Justice et Paix

" Je suis homme, l'injustice envers d'autres hommes révolte mon coeur. Je suis homme, l'oppression indigne ma nature. Je suis homme, les cruautés contre un si grand nombre de mes semblables ne m'inspirent que de l'horreur. Je suis homme et ce que je voudrais que l'on fit pour me rendre la liberté, l'honneur, les liens sacrés de la famille, je veux le faire pour rendre aux fils de ces peuples l'honneur, la liberté, la dignité. " (Cardinal Lavigerie, Conférence sur l'esclavage africain, Rome, église du Gesù)

 

NOS ENGAGEMENTS POUR LA JUSTICE T LA PAIX
S'EXPRIMENT DE DIFFÉRENTES MANIÈRES :

En vivant proches des pauvres, partageant leur vie.
Dans les lieux de fractures sociales où la dignité n'est pas respectée.
Dans les communautés de base où chaque personne est responsable et travaille pour le bien commun.
Dans les forums internationaux pour que les décisions prises ne laissent personne en marge.

Dans cette rubrique, nous aborderons différents engagements des Missionnaires d'Afrique, en particulier notre présence auprès des enfants de la rue à Ouagadougou et la défense du monde paysan.

 

« Passeports dorés » : quand les Africains fortunés s’offrent une double nationalité

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Mis à jour le 10 novembre 2020 à 11h35
Une centaine d'États accordent des passeports ou des visas "dorés" (image d'illustration)

Une centaine d'États accordent des passeports ou des visas "dorés" (image d'illustration) © Peter Garrard Beck/Gettyimages

 

En pleine pandémie de Covid-19, de plus en plus de riches Africains se tournent vers les « passeports dorés ». Enquête sur ces laissez-passer que délivrent des pays avides de capitaux étrangers et qui permettent de se jouer des frontières. À condition d’y mettre le prix.

Les signes extérieurs de richesse changent avec l’époque et le Covid-19. Aux jets privés, désormais cloués sur les tarmacs des aéroports, les grandes fortunes de ce monde préfèrent désormais une double nationalité qui leur permettra de franchir des frontières cadenassées pour cause de confinement. Bienvenue au temps des « passeports dorés ».

C’est le cas des ressortissants aisés des pays en développement, notamment africains, « habitués à se faire soigner à l’étranger et qui se sont retrouvés coincés dans leur pays lors de la première vague », explique Armand Arton, président du cabinet Arton Capital, spécialisé dans ce marché de plus en plus lucratif au fil des flux et reflux du coronavirus.

« Citoyenneté par investissement »

Depuis ses origines, l’industrie de « la citoyenneté par investissement » raffole de ces périodes de crise et d’incertitude auxquelles elle doit sa bonne fortune, l’actuelle pandémie n’étant que la dernière en date. Inauguré en 1984 par les autorités de Saint-Kitts-et-Nevis afin de financer la relance du secteur sucrier local sans avoir à passer sous les fourches caudines du FMI, le concept fait rapidement des émules dans des pays à forte tradition migratoire comme le Canada, puis les États-Unis, qui accueilleront au début des années 1990 de nombreuses fortunes hongkongaises avant la rétrocession du territoire à la Chine.

La pratique reste ensuite des plus confidentielles jusqu’à la crise financière de 2008 qui, selon Nuri Katz, fondateur d’Apex Capital Partners, autre acteur de poids du secteur, « fait prendre conscience à de nombreux pays en recherche de financements que leur citoyenneté est un bien comme les autres ». Et qu’il peut leur rapporter beaucoup d’argent.

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UNE CENTAINE D’ÉTATS ACCORDENT CES PASSEPORTS OU CES VISAS

Les programmes fleurissent alors dans les micro-États insulaires des Caraïbes, où ils contribuent à financer le développement du tourisme, ainsi que dans les petits pays européens en mal de liquidités. En sept ans, Chypre a collecté pour 8 milliards de dollars d’investissements immobiliers pendant que la Dominique a pu se relever du passage dévastateur du cyclone Maria fin 2017 grâce à la vente de ses passeports.

En Moldavie comme à la Grenade ou dans les Îles Salomon, ces rentrées d’argent pèsent chaque année jusqu’à 20 % du PIB. Selon l’OCDE, près d’une centaine de pays accordent aujourd’hui des titres de séjour permanents (passeports) ou temporaires (visas) pour attirer des capitaux étrangers.

Passeports « puissants »

Aucun pays africain ne s’est encore officiellement positionné sur un marché qui, ces dix dernières années, aurait permis de générer entre 20 et 25 milliards de dollars d’investissements directs. Mais l’arrivée de la pandémie a accéléré la réflexion chez certains, comme Maurice qui, le 28 octobre, a annoncé la création d’un visa premium destiné à ceux qui peuvent télétravailler loin de chez eux. « Suite au Covid-19, cinq à six pays devraient démarrer leur propre programme dans les douze mois », annonce déjà Armand Arton, comme les Tuvalu, dans le Pacifique, ou la Macédoine et l’Albanie en Europe.

En Afrique, à part Maurice et les Seychelles, rares sont les États à pouvoir capitaliser sur leur passeport. Il doit pour cela être attrayant, « puissant » pour reprendre le terme utilisé par le cabinet britannique Henley & Partners, qui publie chaque année depuis 2006 son classement mondial des passeports, établi en fonction du nombre de pays qu’ils autorisent à visiter sans visa.

Et là encore, le coronavirus a chamboulé la donne en quelques mois. Globalement épargnés par la pandémie, l’Australie et la Corée du Sud ont vu leurs pièces d’identité progresser dans la liste, pendant que celles émises par les États-Unis, la Russie ou encore le Brésil, dont les ressortissants ne sont plus autorisés à pénétrer dans l’Union européenne (UE), ont lourdement chuté.

Le document américain disparait même pour la première fois des dix premières places du classement, « ouvrant un nouveau marché très lucratif aux États-Unis », constate déjà Armand Arton.  À mesure que la situation sanitaire s’aggrave dans leur pays, les riches américains rejoignent ainsi en nombre – un flux en hausse de 700 % comparé à 2019 – leurs homologues du Moyen-Orient et de la Chine, qui représentent aujourd’hui plus de 80 % des 25 000 candidats à une double-nationalité enregistrés chaque année en toute discrétion, patriotisme économique oblige.

Une demande africaine en hausse

Les Africains sont pour l’instant encore peu nombreux à entamer une telle démarche, « mais les choses sont en train de bouger », constate Nuri Katz, qui prévoit d’ouvrir un bureau sur le continent dans les prochains mois. D’abord, parce que le nombre de millionnaires en dollars est en forte augmentation sur un continent où les infrastructures de santé et d’éducation restent généralement défaillantes.

Ensuite, parce que la grande majorité des passeports délivrés en Afrique sont loin d’être des passe-partout et que des pays comme l’Éthiopie et l’Égypte occupent même la fin du classement établi par Henley & Partners, en compagnie du Yémen, de la Syrie et de l’Irak. Pire, une place forte économique comme le Nigeria a dégringolé de plus de vingt places en dix ans. « Insupportable pour des entrepreneurs qui veulent ni plus ni moins bénéficier des mêmes libertés de mouvement qu’un Occidental », reprend Nuri Katz.

Plutôt que de courir le risque de se voir assigner à résidence dans leur pays à la suite de soubresauts politiques, économiques ou dernièrement sanitaires, les High Net Worth Individuals (HNWI, « personnes de haute valeur ») d’Afrique se laissent donc à leur tour séduire par les « passeports dorés ». Créé il y a cinq ans, le programme mis en place à Sainte-Lucie n’avait jamais reçu la moindre demande en provenance d’Afrique. Depuis septembre, les autorités de cette petite île des Antilles ont délivré une soixantaine de passeports à de riches Nigérians.

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UNE SECONDE NATIONALITÉ DANS LES ANTILLES DONNE ACCÈS À PLUS DE 140 PAYS, DONT LES ÉTATS DE L’UE

Dans le même temps, les Sud-Africains ont été plusieurs centaines à opter pour les douceurs du Portugal, rejoints par quelques Kényans. Les Francophones – Algériens, Sénégalais et Ivoiriens en tête – continuent quant à eux de préférer les frimas du Québec, tandis que les contingents nigérians et ghanéens ont triplé dans les autres provinces du Canada.

À partir de 100 000 dollars

Le ticket d’entrée pour certaines destinations exotiques, épargnées qui plus est par le Covid, est des plus abordables. Le passeport du Vanuatu présente certainement aujourd’hui le meilleur rapport qualité-prix. Pour 130 000 dollars, il permet à son détenteur de voyager dans 130 pays et il est livré à domicile en moins d’un mois. Dans les Antilles, il suffit d’investir entre 100 000 dollars (sur l’île de la Dominique) et 200 000 dollars (à la Grenade) dans les différents fonds souverains nationaux existants pour offrir une seconde nationalité à toute sa famille, avec un accès permanent à plus de 140 destinations dans le monde, dont les différents États de l’UE.

La formule est d’ailleurs bien plus avantageuse que celle consistant à acheter directement un passeport européen. Au Portugal, la première option démarre à 350 000 dollars. Elle dépasse le million de dollars d’investissements dans l’immobilier à Malte ou à Chypre. La pandémie a néanmoins assoupli certains programmes existants. Il n’est par exemple plus nécessaire d’être physiquement présent dans les pays pour en demander la nationalité. Certains nouveaux citoyens ne mettent même jamais les pieds dans leur lieu de résidence tout neuf.

Corruption et évasion fiscale

« Une seconde citoyenneté, c’est davantage un style de vie », estime Armand Arton. Qui fait parfois froncer quelques sourcils du côté du commun des mortels, qui lui n’a pas les moyens financiers de ses compatriotes les plus riches pour assurer sa liberté de mouvement, mais aussi au sein des instances internationales, Commission européenne et OCDE en tête, vite tentées de faire l’amalgame entre passeports dorés et paradis fiscaux.

Le scandale qui a éclaté à Chypre en 2019 a réveillé les pires craintes à Bruxelles. Une enquête de la presse locale a révélé la présence d’une vingtaine d’escrocs notoires, dont l’homme d’affaires kenyan Humphrey Kariuki Ndegwa et sa femme Stelia Nasike, parmi les 4 000 passeports délivrés par Nicosie depuis la mise en place du Cyprus Investment Program (CIP) en 2011.

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L’EUROPE N’A QU’À PERMETTRE AUX AFRICAINS DE SE VENIR PLUS FACILEMENT »

Déjà échaudée après l’assassinat à Malte, deux ans plus tôt, de la journaliste Daphne Caruana Galizia, alors qu’elle enquêtait justement sur les soupçons de corruption et d’évasion fiscale liés au programme de citoyenneté de son pays, la Commission a tapé du poing sur la table pour que les pays membres durcissent les critères d’attribution de leurs passeports. « Pas de maillon faible au sein du marché intérieur commun », dit en substance une note publiée sur le sujet l’année dernière.

« Pour l’UE, ses passeports ne devraient pas être à vendre, s’amuse Nuri Katz. Elle aime donc entretenir la confusion. » Chez Arton Capital aussi, on réfute toute volonté d’optimisation fiscale chez ses clients : « il existe des solutions bien moins contraignantes pour cela ». Et comme le rappelle le Sud-africain Chris Immelman, courtier en citoyenneté dans son pays, « si l’Europe veut réduire le nombre de demandes pour un second passeport, elle n’a qu’à permettre aux Africains de s’y rendre plus facilement ».

Comment Blaise Compaoré a fait de Mahamadou Bonkoungou
l’un des plus riches patrons du Burkina (2/2)

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Mis à jour le 04 novembre 2020 à 14h45
Au premier plan : l’entrepreneur Mahamadou Bonkoungou. Au second plan : l'ancien président burkinabè Blaise Compaoré.

 

L’ascension du patron d’Ebomaf est indissociable de l’ex-président burkinabè, qui lui a fait profiter de ses connexions. Dans le second volet de son enquête, « Jeune Afrique » vous révèle les coulisses de sa montée en puissance à Ouagadougou.

Il est sans aucun doute l’homme le plus fortuné du Burkina Faso. Et l’un des seuls à pouvoir s’entretenir en privé avec le milliardaire nigérian Aliko Dangote, à qui il rend visite régulièrement au Nigeria. À 54 ans, Mahamadou Bonkoungou, fondateur de la société de BTP Ebomaf, est pourtant resté longtemps dans l’ombre, y compris dans son propre pays.

D’abord parce que son ascension, qui s’est accélérée au cours des dix dernières années, repose sur des chantiers obtenus pour la plupart dans les pays voisins. Ensuite, parce que l’entrepreneur a toujours pris soin de cultiver une certaine discrétion. Il sort peu, n’offre pas de grandes réceptions dans sa villa du quartier de Ouaga 2000, n’entretient pas de réelles amitiés avec d’autres VIP, même s’il en fréquente pour la bonne marche de ses affaires, et ne dépense pas son argent de manière exubérante.

Mahamadou Bonkoungou s'est progressivement rapproché de Roch Marc Christian Kaboré.

 

 

Pour avoir une idée de son patrimoine, il vaut mieux regarder du côté de Casablanca, où il a acheté une villa de 4 millions d’euros dans le quartier d’Anfa, et du côté de Paris, où il possède un luxueux pied-à-terre dans une voie privée du 17e arrondissement. Et n’eût été la révélation, en 2018, de son différend financier avec l’ancien Premier ministre béninois Lionel Zinsou, qui ne lui remboursait pas un prêt de 15 milliards de F CFA (23 millions d’euros) consenti pour financer sa campagne présidentielle en 2016, il serait certainement resté quelques années encore sous les écrans radars.

Ambitions politiques

Alors, quand sa fille Alizèta Kambou Bonkoungou s’affiche au début de septembre avec les fondateurs d’un nouveau parti, l’Alliance pour le développement national (ADN), l’initiative surprend. Il s’agirait en fait d’un ballon d’essai. Inspiré par Patrice Talon, le patron d’Ebomaf nourrit, selon nos informations, des ambitions politiques.

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IL SE SENT INVINCIBLE

A force de fréquenter les palais – bien au-delà de la sous-région –, ce fils cadet d’un commerçant né à Dédougou, qui a débuté en important du Nigeria des cassettes audio et des pièces de moto, puis du Togo des voitures d’occasion, rêve aujourd’hui d’un destin présidentiel. « Il se sent invincible » nous confie, incrédule, un grand patron ouest-africain.

Mahamadou Bonkoungou a promu sa fille Alizèta au poste de directrice adjointe de son groupe, Ebomaf.

Le mentor Blaise Compaoré

Son ascension est d’abord indissociable de Blaise Compaoré et de son frère François, à qui l’ancien président burkinabè déléguait la gestion des questions économiques. Avant la chute de ce dernier, le patron avait accès à tous les rouages du système : le chef d’État-major du président, le général Gilbert Diendéré, le chef du gouvernement, Luc Adolphe Tia, et le ministre de l’Économie et des Finances, Lucien Marie Noël Bembamba.

Et c’est encore l’ex-président burkinabè qui invitera les chefs d’État de la sous-région, à commencer par le Togolais Faure Gnassingbé Essozimna, le Béninois Thomas Boni Yayi, et celui qui est devenu l’un de ses premiers soutiens, l’Ivoirien Alassane Ouattara, à faire appel aux services de Bonkoungou.

Soucieux dès le départ à ne pas afficher sa proximité avec le clan Compaoré, le chef d’entreprise a pu échapper à la vindicte populaire au moment des soulèvements de 2014. Aujourd’hui, il s’entend bien avec l’actuel locataire du palais de Kosyam, Roch Marc Christian Kaboré. Il est d’ailleurs l’un des grands donateurs de la fondation de la première dame. « Un homme d’une modestie exceptionnelle », souligne d’ailleurs l’ancien Premier ministre de Blaise Compaoré, candidat à sa propre succession en ce mois de novembre.

Preuve de cette bonne ambiance, Mahamadou Bonkoungou et sa fille Alizèta ont respectivement été élevés aux rangs de Grand Officier et de Chevalier de l’ordre de l’Étalon en décembre 2019. Pourtant, rapprocher les deux hommes n’a pas été simple. Il a fallu de nombreuses interventions pour y parvenir, dont celle de Mahamadi Savadogo, président de la Chambre de commerce et d’industrie du Burkina Faso. Et ce n’est qu’en 2017, lors de l’Assemblée générale des Nations unies, à New York, que le contact a été rétabli.

Depuis, l’exécutif burkinabè utilise souvent, comme les autres présidences de la région, les jets haut de gamme de la Liza Transport International (LTI) appartenant à l’homme d’affaires. S’il s’en défend, Bonkoungou a malgré tout, par loyauté, pris le risque de garder contact en secret avec l’ancien président. Selon une source au sein du Congrès pour la démocratie et le progrès, il lui rendrait d’ailleurs visite sur les rives de la lagune Ebrié, où Blaise Compaoré occupe une villa du quartier de Cocody-Ambassades, qu’a auparavant habitée l’actuel Premier ministre ivoirien Hamed Bakayoko, grand ami de Bonkoungou.

Premier cercle très familial

Décrit comme distant, faisant facilement fi des conventions, parfois obstiné, Mahamadou Bonkoungou s’appuie sur un premier cercle constitué pour l’essentiel de membres de sa famille pour piloter son groupe. Sa fille Alizèta, directrice générale adjointe, est impliquée dans tous les dossiers stratégiques. Bien que très jeune, son fils Issouf Bonkoungou avait lui aussi intégré Ebomaf. Il était d’ailleurs en mission en Côte d’Ivoire pour inspecter le chantier de bitumage de l’axe Ferkessédougou-Kong lorsqu’il est décédé, dans un accident de la circulation, en février dernier.

Récemment, le fondateur d’Ebomaf a également rappelé auprès de lui l’un de ses parents, Oumar Bonkoungou, ancien officier spécialiste des transmissions de l’armée burkinabè auparavant directeur général de l’opérateur de télécoms GreenCom en Guinée équatoriale. Sans poste précis, le quinquagénaire mène des missions de confiance à la demande du patron. Il l’a ainsi représenté au début d’octobre au Togo lors de la remise de logements à la gendarmerie nationale.

L’entrepreneur peut aussi compter sur Adama Rouamba, collaborateur dévoué qui a longtemps occupé le poste de directeur financier et qui coordonne désormais, en tant que secrétaire général, les activités du groupe dans les différents pays où il est présent. Dispositif auquel il faut ajouter son directeur de cabinet, Prosper Bassolé – proche de Djibrill Bassolé, ancien ministre des Affaires étrangères de Blaise Compaoré –, et son avocat Mathieu Somé.

Parmi ses fidèles depuis quelques années, on peut également citer El Hadj Aboubacar Zida, dit Sidnaba, fondateur du groupe de Savane médias, originaire comme lui de la région de Dédougou, ainsi que Moussa Ahmed Diallo, patron de l’Université de l’unité africaine (ex-IAM Burkina Faso), lui-même proche du ministre des Affaires étrangères, Alpha Barry.

Avant de se spécialiser dans les projets routiers et aéroportuaires, l’entrepreneur s’était d’abord concentré (à partir des années 1990) sur la réalisation de bâtiments publics. Il y avait été incité, selon ses dires, par des fonctionnaires à qui il vendait des véhicules d’occasion. En réalité, c’est le général Diendéré – avec qui il partage des origines communes dans un village de la province du Passoré (nord du pays) et qu’il considère comme un « frère » – qui a facilité l’obtention de plusieurs contrats.

Le général Gilbert Diendéré est l'un des premiers à avoir favorisé l'ascension de Mahamadou Bonkoungou au Burkina.


Ebomaf a bénéficié de financements des coopérations japonaise et française pour construire des écoles, la Maison des examens ou encore le Musée national du Burkina Faso, inauguré en 2004. Il a notamment beaucoup travaillé dans son fief de Dédougou. Les affaires étaient bonnes, mais les revenus, limités. De 1989, date de la création d’Ebomaf, à 2010, le groupe n’aurait engrangé que 60 milliards de F CFA de chiffre d’affaires cumulés. Une broutille comparée aux 782 milliards de F CFA enregistrés l’an dernier.

La montée en puissance du groupe débute en 2006, lorsqu’il décroche sur appel d’offres une partie du projet de la zone d’aménagement commerciale et administrative (Zaca) lancé pour moderniser le centre-ville de Ouagadougou. Sans expérience des grands chantiers, Mahamadou Bonkoungou noue alors un partenariat avec Christian Ober, l’un des patrons du groupe alsacien Trabet-GRE, aujourd’hui démantelé, qui lui fournit des hommes et du matériel. Puis, en 2009, il confirme son nouveau statut en obtenant un second lot, cette fois de gré à gré.

Bien que controversées – au point qu’un audit sera commandé en 2016 pour éclaircir les conditions d’attribution du chantier –, les réalisations du projet Zaca vont marquer le début de son expansion internationale, d’abord au Togo, puis au Bénin, en Côte d’Ivoire et en Guinée avec l’appui du président Blaise Compaoré. De l’avis général, les succès de Mahamadou Bonkoungou s’expliquent aussi par son professionnalisme et sa capacité à bien s’entourer. Lui-même affirme employer environ 300 expatriés par l’intermédiaire de sociétés d’intérim françaises, et son matériel vient des meilleurs fabricants.

Trésor de guerre

Devenu incontournable dans le secteur des projets de BTP en Afrique de l’Ouest grâce à ses liens avec un grand nombre de présidents, Mahamadou Bonkoungou a amassé un véritable trésor de guerre. D’après un banquier qui a pu consulter les comptes de son groupe il y a quelques années, la situation financière d’Ebomaf est exceptionnellement saine.

Très tôt, l’entrepreneur, qui vit sous la protection de la police burkinabè, a décidé d’utiliser cet argent pour diversifier ses affaires. Après la construction d’un premier hôtel, en 2009, à Dédougou, il a entrepris de créer une chaîne hôtelière. En 2016 et en 2018, il a ouvert deux établissements, à Ouagadougou et à Dédougou. Tous reprennent le nom de Zind Naaba (littéralement, « le roi de la sauce ») donné à son père de son vivant par les habitants de la boucle du Mouhoun quand il approvisionnait en légumes tous les marchés de la zone.

Il a également acheté à cette période Jackson Assurances, une petite compagnie alors en difficulté, puis inauguré en mai 2019, dans la capitale burkinabè, un supermarché – Liza Market, dont sa fille Alizèta a pris la gestion – et pris le contrôle de la société sénégalaise Barberousse Fish, spécialisée dans la transformation et la commercialisation des produits de la pêche. Il envisage maintenant la construction de dix bateaux.

Entre 2011 et 2013, il a aussi acquis à Bobo-Dioulasso (grâce à des financements apportés par Ecobank) les usines d’huile de coton Jossira et de jus de fruits Savana. Annoncée depuis plusieurs années, leur rénovation n’est toujours pas effective. Si certaines banques internationales, comme la Société générale, semblent aujourd’hui être un peu moins promptes à lui prêter des fonds de peur qu’Ebomaf ne respecte pas tous les critères de conformité, d’autres, telles Attijariwafa Bank et la Banque centrale populaire, continuent de le financer. Mahamadou Bonkoungou entretient d’ailleurs des relations directes avec leurs patrons respectifs, Mohamed El Kettani et Kamal Mokdad.

Mais le rêve de l’homme d’affaires est de pouvoir un jour se passer de leurs services. Inspiré par Idrissa Nassa, le fondateur de Coris Bank, il a créé en 2017 son propre établissement, IB Bank (nommé ainsi en référence à son fils Issouf) à partir de l’ancienne Banque de l’habitat du Burkina Faso. L’opération, officialisée sous le régime de Roch Marc Christian Kaboré, avait été selon plusieurs sources finalisée durant la transition assurée par le colonel Yacouba Isaac Zida, un « frère » originaire lui aussi du nord du pays. Selon nos informations, c’était Alizèta Ouédraogo, l’ex-belle mère nationale, qui devait initialement s’en emparer – avant le renversement de Blaise Compaoré. Au Burkina Faso, il en a confié la direction à l’époux de sa fille, Raphaël Kambou.

Mais Mahamadou Bonkoungou veut lui donner une envergure panafricaine. Pour piloter ce projet, il a misé sur le Marocain Nabil Tahari, ancien collaborateur de la Société générale qui, de 2016 à 2019, était directeur commercial de la filiale au Burkina Faso, et auparavant responsable de l’audit interne de la banque française pour l’Afrique subsaharienne. Ce dernier devrait être nommé à la tête du conseil d’administration d’IB Bank en fin d’année.

Ensemble, les deux hommes ont créé au Maroc une petite boutique, Africa Developement Consulting, spécialisée dans l’audit et la levée de fonds. Leur principal objectif est de réussir à la fin de cette année le lancement d’IB Bank à Djibouti, sous la houlette d’Urbain Bako, ex-cadre de Banque Atlantique au Burkina Faso. Pour obtenir la licence bancaire, l’entrepreneur est resté fidèle à sa méthode : aller directement à la présidence afin d’exposer son projet.

Cette fois, c’est l’Ivoirien Tommy Tayoro Nickoss, un jeune « frère » qui n’est autre que l’époux de l’une des filles du président djiboutien, Ismaïl Omar Guelleh,, qui lui a ouvert les portes du palais.

[Tribune] Présidentielle américaine : où est l’Afrique ?

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Mis à jour le 02 novembre 2020 à 14h06

 

Par  Pap Ndiaye

Historien, professeur à Sciences Po Paris

Manifestation, le 19 janvier 2018 à New York, en réponse au président Donald Trump, qui avait qualifié Haïti, le Salvador et certains pays d’Afrique de « pays de merde ».

Manifestation, le 19 janvier 2018 à New York, en réponse au président Donald Trump,
qui avait qualifié Haïti, le Salvador et certains pays d’Afrique de « pays de merde ». © Pascal Sonnet / Hans Lucas / AFP

 

Quasi absente des débats aux États-Unis, la politique étrangère semble être le cadet des soucis américains. Pourtant, Joe Biden a pensé au continent dans son programme.

La politique étrangère n’occupe généralement pas une place importante dans les campagnes électorales américaines. C’est encore le cas aujourd’hui : les Américains pensent prioritairement à la crise sanitaire du Covid-19, à la situation économique, aux relations raciales, à l’environnement et, bien entendu, aux personnalités des deux candidats.

Continent absent

La politique étrangère a été à peine mentionnée lors des deux débats : les relations avec la Chine, avec la Corée du Nord ; les traités commerciaux et militaires… Tout cela a été expédié en quelques minutes. Ne parlons pas du continent, complètement absent du débat public.

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DONALD TRUMP N’A PAS DE PROJET PARTICULIER, EN DEHORS DE SA RÉÉLECTION

Tournons-nous alors vers les programmes des candidats pour obtenir des informations. Ou plutôt « le » programme, devrait-on dire, car le seul qui soit disponible est celui de Joe Biden. Donald Trump n’a pas de projet particulier, en dehors de sa réélection : « réélisez-moi pour que tout soit pareil qu’aujourd’hui », dit-il en substance. Il vante son bilan, mais il ne dit rien de ce qu’il fera en cas de réélection, il ne le sait sans doute pas. Le Parti républicain a réimprimé le programme de 2016, avant de le mettre à la corbeille.

Biden et la diaspora

Le premier point important du programme du démocrate en ce qui concerne l’Afrique tient à la diaspora. Il reconnaît l’importance de la communauté installée aux États-Unis – elle compte environ 2 millions de personnes. Elle double tous les dix ans, et elle représente l’un des groupes migrants les plus dynamiques du pays.

Mais, ces dernières années, beaucoup d’Africains ont été confrontés aux restrictions de visas ordonnées par l’administration Trump, en particulier les personnes originaires du Soudan, de Somalie, du Nigeria – ces pays musulmans dans le collimateur du président.

Biden promet de revenir à une politique plus ouverte, au regroupement familial ; il veut rendre de nouveau possible la régularisation des migrants en situation illégale, et restaurer la politique d’asile.

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UN PROGRAMME QUI PARLE SPÉCIFIQUEMENT DES AFRICAINS EST UNE BONNE NOUVELLE

Le programme présidentiel démocrate mentionne également la crise sanitaire, en reconnaissant que beaucoup d’Africains sont des « travailleurs de première ligne », qui occupent des emplois très exposés au virus, et en promettant une couverture médicale pour eux.

L’engagement vaut ce qu’il vaut, bien entendu, mais le simple fait, dans un programme présidentiel, de parler spécifiquement des Africains, dont beaucoup n’ont pas la nationalité américaine et ne sont donc pas des électeurs, est une bonne nouvelle. Les gens originaires du continent ne sont pas oubliés.

Dans les pas d’Obama

Du côté de la politique étrangère, le propos est très général, et s’inscrit dans la continuation de la politique de l’administration Obama, dont Biden était le vice-président. Il est d’abord question d’un « engagement respectueux » à l’égard de l’Afrique, manière de souligner en creux l’indifférence de Trump à l’égard du continent, le seul qu’il n’ait pas visité.

Le 19 janvier 2018, la communauté haïtienne et des associations solidaires ont descendu Flatbush Avenue et traversé le Brooklyn Bridge, à New York, pour finir devant le Trump Building dans le quartier de Wall Street.h
Le 19 janvier 2018, la communauté haïtienne et des associations solidaires ont descendu Flatbush Avenue et traversé le Brooklyn Bridge, à New York,
pour finir devant le Trump Building dans le quartier de Wall Street. © Pascal Sonnet / Hans Lucas / AFP

 

On se souvient des propos insultants tenus par le président américain lors d’une discussion sur la protection des migrants venus d’Haïti, du Salvador et des pays d’Afrique, qualifiés de shithole countries (« pays de merde », propos rapportés par le Washington Post le 12 janvier 2018, et que Trump n’a pas démentis). Du côté du département d’État, aucun diplomate de haut rang n’a été nommé aux affaires africaines avant juillet 2018.

En octobre 2018, Melania Trump a certes effectué un voyage d’une semaine dans quatre pays africains (Ghana, Malawi, Kenya et Égypte), mais elle s’est gardée de tout propos politique, préférant insister sur l’éducation et l’aide humanitaire.

En outre, deux controverses ont terni son voyage : d’abord une séance photo avec des éléphanteaux au Kenya, au cours de laquelle elle affirma son engagement pour la préservation des animaux sauvages, ce qui fut l’occasion de rappeler que ses deux beaux-fils (Eric et Donald Jr.) pratiquent la chasse à l’éléphant, et que son mari a facilité l’importation aux États-Unis de trophées de chasse.

Ensuite, toujours au Kenya, le port d’un chapeau rappelant fortement un casque colonial, ce qui était pour le moins déplacé. Quelques jours après le voyage touristique de Melania Trump, son mari recevait pour la première fois à la Maison Blanche un président africain, le Nigérian Muhammadu Buhari.

Si Trump ne s’intéresse pas à l’Afrique, et tient le continent pour quantité négligeable, certaines continuités peuvent être soulignées, comme l’a fait le Council on Foreign Relations, un think tank influent qui publie la prestigieuse revue Foreign Affairs, consacrée à des questions économiques.

« Le Congrès a limité les dégâts »

Le plan « Prosper Africa » a ainsi pour objet de faciliter les projets d’entreprises américaines sur le continent, mais Trump ne semble pas y prêter le moindre intérêt.

De son côté, le Congrès a limité les dégâts en s’opposant aux réductions budgétaires drastiques en matière d’aide au développement proposées par l’administration. De telle sorte qu’un semblant de politique africaine a été maintenu par les parlementaires et quelques diplomates chevronnés comme Tibor Nagy.

Face à ce maigre bilan, Biden propose de « restaurer les relations diplomatiques » avec les gouvernements africains et l’Union africaine ; il souhaite réaffirmer l’engagement des États-Unis en matière de démocratie, de développement économique, ainsi que de paix et de sécurité. Il indique également que le service diplomatique, notamment en ce qui concerne les spécialistes de l’Afrique, devra refléter la diversité de la population américaine. Et il souhaite relancer l’initiative « Young African Leaders », un programme lancé en 2010 par Obama permettant à plusieurs centaines de jeunes Africains de séjourner dans des universités américaines.

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UNE VOLONTÉ PRUDENTE DE REVENIR À LA POLITIQUE AFRICAINE MENÉE PAR LES PRÉDÉCESSEURS DE TRUMP

Dans l’ensemble, c’est de « restauration » dont on peut parler à propos des projets de Biden sur l’Afrique : il n’y a pas d’innovation marquante, mais une volonté prudente de revenir à la politique africaine menée par les prédécesseurs de Trump. Et, ce qui est peut-être aussi important, en respectant l’Afrique et les Africains.

L’Afrique de l’Ouest et centrale forme une vaste région où se côtoient de multiples cultures,
croyances, langues et modes de vie.

Cette région se déploie de la pointe la plus occidentale de l’Afrique jusqu’à la République du Congo au sud, de part et d’autre de l’équateur et en partie le long de l’océan Atlantique. Elle regroupe 22 pays qui s’étendent des terres semi-arides du Sahel aux vastes zones côtières de l’Atlantique et du golfe de Guinée, tandis que la forêt tropicale recouvre de larges territoires, de la Guinée à la République du Congo, en passant par la Côte d’Ivoire, le Cameroun et le Gabon.

Avec près de 500 millions d’habitants, la sous-région a vu sa population quadrupler au cours des 50 dernières années. La majorité de la population est concentrée dans les zones côtières, tandis que les pays sans littoral sont en général moins densément peuplés. La région a connu une urbanisation très dynamique et 48 % de la population vit désormais en milieu urbain. Avec respectivement 3,7 et 3,1 millions d’habitants, Abidjan et Dakar sont les plus grandes villes francophones du monde après Kinshasa et Paris, et Lagos est l’une des plus grandes agglomérations anglophones du monde. Cette urbanisation rapide devrait se poursuivre au cours des prochaines années.

L’Afrique de l’Ouest et centrale a l’une des populations les plus jeunes du monde, avec 12 % de jeunes de moins de 15 ans.

De nombreux pays possèdent d’abondantes ressources et exportent des produits de base tels que le pétrole (Gabon, Nigéria, République du Congo), le cacao (Côte d’Ivoire, Ghana) et le coton (Bénin, Burkina Faso). Le secteur agricole et alimentaire reste cependant prépondérant dans la plupart des pays. C’est le premier employeur (66 % des emplois) et la source de revenu de 82 millions de personnes. Riche en ressources naturelles, la sous-région regorge d’opportunités. Elle a connu à partir du milieu des années 2000 une croissance économique soutenue, tirée par les prix élevés des matières premières, avant d’amorcer un ralentissement au cours de la période récente. Le PIB combiné des 22 pays d’Afrique de l’Ouest et centrale (sans la République démocratique du Congo) était estimé à près de 711 milliards de dollars en 2019.

Malgré ces immenses possibilités, l’Afrique n’atteint que 40 % de son potentiel estimé en raison d’un retard persistant dans les domaines de l’éducation, de la santé et des compétences. En outre, les conflits, l’insécurité alimentaire, la croissance démographique et les fortes perturbations liées au changement climatique menacent de freiner voire même d’annuler les progrès accomplis au cours des dernières décennies.

Récemment, la pandémie de COVID-19 (coronavirus) est venue rappeler les risques que posent la fragilité des systèmes de santé et le manque de surveillance épidémiologique. Alors que de nombreux pays de la région ont tiré de douloureuses leçons de l’épidémie d’Ebola qui a ravagé l’Afrique de l’Ouest en 2014, ils s’efforcent aujourd’hui d’appliquer les enseignements de cette expérience et d’exploiter tous les instruments et compétences dont ils disposent pour endiguer la pandémie, en donnant la priorité aux personnes les plus pauvres et les plus vulnérables.

Forte d’une longue tradition de commerce régional, la sous-région a accompli des progrès remarquables en matière de coopération. Outre la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), qui est la plus grande union économique et politique du continent africain, la région comprend également deux unions monétaires — l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) et la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC) — qui regroupent 13 pays au total.

Fidèle partenaire des pays d’Afrique de l’Ouest et centrale, la Banque mondiale aide les gouvernements à obtenir des résultats solides en matière de développement au profit des populations. Cet appui s’inscrit dans le cadre des priorités fixées dans la stratégie de la Banque mondiale pour l’Afrique, qui fait également de l'intégration régionale et de la recherche des axes d’action prioritaires en vue de maximiser l’impact du développement dans ses pays clients.

Au 18 juin 2020, le soutien de la Banque mondiale en faveur des pays d’Afrique de l’Ouest et centrale sur l’exercice en cours avait totalisé 8,1 milliards de dollars de

financements répartis sur 72 opérations. Le portefeuille actuel de la Banque (BIRD/IDA) dans la région est constitué de 350 projets en cours d’une valeur totale de 38,1 milliards de dollars. Plus de 260 millions de dollars ont déjà été alloués aux interventions d’urgence contre la pandémie de COVID-19, auxquels s’ajoutent 4,8 milliards de dollars destinés à des opérations en préparation pour le reste de l’exercice 2020 et l’exercice 2021.

Les domaines clés de l’engagement à long terme de la Banque mondiale en Afrique sont les suivants : renforcement du capital humain et autonomisation des femmes, développement de l’économie numérique, promotion de l’intégration régionale notamment dans les régions de la Corne de l’Afrique et des Grands Lacs, élargissement de l’accès aux énergies renouvelables à un coût abordable, renforcement de la résilience face au changement climatique, et mobilisation de toutes les sources de financement au service du développement.

Intégration régionale

Le Groupe de la Banque mondiale renforce son appui en faveur de l’intégration régionale afin de répondre aux grandes priorités du continent africain. Les domaines prioritaires de ses activités en Afrique de l’Ouest et centrale sont les réseaux d’infrastructures, la diversification économique, la facilitation du commerce et des transports, le financement, le développement du capital humain, la résilience et la lutte contre les fragilités, en particulier dans les régions du lac Tchad et du Sahel.

Voici un aperçu des principaux programmes régionaux menés en Afrique de l’Ouest et centrale :

Le projet de renforcement des systèmes régionaux de surveillance des maladies (REDISSE) vise à renforcer les systèmes de santé et la collaboration entre pays pour mieux détecter et contrôler les épidémies de maladies contagieuses. Le projet a contribué pour beaucoup à maîtriser l’épidémie d’Ebola en Afrique de l’Ouest et aide actuellement à enrayer la propagation du coronavirus dans cette région.

Le projet pour l’autonomisation des femmes et le dividende démographique au Sahel (SWEDD) a pour objet d’élargir l’accès des femmes et des adolescentes à une éducation de qualité et aux services de santé reproductive, maternelle et infantile. Le Groupe de la Banque mondiale a récemment approuvé un quatrième financement supplémentaire pour intensifier les activités en cours au Tchad, en Côte d’Ivoire, au Mali et en Mauritanie et de les étendre à deux nouveaux pays : le Cameroun et la Guinée.

Le système d’échanges d’énergie électrique ouest-africain (EEEOA) est un mécanisme de coopération entre 13 pays et 27 compagnies nationales d’électricité qui vise à intégrer le marché régional de l’électricité pour élargir l’accès à l’électricité et réduire les coûts. Le coût de raccordement au réseau électrique en Afrique de l’Ouest figure parmi les plus élevés du monde (0,25 dollar par kilowattheure, soit plus du double de la moyenne mondiale), et il y a jusqu’à 80 heures de coupures de courant par mois. Depuis 2005, la Banque mondiale et d’autres partenaires de développement accompagnent cette initiative avec l’objectif d’améliorer l’interconnexion physique et l’intégration des réseaux électriques.

Recherche et analyse

Les connaissances sont essentielles pour permettre aux gouvernements d’améliorer les politiques et les institutions, et partant, l’efficacité de l’aide. Les rapports régionaux les plus récents produits par la Banque sont présentés ci-dessous, tandis que les travaux d'analyse nationaux sont publiés sur les sites web des pays concernés. Ces études, conjuguées à des analyses sectorielles robustes, servent de socle à des discussions de fond et des prises de décisions informées sur des aspects clés du développement.