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Mali : la tragédie d’Ansongo, au-delà de l’émotion 

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Par  Ibrahim Maiga

Spécialiste des questions de sécurité et de gouvernance, auteur de "Répondre à l'insécurité dans le Liptako-Gourma", publié en mars 2021.

Convoi de l’armée nigérienne se dirigeant vers la ville d’Ansongo, dans le nord du Mali, le 29 janvier 2013.
Convoi de l’armée nigérienne se dirigeant vers la ville d’Ansongo, dans le nord du Mali, le 29 janvier 2013. © Kambou Sia / AFP

Après le massacre d’une cinquantaine de personnes, le 8 août, dans quatre localités à la frontière avec le Niger, la définition d’une stratégie de lutte plus cohérente s’impose.

Une cinquantaine de morts, tel est le bilan provisoire des attaques qui ont ciblé les localités de Karou, Ouatagouna, Dirga et Daoutegueft, dans le cercle d’Ansongo [Gao, dans le nord du Mali]. Cette énième tragédie vient nous rappeler la triste réalité : celle d’un pays instable depuis une décennie, qui peine à se reconstruire et où les populations vivent dans la peur permanente – ce que brouhahas politiciens et controverses improductives ont tendance à nous faire oublier trop souvent.

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QU’IL SEMBLE LOIN, LE TEMPS OÙ L’ON POUVAIT DORMIR À LA BELLE ÉTOILE ENTRE GAO ET ANSONGO ! »

Depuis 2015, l’insécurité n’a cessé de s’étendre. Les trois quarts du territoire sont devenus – sauf motif impérieux – des zones formellement déconseillées aux étrangers. En réalité, depuis 2012, des milliers de Maliens sont privés de l’une de leurs libertés fondamentales, celle d’aller et de venir librement. Qu’il semble loin ce temps où l’on pouvait prendre l’autocar à 5 heures à Gao et arriver à 23 heures à Bamako ! Qu’il paraît loin, aussi, ce temps où l’on pouvait dormir à la belle étoile, perdu dans un bled entre Gao et Ansongo ! L’insouciance a laissé place à l’angoisse : celle de croiser sur son chemin des hommes armés non identifiés.

L’État désemparé

Face à ces massacres répétés, l’État malien, comme ses partenaires, semble désemparé. Malgré tous les efforts déployés ces dernières années, tant sur le plan national (Opérations Dambé, Maliko) que dans le cadre de dispositifs sécuritaires régionaux (Force conjointe du G5 Sahel) et internationaux (Barkhane, Takuba et Minusma), la situation n’a cessé de se détériorer. Les civils payent un lourd tribut. Les tueries de Koulogon, Ogossagou, Sobane-Da sont encore fraîches dans la mémoire collective.

Passé le temps de la torpeur, vient celui des doutes, des questions, des accusations, voire des suspicions. Que faire pour rompre avec ce cycle infernal de la violence ? La réponse n’est hélas pas simple. Certes, il est plus commode de penser que le départ de la France ou l’arrivée de la Russie suffiront à juguler l’insécurité. En réalité, la solution viendra des Maliens eux-mêmes, à condition qu’ils aient une idée précise de la direction à emprunter.

Sans être exhaustif, trois raisons, qui me paraissent essentielles, peuvent en partie expliquer l’inefficacité de la réponse sécuritaire et l’enlisement progressif des forces étrangères.

Cacophonie institutionnelle

Première raison : l’incapacité à appréhender l’insécurité comme un phénomène global, à la fois politique et social. Les initiatives qui ne reposent que sur une compréhension partielle dudit phénomène ont forcément une portée et une efficacité limitées.

Deuxième raison : l’insuffisante coordination des initiatives, qu’elles soient d’inspiration étatique ou le fait de partenaires extérieurs. Les responsables chargés de l’élaboration et de la mise en œuvre des réponses institutionnelles à l’insécurité travaillent souvent en vase clos. C’est le cas, par exemple, des multiples structures de l’État chargées du rétablissement de la paix dans le pays. Cette cacophonie institutionnelle accroît les rivalités entre ces acteurs et limite grandement leur efficacité sur le terrain.

Troisième raison : la faiblesse de la réponse judiciaire à des drames similaires à ceux de Koulogon, Ogossagou et Sobane-Da, qui ont favorisé l’instauration d’un cycle de violence.

Approche holitisque

À partir de ces constats, quelques recommandations peuvent être formulées pour améliorer l’action de l’État et celle de ses partenaires.

Le gouvernement devrait consentir davantage d’efforts pour se doter d’une stratégie holistique et, surtout, plus cohérente. Ainsi, la plus grande attention doit être accordée à la réforme du secteur de la sécurité. Contrairement à une idée reçue et qui semble guider ce processus au Mali, cette réforme n’est pas que l’affaire des militaires. Comme le dit l’adage, « les malades ne se soignent pas entre eux ».

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LA PROTECTION DES CIVILS DOIT DEVENIR LA PRIORITÉ DES FORCES DE DÉFENSE ET DE SÉCURITÉ.

Une stratégie plus cohérente devrait aboutir à une meilleure articulation entre les différentes actions, qu’elles soient militaires ou humanitaires, qu’elles concernent le développement, le renforcement de la cohésion sociale ou l’amélioration de la gouvernance.

La protection des civils doit devenir une priorité stratégique pour les Forces de défense et de sécurité maliennes. Celles-ci doivent mobiliser leur énergie et leurs ressources en ce sens, et pas seulement contre la lutte antiterroriste. Cela signifie, a contrario, que leur efficacité ne devra plus uniquement être évaluée à l’aune du nombre de terroristes neutralisés, mais au regard du nombre de villages et d’habitants secourus ou défendus.

Le gouvernement devrait par ailleurs consentir davantage d’efforts en matière de lutte contre l’impunité. Cela suppose un renforcement du dispositif judiciaire, notamment du pôle spécialisé dans la lutte contre le terrorisme et la criminalité transnationale, pour prévenir, poursuivre et sanctionner les auteurs de violations graves des droits humains.

Enfin, les autorités maliennes doivent davantage mettre l’accent sur l’utilité de l’État pour les populations, et non sur la simple visibilité des symboles de celui-ci, en particulier dans les zones éloignées de la capitale. Il n’importe pas tant d’être présent dans ces zones que de les administrer en répondant concrètement aux besoins, en constante augmentation, des populations.

Golfe de Guinée : des pirates toujours plus professionnels et plus agressifs

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Mis à jour le 10 août 2021 à 11h36
Patrouille navale des forces de sécurité béninoises.
© Patrouille navale des forces de sécurité béninoises.

Le golfe de Guinée est de loin la zone maritime la plus dangereuse au monde. Et les attaques y sont de plus en plus violentes et sophistiquées. La preuve en infographies.

Comment mieux saisir un sujet complexe que grâce à la datavisualisation ? En 2020-2021, chaque semaine, Jeune Afrique vous a proposé une infographie sur l’un des grands enjeux du moment. Souveraineté économique, problèmes sécuritaires, batailles politiques… Cette semaine, nous vous invitons à replonger dans ces décryptages exclusifs. Aujourd’hui, le fléau de la piraterie qui sévit dans le Golfe de Guinée, devenu en quelques années la zone maritime la plus dangereuse du monde.

Les assaillants sont lourdement armés, et leur opération remarquablement coordonnée. Le 23 janvier dernier, lorsqu’ils se lancent à l’abordage du Mozart, un porte-conteneurs appartenant à l’armateur turc Boden Denizcilik A.S. battant pavillon libérien, les pirates nigérians mettent tout en œuvre pour atteindre leur objectif : capturer les membres de l’équipage.

Lorsqu’ils se hissent à bord du navire, un mastodonte de 220 mètres de long parti de Lagos pour rejoindre Le Cap, les assaillants percent les parois des quartiers des marins, où ces derniers se sont réfugiés. Un ingénieur azeri est tué dans l’assaut, quinze marins sont enlevés, tous sont turcs. Les trois derniers membres de l’équipage laissés à bord ramèneront tant bien que mal le navire à Port-Gentil, au Gabon.

Un mois plus tard, mi-février, les quinze marins turcs sont finalement libérés par leurs kidnappeurs, au terme d’une « médiation » menée par une équipe européenne. Les détails de la transaction – et en particulier le montant de la somme versée par l’armateur – n’ont pas été dévoilés.

Cette attaque meurtrière est loin d’être une première dans le golfe de Guinée, qui connaît désormais la triste destinée du golfe d’Aden (au large des côtes somaliennes), qui était jusqu’en 2019 le point névralgique de la piraterie mondiale. Au cours de l’année 2020, 130 marins ont été enlevés au large des côtes ouest-africaines, au cours de 22 attaques.


Au fil des années, les pirates ont gagné en expérience. Voire en expertise. Ils se sont professionnalisés. Le modus operandi est désormais bien rodé. Les attaques – souvent réussies – ont lieu de plus en plus fréquemment en haute mer, loin de la mangrove du delta du Niger d’où partent les assaillants. Ils utilisent désormais des chalutiers comme navires « mères », qui viennent en appui aux petites embarcations rapides qui servent à lancer les abordages.

Une technique qui leur permet d’attaquer plus loin des côtes ainsi que de lancer des opérations plus longues et plus complexes. L’assaut mené contre le Mozart a ainsi duré six heures en tout. Ils se concentrent en outre sur les enlèvements jugés plus rentables, et ciblent les navires dont les compagnies d’assurances sont réputées pour verser des rançons afin d’obtenir la libération des équipages.

Pour tenter d’endiguer le phénomène, et apporter un soutien aux forces navales ouest-africaines aux moyens limités, l’Union européenne a lancé, le 25 janvier, une cellule de coordination et a fait du golfe de Guinée la première zone maritime d’intérêt européen. Le Danemark a promis l’envoi, en novembre 2021, d’une frégate dotée d’un équipage de 175 marins et d’un hélicoptère pour une durée de trois mois.

Les pirates qui opèrent dans le golfe de Guinée sont presque exclusivement des Nigérians installés dans le delta du Niger, région riche en pétrole mais dont les retombées économiques n’ont que très peu profité aux populations locales.

Un sentiment d’exclusion économique qui a servi de terreau aux gangs. Les kidnappings peuvent en effet rapporter gros : de 40 000 à 50 000 dollars par otage en moyenne, selon les experts en sécurité maritime de Bimco et Dryad Global.

 

Tchad : un affrontement entre agriculteurs et pasteurs fait une vingtaine de morts

Un troupeau d'un pasteur tchadien dans la région de Ouaddaï, à l'est du Tchad. (Photo d'illustration).
Un troupeau d'un pasteur tchadien dans la région de Ouaddaï, à l'est du Tchad. (Photo d'illustration). AFP - AMAURY HAUCHARD

Au Tchad, un conflit intercommunautaire a fait plus de vingt morts le week-end dernier. A l’origine, un conflit foncier opposant deux communautés dans la province du Hadier Lamis, non loin de la capitale. Un conflit qui est la conséquence des difficultés de la justice à trancher les différends entre agriculteurs et éleveurs.

Avec notre correspondante à Ndjamena, Madjiasra Nako 

Le bilan des affrontements de ce week-end du 7 août est de 25 morts. Certaines des victimes de ce weekend ont succombé à leurs blessures, une des parties au conflit ayant utilisé des armes de guerre. 

Différend foncier

A l’origine de l'accrochage, un différend foncier opposant deux communautés autour des périmètres où les uns cherchent à faire de l’agriculture, alors que les pasteurs cherchent à y faire paître du bétail. Une scène à laquelle on assiste régulièrement depuis de nombreuses années. 

Des membres du gouvernement ont été dépêchés sur place en hélicoptère pour calmer la situation sans vraiment y parvenir. Un calme relatif règne sur place depuis dimanche soir, mais la tension reste vive.  

Conflits récurrents 

Les conflits entre communautés sont récurrents depuis plusieurs années et se perpétuent à cause de la faible capacité de la justice à dire le droit. 

À lire aussi : Tchad : la CNDH interpelle le gouvernement sur le conflit intercommunautaire au Salamat

Côte d’Ivoire : réconciliation, gouvernement, RHDP… Patrick Achi, l’équilibriste

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Mis à jour le 03 août 2021 à 12h09
Patrick Achi arrive au palais présidentiel lors du premier conseil ministériel du nouveau gouvernement à Abidjan, en Côte d’Ivoire, le 7 avril 2021.

Patrick Achi arrive au palais présidentiel lors du premier conseil ministériel du nouveau gouvernement à Abidjan,

en Côte d'Ivoire, le 7 avril 2021. © LEGNAN KOULA/MAX PPP

Propulsé sur le devant de la scène après le décès d’Hamed Bakayoko, le Premier ministre a fort à faire. À la tête du gouvernement, où les dossiers sont légions, comme au sein du RHDP. Faux pas interdits…

Cette nuit-là, un vent de panique souffle sur la lagune Ébrié. Des chancelleries du Plateau aux villas ministérielles cossues de Cocody, les téléphones ne cessent de vibrer. Comment est-ce possible ? Après les décès brutaux d’Amadou Gon Coulibaly et d’Hamed Bakayoko en neuf mois, voilà que leur successeur, Patrick Achi, est à son tour évacué en urgence vers Paris. En cette soirée du 10 mai, l’état de santé du Premier ministre fait craindre à certains une sinistre répétition de l’histoire. Opéré quelques jours plus tôt de polypes intestinaux, voilà 48 heures que sa situation se dégrade et qu’il perd du sang. Pour Alassane Ouattara, hors de question de prendre le moindre risque. Il fait embarquer son collaborateur à bord d’un Gulfstream de la flotte présidentielle, en compagnie de son épouse et de son médecin personnel. Arrivé au petit matin, il est directement transféré à l’hôpital américain de Paris, à Neuilly-sur-Seine.

Après quatre jours de convalescence, Achi va nettement mieux. L’heure est venue de rentrer, pour couper court aux folles rumeurs abidjanaises. Aux journalistes présents à l’aéroport international Félix Houphouët-Boigny pour son retour, il déclare : « Je me sens très bien. Je suis revenu en pleine forme pour reprendre le travail. » Depuis, le chef du gouvernement n’a plus connu d’alerte de santé. Ni quitté son poste à la primature, où il a passé le cap symbolique des 100 premiers jours fin juin. « Le pire job de la terre », lâche, sourire pincé, un diplomate étranger.

Le « Fillon de Ouattara »

Car au-delà des histoires de malédiction présumée, être le Premier ministre d’Alassane Ouattara dans le contexte actuel n’a rien d’une sinécure. Depuis sa réélection à un troisième mandat en octobre, marqué par le boycott de ses opposants et par la mort de plus de 80 personnes, le président ivoirien sait sa marge de manœuvre réduite. « Il est très attaché à l’image qu’il laissera une fois parti, analyse l’un de ses confidents. Or cette affaire de troisième mandat lui a beaucoup coûté. Il veut donc corriger le tir en obtenant rapidement de bons résultats économiques et sociaux, et Patrick Achi est d’abord là pour ça. »

Les objectifs sont élevés. Après quasiment dix ans de croissance à 8 % entre 2011 et 2020, il faut relancer une machine mise à l’arrêt par la pandémie de Covid-19. Régulièrement accusé de ne pas avoir sorti sa population de la pauvreté malgré ces chiffres honorables, Ouattara entend désormais obtenir davantage de retombées, notamment en termes d’éducation et de santé. Il espère aussi multiplier les créations d’emplois en soutenant le secteur privé. Autant dire que son chef du gouvernement, par ailleurs accaparé par la poursuite des grands travaux ou la lutte contre la menace jihadiste, a largement de quoi faire.

Les bons connaisseurs des arcanes ivoiriennes sont unanimes : depuis sa nomination, le Premier ministre est soumis à une intense pression du palais. « Il est harcelé par son boss, qui garde les rênes courtes sur lui », assure une source diplomatique à Abidjan. Audiences, réunions, visites de terrain… Ses journées sont sans fin et ses nuits (très) courtes. L’intéressé, réputé gros travailleur, encaisse sans broncher. Le chef de l’État, lui, dicte la cadence. Premier ministre ou premier collaborateur du président ? Certains s’en amusent et voient en lui le « Fillon de Ouattara ».

Technocrate méticuleux

Le chef de l’État n’a pas hésité longtemps quand il a fallu trouver un successeur à Hamed Bakayoko, décédé en mars. « Qui d’autre aurait-il pu choisir pour ce poste ? », fait mine de s’interroger un ancien ministre. Depuis sa nomination en tant que secrétaire général de la présidence (avec rang de ministre d’État) en 2017, Patrick Achi est au cœur du réacteur. Et s’est beaucoup rapproché de son aîné, qui lui fait désormais pleine confiance. « Cela fait plusieurs années qu’il a une vue transversale sur tous les dossiers et qu’il travaille étroitement avec le président, avec lequel il échange pratiquement tous les jours », confie un intime de Ouattara.

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C’EST UN HOMME RÉFLÉCHI ET PRUDENT, IL AVANCE SEULEMENT QUAND IL SAIT OÙ IL VA ET QU’IL EST SÛR D’OBTENIR DES RÉSULTATS

Ingénieur de formation passé par l’université américaine de Stanford, ce technocrate méticuleux de 65 ans a le genre de profil qu’affectionne le chef de l’État. Ministre des Infrastructures pendant une quinzaine d’années, d’abord sous Laurent Gbagbo puis, de 2011 à 2017, sous Ouattara, Achi a géré une bonne partie des chantiers du pays depuis plus d’une décennie. Ceux qui travaillent avec lui évoquent tous sa culture – parfois abrupte – du résultat. « Quand il est en réunion, il demande tous les chiffres, les taux, les coûts, les bénéfices, confie l’un de ses interlocuteurs réguliers. Il donne l’impression d’être quelqu’un de conceptuel et structuré. » « C’est un homme réfléchi et prudent. Il avance seulement quand il sait où il va et qu’il est sûr d’obtenir des résultats », ajoute un ministre.

Tel un équilibriste sur une corde, le Premier ministre fait attention au moindre faux pas. Pas question de faire ou dire quoi que ce soit qui pourrait être mal perçu par la présidence. Sollicité à plusieurs reprises par JA, il a préféré garder le silence. « Pas le moment de s’exprimer », nous a-t-il fait savoir. Se méfiant des journalistes, qu’il n’hésite pas à rabrouer quand un désaccord survient, il aime garder le contrôle sur sa communication. Lorsqu’un de ses hôtes a brièvement diffusé sur les réseaux sociaux une vidéo d’une petite fête organisée chez lui pour célébrer sa nomination, quelques jours après le décès d’Hamed Bakayoko, c’est peu dire que Patrick Achi n’a pas apprécié – et assure, en privé, ne pas avoir été à l’initiative de cette soirée.

Futur candidat ?


Patrick Achi, au palais présidentiel en septembre 2019. © Thierry Gouegnon/REUTERS

S’il prend autant de précautions, c’est aussi parce qu’il joue gros. Officiellement, il est encore trop tôt pour évoquer la succession d’Alassane Ouattara, tout juste réélu pour un nouveau quinquennat. La question est pourtant déjà dans toutes les têtes au sein du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP, au pouvoir). « Beaucoup de gens ont des ambitions, mais il n’y a aucun successeur désigné, affirme une source au palais. Le président garde la main sur ses équipes. Il ne faut pas que les envies personnelles polluent nos objectifs. »

Après les disparitions d’Amadou Gon Coulibaly et d’Hamed Bakayoko, le nouveau Premier ministre fait pourtant partie des favoris. À l’heure actuelle, il semble même être l’un des mieux placés. Il le sait, mais évite soigneusement de donner l’impression d’y penser tous les matins en se rasant. Le natif d’Adzopé est-il plus ambitieux qu’il ne souhaite le laisser paraître ? « Il fait attention à ne pas se mettre au premier plan pour ne pas contrarier Ouattara, croit savoir l’un de ses ex-compagnons du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI, sa formation d’origine). Mais il joue sur la durée et réfléchit à être un jour candidat à la présidentielle. »

Depuis plus de vingt ans, ce métis, fils d’une mère bretonne et d’un père attié de la Mé, fait preuve d’une certaine habileté politique. « Il s’est toujours battu pour rester dans le giron du pouvoir », résume un ancien ministre qui le connait bien. « Il est très calculateur et opportuniste », grince un autre ancien membre du gouvernement.

Il faut remonter au milieu des années 1990, sous la présidence de Bédié, pour retrouver les premiers pas de Patrick Achi dans l’administration ivoirienne. Il y débute en tant que conseiller du ministre des Finances, puis de celui de l’Énergie. En 1999, survient le coup d’État du général Robert Gueï. Le quadra du PDCI parvient à rester dans le jeu. Il est chargé par le Premier ministre de transition, Seydou Diarra, de réformer la stratégique filière café-cacao. En 2000, nouveau changement au sommet de l’État : Laurent Gbagbo est élu président. Encore une fois, l’administrateur tire son épingle du jeu. Et intègre même le gouvernement en tant que ministre des Infrastructures économiques. « Bien qu’il vienne du PDCI, Gbagbo l’appréciait et songeait à en faire son Premier ministre. Il cherchait un jeune technocrate pour mener ses réformes administratives et sociales », se rappelle un intime de l’ancien président.

La carte Gon Coulibaly

Le 19 septembre 2002, Achi, qui est également porte-parole du gouvernement, se trouve à Rome avec Gbagbo quand une tentative de coup d’État ébranle son régime. Une déclaration présidentielle est rédigée en urgence. Contre toute attente, il refuse de la lire, prétextant qu’il s’agit de la position de la présidence et non de celle du gouvernement. Un froid s’installe. Le chef de l’État ne comprend pas. Certains de ses intimes le soupçonnent d’être de mèche avec les putschistes. Alors que Gbagbo regagne Abidjan, Patrick Achi part en mission à Washington, puis se rend à Paris, avant de rentrer à son tour. En délicatesse avec le chef de l’État, il se tourne vers Henri Konan Bédié. « Il l’a beaucoup défendu, raconte une figure du PDCI. Il l’a même hébergé un temps chez lui, à Daoukro, quand Achi craignait pour sa sécurité. Il le voyait comme l’un des cadres du futur sur lesquels il pouvait s’appuyer. »

Après les accords de Linas-Marcoussis en janvier 2003, Patrick Achi retrouve son maroquin au nom du PDCI. Revenu sous la coupe de Bédié, il se range avec lui derrière Alassane Ouattara durant la crise post-électorale de 2010-2011. Le nouveau président le maintient au ministère des Infrastructures économiques. Puis vient le divorce entre Bédié et Ouattara. Achi reste loyal au pouvoir et choisit le RHDP, tout en essayant de rapprocher ses deux aînés. Un rôle qu’il tient encore aujourd’hui, fort des relations respectueuses qu’il a gardées avec le sphinx de Daoukro – à qui il a rendu visite début juin.

En 2017, il franchit un nouveau palier : il est nommé secrétaire général de la présidence pour remplacer Amadou Gon Coulibaly, que Ouattara a propulsé à la primature. Pour en avoir été le témoin pendant plusieurs années, Achi sait qu’il n’aura jamais la relation exceptionnelle, quasi-filiale, qui existait entre le chef de l’État et son « jeune frère ». Pas question donc d’essayer de le remplacer, il sait que c’est impossible, mais pourquoi ne pas essayer de s’inscrire dans sa lignée ? Depuis sa nomination, le chef du gouvernement joue ouvertement la carte Gon Coulibaly. « Il est arrivé à la primature dans un contexte difficile, après les décès de ses deux prédécesseurs, mais il a été plutôt fin tacticien, relate un ministre influent. Il a tout suite opté pour la fidélité à Amadou, dont il a en quelque sorte perpétré l’héritage. Cela a plu au président. »

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IL ESSAIE DE CASSER SON IMAGE, ET S’AFFICHE CASQUETTE À L’ENVERS SUR LA TÊTE, AU GUIDON D’UNE PUISSANTE MOTO

Dans la mouture du gouvernement sur laquelle il travaillait avant d’être emporté par un cancer, Hamed Bakayoko avait écarté – ou déclassé – de nombreux lieutenants du « lion de Korhogo ». « Quand il a été nommé, Achi nous a appelé quasiment un par un pour nous dire qu’il comptait sur nous, confie un ministre autrefois proche de Gon Coulibaly. Aujourd’hui, la plupart d’entre nous sont toujours au gouvernement et ont rallié le Premier ministre. »

En parallèle, l’ancien secrétaire général de la présidence multiplie les gestes symboliques. Quelques jours après son entrée à la primature, il va s’incliner sur la tombe de Gon Coulibaly lors des funérailles traditionnelles et va solennellement saluer la mère du défunt. Le 8 juillet dernier, pour la commémoration de la première année de son décès, il lui rend un vibrant hommage, ponctué de superlatifs, devant tout le RHDP.  

Ancrage local et réseau important

Entre les deux hommes, la ressemblance saute aux yeux. Ingénieurs, fins connaisseurs des rouages de l’État, hommes de dossiers… « Il a certaines qualités de Gon que le président appréciait », indique un proche de Ouattara. Comme lui, Patrick Achi souffre aussi d’une image de technicien un brin rigide et peu populaire qu’il essaie de casser, comme lorsqu’il s’affiche, casquette à l’envers sur la tête, au guidon d’une puissante moto dans les rues d’Adzopé.  

« Les gens lui collent volontiers cette étiquette de technocrate mais en réalité, c’est un pur politicien », souffle un ministre. Ceux qui le connaissent l’assurent : derrière ses lunettes et son costume cravate, le Premier ministre est en fait très « politique ». En 2011, il parvient à se faire élire député de la Mé, l’un des fiefs du Front populaire ivoirien (FPI) de Laurent Gbagbo. Un fauteuil qu’il n’a plus quitté depuis, après avoir été réélu en 2016 et en mars dernier. En parallèle, il prend la présidence du conseil régional en 2013. « Il parle l’attié et il connait la vie au village. Cette zone a beau être acquise au FPI, il continue à y régner et a gardé le soutien des chefs traditionnels au gré de sa carrière. Il a un vrai ancrage local », reconnaît un de ses opposants. Il a aussi un réseau important à Abidjan et dans la sous-région. Quant aux partenaires étrangers, ils semblent l’avoir adoubé. « Il donne l’impression d’être un gestionnaire sérieux. Il a un côté rassurant pour les occidentaux », estime un diplomate français.

Personnalité peu clivante, qui a gardé des liens au PDCI et qui est capable de discuter avec les pro-Gbagbo, Achi va maintenant devoir conquérir les cœurs au sein du RHDP. Et plus particulièrement parmi les barons du Rassemblement des Républicains (RDR), la formation originelle de Ouattara, qui n’apprécient guère d’assister à l’ascension d’un homme qui a rejoint le président sur le tard. Chrétien venant du sud, alors que le noyau dur de l’entourage présidentiel est majoritairement musulman du nord, Achi n’est pas dans les bonnes grâces de certains membres du clan Ouattara. « Mais cela peut aussi être vu comme un atout, conclut un baron du RHDP. Ce serait même un bon signal et un antidote à la xénophobie portée par certains de nos adversaires. »

Mali : le plan d’action gouvernemental de Choguel Maïga divise la classe politique

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Mis à jour le 04 août 2021 à 15h11
Fer de lance de l’opposition au Conseil national de transition, Choguel Kokalla Maïga a été nommé Premier ministre le 7 juin.
Fer de lance de l’opposition au Conseil national de transition, Choguel Kokalla Maïga a été nommé Premier ministre
le 7 juin. © HADAMA DIAKITE/MAXPPP

Dispositif sécuritaire, gouvernance, corruption… Le Premier ministre Choguel Maïga déploie une feuille de route ambitieuse qui laisse certains observateurs dubitatifs.

Sans surprise, le plan d’action gouvernemental (PAG) a été largement adopté lundi 2 août au soir, par le Conseil national de transition (CNT), l’organe législatif, avec 102 voix pour, deux voix contre et neuf abstentions. Si l’issue du vote était quasiment connue d’avance, l’enjeu est tel qu’il a fallu attendre dix heures de débats intenses entre les membres du CNT pour en arriver à l’épilogue.

Pour faire approuver sa politique par les représentants du CNT et convaincre l’ensemble des Maliens, Choguel Kokalla Maïga avait présenté avec une certaine gravité, ce vendredi 30 juillet, son PAG qui doit conduire le pays à la fin de la transition. « Nous prenons en charge le destin de la Nation en un moment crucial », a-t-il souligné. Face au Conseil, le Premier ministre a qualifié le Mali de « grand corps malade qui a besoin d’une thérapie ».

Persuadé d’avoir la recette pour sortir le Mali de l’ornière, Choguel Maïga a dressé une feuille de route gouvernementale qu’il a déclinée en quatre principaux axes. Son coût s’élève à plus de 2 000 milliards de F CFA (environ 3 milliards d’euros).

Renforcement sécuritaire

Ces axes reposent principalement sur les grandes préoccupations actuelles du pays, au premier rang desquelles l’aspect sécuritaire. Le Premier ministre a promis de renforcer la formation des forces de sécurité et de défense, et de mettre à leur disposition des moyens humains et matériels supplémentaires pour permettre le redéploiement de l’administration, et des services sociaux de base, dans les zones qu’elle a désertées – principalement dans le nord du Mali – à cause de l’insécurité.

Cette stratégie de sécurisation du pays doit également passer par l’appui et le déploiement de l’armée reconstituée. Un dispositif cher aux membres de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA), et prévu par l’accord de paix de 2015, mais qui a eu du mal à prendre forme.

Sans donner plus de détails, le chef du gouvernement prévoit de s’attaquer aussi à la relecture « intelligente et consensuelle » de cet accord pour en garantir « une appropriation collective et le renforcement de son caractère inclusif ».

Bien que la CMA défende l’application stricte de l’accord, la classe politique a pour sa part demandé sa relecture avec insistance à l’issue du dialogue national inclusif (DNI) de 2019. « Le Premier ministre a bien précisé qu’on ne toucherait pas à l’ensemble de l’accord, tempère Jeamille Bittar, porte-parole du Mouvement du 5 juin-Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP). Certains points, comme la laïcité et l’intégrité territoriale du Mali, ne seront pas négociables. »

« Rupture et exemplarité »


Choguel Kokalla Maïga présente le plan d’action du gouvernement au Conseil national de transition à Bamako, le 30 juillet 2021

 

S’il a largement été question du renforcement de la sécurité sur l’ensemble du territoire, Choguel Maïga, qui était l’une des figures de proue du M5-RFP, a manifesté sa volonté de marquer une rupture avec l’ancien système. Ce qui implique des réformes politiques et institutionnelles destinées à « rénover le cadre politique » afin de « doter le pays d’institutions fortes et légitimes » qui permettront d’instaurer une « stabilité politique et une paix durable », a-t-il déclaré devant le CNT.

Comme le Premier ministre l’avait déjà annoncé dans les jours qui ont précédé sa prise de fonctions, des assises nationales conduites par le ministre de la Refondation, Ikassa Maïga, vont se tenir dans les prochaines semaines pour encadrer la mise en place de ce futur cadre politique. Elles s’appuieront principalement sur les conclusions du DNI.

Au cœur de sa stratégie de bonne gouvernance – un volet scruté avec attention par les membres du M5 –, Choguel Maïga a choisi de placer « la rupture et l’exemplarité ». Ce qui va, entre autres, demander « une réduction drastique » du train de vie de l’État et la création d’« espaces budgétaires pour améliorer les conditions de vie des populations ». Ainsi, il engage son gouvernement à trouver 100 milliards de F CFA qui seront « réalloués » aux secteurs sociaux prioritaires comme la santé et l’éducation.

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LE GOUVERNEMENT VA RÉCUPÉRER UNE MANNE FINANCIÈRE IMPORTANTE EN LUTTANT CONTRE LA CORRUPTION

Le Premier ministre a prévenu que des audits sur les bâtiments publics seraient réalisés et qu’une commission d’enquête sur les démolitions réalisées dans la zone aéroportuaire de Bamako allait être lancée.

« La stratégie du gouvernement est claire. Pour financer son PAG, il va essayer de récupérer une manne financière importante en luttant contre la corruption. L’idée est de procéder à l’arrestation de barons de l’ancien système qui ont détourné des deniers publics pour s’enrichir, et de leur demander de les restituer à l’État », explique l’analyste Mohamed Maïga, qui travaille sur les politiques socioéconomiques de territoire.

Depuis que Choguel Maïga a pris la tête de la primature, les arrestations de grandes figures médiatiques se multiplient. Dernière cible en date : Adama Sangaré, l’influent maire de Bamako, qui a été placé sous mandat de dépôt par le pôle économique et financier.

Prolongement de la transition ?

Renforcement du dispositif sécuritaire du pays, instauration de la bonne gouvernance, lutte contre la corruption… Sur le papier, la feuille de route gouvernementale proposée par Choguel Maïga voit donc très grand, mais elle est loin de faire l’unanimité, surtout au sein de la classe politique. Que lui reproche-t-on réellement ?

« À la lecture de ce PAG, force est de constater qu’il présage d’ores et déjà un prolongement de la transition parce qu’il est très ambitieux, observe Boubacar Haïdara, enseignant en sciences politiques à l’université de Ségou et chercheur associé au laboratoire Les Afriques dans le monde (LAM). On se demande d’emblée comment ils vont pouvoir exécuter tout ce que contient ce plan en seulement huit mois. »

Si, ces derniers jours, le chef du gouvernement n’a cessé de répéter qu’il s’engageait à respecter les délais de la transition en organisant les élections présidentielle et législatives le 27 février prochain, la classe politique reste pour le moins dubitative. La gestion des scrutins constitue l’un des points de discorde. Malgré quelques critiques, le Premier ministre a maintenu son choix de mettre en place un organe unique pour les organiser, un projet qui avait été adopté le 7 juillet dernier en conseil des ministres. Il est pourtant jugé « irréalisable » par de nombreux observateurs.

« Le baromètre de réussite d’une transition est la bonne organisation des élections dans le but de retourner à une vie constitutionnelle normale. Nous nous félicitons que le Premier ministre s’engage à respecter le délai [prévu]. Néanmoins, à l’Adema [Alliance pour la démocratie au Mali], nous jugeons que cette déclaration n’est pas compatible avec le plan d’action que Choguel Maïga a proposé puisque celui-ci valide la mise en place d’un organe unique », regrette Adama Diarra, secrétaire politique de l’Adema-Parti africain pour la solidarité et la justice (PASJ).

Et d’ajouter : « Nous l’avions demandé à long terme, dans la perspective d’une transition. Aujourd’hui, sa mise en place est impossible puisqu’elle nécessite d’une part l’adoption de textes portant le règlement de cet organe, et d’autre part des moyens financiers et humains. Ce qui ne peut se réaliser en cinq mois. »

« Les critiques de l’organe unique n’ont pas lieu d’être, balaie pour sa part Jeamille Bittar, un soutien de Choguel Maïga. Il faut rappeler qu’il s’agissait au départ d’une revendication de l’ensemble de la classe politique. Le temps que demande la mise en place une autre commission électorale est aussi long que celui que va prendre la création de l’organe unique. »

Scission au sein du gouvernement

En ce qui concerne l’organe unique, des divergences se manifestent aussi au sein du gouvernement. « Au niveau de l’État, il y a une scission entre le Premier ministre et le MATD [le ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, le lieutenant-colonel Abdoulaye Maïga], qui avait organisé un atelier sur instruction de Choguel Maïga pour évaluer la faisabilité de la mise en place de cet organe unique. Cet atelier a conclu qu’il était l’impossible de mettre en place ledit organe dans le temps disponible, assure Adama Diarra. »

Choguel Maïga a quant à lui demandé à recevoir un comité d’experts électoraux nationaux – auquel Ibrahim Sangho, président de l’Observatoire pour les élections et la bonne gouvernance au Mali, a participé – qu’il a reçus le 16 juin dernier. Composé d’enseignants-chercheurs et de magistrats, ce comité indique qu’il est encore possible de créer l’organe unique en trois mois. Et dans ce nouveau dispositif, le MATD, qui était la pièce maîtresse dans l’organisation des élections, doit lui transférer ses compétences actuelles. Il jouera désormais un rôle d’appui territorial auprès de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni).

Un budget onéreux

Outre la gestion des élections, le budget alloué à ce plan gouvernemental pose question : il atteint plus de 2 000 milliards de F CFA – pour un gouvernement auquel il ne reste que sept mois pour agir – alors que le budget annuel du Mali est de 2 500 milliards de F CFA pour l’année 2021.

Mohamed Maïga juge que « certaines réformes de ce PAG ne peuvent pas aboutir dans le temps qu’il reste et seront mises en œuvre pendant et après la transition. Ce budget sera donc en réalité étendu à 2022. Ça reste un budget de transition très important mais, dans l’esprit de Choguel Maïga, le futur gouvernement qui sera mis en place après les élections va poursuivre les projets en cours. Reste maintenant à trouver des fonds auprès des bailleurs. »

« Si l’on passe par les procédures habituelles du FMI et de la Banque mondiale, il va être difficile de se doter des fonds nécessaire, reconnaît Jeamille Bittar. Mais on peut solliciter des organismes autres que les partenaires classiques. » Reste à savoir si les bailleurs de fonds vont prendre le risque de prêter de l’argent à un Mali dont l’instabilité sécuritaire et  institutionnelle inquiète.