeste de 2 façons.

Tout d’abord, cet apprentissage permet d’ouvrir les yeux sur d’autres façons de faire, ce qu’on nomme « compétence culturelle ».

L’autre gain lié à cet apprentissage est en rapport avec l’aisance plus ou moins grande à se retrouver dans une situation peu familière, que l’on nomme « tolérance à l’ambiguïté ».

Compréhension interculturelle

La compétence culturelle est essentielle, dans un monde de plus en plus globalisé. Mais comment l’apprentissage des langues permet-il de la renforcer ? La réponse est à chercher du côté des différents types d’intelligence.

Les recherches sur l’intelligence menées par le psychologue Robert Sternberg décrivent deux types d’intelligence et la façon dont elles sont liées à l’apprentissage d’une langue chez l’adulte. Ce qu’il nomme « intelligence pratique » est comparable à l’intelligence sociale, car elle aide les individus à comprendre les informations non explicites de leur environnement, comme certains gestes chargés de sens ou d’autres éléments socialement signifiants.

Apprendre une autre langue réduit l’anxiété sociale. COD Newsroom, CC BY

Apprendre une langue, c’est forcément s’imprégner de cultures différentes. Les étudiants piochent des éléments culturels associés à la langue pendant les cours, mais aussi au fil de leurs expériences d’immersion.

Les chercheurs Hanh Thi Nguyen et Guy Kellogg ont démontré que lorsque leurs étudiants apprennent une langue, ils développent de nouvelles façons de comprendre une culture différente de la leur à travers l’analyse des stéréotypes culturels. Ils expliquent ainsi que « l’apprentissage d’une nouvelle langue implique non seulement l’acquisition d’éléments linguistiques, mais aussi l’intégration de nouvelles façons de penser et de nouveaux comportements ».

Avec l’aide de leur professeur, les étudiants peuvent s’exercer à développer une pensée critique sur les stéréotypes associés à différentes cultures, qu’il s’agisse de nourriture, d’apparence ou de façons de converser.

À la rencontre de l’inconnu

L’autre façon dont l’apprentissage des langues améliore la tolérance est en lien avec la « tolérance à l’ambiguïté ».

Une personne dotée d’une haute tolérance à l’ambiguïté trouve les situations inhabituelles plus excitantes qu’effrayantes. Mes propres recherches sur la motivation, l’anxiété et les croyances démontrent que l’apprentissage des langues améliore la tolérance à l’ambiguïté, en particulier quand la personne parle plus d’une langue étrangère.

Le phénomène est assez simple à comprendre. Toute conversation dans une langue étrangère implique l’utilisation de mots inconnus. Si l’un des interlocuteurs passait son temps à interrompre l’échange pour dire « Attendez, je ne connais pas ce mot. Laissez-moi le chercher dans le dictionnaire », il serait difficile de discuter. Les personnes dotées d’une haute tolérance à l’ambiguïté ne ressentent aucune gêne à poursuivre la conversation bien qu’elles ne comprennent pas tous les mots.

Les linguistes de terrain Jean-Marc Dewaele et Li Wei étudient également cet aspect, et pour eux, il ne fait aucun doute que l’apprentissage de plus d’une langue étrangère accroît sensiblement la tolérance à l’ambiguïté.

Ce que change cette faculté de compréhension

Une haute tolérance à l’ambiguïté comporte beaucoup davantages. Elle aide les étudiants à limiter leur anxiété dans le cadre de la vie en société et facilite leurs futures expériences d’apprentissage des langues. Sans surprise, plus une personne est habituée à apprendre des langues, plus elle est à l’aise avec l’ambiguïté inhérente à cet apprentissage.

Mais ce n’est pas tout.

Les personnes dotées d’un haut biveau de tolérance à l’ambiguïté ont l’esprit d’entreprendre ; elles sont plus optimistes, plus portées sur l’innovation et la prise de risques.

L’apprentissage des langues dans l’éducation supérieure

La plupart des universités américaines ont une exigence minimale en matière d’enseignement des langues étrangères, qui varie en fonction de la majeure de l’étudiant.

Les universités américaines devraient proposer plus systématiquement l’étude des langues étrangères. sarspri, CC BY-NC

L’université de Princeton, au contraire, a annoncé récemment que tous les étudiants, quel que soit leur niveau de langues quand ils entrent à l’université, doivent désormais apprendre une langue étrangère.

Il me semble que les autres universités devraient suivre l’exemple de Princeton, car l’apprentissage d’une langue au niveau universitaire pourrait mener à une plus grande tolérance des cultures diversifiées que l’on retrouve dans la société américaine, tolérance dont nous avons grand besoin au vu du climat actuel, tandis qu’une vague de crimes haineux frappe les campus du pays.

La connaissance d’autres langages est une clé indispensable pour le citoyen d’aujourd’hui, dans un monde globalisé. Comme l’ancienne secrétaire d’État à l’éducation Anne Duncan l’a si justement dit,

« Notre pays a besoin de créer un avenir dans lequel tous les Américains comprendront que le fait de parler plusieurs langues permet à notre pays de rester dans la course et de travailler main dans la main avec nos partenaires, partout dans le monde. »

Puisque nous savons que l’étude des langues étrangères améliore la tolérance, la question n’est plus « Pourquoi faudrait-il apprendre les langues étrangères à l’université » mais plutôt « Pourquoi diable ne le ferait-on pas ? »

Amy Thompson, Professor of Applied Linguistics and Chair of World Languages, Literatures, and Linguistics, West Virginia University

This article is republished from The Conversation under a Creative Commons license. Read the original article.

 
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[Tribune] Suspension de la dette de l’Afrique :
un bon début du G20, mais il faut faire plus

| Par Jeune Afrique - Ngozi Okonjo-Iweala, Brahima Sangafowa Coulibaly, Tidjane Thiam, Donald Kaberuka,
Vera Songwe, Strive Masiyiwa, Louise Mushikiwabo et Trevor Manuel
Des volontaires de la Croix Rouge lors d'une opération de sensibilisation sur la pandémie de coronavirus, à Dakar, le 18 avril 2020.

Déjà cosignataires de la tribune “Il faut alléger la dette africaine pour combattre le coronavirus”, publiée le 11 avril par Jeune Afrique, les huit grands noms africains de la politique et de l’économie reviennent ici sur la décision des ministres des Finances du G20 d’une suspension partielle du service de la dette de 77 États à bas revenus.

Par Ngozi Okonjo-Iweala, Brahima Sangafowa Coulibaly, Tidjane Thiam, Donald Kaberuka, Vera Songwe, Strive Masiyiwa, Louise Mushikiwabo et Trevor Manuel

Les pays africains, comme beaucoup d’autres sur la planète, sont aujourd’hui confrontés à un choc sans précédent qui nécessite une aide financière substantielle et sans conditions, dans l’esprit du fameux « quoi qu’il en coûte » de l’ancien patron de la Banque centrale européenne, Mario Draghi. Cette crise est inédite et frappe toutes les régions en même temps. Les institutions sont submergées car l’urgence se manifeste à tous les niveaux : sanitaire, économique et social.

Le continent n’est pas encore frappé de plein fouet par la pandémie, pourtant son économie est déjà à l’arrêt. Elle enregistrera cette année son plus mauvais taux de croissance depuis trente ans et, déjà, la crise sanitaire fait naître des crises économiques, financières et alimentaires. Les conséquences de cette catastrophe peuvent être contenues, mais uniquement si nous intervenons immédiatement, collectivement, et si nous mobilisons toutes les ressources disponibles.

Les dirigeants des pays avancés, avec sagesse, ont déjà jeté aux orties toute notion d’orthodoxie financière et l’Afrique doit faire de même. Les premières décisions de la réunion des ministres des Finances et des gouverneurs de Banques centrales du G20 (G20 FMCBG) vont dans la bonne direction, mais il faut faire plus et viser plus haut.

Le 15 avril, conformément aux instructions des dirigeants des pays membres, ce G20 FMCBG a présenté un plan d’action visant à accroître les ressources pour faire face à la pandémie de Covid-19. Parmi les principales recommandations résumées dans son communiqué, il faut citer :

– une constitution rapide du fonds de réponse d’urgence de 200 milliards de dollars créé à l’initiative des différentes banques multilatérales de développement

– l’appel à relever le niveau de contribution des États au Fonds fiduciaire d’assistance et de riposte aux catastrophes (ARC) et au Fonds fiduciaire pour la réduction de la pauvreté et pour la croissance (FFRPC)

– une suspension temporaire du paiement du service de la dette par les pays les plus pauvres, ce dernier point étant particulièrement important.

Ce plan d’action répond en partie aux demandes formulées dans notre précédent appel, mais il ne va pas assez loin.

L’augmentation des contributions aux banques de développement et au FMI apportera une aide bienvenue, mais la part qui ira à l’Afrique ne suffira pas à couvrir les 200 milliards de dollars dont l’Union africaine (UA) a estimé que le continent avait besoin pour se défendre contre la pandémie.

Quant à la suspension du paiement de la dette, elle n’est pas assez ambitieuse. Pour permettre à l’Afrique de combattre vraiment la maladie et ses conséquences économiques, nous préconisons donc les mesures suivantes :

1 – Élargir le nombre de pays bénéficiant d’un moratoire sur la dette

Au stade où nous en sommes, tous les pays dont la Banque internationale pour la reconstruction et le développement (IBRD) considère qu’ils peuvent se financer sur les marchés sont exclus du moratoire. Sur le continent, cela concerne l’Algérie, l’Angola, l’Égypte, la Libye, le Maroc, l’Afrique du Sud et la Tunisie. Mais face à une crise comme celle du Covid-19, le critère retenu pour suspendre le remboursement de la dette devrait être la nécessité de combattre le virus et ses conséquences sur l’économie.

Le nombre de candidats au départ ne fera que croître si l’économie de ces pays s’effondre

Or quatre des cinq pays africains les plus touchés par le coronavirus – l’Algérie, l’Égypte, le Maroc et l’Afrique du Sud – font précisément partie de ceux que le moratoire exclut. Le fait que la Libye soit déchirée par une guerre civile et durement affectée par la chute du cours du pétrole, ou que la Tunisie ait été l’épicentre du Printemps arabe, avec les risques potentiels que cela implique, devrait être pris en considération. Si la pandémie n’est pas vaincue dans ces pays, leurs voisins en subiront les conséquences, même si ces derniers parviennent à l’enrayer sur leur propre territoire.

De même, les difficultés économiques et financières de ces pays auront un impact significatif sur l’ensemble du continent. Les sept pays exclus du bénéfice du moratoire par les règles de l’IBRD représentent à eux seuls 50 % du PIB de l’Afrique, 46 % de ses exportations et 55 % des exportations au sein du continent. Ils pèsent aussi très lourd dans les relations économiques avec le reste du monde – pour ne donner qu’un exemple, ils représentent 72 % des importations depuis l’Union européenne – et dans les flux migratoires. Et le nombre de candidats au départ ne fera que croître si l’économie de ces pays s’effondre en privant leur jeunesse de toute perspective.

2 – Accroître la participation des créanciers privés

Le G20 FMCBG a appelé le secteur privé à se joindre à l’effort collectif d’allègement de la dette. C’est un bon début, mais il faut aller plus loin en chargeant le FMI de développer, avec l’UA et l’Institut de la finance internationale (IIF), un mécanisme qui garantira à la fois la soutenabilité de la dette et le futur accès des États aux marchés financiers.

L’objectif du moratoire ne pourra être tenu que si les créanciers privés participent à l’effort

Aujourd’hui, le secteur privé représente une part importante de la dette africaine, et surtout une part disproportionnée du paiement du service de celle-ci. Pour beaucoup de pays du continent, même relativement peu endettés, le remboursement des intérêts peut représenter plus de 20 % de leurs revenus.

C’est pourquoi l’objectif du moratoire ne pourra être tenu que si les créanciers privés participent à l’effort. Bien sûr, les pays demandant une suspension des remboursements devront le faire de leur plein gré, mais nous estimons que les pays identifiés par l’IBRD y ont tout intérêt, et tout doit être mis en œuvre pour les encourager à recourir à de tels mécanismes.

3 – Renforcer les droits de tirage spéciaux

Les droits de tirage spéciaux (DTS) sont un outil financier qui a fait ses preuves lorsqu’il s’agit de renforcer les ressources disponibles. En décidant d’attribuer aux pays qui en ont besoin une part des DTS existants non utilisés, ou bien en en créant de nouveaux – dont le montant total pourrait atteindre 500 milliards de dollars –, on fournirait le niveau de liquidités nécessaire aux banques centrales et aux entreprises privées.

Cette crise de financement nous oblige à nous montrer innovants

Actuellement, le flux des devises à destination du continent s’est tari du fait de la fuite des capitaux, de la chute des cours des matières premières et de la forte réduction des échanges commerciaux et des entrées de touristes. Si bien que beaucoup de pays n’ont que deux semaines de réserves et que les devises africaines se sont dépréciées de 20 à 30 %.

Plusieurs banques centrales ont un besoin urgent d’être renflouées, tandis que les entreprises privées ne trouvent plus de sources de financement, ou seulement à des taux très désavantageux. Certaines de ces sociétés – dans l’aérien, l’hôtellerie ou le tourisme, notamment – doivent en outre rendre des comptes à des compagnies étrangères. Le secteur aérien africain, par exemple, a besoin de 1 milliard de dollars uniquement pour payer la location de ses appareils. Si nous voulons que ces entreprises évitent la faillite, il faut un apport de capital.

Cette crise de financement nous oblige à nous montrer innovants. Un véhicule financier ad hoc pourrait être créé afin de recueillir les fonds nécessaires, sur la base du volontariat. Il permettrait, s’il est bien conçu, d’alléger le poids de la dette tout en garantissant aux pays qui l’utiliseraient l’accès aux marchés internationaux. Quant aux prêteurs, ils bénéficieraient de créances à la fois plus liquides et plus solides. Nous pensons donc que le FMI, l’IIF et l’UA devraient être chargés d’explorer cette voie.

4 – Améliorer la gouvernance et la transparence quant à l’utilisation de ces ressources

Grâce à un allègement substantiel de leur dette, les gouvernements africains pourront se concentrer sur la protection des populations les plus fragiles, soutenir leur secteur privé – en particulier les PME – en lui assurant un accès au crédit, et limiter l’impact économique et bancaire de la crise actuelle. Mais en retour, ils devront rendre des comptes, faire preuve de plus de transparence, publier des prévisions fiables…

L’heure n’est pas à l’hésitation mais aux réponses politiques fortes

Certaines organisations font déjà beaucoup pour la transparence sur le continent, mais ce sont les pays eux-mêmes qui doivent user de leurs moyens technologiques pour tracer et analyser les fonds qui leur seront alloués. Quitte à demander l’aide des ONG et des sociétés spécialisées dans ce type de procédures.

L’heure n’est pas à l’hésitation mais aux réponses politiques fortes. C’est en prenant maintenant des mesures décisives que nous éviterons de futurs défauts de paiement qui provoqueraient le chaos sur le marché des dettes souveraines. C’est aussi ce qui nous permettra de sauver des millions d’emplois sur le continent, d’éviter une déstabilisation politique et sociale et d’empêcher une flambée de l’insécurité et des migrations.

Ngozi Okonjo-Iweala, membre de l’Africa Growth Initiative (Brookings Institution), ancienne ministre des Finances du Nigeria et directrice générale de la Banque mondiale
Brahima Sangafowa Coulibaly, directeur de l’Africa Growth Initiative (Brookings Institution), ancien chief economist de la Réserve fédérale américaine
Tidjane Thiam, membre du Council on Foreign Relations (Etats-Unis), ancien directeur général de Crédit Suisse
Donald Kaberuka, membre du comité de direction du Fonds mondial, ancien président de la Banque africaine de développement
Vera Songwe, membre de l’Africa Growth Initiative (Brookings Institution), secrétaire exécutive de la Commission Économique pour l’Afrique (CEA) des Nations-Unies
Strive Masiyiwa, fondateur et directeur exécutif d’Econet Global, philanthrope
Louise Mushikiwabo, secrétaire générale de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF), ancienne ministre des Affaires étrangères de Rwanda
Cristina Duarte, ancienne ministre des Finances du Cap-Vert

 
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