Actualités

Côté d’Ivoire : décès de Seydou Diarra, le Premier ministre des missions impossibles

| Par - à Abidjan
Seydou Diarra, en mars 2003 à Bouaké, à l’issue d’une rencontre avec des rebelles.

La vie politique de Seydou Elimane Diarra, mort à Abidjan le 19 juillet 2020 à l’âge de 86 ans, se résume en trois mots : homme de consensus. Il avait réussi la prouesse d’être nommé Premier ministre par deux chefs d’État différents, à des périodes difficiles dans l’histoire de la Côte d’Ivoire.

Sa santé était précaire ces trois dernières années et ses apparitions publiques, rares. Dans sa luxueuse villa des Deux-Plateaux à Cocody, aux côtés de son épouse franco-ivoirienne Josiane Varre et, souvent, de sa dernière fille ainsi que de ses petits-enfants qu’ils recevaient pendant les vacances, Seydou Elimane Diarra passait ses vieux jours, dans la paix de l’homme qui aura accompli son devoir citoyen avec honnêteté.

« Je garde un souvenir inaltérable des années où j’ai été ministre dans le gouvernement d’union nationale dirigé par le Premier ministre Diarra, au sortir de l’accord de Linas-Marcoussis, et je salue la mémoire d’un homme attaché à la paix et à la concorde », témoigne Guillaume Soro, Premier ministre de 2007 à 2012, actuellement en exil en France. Selon lui, « Seydou Elimane Diarra a incarné au cours des trois dernières décennies la figure politique de la tolérance, du consensus et de la réconciliation dans notre pays. »

Premier ministre de la transition militaire

Nous sommes en décembre 1999. Le général Robert Guéï, à la tête de « jeunes gens », des militaires mutins sans grade, renverse Henri Konan Bédié, qui a succédé, six ans plus tôt, à Félix Houphouët-Boigny. Le militaire putschiste fait alors appel à Diarra en vue de constituer le gouvernement. Premier ministre de Robert Guéi durant la transition militaire, il échoue à empêcher ce dernier de se porter candidat à la présidentielle d’octobre 2000, finalement remportée par Laurent Gbagbo, à l’issue d’une crise postélectorale qui a fait des dizaines de morts.

Alors que Gbagbo lui demande de conserver son poste, le temps de lui permettre de pacifier le pays, Diarra décline respectueusement l’offre, mais maintient les contacts avec le nouveau chef d’État. C’est sans surprise que Gbagbo le nomme président du Forum de la réconciliation nationale en 2001. Durant les mois d’octobre et novembre de la même année, Diarra réussit à réunir à Yamoussoukro, pour la première fois autour d’une même table, les quatre grands de la politique ivoirienne d’alors. Il s’agit d’Alassane Ouattara et d’Henri Konan Bédié qui étaient tous les deux en exil, de Robert Guéï, qui s’était retiré dans son fief de l’Ouest montagneux après sa chute, et de Laurent Gbagbo.

Premier ministre de consensus

Seydou Diarra, lors d'une conférence de presse à Paris, en 2003 (archives).

Fin janvier 2003, à l’issue des accords de Linas-Marcoussis censés mettre un terme à la rébellion des Forces nouvelles de Guillaume Soro, c’est naturellement encore à Diarra que pense Gbagbo, quand on lui demande de choisir un Premier ministre de consensus. Celui-ci occupe le poste durant deux ans, dans un environnement particulièrement hostile, entre les « Jeunes patriotes » de Charles Blé Goudé – partisans de Gbagbo – qui le traitaient de « Premier ministre de coup d’État » et les militants de l’opposition politique qui le soupçonnaient de rouler pour le pouvoir. Cependant, la classe politique dirigeante évite de l’attaquer de front.

« Toute la classe politique reconnaît ma position d’homme de consensus », se plaisait-il à dire. Pour arriver à agir « comme s’il était impossible d’échouer », comme il l’a confié à Jeune Afrique dans l’une de ses rares interviews accordées à un média, ce fils de fonctionnaire colonial né à Katiola, dans le centre-nord, use de ses talents de diplomate.

Musulman pratiquant – il s’est rendu à la Mecque pour le Hadj –, Diarra est nommé ambassadeur au Brésil en 1970 par Félix Houphouët-Boigny, qui l’avait auparavant envoyé en prison durant deux ans, dans la sulfureuse affaire des « complots » de 1963.

À sa retraite de l’administration publique en 1985, il se lance dans les affaires et prend la direction de SACO, entreprise de transformation de cacao. Président de la Chambre de commerce et d’industrie, il fait fortune, sans se mêler de politique. Cette période le rapproche cependant de Bédié, alors président de l’Assemblée nationale, avec lequel il avait milité au sein de la Fédération des étudiants d’Afrique noire en France (FEANF), lors de ses études d’ingénieur agronome. Ses relations avec Alassane Ouattara, quant à elles, se solidifient lors de la transition militaire.

Haute autorité pour la bonne gouvernance

En 2015, ce dernier, alors président de la République depuis 2011, le nomme à la tête de la Haute autorité pour la bonne gouvernance (HABG, institution censée lutter contre la grande corruption).

L’avènement de l’Ivoirien nouveau devra être placé sous le sceau de l’exemplarité des premiers responsables

Début février 2016, Diarra présente un rapport de 63 dossiers de dénonciations d’actes de corruption impliquant des hauts responsables de l’administration ivoirienne. Ces derniers ne seront pas poursuivis devant les tribunaux, mais Diarra reste constant : « L’avènement de l’Ivoirien nouveau devra être placé sous le sceau de l’exemplarité des premiers responsables. »

En 2017, Ouattara nomme un nouveau président à la tête de la HABG et Diarra prend alors définitivement sa retraite politique. D’une santé précaire, il a fini ses jours dans sa résidence, entouré des siens. L’histoire ivoirienne retiendra sans doute de lui qu’il a été « un homme de principe, de rigueur, un grand serviteur de l’État », selon les mots d’Albert Toikeusse Mabri, qui a été son ministre de la Santé sous Gbagbo et qui le présente « comme un père ».

 
 

Coronavirus: le Sénégal rouvre ses frontières aériennes

Hall de départ de l'aéroport international Blaise-Diagne, au Sénégal.

Hall de départ de l'aéroport international Blaise-Diagne, au Sénégal. Wikimedia Commons CC BY-SA 4.0 Jjm2311
Texte par : RFI
2 min

Les autorités sénégalaises assouplissent un peu plus les mesures contre le Covid-19. Les frontières ont rouvert, mais pas avec tout le monde.

Les vols ont repris à l’aéroport international, rapporte notre correspondante à Dakar Charlotte Idrac, mais ce n’est pas encore la foule des grands jours. La reprise est graduelle, et c’est un vol Alger-Dakar qui a rouvert le bal cette nuit. Huit vols sont prévus ce mercredi. Cette réouverture du ciel sénégalais dépend des pays de destination, car de nombreux États n’ont pas rouvert leurs frontières dans la région.

L’Union européenne a aussi publié une liste de 15 pays autorisés, et le Sénégal n’en fait pas partie pour le moment. Sénégal qui applique le principe de réciprocité, même si des négociations ont été engagées avec l’Union européenne. Cette liste est appelée à être révisée. À ce jour, seules certaines catégories de passagers, comme les diplomates, sont autorisés à voyager vers l’Union européenne. 

L’aéroport international de Dakar n’a jamais fermé ses portes au cours de ces quatre derniers mois, pour les vols de rapatriement, pour les ressortissants bloqués à l’étranger, mais aussi pour les vols sanitaires. Pour cette reprise, tout un dispositif est mis en place pour se conformer au protocole sanitaire du gouvernement. Les accompagnants sont interdits d’accès, des vitres ont été placées aux guichets, des marquages au sol pour garder ses distances, le port du masque est obligatoire, des caméras thermiques ont été mises en place un peu partout.

Pour les passagers qui arrivent de l’extérieur, il faut désormais présenter un certificat de test négatif de Covid-19 de moins de sept jours. Il faut aussi remplir un formulaire de localisation pour pouvoir suivre le trajet du passager. Objectif : empêcher à tout prix le retour de cas de Covid-19 dits « importés ».

Sénégal: une fresque pour honorer les héros noirs ou africains à Dakar

Comment Air France prépare son retour en Afrique

| Par
Airbus A350 d'Air France, utilisé notamment pour les dessertes Paris-Dakar-Paris.

Malgré les restrictions imposées par l’UE, la compagnie a repris cette semaine ses vols vers Abidjan et poursuit les discussions avec d’autres capitales africaines.

« Une douche froide ». C’est ainsi que certains bons connaisseurs du ciel africain qualifient la publication le 1er juillet par l’Union européenne de la liste des pays dont les ressortissants sont autorisés à pénétrer dans l’espace Schengen.

« Concentrée sur son remaniement ministériel, la France n’a pas su défendre les pays africains » regrette une source proche des négociations, alors que l’Allemagne et la République tchèque ont bloqué l’extension de la liste aux pays subsahariens.

Un seul figure toutefois dans la liste : le Rwanda, qui ne fait pas partie des destinations desservies par le groupe Air France-KLM…

Reprise partielle des liaisons

Selon les informations de Jeune Afrique, Air France peut continuer « à titre exceptionnel » à desservir des destinations qui ne sont pas incluses dans la réglementation, avec l’accord du pays et à condition que les passagers concernés fassent valoir un motif particulier (statut de résident, liens familiaux…).

En vertu du principe de réciprocité, le Sénégal, le Gabon et l’Algérie ont fermé la porte aux citoyens européens, la Côte d’Ivoire et le Bénin ont eux ouvert leur espace aérien, sans appliquer de pareilles restrictions. La liste de l’UE devrait être réactualisée le 15 juillet.

Pour sa part, Air France a déjà repris ses liaisons vers Abidjan, Cotonou, Douala, Yaoundé, Libreville, en tenant compte des restrictions éventuelles concernant les passagers admissibles dans chaque pays. Elle se prépare toutefois activement en prévision d’un retour « à la normale » dans les capitales africaines.

Ses délégués régionaux mènent des discussions avec les ministres des Transports et les aviations civiles de chaque pays

D’abord, d’un point de vue opérationnel, en préparant la remise en route d’appareils qui n’ont pas volé pendant plusieurs mois.

Ensuite, au travers de ses délégués régionaux qui mènent des discussions avec les ministres des Transports et les aviations civiles de chaque pays, évaluant la situation épidémique, la capacité à remettre des vols aussitôt que les conditions sanitaires seront levées. Des échanges qui se poursuivent en parallèle au plus haut niveau avec les présidences.

Regagner la confiance des voyageurs

D’après nos informations, la compagnie a chargé son ancien directeur des relations extérieures pour l’Afrique, le consultant Guy Delbrel, depuis longtemps facilitateur des relations entre la compagnie et les pays africains, de mener à bien les contacts.

Il importe au transporteur de ne pas froisser les interlocuteurs

C’est ainsi qu’a été préparé le retour des vols commerciaux d’Air France le 6 juillet avec le ministre ivoirien des Transports Amadou Koné, les dirigeants de l’aviation civile et des proches du président Ouattara et que les échanges se sont aussi poursuivis avec l’entourage de son homologue sénégalais Macky Sall.

S’il s’agit de bien mettre au point les procédures sanitaires, il importe aussi, au transporteur français, de ne pas froisser les interlocuteurs. La diffusion en mai sur les réseaux sociaux d’un faux visuel concernant la reprise des vols d’Air France sur le continent avait suscité le courroux des autorités à Dakar, obligeant Air France à clarifier la situation.

Si les cabines sont encore loin d’être remplies, la compagnie devra aussi regagner la confiance des voyageurs, qui ne sont pas tous prêts à remonter dans un avion. Et les passagers devront se montrer patients devant les contrôles sanitaires prévus à l’arrivée, avec un temps d’attente particulièrement long dans plusieurs aéroports du continent. Très attendu, le retour d’Air France en Afrique ne s’annonce pas de tout repos.

Plus de 2 millions de personnes

menacées par la famine au Burkina Faso

Vatican News, 07 juillet 2020

Burkina

Dans un camp de déplacés internes à Kaja, Burkina Faso, le 22 janvier 2020

Caritas Internationalis lance un appel d'urgence pour aider les personnes déplacées au Burkina Faso à survivre à la grave crise alimentaire. Selon l’organisation catholique, si aucune aide n'est fournie, plus de 2,2 millions de burkinabè risquent de mourir de faim dans les mois à venir en raison des conflits en cours et des conditions climatiques extrêmes.

En cette année 2020, le nombre de personnes touchées par une très grave pénurie alimentaire est trois fois plus élevé que l'année dernière au Burkina Faso, constate Caritas Internationalis dans un communiqué publié le 1er juillet dernier.

Ce pays enclavé d'Afrique de l'Ouest est devenu l'épicentre d'un conflit régional dramatique qui a provoqué le déplacement de plus d'un million de personnes. Il n'y a pas si longtemps encore, la paix régnait au Burkina Faso, mais depuis maintenant quatre ans, des groupes armés opérant le long de la frontière nord et dans l'est du pays continuent de tuer et de terroriser les citoyens. Une grande instabilité en résulte, se traduisant par l'une des vagues de déplacement les plus rapides au monde, avec des centaines de milliers de personnes sans nourriture, eau ou abri.

«Le monde a oublié la crise du Sahel», regrette le directeur de Caritas Burkina Faso, le père Constatin Sere, selon qui «des pays comme le Burkina Faso sont confrontés à une série de défis et sans aide, les gens vont souffrir terriblement. Les personnes déplacées n'ont pas accès à la nourriture ni à l'eau, qui est essentielle à la fois pour la boisson et l'hygiène personnelle».

Le père Sere note également qu'à l'approche de la saison des pluies, les conditions des personnes déplacées deviennent encore plus critiques car la plupart d'entre elles n'ont pas d'abri adéquat pour faire face aux tempêtes, aux vents forts et aux inondations qui vont suivre dans les trois à cinq prochains mois.

Comme l’explique le prêtre, tous les Burkinabè et les personnes déplacées en particulier continuent d'espérer la paix et le retour à la normale. «Si vous demandez à une personne déplacée ce qu'elle souhaite le plus, elle vous répondra qu'elle veut retourner dans son village d'origine. Je crains que cela ne se produise pas de sitôt, car la violence ne diminue pas. Malgré l'engagement de l'État, les groupes armés de notre pays continuent à semer la terreur et à briser des vies», constate-t-il.

Un projet pour tenter de secourir la population

Le nombre de personnes menacées par la famine à court-terme est très élevé, représentant 11% de la population, «Entre juillet et août, 2,2 millions de personnes au Burkina Faso risquent de mourir de faim. L'avenir est inquiétant, mais nous continuons à mettre notre foi en Dieu et en l'amour de nos frères et sœurs dans le monde entier», ajoute le père Sere.

Caritas a donc lancé un projet de 600 000 euros pour fournir aux personnes déplacées et à leurs familles d'accueil une aide alimentaire et une contribution économique jusqu'à la fin octobre 2020. Le projet, qui vise à aider environ 50 000 personnes, sera principalement concentré dans les diocèses de Kaya, Fada N'Gourma, Nouna et Dédougou.

Les colis alimentaires offerts à environ 1 500 familles contiendront suffisamment de nourriture pour un mois et comprendront: 50 kg de riz, 50 kg de sorgho ou de millet, 25 kg de haricots, 5 litres d'huile, 2 kg de sel et 5 000 francs centrafricains que les gens pourront utiliser pour acheter des denrées périssables. Au nom de Caritas Burkina, le père Sere remercie tous ceux qui entendent aider la population locale.

es Sud-Soudanais attendant une aide du PAM, le Programme alimentaire mondial, le 4 février 2020. 

 

9 ans après son indépendance,

le Soudan du Sud est épuisé et affamé

 

Sousan

Vatican News,08 juillet 2020

Dans un rapport publié à la veille du neuvième anniversaire de l’indépendance sud-souda-naise, Caritas Italie dresse un triste état des lieux du plus jeune État du monde.

Une population épuisée par la guerre et affamée par la pandémie : c'est la photographie dramatique prise par Caritas Italiana au Soudan du Sud, à l'occasion du neuvième anniversaire de l'indépendance du pays, obtenue le 9 juillet 2011. Le constat de l'organisation est sans appel : «Une guerre civile qui a fait des centaines de milliers de morts ; une population épuisée et en fuite avec des millions de personnes déplacées et de réfugiés qui pèsent sur des pays voisins tout aussi fragiles ; un territoire dépourvu d'infrastructures importantes et de ressources naturelles riches qui ne parviennent pas à garantir la sécurité et la stabilité ; un processus de paix lent, entre la signature d'accords et de cessez-le-feu jamais respectés, sans cesse repoussés et conduisant toujours à de nouveaux affrontements dont les conséquences sont payées par tant de pauvres ; une crise parmi les plus oubliées».

Caritas rappelle par ailleurs les nombreux appels lancés par le Pape François et l'Église locale qui «ont élevé la voix, appelant au pardon et au dialogue pour surmonter les divisions ethniques et les intérêts de quelques-uns et pour revenir à l'unité nationale». Tout cela alors que «la pandémie de Covid-19 augmente la faim, plus qu'elle n'affecte les quelques hôpitaux».

Pour un avenir moins obscur, Caritas propose une réconciliation au niveau politique, militaire et communautaire, la transparence dans la gestion des ressources naturelles, la lutte contre la corruption et un plus grand investissement dans les infrastructures et les services primaires, en donnant la «priorité aux jeunes et aux femmes en tant qu’acteurs du changement». 

Les violences malgré un accord de paix 

Au Soudan du Sud, malgré les progrès vers l'application de l'accord de paix, les violences intercommunautaires se poursuivent dans ce pays regorgeant d'armes, où elles ont fait 658 morts et 452 blessés au premier trimestre 2020, selon les Nations unies.

Après des mois de négociations, les deux rivaux, Salva Kiir et Riek Machar, ont accepté en février dernier de former un gouvernement d'union nationale, afin d'en finir avec une guerre civile qui a fait en six ans plus de 380 000 morts et provoqué une crise humanitaire catastrophique. La formation d'un gouvernement d'union nationale était le point clé de l'accord de paix conclu en septembre 2018 à Addis Abeba. Depuis, la principale pomme de discorde était le contrôle des 10 États que compte le pays, en particulier ceux produisant du pétrole, principale source de richesse du pays. Mercredi 17 juin, le président et le vice-président ont conclu un accord pour le partage de ces zones. Ceux qui ont commis des violences devront rendre compte à Dieu, avertissait en juin dernier le Conseil des Églises du Soudan du Sud (Sscc). 

Lire aussi : Appel œcuménique contre les violences au Soudan du Sud

Mali: au moins quatre morts et des arrestations en marge de la manifestation contre IBK

Le mouvement M5, né début juin et composé d’une partie de la société civile, de l’opposition politique et de religieux, a organisé sa troisième manifestation ce vendredi 10 juillet pour réclamer la démission du chef de l’État Ibrahim Boubacar Keïta
Le mouvement M5, né début juin et composé d’une partie de la société civile, de l’opposition politique et de religieux, a organisé sa troisième manifestation ce vendredi 10 juillet pour réclamer la démission du chef de l’État Ibrahim Boubacar Keïta REUTERS/Matthiew Rosier
Texte par : RFI
4 min

Au Mali, le dernier bilan de la manifestation du vendredi 10 juillet fait état d'au moins quatre morts et 70 blessés. Le Premier ministre malien, Boubou Cissé, s’est rendu, dans l’après-midi de ce samedi 11 juillet, à l’hôpital Gabriel Touré, pour rendre visite aux personnes blessées dans les manifestations de vendredi, et a annoncé que le bilan s’élevait à quatre personnes tuées. Des bâtiments administratifs ont également été pris d'assaut, comme le siège de la Télévision nationale, l'ORTM, et l'Assemblée nationale. Plusieurs personnes ont été interpellées.

Avec nos correspondants à Bamako,

Le Premier ministre malien Boubou Cissé qui s’est rendu cet après-midi à l’hôpital Gabriel Touré pour rendre visite aux personnes blessées dans les manifestations de vendredi a annoncé que le bilan s’élevait désormais à quatre personnes tuées. Au lendemain d’un vendredi émaillé de violences, le chef du gouvernement a également déclaré à RFI que le président et lui-même restent ouverts au dialogue. « Très rapidement, je mettrai en place un exécutif avec l’intention d’ouverture pour faire face aux défis de l’heure », a-t-il affirmé.

Au lendemain de cette houleuse manisfestation à Bamako, selon les proches de Issa Kaou Djim, et de Clément Dembélé, deux des principales figures de la contestation, ils ont été interpelés. D’autres leaders de la contestation, à la mi-journée de ce samedi, ne répondaient pas au téléphone. Difficile de savoir ce qui se passe. Ajoutons que le siège du Mouvement du 5 juin (M5) serait assiégé par les forces de l’ordre, selon un responsable.

L’imam Mahmoud Dicko, a été arrêté vendredi soir, selon le Mouvement du 5 juin. Son organisation avait appelé à la désobéissance civile, une réponse aux propositions du chef de l’État, cette semaine, pour sortir de la crise politique. Ce vendredi 10 juillet, dans les rues, le M5 a renouvelé son appel à la démission du président IBK.

Clément Dembélé, de la Plateforme de lutte contre la corruption et le chômage (PCC), a lui été arrêté pour insurrection et tentative de déstabilisation du pays, avant d’être relâché, puis de nouveau arrêté cette nuit, selon un communiqué publié sur sa page Facebook.

Les réseaux sociaux, ce samedi matin, continuent à fonctionner au ralenti et la télévision nationale, elle, a repris sa diffusion. Vendredi, l’ORTM avait cessé d’émettre dans l'après-midi, après l’occupation de la cour et l’occupation du bâtiment par des manifestants.

Avant la mi-journée de ce samedi, des jeunes ont tenté à nouveau de prendre le contrôle d’un des trois ponts de Bamako. Il y a eu de gros embouteillages et puis finalement, tout est revenu à la normale. RFI a pu constater que les deux ponts occupés, vendredi, par les manifestants étaient ouverts à la circulation. Des restes de pneus étaient également visibles dans les rues que les services de la voirie ont commencé à nettoyer. Des voitures incendiées étaient également visibles.

Par ailleurs, au grand marché de la capitale Bamako, par mesure de précaution, des boutiques sont restées fermées. Ajoutons que devant l’Assemblée nationale, en partie saccagée, nous avons vu les Forces de l’ordre.

L'Assemblée nationale «saccagée»

Vendredi, l'Assemblée nationale a également été investie par la foule, du matériel a été emporté et des documents ont été détruits, avant l’arrivée des forces de l’ordre.

Joint par RFI, Moussa Timbiné, président de l’Assemblée nationale faisant partie des députés dont l'élection est contestée, déplore ce débordement.

Les dégâts sont énormes parce que l’édifice lui-même a été saccagé […] Il y a eu des pillages […] Naturellement je déplore cela. Tout ce qui vient d’être perdu n’appartient pas à un individu. Cela appartient au peuple malien.

Moussa Timbiné, président de l’Assemblée nationale malienne.

La police et la gendarmerie n’ont quasiment pas été aperçues dans le sud de la ville et au niveau des deux ponts bloqués par des barricades, au nord de la ville, des tirs ont été entendus. Ce samedi 11 juillet, le dernier bilan fait état d'au moins deux morts et 55 blessés. 

À lire aussi : La manifestation du M5 contre IBK dégénère à Bamako

Le Mouvement du 5 juin, à l'origine de cette nouvelle journée de protestation,  réclame la dissolution du Parlement, la formation d'un gouvernement de transition dont il désignerait le Premier ministre, ainsi que le remplacement des neuf membres de la Cour constitutionnelle, accusée de collusion avec le pouvoir.

Dans un communiqué diffusé vendredi soir, il a tenu le pouvoir pour responsable des violences et exhorté les forces de l'ordre à protéger « les manifestants aux mains nues qui ne défendent que les valeurs démocratiques, laïques et républicaines ».

bamako manif barricades
bamako manif barricades AP Photo/Baba Ahmed