Dialogue interreligieux

« Lorsque nous travaillons pour les âmes, nous ne pouvons user que de persuasion et d'amour... Nous ne pouvons rien faire tant que nous n'avons pas persuadé les gens autour de nous qu'ils sont aimés... » (Cardinal Lavigerie, 1885)

« Nous croyons qu'en toute religion il y a une secrète présence de Dieu, des semences du Verbe qui reflètent un rayon de sa lumière... » (Chapitre 1967)

« Nous célébrons et partageons cette vie avec Dieu lorsque nous allons à la rencontre des cultures et des religions... nous réjouissant de la foi vivante de ces croyants et les rejoignant dans leur quête de la Vérité, cette Vérité qui nous rend tous libres. » (Chapitre 1998)

Missionnaires, nous sommes appelés à faire les premiers pas pour rencontrer les personnes, qu'elles que soient leurs convictions, leur religion.

Au Burkina Faso, cette réalité se traduit surtout dans la rencontre respectueuse et évangélique avec les adeptes des religions traditionnelles et avec les musulmans.

Dans cette rubrique, nous étudierons divers aspects de ces religions, particulièrement de l'islam.

Les afro-descendants belges et la question de la reconnaissance |The Conversation

Les manifestations antiracistes à la suite de la mort de George Floyd, tué fin mai 2020 par des policiers blancs aux États-Unis, ont apporté un souffle nouveau à la lutte contre le racisme et contre l’exclusion que subissent encore les Noirs à travers le monde.

En Belgique, si les premières actions ont consisté à prendre pour cible, à vandaliser ou encore à déboulonner les statues de Léopold II, ancien roi des Belges, c’est parce que, pour les manifestants, la question noire dans ce pays nécessite à la fois un retour sur l’histoire coloniale belge en Afrique des Grands Lacs et ses divers héritages contemporains.

Aymar Nyenyezi BisokaUniversité de Mons

On comprend donc pourquoi, suite à ces manifestations et à l’occasion de la soixantième année de l’indépendance de la RDC, le roi des Belges a exprimé ses « plus profonds regrets pour les blessures » infligées aux Congolais durant la colonisation. On comprend aussi pourquoi, dès le 17 juillet 2020, le Parlement belge a décidé de faire « la paix avec son passé colonial » en mettant en place une commission spéciale chargée de mener « l’enquête et le débat sociétal à ce sujet » et d’établir « une commission de vérité et réconciliation ».

Pour avancer efficacement sur la question noire en Occident, il faudra cesser de la penser comme un phénomène homogène. Il faudra comprendre comment elle se décline dans chaque pays. L’un des enjeux de la lutte décoloniale devient dès lors celui de la reformulation des idéaux politiques spécifiques autour desquels les luttes devraient se cristalliser au niveau national.

Dans cet article, j’essaie de formuler l’un de ces idéaux de la lutte des afro-descendants noirs et métis pour le cas spécifique de la Belgique en m’inspirant de « Caoutchouc-Rouge – Rouge Coltan », un film d’animation de Jean‑Pierre Griez qui interroge « le lien entre la violence de la colonisation belge du Congo et les violences extractivistes contemporaines ». https://www.youtube.com/embed/Z7_u8EdY-DM?wmode=transparent&start=0 Bande annonce de Caoutchouc rouge, rouge coltan.

Le film pose deux problèmes majeurs. Le premier est lié au sens de la continuité mécanique que le film semble établir entre l’exploitation du caoutchouc à partir de la fin du XIXe siècle et l’extraction du coltan au début du XXIe siècle – deux temporalités tout à fait différentes. Le deuxième problème est celui du sens de la revendication de l’identité congolaise de la part des afro-descendants qui n’ont pas la nationalité congolaise.

Toute tentative de résolution de ces deux problèmes, celui de la continuité et de l’identité, nous mène à penser nécessairement les afro-descendants belges comme une communauté et minorité politique belge qui devrait lutter pour sa reconnaissance juridique, une reconnaissance constitutionnelle à l’instar des autres communautés en Belgique. Cette reconnaissance ouvre à la question de la mise en place de dispositifs spécifiques qui visent les afro-descendants en vue de l’égalisation des conditions de vie des Belges.

D’une part, cette minorité prend conscience de sa situation et du sens de sa lutte à partir d’un retour dans l’histoire des rapports violents entre la Belgique et le Congo depuis plus d’un siècle et la manière dont cette violence s’est prolongée dans leur patrie, la Belgique. D’autre part, la reconnaissance de cette minorité afro-descendante suppose un triple engagement de la Belgique face à la violence qui traverse leur quotidien en Belgique (symbolisée, dans le film, par les statues de Léopold II dans l’espace public), face à leur histoire (symbolisée par le caoutchouc) et face à leurs autres parties situées en Afrique des Grands Lacs (symbolisées par le coltan).

Trois idées ressortent avec force dans le film : la violence (post-)coloniale, le retour en Afrique et l’interruption politique.

La violence (post-)coloniale

Caoutchouc rouge, rouge coltan raconte l’histoire de Abo Ikoyo, une jeune Belgo-Congolaise de 17 ans.

« [Abo] n’a jamais connu son père, disparu à l’est de la RDC à l’aube des années 2000. Alors, quand la prof propose un parcours sur les traces du passé colonial, elle replonge dans l’histoire méconnue de sa famille : la résistance acharnée d’un aïeul et d’un peuple contre les horreurs de l’époque léopoldienne, l’apartheid et le racisme du colonialisme ordinaire, le pillage des ressources, un arrière-grand-père chauffeur personnel de Patrice Lumumba, une guerre dévastatrice pour le coltan et autres minerais du sang. »

Dans le film, Abo se présente comme une Belgo-Congolaise. Elle cherche à s’approprier la nationalité congolaise, la double nationalité n’étant pas acceptée au Congo. Et pourtant, Abo a besoin de se nommer congolaise. Elle sait qu’il est impossible d’être uniquement et exclusivement belge lorsqu’on est noir ou métisse en Belgique. Elle a compris que, dans les faits, les personnes de sa couleur n’avaient pas de place en Belgique et, lorsqu’elles en avaient une, elle était périphérique.

Les Noirs et afro-descendants belges subissent un racisme silencieux mais systémique et à grande échelle : agression physique, harcèlement, exclusion, discrimination à l’emploi et au logement, profilage discriminatoire par la police et d’autres formes de violence.

Beaucoup d’associations contre le racisme sont unanimes sur le fait que le problème du racisme est une plaie qui gangrène la Belgique mais dont on ne veut surtout pas parler.

Tout ceci est pourtant paradoxal pour un pays où la différence est reconnue et sérieusement considérée : les Flamands, les Wallons, les germanophones, sont autant de communautés pour lesquelles la Belgique essaie de considérer les particularités, les histoires, les blessures et de mettre en place des politiques de soin. Mais ce souci de soin ne vaut pas pour les afro-descendants, ces sujets auxquels le royaume doit pourtant beaucoup.

Ce refus de prendre soin des afro-descendants rappelle malheureusement comment, depuis la fin du XIXe siècle au moins, la Belgique a pris l’habitude de discriminer et de violenter ceux qui étaient noirs de peau. La place périphérique qu’expérimentent les afro-descendants en Belgique n’a pas produit que de la discrimination. Elle a aussi produit leur absence dans les sphères de pouvoir, leur oubli dans les principaux débats publics, l’ignorance de leurs problèmes spécifiques. C’est ce rejet qui a mené Abo, comme d’autres afro-descendants belges, sur le chemin du retour.

Retour en Afrique et construction d’une identité spécifique

Caoutchouc rouge, rouge coltan est un cri. Le film montre que ce qui a mené Abo à raconter son histoire, c’est cette lourdeur qui l’entoure lorsqu’elle se balade dans son propre pays, la Belgique. Abo ne comprend pas pourquoi les statues des bourreaux des Congolais qui parsèment sa ville n’ont pas été déboulonnées à l’instar de ceux de chefs nazis dont il n’existe quasiment plus de traces dans les villes européennes.

Comment comprendre ce paradoxe ? Que faire de ces choses qui nous rappellent instamment que nous sommes différents dans notre propre pays, que nous n’avons pas les mêmes droits ? Que nous sommes certes Belges et Européens mais toujours de seconde zone ? Le royaume ne l’explique jamais aux afro-descendants. Ceux-ci doivent retourner au Congo pour tout comprendre.

Mais ce retour n’est pas à considérer comme l’expression d’une obsession identitaire. Il n’est pas non plus un privilège. Il s’agit au contraire d’une volonté de se reconstruire, de se soigner, de retrouver la dignité. Il s’agit aussi d’un acte éminemment politique qui marque la singularité des afro-descendants et qui les institue en tant que communauté et minorité belge.

En d’autres termes, pour que les afro-descendants puissent comprendre leur place en Belgique, ils doivent retourner en Afrique. C’est seulement à partir de là qu’ils peuvent comprendre comment, historiquement, l’appât du gain (ici, le caoutchouc) a mené Léopold II et ensuite la Belgique à produire la hiérarchie des races et comment cela s’est répercuté dans le présent des afro-descendants en Belgique. L’Afrique représente ici ce lieu de restauration – à défaut d’une Belgique qui présente leurs bourreaux en héros ; qui n’enseigne pas leur histoire ; qui interdit l’accès à leurs archives ; et qui criminalise leurs tentatives de retrouver la dignité.

La singularité des Noirs et des métis afro-descendants belges se trouve donc derrière cette nécessité de retourner en Afrique, c’est-à-dire de retourner dans l’histoire de la Belgique pour comprendre pourquoi celle-ci les a lâchés. Cette singularité explique aussi la nécessité de se battre sans relâche pour interrompre le discours de normalité, d’homogénéité de la communauté politique, d’harmonie d’une nation.

Interruption politique et reconnaissance juridique

Le film est l’un de ces moments intenses d’interruption politique. Il constitue donc une autre brique qui s’ajoute à la longue et lente constitution de la communauté politique noire et métisse en Belgique. Mais une telle lutte a des conséquences : elle fait de ces afro-descendants des Congolais, Rwandais et Burundais à part entière qui sont désormais concernés par la violence de la Belgique contre leurs autres patries qui se situent en Afrique des Grands Lacs.

C’est cela qui dédouble leur lutte. La lutte des afro-descendants belges devient à la fois une lutte contre le racisme et l’exclusion qu’ils subissent en Belgique et une lutte contre tout positionnement paternaliste et néocolonial de la Belgique en Afrique des Grands Lacs. Voilà pourquoi ces afro-descendants dénoncent aujourd’hui l’exploitation du caoutchouc et l’extraction du coltan – deux métaphores qui symbolisent la complicité et le silence de la Belgique.

Pour finir, en interrogeant le lien entre la violence coloniale et les violences extractivistes à la fois anciennes et contemporaines, ce film constitue une contribution à la consolidation d’une communauté politique noire et métisse en Belgique. Il s’attaque au refus, pour la Belgique, de penser une nation plurielle où les particularités des Noirs et des métis devraient être sérieusement considérées ; c’est-à-dire juridiquement reconnues. Cette reconnaissance implique des droits spécifiques pour l’égalisation des conditions matérielles de vie des Belges. Une telle mesure ne serait pas d’ordre identitaire ; elle relèverait de l’idéal démocratique et irait dans le sens de la consolidation d’une nation qui a oublié certains de ses filles et fils.

Aymar Nyenyezi Bisoka, Chargé de cours, Université de Mons

This article is republished from The Conversation under a Creative Commons license. Read the original article.

Les relations États et religions ailleurs dans le monde

Les relations entre États et religions peuvent être très différents selon les pays et leur histoire. Voici quelques exemples décryptés par « La Croix Campus ».

  • La Croix 

Lecture en 3 min.

Les relations États et religions ailleurs dans le monde
 
LA CROIX CAMPUS

Dès la naissance du pays, à la fin du XVIIIe siècle, les pères fondateurs, qui étaient souvent des personnes très croyantes, décident de séparer l’État et la religion. La Constitution de 1787 établit une distinction juridique nette entre les institutions civiles et les groupes religieux. S’ils prennent tous deux la forme séparatiste, les modèles français et américain diffèrent toutefois dans leurs objectifs de départ.

La laïcité, dans sa version américaine, vise à protéger le pluralisme confessionnel et à empêcher l’instauration d’une religion officielle. Il s’agit donc de mettre les religions à l’abri de l’État. En France, c’est l’inverse : l’État, en devenant laïque, a cherché à se protéger des religions, surtout du catholicisme, et de leur emprise supposée.

► Mexique

« République catholique » à sa naissance, le Mexique est devenu laïque dans la deuxième moitié du XIXe siècle, avec la mise en place d’une séparation stricte de l’État et de l’Église. La révolution de 1910 conforte ce principe. Jusqu’en 1992, la Constitution ne reconnaissait pas la personnalité juridique de l’Église catholique et encadrait vigoureusement ses activités.

Le pays connut régulièrement des polémiques d’ordre religieux, partagé entre une forte communauté catholique (un peu plus de 80 % de la population selon les estimations) et un État fermement attaché au principe de laïcité. Comme dans la plupart des pays latino-américains, l’Église catholique voit ces dernières années son influence décliner tandis que les protestants évangéliques connaissent une forte croissance.

►Nigeria

La Constitution nigériane dispose que le gouvernement ne doit adopter aucune religion comme religion d’État. L’article 38 de la Constitution « garantit que chaque citoyen nigérian a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion, y compris la liberté de changer de religion ou de conviction et la liberté de manifester et de propager sa croyance religieuse. »

Au niveau fédéral, le Nigeria possède des juridictions laïques. Mais douze des trente-six États fédérés appliquent la charia (loi islamique). Les deux systèmes juridiques fonctionnent avec des problèmes récurrents de compatibilité. Parmi les 196 millions d’habitants du Nigeria, 50 % sont musulmans et 40 % sont chrétiens, dont environ 74 % de protestants ou évangéliques et 25 % de catholiques.

►Iran

Depuis la Révolution de 1979, le régime iranien est une république théocratique islamique. Selon l’article 2 de la Constitution, Dieu (Allah) dirige le pays : « Dieu exerce en Iran une souveraineté absolue et préside à l’élaboration des lois », est-il écrit. C’est un haut dignitaire religieux, actuellement l’ayatollah Ali Khamenei, qui est le principal dirigeant. Des élections sont toutefois organisées pour désigner le président de la République et les députés du Parlement (le Majlis), ce qui leur donne une légitimité populaire. L’Arabie saoudite voisine est aussi une théocratie gouvernée selon la charia, mais le pouvoir politique y est exercé sous la forme d’une monarchie absolue.

►Turquie

La République turque a été fondée en 1923 par un général, Mustafa Kemal Atatürk, qui a créé un État-nation laïque, symbole de modernité. Dans ce pays où la population est majoritairement musulmane, l’organisation religieuse a alors été placée sous l’autorité du premier ministre, la charia a été abolie, les confréries religieuses ont été interdites et l’écriture ottomane a été abandonnée au profit de l’alphabet latin.

→ A LIRE. La basilique Sainte-Sophie redevient une mosquée

Depuis 2003, c’est toutefois un dirigeant islamiste qui dirige le pays, Recep Tayyip Erdogan. Conséquence : le port du voile dans les services publics et les établissements d’enseignement a été autorisé. Et les pressions politiques et sociales en faveur de l’observance de la pratique musulmane se sont renforcées. Mais les principes laïques de la Constitution n’ont pas été modifiés.

►Russie

La Constitution fait de la Russie un État laïque qui garantit l’égalité devant la loi de toutes les confessions. Dans les faits, après avoir été réprimée par le pouvoir communiste au temps de l’URSS, l’Église orthodoxe occupe une place prééminente et entretient des liens étroits avec le pouvoir. Depuis 2013, une loi punit « l’offense aux sentiments des croyants ».

→ ANALYSE. Russie : la référence à « Dieu » bientôt dans la Constitution

En 2020, pour la première fois, Dieu est mentionné dans la Constitution russe, qui rend hommage aux « ancêtres qui nous ont transmis leurs idéaux et la foi en Dieu ». L’État reconnaît comme « religions traditionnelles » de la Russie le bouddhisme, le judaïsme, l’islam et le christianisme orthodoxe oriental. Sept Russes sur dix se disent orthodoxes mais avec seulement 2 à 5 % de pratiquants réguliers.

►Japon

« Aucune organisation religieuse ne doit bénéficier de privilèges de la part de l’État, ni exercer une quelconque autorité politique. » L’article 20 de la Constitution nippone d’après-guerre garantit la liberté de culte et établit le principe de séparation de la religion et de l’État. L’État japonais s’est désengagé des religions pour éviter que le shintoïsme ne redevienne la religion officielle, comme jusqu’en 1945.

Par conséquent, l’État reconnaît comme religion tout ce qui prétend l’être. La société se caractérise par une forte symbiose entre bouddhisme et shintoïsme. D’après les statistiques officielles, parmi les 126 millions d’habitants, près de 100 millions se disent bouddhistes et… 85 millions shintoïstes. On peut en effet être les deux à la fois.

Mali: l'imam Dicko publie un manifeste et se veut rassembleur


L'imam Mahmoud Dicko, le 11 août 2020, lors d'un rassemblement de protestation contre le président IBK, à Bamako.

L'imam Mahmoud Dicko, le 11 août 2020, lors d'un rassemblement de protestation contre le président IBK, à Bamako.
 REUTERS/Rey Byhre
Texte par :RFISuivre
2 mn

« Manifeste pour la refondation du Mali », c'est le titre du document rendu public vendredi 5 février par l'imam Mahmoud Dicko. Le leader religieux y dit tout son tourment et sa tristesse « infinie » devant la situation « périlleuse » dans laquelle se trouve le pays. Un constat qui le pousse à se positionner en rassembleur et surtout en médiateur.

L’imam Dicko lance ni plus ni moins un appel à sauver le Mali. « Sans réaction collective maintenant, écrit-il, l’État qui nous gouverne n’a plus de sens ». Un constat qui le conduit à s’engager pour réconcilier les Maliens. Il propose la construction d’un nouveau pacte républicain et s’engager personnellement à « bâtir des passerelles entre acteurs civils et armés ».

Difficile de dire quelles sont les intentions du leader religieux qui opte dans ce texte pour une rhétorique politique, à commencer par le choix du mot « manifeste ». Prend-il ses distances avec les militaires qu’il a jusque-là clairement soutenus ?

L'imam reste attentif à la situation du pays

« Pas forcément », assure le sociologue Brema Ely Dicko, mais c’est un rappel qu’il veille au grain et surveille la transition, selon ce dernier, quitte à reprendre son bâton de pèlerin.

Ce texte n’a pas pu être écrit à l’insu des militaires, estime pour sa part Gilles Holder, spécialiste de l’islam malien. Mais plus que la caution de l’ex-junte ce qui compte surtout pour l’anthropologue c’est le calendrier choisi et l’intention. Ce texte ressemble fort à un message au président Macron à la veille du sommet du G5 Sahel à N’Djamena. Un message qui rappelle noir sur blanc à la France l'importance de discuter avec les groupes armés.

►À lire aussi : Au Mali, critiques autour de la dissolution de la Commission électorale nationale indépendante

Trois fédérations revoient la « charte » de l’islam, après leur refus de la signer

Analyse 

Trois fédérations du Conseil français du culte musulman (CFCM), dont deux sont liées à la Turquie et une au mouvement piétiste Tabligh, sont revenues en détail, lundi 1er février, sur leur refus de signer la « charte des principes pour l’islam de France » validée par l’Élysée le 18 janvier.

  • Mélinée Le Priol, 

Lecture en 4 min.

Trois fédérations revoient la « charte » de l’islam, après leur refus de la signer
 
Le 18 janvier, le président de la République a reçu les représentants du Conseil français du culte musulman (CFCM) au palais de l'Elysée.THOMAS PADILLA//MAXPPP

Deux semaines après avoir refusé de signer la « charte des principes pour l’islam de France », pourtant saluée comme un « acte fondateur » par l’Élysée le 18 janvier, trois fédérations musulmanes ont exposé dans un communiqué, lundi 1er février, leurs « observations et réserves » sur le contenu de ce texte composé de dix articles, qui affirme notamment la liberté de conscience et l’égalité entre les femmes et les hommes.

→ ENTRETIEN. Pourquoi les fédérations turques ont-elles refusé de signer la « charte » de l’islam de France ?

Il s’agit de deux fédérations liées à la Turquie – le Comité de coordination des musulmans turcs de France (CCMTF) et Milli Görüs (CIMG) – et de Foi et pratique, la branche française du mouvement piétiste Tabligh, né en Inde. En tout, huit fédérations du Conseil français du culte musulman (CFCM) sont concernées par le projet – la neuvième, la Grande mosquée de la Réunion, s’étant déjà mise en retrait en raison de ses spécificités.

« Esprit constructif »

Déplorant la « signature précipitée » de cette charte – comme, du reste, de nombreux imams indépendants déplorant l’absence de consultation de la « base » musulmane –, les trois fédérations récalcitrantes assurent toutefois rester « ouvertes au dialogue dans un esprit constructif ». Leurs remarques ont été adressées au président du CFCM Mohammed Moussaoui dans le but d’« améliorer la charte afin qu’elle puisse être reconnue et adoptée par tous ».

→ ÉDITORIAL. L’enjeu français de l’islam

« Nous restons convaincus que la mise en place du conseil national des imams (CNI), chargé d’agréer les imams de France, est une nécessité et sera bénéfique pour les musulmans », précisent-elles en préambule. La création de cette instance, annoncée mi-novembre et qui devait s’accompagner de la publication rapide d’une « charte républicaine », butte depuis plus de deux mois sur des divisions internes au culte musulman.


Dans un document de dix pages - aussi long que la charte elle-même -, les trois fédérations détaillent point par point leurs désaccords avec les formulations retenues. Le titre même de la charte leur pose problème, puisqu’elles récusent l’expression d’« islam de France » : « Il n’y a qu’une seule croyance islamique acceptée par les musulmans à travers le monde », affirme leur communiqué. Ce débat, vieux d’une trentaine d’années, continue de diviser les Français musulmans.

Liberté de conscience

L’article 3 de la charte, intitulé « La Liberté », est sous doute l’un des plus audacieux, puisqu’il engage les signataires à « ne pas criminaliser un renoncement à l’islam, ni à le qualifier d’apostasie (ridda) » - ce qui n’avait encore jamais été énoncé avec tant de clarté dans les textes antérieurs équivalents (signés en 1994 et en 2000).

Les deux fédérations proches de la Turquie ainsi que Foi et pratique jugent toutefois cette mention inutile, dans la mesure où la liberté de conscience est déjà « garantie par le droit international »« D’un point de vue institutionnel, l’adhésion ou la résiliation à une association musulmane œuvrant dans le cadre du droit français sont réglementées par le droit des associations et répondent à des choix personnels », ajoutent-elles.

Quant à la condamnation du « prosélytisme abusif oppressant les consciences », mentionnée au même article, cela pourrait limiter « l’expression des musulmans dans ce qu’ils considèrent juste, bon et convenable selon leur croyance », estiment ces fédérations. Issue du mouvement piétiste Tabligh, Foi et pratique est communément considérée comme prosélyte.

Islam politique, une expression « ambiguë »

Il ne fait guère de doute que le refus de ces trois fédérations de signer la charte porte sur deux points particulièrement sensibles, figurant à l’article 6 : le rejet des ingérences étrangères et de ce qui y est qualifié d’« islam politique ». Le Tabligh est en effet explicitement cité dans la charte parmi les courants en faisant partie (avec le salafisme et les Frères musulmans). Quant aux deux fédérations liées à la Turquie, bien plus influentes au sein du CFCM, elles sont soupçonnées de constituer un instrument diplomatique pour Ankara sur le sol européen.

→ EXPLICATION. Islam : la difficile séparation entre loi civile et « loi divine »

Dans leur communiqué, ces trois fédérations jugent par trop « vague et ambiguë » la définition de l’islam politique telle que la propose la charte, craignant que cela « restreigne » l’accès des musulmans au débat social ou politique, voire « criminalise » leurs opinions. À la place de cette expression controversée, ces fédérations proposent donc de parler d’« extrémistes abusant de la religion contre l’ordre constitutionnel ».

L’homosexualité, « un péché »

Enfin, la mention de l’homosexualité dans une charte écrite et adoptée par des fédérations islamiques « contredit les principes de la foi musulmane », soutient le communiqué. L’article 5 de la charte rejette en effet « toute discrimination fondée sur la religion, le sexe, l’orientation
sexuelle, l’appartenance ethnique, l’état de santé ou le handicap ».

Or, insistent ces fédérations, l’islam considère l’homosexualité comme un péché. Si cela peut sembler « discriminatoire » aux yeux de certains, le communiqué assure que « cela ne leur donne pas le droit de s’immiscer dans les affaires internes » de cette religion.

Ce débat brûlant n’est pas sans rappeler la polémique provoquée par Gérald Darmanin qui affirmait sur France Inter, ce même 1er février, que « la loi de la République est supérieure à la loi de Dieu ». Le ministre de l’intérieur a du reste prévenu ces trois fédérations qu’il allait « particulièrement regarder ce qu’il va se passer dans les lieux de culte qu’elles gèrent » et qu’il n’aurait « pas la main qui tremble » si des actions contraires aux valeurs de la République y sont détectées.

 

Islam de Belgique : Noureddine Smaili de retour à la tête de l’EMB|SaphirNews

 

L’Exécutif des musulmans de Belgique (EMB) rappelle Nourredine Smaili. Le professeur de religion islamique a été désigné au week-end du 23 janvier pour succéder à Salah Echallaoui au poste de vice-président. L’homme d’origine marocaine, qui est par ailleurs imam, n’est pas un visage nouveau dans le paysage institutionnel de l’islam belge : il avait déjà assuré la présidence de l’EMB entre 2014 et 2016. « On s’est dit que c’est la personne qui ferait le moins de peine à la communauté car il connaît les dossiers », a confirmé Ramadan Gjanaj, membre du Conseil de coordination des institutions islamiques de Belgique (CCIIB) auprès du quotidien belge La Libre mardi 26 janvier.

Si son expérience passée au sein de l’EMB est un gage de confiance pour certains, Noureddine Smaili s’est aussi vu reprocher par le passé plusieurs prises positions. Au lendemain des attentats de janvier 2015, l’imam avait déclaré que les musulmans résidant en Europe devaient « s’assimiler ou partir »« S’ils ne veulent pas accepter les valeurs européennes et vivre en Europe en respectant la loi, ils n’ont rien à faire ici », avait-il clamé sans détour au micro de RTL Belgique. Une sortie qui avait alors crée des remous parmi les musulmans mais aussi au sein de l’EMB.

Lire la suite: Noureddine Smaili de retour à la tête de l’EMB, Myriam Attaf, SaphirNews, 27.01.21