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Burkina Faso : le recours du général Diendéré
est rejeté par le Conseil constitutionnel

| Par Jeune Afrique avec AFP

Le recours déposé par le général Gilbert Diendéré, l'un des principaux accusés au procès du putsch manqué de septembre 2015, avait entraîné une suspension au début des plaidoiries. Il a finalement été rejeté par le Conseil constitutionnel.

« Le recours du général Gilbert Diendéré est recevable mais mal fondé », ont écrit les sages du Conseil constitutionnel dans leur décision.

Les avocats du général Diendéré, avaient introduit le 15 juillet auprès du Conseil constitutionnel un recours aux fins de déclaration d’inconstitutionnalité, entraînant une suspension jusqu’au 29 juillet du procès.

« Pour le parquet, toutes les personnes contre qui il existe des charges d’attentat ou complicité d’attentat sont systématiquement responsables des meurtres et des coups et blessures », a commenté Me Mathieu Somé, un des avocats du général Diendéré, estimant qu’on doit « caractériser l’infraction pour chaque individu et c’est en cela que le recours avait sa raison d’être ».

Prison à vie

Le 16 septembre 2015, des soldats du Régiment de sécurité présidentielle (RSP) avaient tenté en vain de renverser le gouvernement de transition mis en place après la chute du président Blaise Compaoré, chassé le 31 octobre 2014 par une insurrection populaire après 27 ans au pouvoir.

Au total, 84 accusés sont jugés depuis février 2018, dont le général Diendéré, principal accusé et cerveau présumé du coup de force manqué, qui avait fait 14 morts et 270 blessés.

Lors du putsch, le général Diendéré avait pris la tête du Conseil national pour la démocratie, organe dirigeant des putschistes, avant de rendre le pouvoir face à la pression populaire et à l’armée loyaliste.

Le procureur du tribunal militaire a requis la prison à vie à l’encontre des généraux Diendéré et Djibrill Bassolé, les deux principaux accusés du procès du putsch manqué de 2015, après avoir demandé la reconnaissance de leur culpabilité pour « attentat à la sûreté de l’Etat », « trahison », « meurtres et coups et blessures ».

Burkina Faso: pouvoir et opposition s'accordent
sur les élections de 2020

Le dialogue politique national organisé au Burkina Faso s'est terminé lundi 22 juillet.
© REUTERS/Joe Penney/Files

Durant une semaine, les représentants des partis de la majorité présidentielle burkinabè et ceux de l’opposition ont discuté des élections de 2020, de la sécurité et de la situation sociale du pays.

Les participants au dialogue politique ont trouvé un consensus sur plusieurs points concernant la tenue des élections en 2020. Le code électoral subira une légère modification, mais il sera intégralement relu après l’adoption de la nouvelle Constitution.

Majorité et opposition se sont donc mis d’accord sur « le maintien du calendrier électoral conformément aux dispositions constitutionnelles, légales et aux textes supranationaux, c’est-à-dire la tenue effective des élections couplées présidentielle et législatives en 2020, et municipales en 2021, a indiqué Siméon Sawadogo, ministre de l’Administration du territoire, de la Décentralisation et la Cohésion nationale. La détermination de la période de tenue du référendum laissée à la discrétion du chef de l’État. »

L’opposition politique s’est toutefois opposée au couplage du référendum à toute autre élection, et ce pour plusieurs raisons, explique Zéphirin Diabré, le chef de file de l’opposition. « Nous sommes tous d’accord pour le référendum, il y a un consensus. Alors si vous mélangez un scrutin où il y a consensus et accord et un autre scrutin où il n’y a pas accord, c’est compliqué pour les gens à comprendre, souligne-t-il. C’est pourquoi nous avons demandé au chef de l’État de faire attention et de tout faire pour que ce ne soit pas couplé à une autre élection. »

L’opposition a saisi l’occasion de ce dialogue pour faire un plaidoyer auprès du président du Burkina Faso et d’autres autorités pour une évacuation sanitaire du général Djibrill Bassolé.

Sénégal : deux centrales solaires produiront
l’électricité la moins chère d’Afrique de l’Ouest

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Deux centrales électriques solaires vont être construites au Sénégal pour un montant de 47,5 millions d'euros, grâce à l'initiative Scaling Solar de la Banque mondiale. Mathieu Peller, responsable du fonds d'investissement Meridiam, décrypte pour Jeune Afrique les spécificités de ces projets.

Deux nouvelles centrales solaires devraient voir le jour fin 2020 au Sénégal, grâce à un financement lancé par Scaling Solar, l’initiative de la Banque mondiale qui accompagne les gouvernements dans le financement de projets solaires. Situées chacune à un peu plus de cent kilomètres de la capitale, à Kabone et à Kael, les deux centrales auront respectivement une capacité de production 35 et 25 MW, et devraient fournir près de 600 000 personnes en électricité renouvelable, à bas coût.

Moins de 4 cents/kWh

Le groupe français Engie et le fonds d’investissement Meridiam, spécialiste en projets d’infrastructures, ont remporté en avril 2018 l’appel d’offres pour ces deux centrales électriques. Pour un montant total de 47,5 millions d’euros, le financement du projet à été bouclé avec la participation de la Banque européenne d’investissement, Proparco et la Société financière internationale (IFC), permettant désormais le lancement des travaux. La mise en service des usines est prévue pour dernier trimestre de 2020.

Mathieu Peller, chef d’exploitation pour Meridiam sur le continent africain, décrypte pour Jeune Afrique les spécificités de ces deux nouveaux projets.

Jeune Afrique : Comment sont distribués les rôles entre les acteurs des projets ?

Mathieu Peller : Pour répondre à l’appel d’offres, Meridiam s’est associé en tant que développeur et investisseur à Engie, qui se chargera de la construction et de l’exploitation des centrales. Nous avons négocié les contrats, monté le plan d’investissement et fait son instruction. Chacun détient une part de 40% dans le projet, et le Fonsis [Fonds souverain sénégalais, ndlr] détient les 20% restants. Concernant IFC, la Banque européenne d’investissement et Proparco, ils interviennent en tant que prêteurs de fonds.

3,8 et 3,98 cents/kWh : ces centrales fourniront l’électricité solaire la moins chère d’Afrique de l’Ouest, comment avez-vous réussi à atteindre ces prix ?

Nous avons bénéficié de nos précédentes expériences sénégalaises avec les centrales solaires de Senergy et Ten Merina qui nous ont beaucoup appris. Nous disposons aujourd’hui d’une bonne connaissance des cadres légaux et logistiques du pays. Cela nous a aidé à fixer nos tarifs. Nous avons aussi profité de la baisse des prix des équipements au niveau mondial, et de bonnes conditions d’endettement pour financer le projet.

Quels sont les autres projets auxquels participe Meridiam sur le continent africain ?

Nous travaillons actuellement sur une dizaine de projets sur le continent, notamment l’aéroport de Ouagadougou, dont nous espérons signer la concession prochainement ; l’aéroport d’Antananarivo dont nous sommes concessionnaire et dont le nouveau terminal doit être mis en service au début de l’année prochaine. Nous participons aussi au nouveau port à containers de Nouakchott, ainsi qu’au barrage de Kinguélé au Gabon.

Burkina Faso: tentative de sabotage du pont
qui relie Djibo à Ouagadougou

Le pont qui relie Djibo à Ouagadougou a été attaqué dans la nuit du 18 au 19 juillet 2019.
© RFI

Des hommes armés ont essayé de faire sauter l’ouvrage au petit matin du 18 juillet. Selon les autorités locales, si rien n’est fait dans l’urgence la ville de Djibo sera totalement coupée de la capitale, car le pont est endommagé.

C’est aux environs de trois heures du matin, dans la nuit du 18 au 19 juillet que les populations de Mentao ont entendu une forte déflagration. Dès le matin les investigations ont permis de savoir que c’est le pont, situé à une dizaine de kilomètres du chef de lieu de province qui était visé.

►A lire aussi: Burkina Faso: pour la première fois la ville de Djibo cible d’une attaque

Cette construction relie cette localité où se trouve un camp de réfugiés maliens à la ville de Djibo en venant d’Ouagadougou. Le dispositif mis en place par les hommes armés n’a pas totalement fonctionné, ce qui a permis d’éviter une destruction entière du pont, selon une source sécuritaire sur place.

La crainte d'une isolation de Djibo

Seule une partie de l’ouvrage a été touchée par l’explosion. Le trafic continue toujours sur cette route, mais « si rien n’est fait dans l’urgence », s’inquiète une autorité locale « Djibo sera totalement coupée » du reste du pays. De part et d’autre de l’ouvrage il y a de l’eau et avec l’hivernage qui s’installe, sa destruction serait une catastrophe pour les populations, précise ce responsable.

« C’est un pont très important pour les habitants de Djibo et les commerçants qui viennent s’approvisionner au marché de bétail », nous dit un habitant. Même s’il existe d’autres voies, le tronçon sur lequel est situé le pont, reste la principale porte d’accès à la province du Soum, selon notre source.

[Tribune] Renoncer au franc CFA ? Une opération périlleuse

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L'économiste sénégalais Cheikh Ahmed Bamba Diagne est directeur scientifique du Laboratoire de recherche économique et monétaire (Larem) de l'Université Cheikh-Anta-Diop (Ucad) de Dakar

Le débat sur le franc CFA est régulièrement remis au goût du jour, soit par les hommes politiques soit par les intellectuels du continent. Cette monnaie suscite des débats passionnés, des proclamations politiques aussi simplistes que péremptoires. De quoi s’agit-il, en réalité, lorsqu’on parle du franc CFA ?

The ConversationCette tribune a initialement été publiée sur le site de The Conversation.

Lorsque les États africains accédèrent à l’indépendance, il fut nécessaire de définir leurs relations monétaires entre eux, avec la France et avec le reste du monde. À l’exception de la Guinée, puis du Mali, qui choisirent d’avoir une monnaie totalement indépendante, les relations monétaires des autres États furent issues directement de la situation antérieure et prolongeaient l’existence de trois monnaies émises respectivement en Afrique de l’Ouest, de l’Est et à Madagascar.

Elles constituaient le système de change des États indépendants de la zone franc.

Mais la zone n’est pas seulement un système de change, elle est aussi une zone de coopération économique (UEMOA, Cemac). Le système de change des pays africains de la zone franc comportait traditionnellement trois caractères :

– Le premier avait trait au régime de convertibilité : entre les pays de la zone franc, le principe était celui d’une totale liberté des changes, tandis qu’à l’égard de l’extérieur la réglementation des changes était identique ;

– Le taux de change entre la France et les pays de la zone franc était fixe ; autrement dit, le taux de change des pays membres de la zone à l’égard du reste du monde était défini par l’intermédiaire du taux de change du franc français ;

– Pour assurer la fixité du change et la convertibilité, les réserves monétaires étaient « mises en commun ». Les pays africains devaient détenir leurs réserves monétaires en francs et la France garantissait la valeur des monnaies africaines par rapport au franc. Cet arrangement se concrétisait par l’existence d’un « compte d’opérations » ouvert par le Trésor français aux trois instituts d’émission africain et malgache, en charge de la politique monétaire, qui y déposaient leurs réserves. Le compte d’opérations peut, en principe, devenir débiteur de façon illimitée. Aujourd’hui, les réserves sont égales à 50 % de leurs avoirs extérieurs nets.

Les avoirs extérieurs nets que les pays de l’UEMOA (Union économique et monétaire d’Afrique de l’Ouest) ont dans le compte d’opérations se montent à 2709 milliards de FCFA, soit 4,1 milliards d’euros ou encore 4,7 milliards de dollars. Cette somme équivaut au tiers du bénéfice du groupe Total, la troisième plus grande entreprise française, ou à 0,18 % du PIB de la France.

Les amères leçons du Mali et de la Guinée

Il faut apprendre des erreurs des autres : le Mali a eu une douloureuse expérience monétaire qui a duré 22 ans (1962-1984). À sa sortie de la zone CFA en 1962, le Mali avait mené une politique monétaire expansionniste ayant abouti à la dévaluation en 1967 du franc malien, suivie d’un coup d’État une année plus tard.

La Guinée Conakry, plus grande et plus riche en ressources naturelles que le Sénégal, a depuis 1960 sa propre monnaie. Elle pèse 7 milliards, là où le Sénégal pèse 16 milliards de dollars. Quel est l’effet du franc guinéen sur son développement ? Le débat est ailleurs.

Pourquoi nous devons snober, dans le court et le moyen terme, la matérialisation de la monnaie unique dans l’espace CEDEAO (Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest) ?

L’UEMOA – qui rassemble huit pays (Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée Bissau, Mali, Niger, Sénégal, Togo) – pèse 58,966 milliards de FCFA, soit 102,2 milliards de dollars (l’équivalent de 22 % du PIB nigérian). La Côte d’Ivoire, qui représente 35,2 % de l’économie de la zone UEMOA, n’a jamais partagé la gouvernance de la Banque centrale. La politique monétaire de la zone répond plus au besoin de la Côte d’Ivoire que le reste des pays membres de l’UEMOA.

Alors qu’en sera-t-il d’une future monnaie de la CEDEAO – l’ECO – où le Nigeria représente à lui seul 73,1 % et les 14 pays restants 26,9 % ? c’est dire qu’il y a de fortes chances que la satisfaction des besoins du Nigéria devienne la préoccupation majeure de la politique monétaire au sein de la zone ECO.

Tirer les leçons de zone euro

Certains pays n’ont pas les mêmes intérêts que le Nigeria. Par exemple, si l’augmentation du baril du pétrole arrange ce dernier, elle dérange d’autres pays non producteurs de pétrole. On voit nettement que ces États n’ont pas les mêmes intérêts. Dès lors, comment peuvent-ils partager la même monnaie ?

Avant de parler d’une monnaie unique de la CEDEAO, il y a des préalables qu’on doit régler : le développement du commerce intrarégional, la mise en place des chambres de compensation et l’étude sur l’optimalité de la zone monétaire.

L’exemple des difficultés de la zone euro doit nous servir de leçon. La Grèce en crise a déprécié la monnaie européenne et rendu l’économie allemande très compétitive. L’Allemagne étant une économie exportatrice, plus l’euro est faible mieux son économie se porte.

En 2017, l’activiste et président de l’ONG Urgences panafricanistes Kémi Séba avait brûlé un billet de 5 000 F CFA. Son geste provocateur avait relancé le débat sur cette monnaie.

Dans la zone UEMOA, la stabilité monétaire est une réalité : l’inflation a toujours été maîtrisée depuis la dévaluation du FCFA de 1994, contrairement aux autres pays de la CDEAO (Nigeria, Ghana…) qui connaissent des inflations de plus de 10 %. Cette stabilité monétaire a permis à la zone UEMOA de mettre en place des politiques économiques dans le long terme avec un faible décalage entre les scénarios pessimistes et optimistes.

La zone monétaire la plus stable au monde

Depuis 2011, les pays de la zone UEMOA sont rentrés dans une dynamique de croissance soutenue encore plus intéressante. Pourquoi quitter, alors, une zone stable, qui nous permet d’avoir une croissance économique soutenue qui avoisine les 7 %, au moment où l’Afrique affiche son taux de croissance le plus faible depuis vingt-cinq ans (1,6 %), pour rejoindre une zone chroniquement instable du fait du poids du PIB du Nigeria, qui dépend aux trois-quarts du pétrole ? Comme le pétrole est très volatile et l’économie nigériane ne dépend que de cette ressource naturelle, on doit s’attendre à une monnaie très instable pour les pays de la CEDEAO.

Bien que la monnaie puisse être considérée comme un instrument de développement, le ciblage d’inflation – politique monétaire qui vise à fixer des objectifs d’inflation sur une période donnée – reste, par expérience, la stratégie de politique monétaire dominante – ce qu’on appelle la « mission hiérarchique ». Seule la Réserve fédérale américaine (FED) a une mission duale, à savoir : stabiliser les prix et chercher la croissance économique.

La zone UEMOA est aujourd’hui la zone monétaire la plus stable au monde. Elle a surtout besoin de mettre en place une économie de transformation des ressources en améliorant le climat des affaires pour créer davantage de valeur ajoutée et lutter, par conséquent, contre le chômage.