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À la Une: vie chère et pauvreté au Sénégal

Une femme prépare un plat de riz et de poisson dans un restaurant de rue de Dakar (image d'illustration).

Une femme prépare un plat de riz et de poisson dans un restaurant de rue de Dakar (image d'illustration).
 AFP - GEORGES GOBET

« La marche contre la vie chère tuée dans l’œuf, s’exclame le quotidien SudLa marche qu’avait prévu des activistes et autres membres de la société civile, des politiques et mouvements citoyens avant-hier dimanche [12 septembre], à Guédiawaye, contre la vie chère, a été interrompue par la police. La police, qui a très tôt quadrillé la zone, a procédé à l’arrestation musclée des organisateurs. L’activiste Guy Marius Sagna et quelques-uns de ses camarades du mouvement Frapp/France Dégage et des mouvements et organisations citoyennes ont été arrêtés. »

Une interdiction contre-productive ?

« Absurde, lance EnquêteLes phobies du pouvoir ont contaminé la raison préfectorale et étouffé l’intelligence publique. Il eût été plus simple de laisser courir cette manifestation et de la canaliser […]. Il eût été plus utile à l’apaisement public, même si cela peut paraitre paradoxal, de laisser marcher ces hommes et ces femmes pour dénoncer une cherté de la vie, au demeurant préjudiciable au pouvoir lui-même. Il eût été plus pensé de s’allier à ces protestations par leur autorisation, pour dénoncer les excès de certains complexes agroalimentaires, de certains lobbies immobiliers et de quelques citoyens avides de profit et entreprendre concomitamment des actions hardies de neutralisation de l’ignoble bête du profit sans scrupule. »

Macky Sall a-t-il peur ?

Le Pays au Burkina Faso renchérit : « On se demande de quoi a peur Macky Sall. Au lieu d’apporter des réponses aux populations dont certaines tirent le diable par la queue, il a plutôt préféré les réprimer. Macky Sall voudrait-il cacher le soleil avec son doigt ? On le sait, pointe le quotidien ouagalais, le panier de la ménagère se réduit comme peau de chagrin au Sénégal, du fait de la flambée des prix des denrées de première nécessité. Et à défaut de prendre des mesures idoines pour contrer cette situation, le pouvoir de Macky aurait dû instaurer un dialogue avec la société civile. Il est évident que la répression ne saurait constituer une réponse à la vie chère. »

La pauvreté s’aggrave…

Cette marche contre la vie chère a donc été étouffée dans l’œuf alors qu’au même moment paraît une étude de l’Agence nationale de la statistique et de la démographie sur la pauvreté dans le pays. « Alors que le gouvernement s’enorgueillit d’un "Sénégal émergent", relève WalfQuotidiencette étude montre que le nombre de pauvres a augmenté au Sénégal (6 millions en 2018, contre un peu plus de 5 millions en 2011). Pire, 50,9% des Sénégalais se considèrent comme pauvres. » Qui plus est, « cette étude bat en brèche les propos du pouvoir à propos des productions agricoles. En effet, ses résultats montrent que "l’insécurité alimentaire reste toujours une réalité" au Sénégal. Elle affecte en majorité les milieux ruraux dans les régions de Kolda, Kédougou, Sédhiou, Tambacounda et Matam. » Et encore, remarque Enquête, cette étude a été réalisée en 2018 et 2019, soit avant l’arrivée du Covid-19, « qui a durement touché l’économie et les ménages sénégalais. » La situation a donc dû s’aggraver.

Alpha Condé : « Plutôt être tué que signer ma démission »

À la Une également, ces révélations de Jeune Afrique sur les conditions de détention et l’état d’esprit d’Alpha Condé. « L’ancien président guinéen est détenu dans l’antenne des forces spéciales installée dans une aile du Palais du peuple, à l’entrée de Kaloum, et plus précisément dans la suite où vivait précédemment le lieutenant-colonel Mamady Doumbouya. C’est d’ailleurs dans cette même pièce (et non au palais de Sékhoutouréya) que la désormais célèbre photo d’Alpha Condé, assis sur un canapé et encerclé par des militaires, a été prise peu après son arrestation. […] Alpha Condé dispose d’une chambre, d’un salon et d’une salle de bain, mais n’a accès ni à ses téléphones, ni à la radio. La télévision, qu’il a un temps pu regarder, lui a été retirée car, selon ses gardiens, "il s’énerve chaque fois qu’il voit le lieutenant-colonel Doumbouya à l’écran et cela affecte son état de santé". »

Par ailleurs, toujours selon Jeune Afrique, Alpha Condé refuserait toute démission : « Plutôt être tué que signer », aurait-il dit. Enfin, relate encore le site panafricain, l’ex-président « peine encore parfois à réaliser qu’il n’est plus à la tête du pays. Il réclame qu’on lui restitue son ordinateur de travail dans lequel se trouvent stockés "une centaine de documents" qu’il devait signer pour conclure des accords entre la Guinée, le FMI et la Banque mondiale. Il rappelle aussi qu’il était attendu à l’Assemblée générale de l’ONU le 23 septembre pour prendre la parole au nom de la Guinée et il s’inquiète de savoir qui ira à sa place. »

Côte d’Ivoire, Sénégal, Kenya : « Une véritable révolution agricole pointe à l’horizon »

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Drone dans une plantation de palmiers à huile, à Tiassale, en Côte d’Ivoire. Les drones pulvérisateurs permettent de traiter 1 hectare douze fois plus vite qu’un travailleur manuel.

Drone dans une plantation de palmiers à huile, à Tiassale, en Côte d'Ivoire.
Les drones pulvérisateurs permettent de traiter 1 hectare douze fois plus vite qu'un travailleur manuel. © Luc Gnago/REUTERS

 

Malgré les difficultés d’approvisionnement liées à la pandémie de Covid-19 et à la flambée des prix, l’analyste et ancien diplomate Pierre Jacquemot affirme que le continent a les moyens de reconquérir son autonomie alimentaire.

Malgré la situation critique – avec plus de 200 millions d’Africains sous-alimentés soit environ 20%  de la population –, il parie sur une issue positive : tous les facteurs sont réunis pour que l’agriculture africaine amorce un tournant permettant enfin au continent d’assurer son autonomie alimentaire.

Telle est la conviction de Pierre Jacquemot, chercheur à l’Institut de relations internationales et stratégiques (Iris) et ancien ambassadeur de France au Kenya, au Ghana et en RDC.

Après avoir analysé l’an dernier les difficultés de la démocratie africaine, dénonçant les troisièmes mandants et les oligarchies qui s’accrochent au pouvoir (1), l’ex-diplomate s’attèle cette année, alors que la pandémie de Covid-19 a bousculé les canaux de distribution agricoles, à un thème tout aussi sensible, la souveraineté alimentaire.

Dans un rapport publié le 13 septembre par la Fondation Jean-Jaurès (2), il liste les défis à relever pour dynamiser l’agriculture et en faire un moteur de croissance et de développement.

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L’AGRICULTURE EST LA GRANDE SACRIFIÉE DES POLITIQUES NATIONALES ET INTERNATIONALES

Outre la hausse de la productivité et la structuration en filière, il met l’accent sur l’accès au crédit, l’autonomisation des femmes et le rôle des États pour enclencher aux niveaux local et régional des cercles vertueux. Le plus dur reste toutefois à faire.

Jeune Afrique : Cela fait des années que l’on annonce la révolution agricole africaine. En réalité, l’agriculture, largement sous-développée, demeure le parent pauvre des investissements. Pourquoi, selon-vous, nous trouvons-nous véritablement à un tournant ?

Pierre Jacquemot : Il y a en effet un décalage entre le discours et la pratique. Tous les dix ans environ, les chefs d’État se réunissent et affirment vouloir faire de la politique agricole une priorité, promettant de consacrer au moins 10 % de leur budget à l’agriculture.

L’engagement, pris lors du sommet de l’Union africaine de 2003 à Maputo, a été réaffirmé en 2014 lors du sommet de Malabo. Or, dans les faits, l’agriculture est la grande sacrifiée des politiques nationales comme des programmes d’aide multilatérale et bilatérale.

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LES FEMMES VONT S’AUTONOMISER VIA LA CONSTITUTION DE COOPÉRATIVES

L’explication est simple : une action dans le domaine agricole ne produit de résultats, au mieux, qu’à moyen terme quand le retour sur investissement dans d’autres secteurs est beaucoup plus rapide.

Malgré ce constat, il existe actuellement une combinaison de facteurs positifs qui va enclencher le nécessaire changement de modèle de l’agriculture africaine. Outre l’électrification rurale, les innovations technologiques et l’essor du microcrédit, trois autres phénomènes clés vont s’accentuer.

Il s’agit de l’autonomisation des femmes via la constitution de coopératives, du retour de jeunes urbains en milieu rural pour y développer des projets, et de l’émergence d’agri-entrepreneurs investissant et produisant pour les marchés urbains dans une logique de chaîne de valeur.

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AU CAMEROUN, UNE START-UP A DÉVELOPPÉ UNE PLATEFORME QUI UTILISE L’IA POUR AMÉLIORER LES RENDEMENTS DES CULTIVATEURS

Tout cela va dans le sens d’une plus grande maîtrise de l’agriculture et de l’alimentation, synonyme d’autonomie retrouvée pour le continent.

Ancien ambassadeur de France en RDC, Pierre Jacquemot, également chercheur à l’Iris et enseignant à l’IEP de Paris,
affiche un optimisme certain quant au futur proche du continent.o;" />

Concrètement, quels pays montrent l’exemple ?

Le Sénégal favorise depuis longtemps l’organisation de groupements de femmes, qui ont développé le maraîchage et la transformation en périphérie de Dakar. Il y a aussi depuis une vingtaine d’années une belle dynamique féminine au Ghana et au Kenya.

Les agri-entrepreneurs émergent évidemment à Nairobi, Abidjan et Dakar, entre autres, quand d’autres développent la culture du soja et sa transformation au Bénin et au Togo, par exemple.

Au Cameroun, la start-up Promagric a développé une plateforme, ClinicPlant, qui utilise l’intelligence artificielle pour diagnostiquer les plantes et améliorer les rendements des cultivateurs, facilitant ainsi leur accès au crédit. Elle étend désormais ses services à la Côte d’Ivoire, au Mali et au Sénégal.

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LE CONTEXTE OBLIGE LES GOUVERNEMENTS À PRENDRE CES MESURES DE COURT TERME

La multiplication et la convergence de ces initiatives, soutenues d’un côté par les États et, de l’autre, par les consommateurs, vont engendrer de vraies révolutions dans les domaines agricole et alimentaire, notamment au Sénégal, en Côte d’Ivoire, au Ghana et au Kenya. Une véritable révolution agricole point à l’horizon.

Pour faire advenir ce changement, l’appui des États est crucial. En ce moment, ces derniers mettent surtout en place des mesures d’urgence, comme des suspensions de taxes douanières ou de TVA, afin de juguler la hausse des prix alimentaires. Est-ce à la hauteur de l’enjeu ?

En limitant la mobilité des individus et en compliquant les importations et exportations, la pandémie de Covid-19 a fortement perturbé l’économie agricole africaine.

Ce contexte, couplé à des cours mondiaux de matières premières globalement à la hausse, oblige les gouvernements, pour assurer une sortie de crise, à prendre ces mesures de court terme.

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CONSTRUIRE DES CIRCUITS COURTS FONDÉS SUR LES AVANTAGES COMPARATIFS DE CHACUN ET CONNECTÉS AUX CENTRES URBAINS

Mais cela ne doit pas les empêcher de conduire une politique de moyen terme et de résister aux réflexes nationalistes, ce que n’a pas su faire le Nigeria, par exemple, lorsqu’il a fermé ses frontières terrestres avec le Bénin, le Niger, le Tchad et le Cameroun entre 2019 et 2020.

Les États peuvent faire la différence en fluidifiant au maximum les échanges nationaux et transfrontaliers. Cela suppose d’investir dans les infrastructures de transport mais aussi de payer correctement ses services douaniers pour éviter les prélèvements indus.

C’est fondamental pour construire des circuits courts locaux et régionaux fondés sur les avantages comparatifs de chacun, connectés aux centres urbains et créateurs de valeur ajoutée.

(1)   De l’élection à la démocratie en Afrique, éditions de la Fondation Jean-Jaurès, mai 2020.

(2)    La Reconquête de la souveraineté alimentaire en Afrique – État des lieux et propositions, éditions de la Fondation Jean-Jaurès, septembre 2021.

Niger : avec qui Mahamadou Issoufou construit-il sa nouvelle vie ?

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Mis à jour le 12 septembre 2021 à 18h24

Depuis qu’il a passé la main à Mohamed Bazoum en avril dernier, l’ancien président nigérien consulte, voyage et se consacre à sa fondation. Avec, pour l’épauler, d’anciens collaborateurs, des cadres du parti au pouvoir mais aussi sa famille.

Le 3 septembre dernier, Mahamadou Issoufou était l’invité du président français Emmanuel Macron à Marseille, à l’occasion du Congrès mondial de la nature. L’ex-chef de l’État nigérien a revêtu pour l’occasion ses nouveaux atours de président de la Fondation Issoufou Mahamadou (FIM), qu’il a créée en 2021 après avoir quitté le pouvoir.

Accompagné par la ministre nigérienne de l’Environnement, Garama Saratou Rabiou Inoussa, et par le haut commissaire à l’Initiative 3N (Les Nigériens nourrissent les Nigériens), Ali Bety, il a livré un discours sur l’écologie en Afrique, faisant part, entre autres, de son ambition de relancer un projet ancien dans les pays sahéliens, la Grande muraille verte.

Le 8 septembre, l’ex-président socialiste a dîné en tête-à-tête, en Mauritanie, avec Mohamed Ould Ghazouani, qui l’a reçu dans la maison d’hôtes de la présidence. Il s’était également entretenu, le 1er août en Côte d’Ivoire, avec Alassane Ouattara et avait croisé les Nigérians Goodluck Jonathan et Muhammadu Buhari lors du mariage du fils de ce dernier, Yusuf, à Kano, le 20 août.

Certes, les contours de sa fondation, dont la première assemblée générale a eu lieu le 12 juin dernier à Niamey, ne sont pas encore totalement dessinés – des experts internationaux sont appelés à rejoindre ses rangs prochainement afin de lancer concrètement des projets. Mais Issoufou mobilise déjà ses fidèles.

Trois hommes travaillent ainsi, au jour le jour, à l’avenir de la toute récente FIM. En premier lieu : Brigi Rafini, qui en est le premier vice-président. Ce Touareg de la région d’Agadez est l’ancien Premier ministre d’Issoufou, resté en poste durant toute sa présidence. Il s’entretient quasiment quotidiennement avec lui.

Le deuxième élément essentiel de l’équipe dirigeante est Foumakoye Gado, actuellement Haut représentant du nouveau président de la République, Mohamed Bazoum. Ce ponte du parti au pouvoir, le Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNDS), a surtout été ministre du Pétrole lors des deux mandats d’Issoufou à la tête du Niger, de 2011 à 2021.

Abdoulaye Bathily est le dernier membre du trio qui pilote les premières destinées de la FIM. Ce Sénégalais est une connaissance de longue date de Mahamadou Issoufou et de Mohamed Bazoum – tous ayant été proches de feu le Burkinabè Salif Diallo. Plusieurs fois ministres sous Abdou Diouf et Macky Sall, Bathily a notamment occupé à Dakar le portefeuille de l’Environnement en 2000, dans le gouvernement de Moustapha Niasse.

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IL S’ENTRETIENT FRÉQUEMMENT AVEC MOHAMED BAZOUM, DONT IL SUIT AVEC ATTENTION LES PREMIERS MOIS AU POUVOIR

Autour de ce quatuor de penseurs, la FIM a prévu de recruter plusieurs experts et fonctionnaires internationaux. Si des postes restent à pourvoir, le Mauritanien Al-Mansour Ould Fadi occupe d’ores et déjà le poste de secrétaire général. Il a pour adjoint, chargé notamment de la communication, le Nigérien Ibrahim Weifane, un cadre bien connu de la société civile de Niamey.

Fondateur du PNDS, Mahamadou Issoufou n’a pas coupé les ponts avec la formation au pouvoir, dont il connaît la plupart des cadres depuis plusieurs décennies. L’ancien président les reçoit encore très régulièrement chez lui, à Niamey, pour des discussions plus ou moins politiques et pour échanger sur les premiers mois au pouvoir de son successeur, Mohamed Bazoum (avec qui il s’entretient également fréquemment).

Parmi eux, figurent son ancien ministre des Affaires étrangères, Kalla Ankourao. Ce dernier est aujourd’hui député et premier vice-président de l’Assemblée nationale, fonction qui lui permet de prendre le pouls des parlementaires du PNDS. L’ex-ministre de la Défense Issoufou Katambé, que Mahamadou Issoufou avait nommé pour remettre de l’ordre dans les comptes de l’armée, est également un des visiteurs du soir. Il est, comme Ankourao, membre du présidium du PNDS.

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ABBA ISSOUFOU, MINISTRE DU PÉTROLE, ENTRETIENT TOUJOURS D’EXCELLENTES RELATIONS AVEC SON PÈRE

L’ancien chef de l’État soigne également ses relations avec deux autres membres de l’organe directeur du parti au pouvoir : le Premier ministre Ouhoumoudou Mahamadou, qui fut son directeur de cabinet, et le ministre des Affaires étrangères, Hassoumi Massaoudou, qui fut son ministre des Finances. Piliers du nouveau pouvoir de Mohamed Bazoum, les deux hommes ne rendent pas visite à leur ancien patron aussi souvent que certains cadres du PNDS, mais ils restent très proches de lui.

Le tout premier cercle familial occupe une place de choix dans la sphère professionnelle de Mahamadou Issoufou. Mahamane Sani Mahamadou Issoufou, que chacun surnomme « Abba », entretient toujours d’excellentes relations avec son père, dont il fut un temps l’un des communicants à la présidence. Aujourd’hui ministre du Pétrole, il est l’un des hommes-clés de l’équipe de Mohamed Bazoum, qui le considère comme son propre fils et qui en avait fait son directeur de campagne en 2020.

Plus discrète et non-impliquée dans la vie politique, Mariam Issoufou Kamara, la fille aînée de l’ancien chef de l’État est, elle aussi, très proche de lui. Architecte, enseignante aux États-Unis, elle a mené plusieurs projets d’urbanisme au Niger et est membre fondatrice du collectif international d’architectes United4design. Elle conseille volontiers Mahamadou Issoufou dans ses projets.

Enfin, les deux ex-Premières dames jouent chacune leur rôle. Le docteur Lalla Malika Issoufou, qui a longtemps été active dans les rangs du PNDS, fait profiter son époux de son expérience au sein de la fondation humanitaire Tattali-Iyali, qu’elle a créée il y a dix ans. Celle-ci est toujours active, dans les secteurs de la santé, du logement et de l’éducation. Quant à la géologue Aïssata Issoufou, elle continue de s’investir dans sa propre fondation, Guri-Vie meilleure, axée sur les couches sociales défavorisées et la lutte contre le paludisme.

Mali: pour le Premier ministre de la transition, les élections ne sont pas une priorité

Choguel Maïga, Premier ministre du nouveau gouvernement malien.

Choguel Maïga, Premier ministre du nouveau gouvernement malien.
 © AFP/Annie Risemberg

Le Premier ministre de transition Choguel MaÏga a rencontré jeudi les diplomates accrédités à Bamako. Il leur a fait l'état de la nation en demandant leur concours afin d'aider son pays dans cette période. Mais il a également abordé la suite du processus et ses priorités.

Avec notre correspondant à Bamako, Serge Daniel

Devant les diplomates étrangers, le Premier ministre malien Choguel Maïga a clairement indiqué que la priorité de son gouvernement est d’abord l’organisation des Assises nationales. Ces rencontres vont commencer, à la base, pendant quelques semaines avant une grande réunion de toutes les forces vives de la nation à Bamako. « Il ne faut pas d’une transition bâclée » a-t-il notamment déclaré lors de la rencontre. 

Il a ensuite, sans trop de précisions, donné la suite de son plan. Après les Assises nationales annoncées, il y a des réformes à mener. Et il faut les inscrire dans le marbre, a-t-il indiqué.

Une échéance difficile à tenir

C’est seulement après ces étapes que les élections auront lieu. Et pas de date pour le moment. Si les élections étaient maintenues fin février 2022, on voit mal comment elles peuvent se tenir puisque le processus n’a pas été lancé afin de respecter les préalables, les actes nécessaires à poser pour respecter la loi.

Comment le Premier ministre malien arrivera-t-il à convaincre ? Des partis politiques, et parmi eux des poids lourds, ont déjà annoncé qu’ils ne participeront pas aux Assises nationales, estimant que la priorité pour l’équipe de la transition, est l’organisation des élections fin février 2022 comme prévu. 

CPI : Charles Blé Goudé réclame jusqu’à 819 300 euros de dommages et intérêts

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Mis à jour le 10 septembre 2021 à 17h55
Charles Blé Goudé, en 2019.

Charles Blé Goudé, en 2019. © Wiebe Kiestra pour JA

Définitivement acquitté de crimes contre l’humanité le 31 mars dernier, l’ancien ministre de Laurent Gbagbo veut désormais être dédommagé pour la longue procédure judiciaire qu’il a subie.

C’est à un savant calcul que se sont livrés les avocats de Charles Blé Goudé. Ils ont d’abord recensé le nombre de jours (1 778) que l’ancien accusé de la Cour pénale internationale (CPI) a passé derrière les barreaux entre son transfert dans le pénitencier de Scheveningen, le 22 mars 2014, et sa libération conditionnelle, le 1er février 2019. Puis le temps écoulé jusqu’à son acquittement définitif, le 31 mars 2021 (790 jours), et enfin le nombre de jours écoulés depuis (163). Au total, 2 731 jours, dont il demande que chacun soit indemnisé à hauteur de 300 euros.

La défense de Charles Blé Goudé réclame donc 819 300 euros de dommages et intérêts pour la longue procédure judiciaire qu’a subie leur client. C’est ce que révèle un document confidentiel consulté par Jeune Afrique. Daté du 9 septembre, il est signé de Geert-Jan Knoops, l’avocat principal de l’ancien ministre de la Jeunesse de Laurent Gbagbo.

Saga hors norme

Ils proposent également un autre calcul, qui ne fait débuter les « graves et manifestes erreurs de la justice » qu’en 2018, lorsque le procureur de la CPI a refusé d’abandonner le dossier, ce qui les amène à réclamer 381 900 euros. Aux juges de trancher. Charles Blé Goudé, qui n’est toujours pas rentré en Côte d’Ivoire, promet d’utiliser cet argent pour venir en aide « aux victimes de la crise postélectorale de 2010-2011 », écrivent ses avocats.

Cette réclamation est peut-être le dernier acte d’une saga judiciaire hors norme. Inculpé pour crimes contre l’humanité et crimes de guerre aux côtés de son mentor, l’ancien président Laurent Gbagbo, Charles Blé Goudé a fini par être totalement blanchi après cinq années de détention. Mais ces accusations ont « eu de sérieuses conséquences sur sa vie personnelle et professionnelle », arguent ses avocats. Désormais, cette requête va être transmise à trois juges de la CPI ainsi qu’au bureau du procureur, qui pourra émettre des observations.

Mystère sur le choix de Gbagbo

Ce genre de procédure reste souvent confidentielle et les avocats de Laurent Gbagbo refusent de dévoiler si l’ancien président, récemment rentré à Abidjan, a fait une demande similaire. Le délai légal est de six mois, ils n’ont donc que jusqu’au 1er octobre pour le faire.

Dans le passé, le Congolais Jean-Pierre Bemba avait lui aussi demandé des dommages et intérêts après son acquittement, en 2018. Mais la somme exigée était incomparablement plus élevée que celle réclamée par Charles Blé Goudé : 68 millions d’euros. La requête avait finalement été rejetée en mai 2020 par la CPI, qui avait estimé que Jean-Pierre Bemba « n’avait pas établi qu’il avait subi une erreur judiciaire grave et manifeste ».