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Mali : les coulisses du retour à Kidal de l’armée reconstituée

| Par - avec Aïssatou Diallo
Arrivée de l’armée reconstituée à Kidal.

Le contingent de 600 soldats maliens de l’armée reconstituée est arrivé ce 13 février à Kidal, bastion de la rébellion touarègue. Qui le compose et quel sera son rôle ? Décryptage.

Une colonne de voitures transportant 600 soldats de l’armée malienne reconstituée est arrivée à Kidal, ce jeudi. Parti de Gao, le 10 février, ce bataillon militaire est constitué de 200 soldats de l’armée traditionnelle, ainsi que de 200 soldats de la coordination des mouvements de l’Azawad et 200 soldats des mouvements de la Plateforme du 14 juin, issus du processus de désarmement, démobilisation et réinsertion (DDR). Il est escorté par les casques bleus de la Minusma.

Pour la première fois depuis les violents combats de 2014 qui l’ont opposée aux séparatistes de l’Azawad, l’armée va reprendre position dans cette région, bastion de la rébellion touarègue. En plus des soldats, une équipe technique constituée d’une quarantaine de Forces armées maliennes (FAMa) – médecins, infirmiers, mécaniciens, et spécialistes de la transmission – fait partie du groupe.

« Le retour de l’armée à Kidal signifie qu’elle pourra renouer avec sa mission régalienne de défense du territoire national. Cela est d’autant plus réconfortant que ce redéploiement se fait dans une ambiance conviviale et dans un cadre accepté par chaque partie », se félicité le colonel-major Diarran Koné, porte-parole de l’armée, auprès de Jeune Afrique.

Après le redéploiement de l’armée, celui de la police et de la gendarmerie doit suivre pour administrer Kidal

À Kidal, le bataillon sera basé au Camp I, qui avait été occupé par l’armée malienne jusqu’en 2012, lorsque les FAMa avaient été chassées par le groupe jihadiste Ansar Eddine, et qui vient d’être rénové par la Minusma.

« Le bataillon aura pour rôle premier d’assurer la protection du gouverneur à Kidal, première personnalité du gouvernement dans la région », explique Samba Tall, directeur de la division Désarmement, la démobilisation et la réinsertion (DDR) et Réforme du secteur de la sécurité (SSR) de la Minusma. « La sécurité des autorités intérimaires sera également assurée par ce bataillon ainsi que celle du camp des forces armées maliennes, qui est l’ancien camp du Mécanisme opérationnel de coopération (MOC) », ajoute-t-il.

Mali

Embryon de la future armée reconstituée

L’armée reconstituée participera à des patrouilles conjointes avec la Minusma. Une fois opérationnel, le bataillon soutiendra le processus de DDR-Intégration dans toute la région.

La ville de Kidal est actuellement administrée par la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA). « Après le redéploiement de l’armée, celui de la police et de la gendarmerie doit suivre pour administrer la ville. Kidal doit être sous l’administration étatique, sous tous ses aspects. Les mouvements signataires doivent rejoindre les sites de cantonnement », préconise Fahad Ag Mahmoud, membre de la Plateforme, une coalition des mouvements pro-Bamako.

« Ce retour de nos forces à Kidal est une étape décisive du processus de stabilisation en vue de la restauration de l’État au nord du pays. C’est une étape importante de la réunification du Mali », se réjouit le ministre des Affaires étrangères Tiébilé Dramé.

Il s’agit « d’un embryon de la future armée reconstituée qui sera une armée nationale représentant toute la diversité du pays. Si cela fonctionne, tout le reste du processus va réussir », assure de son côté Sidi Ag Baye, porte-parole de la CMA, l’ex-rébellion. La prochaine étape du processus consistera à déployer de tels contingent à Gao, Kidal et à Ménaka.

Consensus

Ce déploiement a eu lieu sans incident, grâce à un consensus trouvé par les parties signataires de l’accord de paix. « La répartition du commandant de l’armée dans l’Azawad sera partagée. À Kidal, il reviendra à un officier de l’armée traditionnelle. Et dans les régions de Gao et Kidal, il sera exercé par des officiers issus de la plateforme et de la CMA », explique Mohamed Maouloud Ramadan, l’un des porte-paroles de la Coordination.

Mais le colonel major Diarran Koné, porte-parole de l’armée prévient : « Il n’y a qu’une seule armée malienne. Point final ! ».

Togo : que reste-il de C14, la coalition des partis d’opposition ?

| Par
Brigitte Adjamagbo-Johnson,  coordinatrice de la coalition, et Jean-Pierre Fabre, leader de l’ANC, en 2017, à Lomé.

La coalition, qui ne rassemble plus que cinq partis, semble en sursis. Le scrutin du 22 février sera pour elle un véritable test.

La coalition des partis de l’opposition (C14), qui avait boycotté les législatives de 2018 et les municipales de juin 2019 – les premières depuis plus de trente ans – estime avoir appris de ses erreurs. Elle va donc participer au scrutin présidentiel de février prochain.

« Nous considérons cette échéance électorale comme une opportunité pour réaliser l’alternance tant attendue par les Togolais, explique la coordinatrice de la C14, Brigitte Adjamagbo-Johnson. La seule manière d’y parvenir est d’y aller en rangs serrés autour d’un candidat unique de l’opposition. Nous nous sommes rapprochés de Mgr Philippe Fanoko Kpodzro, archevêque émérite de Lomé, qui partage cette idée, pour que la coalition qu’il a lancée désigne Agbéyomé Kodjo comme son candidat ».

Querelles intestines

Depuis la mi-janvier, Brigitte Adjamagbo-Johnson en est d’ailleurs devenue la porte-parole. À 65 ans, Agbéyomé Kodjo peut s’appuyer sur son Mouvement patriotique pour la démocratie et le développement (MPDD) et se targue d’être le candidat « naturel » de l’opposition.

Président de l’Assemblée nationale de 1999 à 2000, puis Premier ministre jusqu’en 2002, sous le président Gnassingbé Eyadéma, il est considéré comme un transfuge du système, capable de le dynamiter.

Mais l’ancien cacique du Rassemblement du peuple togolais, tombé en disgrâce au lendemain de la présidentielle de 2003, doit convaincre les autres factions de son camp. Jean-Pierre Fabre, leader de l’Alliance nationale pour le changement (ANC), principale force d’opposition du pays, a déjà annoncé sa candidature en octobre dernier.

Rongée par les querelles intestines et les guerres d’ego, la coalition, qui a perdu beaucoup de membres et d’influence, a-t-elle les moyens de rebondir ? Brigitte Adjamagbo-Johnson se montre confiante. « Malgré les départs, les fondements sont solides, et la C14 demeure la troisième force politique du pays au vu des résultats des élections locales », avance-t-elle.

Ressentiments

Un avis que ne partage pas Kokou Folly Hetcheli, universitaire et analyste politique : « L’opposition est épuisée. Elle n’est pas restée cohérente dans sa quête du pouvoir et en son sein subsiste des ressentiments voire des incompréhensions nuisibles à sa capacité de mobilisation », décrypte-il.

Rassemblant à l’origine quatorze partis politiques, comme son nom l’indique, la Coalition ne compte désormais que la Convention démocratique des peuples africains, les Forces démocratiques pour la République, les Démocrates socialistes africains, l’Union des démocrates socialistes et enfin les Démocrates.

L’avenir de la C14 semble être plus que jamais compromis

« La C14 reste l’ombre d’elle-même, réduite à sa portion congrue », résume Kokou Folly Hetcheli. Le scrutin du 22 février s’annonce donc pour elle comme un véritable test, au moment où « son avenir semble être plus que jamais compromis », selon l’analyste politique.

Dakar et Nouakchott s’entendent sur l’achat-vente du gaz issu
du projet Grand Tortue-Ahmeyim

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Exploration de Kosmos au large du Sénégal et de la Mauritanie.

Le Sénégal et la Mauritanie viennent de signer un contrat d’achat-vente du gaz naturel liquéfié (GNL) issu de la phase 1 du mégaprojet de Grand Tortue, qui doit faire de ces deux pays des producteurs de gaz d’ici à 2022.

L’accord d’achat-vente du GNL a été signé par le ministre sénégalais du Pétrole et des Énergies, Makhtar Cissé et son homologue mauritanien, Mohamed Abdel Vetah, le 11 février à Dakar, avec les directeurs des sociétés partenaires sur le projet Grand Tortue-Ahmeyim (GTA), BP et Kosmos Energy.

Selon Makhtar Cissé, ce champ sera développé en trois phases. La première phase doit produire environ 2,5 millions de tonnes par an (mtpa) de gaz naturel liquéfié destinés à l’exportation et 70 millions de pieds cubes par jour de gaz (environ 500 mégawatts) pour l’approvisionnement des deux marchés domestiques.


>>> À lire notre dossier Pétrole et gaz : un renouveau africain ? <<<


S’agissant des coûts, le ministre sénégalais précise « qu’environ 5 milliards de dollars (3 000 milliards de francs CFA ; 4,6 millions d’euros) d’investissement sont nécessaires pour réaliser la première phase de production de GTA ».  BP, l’opérateur britannique qui pilote le projet, avait estimé lors de son entrée sur GTA l’investissement total pour la mise en production du champ à environ 10 milliards de dollars (environ 8,6 milliards d’euros).

Commercialisation via BP Gas Marketing

Sous sa forme liquéfiée, le gaz produit sera stocké dans des bacs cryogéniques ou dans des méthaniers. Dans les deux cas, indique Makhtar Cissé, ces équipements nécessitent un niveau d’investissement, par mètre cube de GNL stocké très élevé, en comparaison au coût de stockage du pétrole brut.

Les différentes entités impliquées dans le projet (États et compagnies pétro-gazières) ont convenu de commercialiser conjointement – via la filiale de BP, BP Gas Marketing (BPGM) -,  tout le GNL de cette phase 1 pour l’optimiser, et ce conformément aux conditions fixées par l’accord de coopération entre Dakar et Nouakchott.

De son côté, le Mauritanien Mohamed Abdel Vetah, indique que le choix de la société BPGM comme acheteur du GNL de la phase 1 a été fait à la suite d’un « processus transparent » mené par les deux sociétés nationales pétrolières Petrosen, pour le Sénégal, et la Société mauritanienne des hydrocarbures et de patrimoine minier (SHHPM), ainsi que le consortium mené par BP et exploitant sur GTA.

Pour rappel, un accord de coopération pour le développement et l’exploitation du champ gazier GTA a été signé en février 2018 entre le Sénégal et la Mauritanie. Les réserves de ce gisement offshore situé à cheval sur les eaux territoriales mauritaniennes et sénégalaises sont estimées à 450 milliards de m3 de gaz. Les deux États ont indiqué que le partage se ferait équitablement, à 50-50.

Les trois points à retenir du 33e sommet de l'Union africaine

Cyril Ramaphosa à la tribune de l'Union africaine lors de sa prise de fonction comme patron de l'organisation, le 9 février 2020.
Cyril Ramaphosa à la tribune de l'Union africaine lors de sa prise de fonction comme patron de l'organisation, le 9 février 2020. REUTERS/Tiksa Negeri

C’est désormais l'Afrique du Sud de Cyril Ramaphosa qui dirige l’organisation continentale pour un an, succédant à l'Égyptien al-Sissi. Retour sur les trois temps forts du sommet.

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Tout d’abord, les premiers mots de Cyril Ramaphosa à la tribune : « Nous allons concentrer notre travail sur la résolution des conflits ». Le président sud-africain annonce deux sommets au mois de mai à Pretoria. Le premier sur la sécurité, le second sur la zone de libre-échange continentale.

Autre temps fort, la colère de Moussa Faki Mahamat, le président de la commission, sur l’absence de solidarité des pays africains envers les États menacés d’effondrement sous les coups des jihadistes. « C’est déconcertant », a-t-il lancé aux chefs d’État présents devant lui.

Troisième moment important : Antonio Guterres, le secrétaire général des Nations unies, déclare à Addis Abeba son soutien à l’initiative africaine sur la Libye. L’idée d’organiser un grand forum de réconciliation fait son chemin. 

Entretien exclusif avec Antonio Guterres

En revanche, les questions de droits de l’homme et de démocratie ont été à peine évoquées, pour ne pas dire passées sous le tapis. La question du troisième ou du quatrième mandat est pourtant au cœur de plusieurs élections présidentielles en 2020.


Pas d'avancées sur le Soudan du Sud, la pression monte

Les positions restent figées alors que la date butoir du 22 février pour la formation d'un gouvernement d'unité nationale approche à grand pas. Le bloc régional Igad a prévenu : pas question d'un troisième report de cette limite. Il devrait donc voir le jour dans onze jours à Juba. C'est en tout cas le souhait de l'organisation sous-régionale mais aussi du président Salva Kiir.

« Nous mettrons en place ce gouvernement avec ou sans Riek Machar », affirme l'ambassadeur sud-soudanais à Addis-Abeba.

L'opposant principal, lui, voudrait d'abord régler la principale pomme de discorde : le nombre d’États régionaux et leurs frontières. En jeu : le contrôle du territoire, des ressources donc et la perspective d'élections en mars 2022.

« Personne ne nous dira combien d’États doit avoir le Soudan du Sud, nous sommes souverains », réplique l'ambassadeur James Morgan. Pour lui le sujet est clos alors que pour le porte-parole du SPLM-IO de Riek Machar, pas du tout.
Plusieurs sources affirment que l'Igad a fait une proposition.

Le gouvernement actuel à jusqu'au samedi prochain pour y répondre.
À Addis-Abeba, les deux leaders ont vu le président de l'UA, Cyril Ramaphosa.
Ils se sont aussi retrouvés face-à-face, en compagnie du président de l'Igad, Adballah Hamdok et de l'Ougandais Yoweri Museveni.

« Ils peuvent se rencontrer tant qu'ils veulent, l'important désormais est que chacun accepte de faire des concessions » se lamente un observateur. Rien ne semble l'indiquer. La communauté internationale cache de moins en moins son agacement. Le médiateur sud-africain est rentré très fâché de Juba vendredi dernier, selon une source bien informée.

Antonio Guterres a l’«espoir» d’un cessez-le-feu rapide en Libye

Coronavirus: aucun cas avéré au Burkina Faso, où la prévention est renforcée

 
Vue aérienne de la capitale du Burkina Faso, Ouagadougou, le 10 janvier 2000.
Vue aérienne de la capitale du Burkina Faso, Ouagadougou, le 10 janvier 2000. Patrick Hertzog/AFP

Le ressortissant chinois placé en quarantaine il y a quelques jours n’est pas atteint par le coronavirus, annoncé la ministre de la Santé Claudine Lougué mardi 11 février. Mais les autorités burkinabè surveillent de près la situation sanitaire et redoublent de vigilance.

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Avec notre correspondant à Ouagadougou, Yaya Boudani

Soulagement au Burkina Faso. Au mardi 11 février, alors que la Chine annonce mercredi matin que plus de 1 100 personnes ont succombé au coronavirus, le pays d’Afrique de l’Ouest reste encore épargné du moindre cas. L’inquiétude était montée la semaine dernière, quand des rumeurs évoquaient un cas, celui d’un Chinois placé en quarantaine dans un centre de santé.

Léonie Claudine Lougué a rassuré son pays lors d’une conférence de presse à laquelle des diplomates chinois et des représentants de l’OMS participaient.

Les entrées sur le territoire sont surveillées

« Le patient est quotidiennement suivi par une équipe médicale et il est en très bon état de santé. Les investigations des laboratoires, menées par des experts venus de l'Institut-Pasteur de Dakar, sont négatives pour le nouveau coronavirus », a déclaré la professeure et ministre de la Santé.

Le Burkina Faso n’en reste pas moins mobilisé pour empêcher toute arrivée et propagation du virus sur son sol. Le dispositif de riposte a été mis en place après le premier cas suspect et il demeure actif. « L’entrée sur le territoire burkinabè est surveillée », souligne Léonie Claudine Lougué, qui incite vivement ses concitoyens à « éviter d’être en contact direct avec quelqu’un qui a des signes de grippe », à savoir « nez qui coule, toux, fièvre, fatigue ».

De son côté, l’ambassade de Chine recommande à ses ressortissants de surseoir momentanément à tout retour ou passage au Burkina Faso.

Infographie] Le coronavirus en 7 points
Le coronavirus en 7 points RFI