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Terrorisme: le Tchad, le Niger et le Mali signent une convention judiciaire

Patrouille de soldats dans les rues de Niamey, le 19 mars 2016.
© AFP/Issouf Sanogo
 

Face aux menaces terroristes, le Mali, le Niger et le Tchad ont décidé de s'unir en signant une convention judiciaire à Niamey, ce jeudi 11 mai. Elle vise notamment à renforcer la sécurité et le contrôle aux frontières.

Ce sont les trois ministres de la Justice du Niger, du Mali et du Tchad qui ont signé cette convention de coopération judiciaire. Des « accords historiques », disent-ils, au moment où ces mêmes pays sont menacés par le terrorisme transfrontalier.

« Il a fallu attendre le développement du terrorisme dans le Sahel pour qu’avec l’aide de nos partenaires, on puisse mettre en place ce mécanisme juridique », explique le professeur Ahmat Mahamat Hassan, ministre tchadien de la Justice.

Les frontières entre ces trois pays n’existent plus en matière judiciaire. « L’entraide sera totale », assure le ministre nigérien de la Justice, Marou Amadou. « Si nous pouvons faire l’extradition d’un détenu là où on peut mieux le juger, là où on a plus d’information, c’est déjà bien, s’il y a des avis de condamnation, on sait qui séjourne dans quel pays, les échanges de casiers judiciaires. »

Les experts des trois pays ont mis deux ans pour aboutir à ces résultats. Les terroristes seront traqués. « Il faudra absolument que les magistrats, les officiers de police judiciaire aient les moyens de pouvoir les poursuivre, les traquer, les arrêter, les inculper et les écouter partout où ils sont », ajoute Ahmat Mahamat Hassan.

Deux pays menacés par Boko Haram n’ont pas encore signé cette convention judiciaire : le Cameroun et le Nigeria.

Concrètement aujourd’hui, nous savons aller plus vite et nous savons aller ensemble en partage pour prendre en charge une action judiciaire qui peut débuter au Mali et qui peut se poursuivre au Tchad et au Niger.
Mamadou Ismaïla Konate, ministre malien de la Justice
11-05-2017 - Par Laura Martel
 

Frontières poreuses

Trafic de drogue, d'armes, d'êtres humains, attaques de groupes jihadistes sahéliens ou de Boko Haram... C'est pour faire face à ces menaces que les autorités nigérienne, malienne et tchadienne comptent, par cet accord, faire tomber les frontières judiciaires entre leurs pays.

Car les trafics sont par nature transfrontaliers. Quant aux terroristes, qu'ils fassent la promotion d'un jihad global, comme les groupes sahéliens, ou tentent d'implanter leur idéologie à la croisée de plusieurs Etats, comme Boko Haram, ils n'ont que faire de ces barrières étatiques. Si ce n'est pour les utiliser comme entrave aux poursuites, à l'image des attaques menées en début d'année dans la région de Tillabéri, au Niger,
par des assaillants venus du Mali qui ont repassé aussitôt la frontière.

Permettre qu'un ressortissant des pays signataires puisse être jugé indifféremment dans l'un des trois pays, partager les informations sur des suspects, mener des enquêtes conjointes... Autant de mesures qui visent à mettre la justice des trois pays en phase avec la réalité du terrain, pour une réponse plus rapide, efficace et coordonnée.

La Mauritanie renforce ses liens économiques avec la Cédéao

L'un des sièges de la Cédéao, à Lomé au Togo (photo d'illustration).
© AFP PHOTO PIUS UTOMI EKPPEI
 

La Mauritanie, qui a quitté la Cédéao en 2000, semble s'en rapprocher de nouveau. S'il n'est pas question de réintégrer l'organisation régionale pour le moment, la Mauritanie renforce ses liens économiques et commerciaux. Le gouvernement mauritanien vient de signer avec la Commission de la Cédéao un accord d'association qui accélère le processus d'intégration de la Mauritanie en Afrique de l'Ouest.

Si le calendrier est respecté, le 1er janvier 2019, la Mauritanie et les Etats de la Cédéao constitueront une zone de libre-échange. Ainsi, les biens venant de Mauritanie ou des Etats membres pourront circuler sans droit de douane entre les 16 pays.

Cela s'accompagnera de la mise en place de tarifs douaniers extérieurs communs et d'une politique commerciale commune. Pour ce qui est des visas, la Mauritanie a déjà des accords bilatéraux avec cinq membres de la Cédéao : Sénégal, Mali, Côte d'Ivoire, Niger et Guinée.

Nouakchott s'engage désormais à poursuivre les discussions avec les 10 autres Etats-membres pour parvenir à un accord régional sur la libre circulation des personnes.

Alors, faut-il y voir un pas vers une prochaine réintégration de la Cédéao par la Mauritanie ? En tout cas, une meilleure intégration économique selon Mohamed Hit, directeur de la promotion du commerce extérieur au ministère mauritanien du Commerce.

« Sur le plan économique, la Mauritanie est restée liée à la Cédéao et donc des échanges ont continué à avoir lieu. Bien évidemment, la mise en place de ce cadre réglementaire permettra de faciliter davantage cette intégration économique au niveau de la Cédéao », explique-t-il.

D'autres domaines, comme la lutte contre la fraude ou contre le terrorisme, feront aussi l'objet de discussions destinées à améliorer la coopération. Mais l'accord signé à Nouakchott devra être validé au sommet de la Cédéao le mois prochain.

 

Nigeria: le difficile retour à la vie des 82 lycéennes de Chibok libérées

Quelque 82 lycéennes de Chibok ont été libérées par Boko Haram le 6 mai 2017.
© REUTERS/Zanah Mustapha
 

Au Nigeria, 82 lycéennes de Chibok ont pu être libérées le week-end du 6 mai. Ces jeunes filles avaient été enlevées par Boko Haram en avril 2014. Ce rapt avait alors suscité l'émoi de la communauté internationale. Leur retour à la vie civile va maintenant se faire progressivement : le gouvernement encadre ces jeunes qui présentent pour la plupart un certain traumatisme.

Le gouvernement se veut rassurant et promet que les 82 lycéennes sont désormais entre de bonnes mains. Selon un officiel, ces jeunes sont dans un premier temps auscultées par des médecins au sein d'une clinique dépendant du service des renseignements. Comme les milliers de villageois libérés de Boko Haram, les lycéennes feront aussi l'objet d'une enquête militaire pour évaluer leur allégeance au groupe jihadiste.

Pour l'heure, le gouvernement tente d'organiser les retrouvailles avec les familles. « Nous avons affiché des photos des lycéennes dans plusieurs localités, car leurs parents viennent de plusieurs villages autour de Chibok. Nous demandons aux parents de venir identifier leurs enfants. Et ceux qui reconnaissent leur fille sont appelés à venir à Abuja afin d'être de nouveau réunis avec leur fille », explique Garba Shehu, conseiller à la présidence.

Syndrome de Stockholm

Mais après avoir passé autant de temps aux côtés des groupes jihadistes, certaines filles sont encore dans un état psychologique instable. « Certaines jeunes présentent les signes du syndrome de Stockholm », indique une source médicale. « Elles s'identifient avec leurs ravisseurs et veulent rester avec eux », poursuit ce responsable. L'une d'elles, qui devait faire partie du groupe ce week-end, a d'ailleurs choisi de rester avec les membres de Boko Haram.

Pas facile donc d'envisager leur réintégration du jour au lendemain dans la vie civile. Les 21 autres lycéennes libérées en octobre dernier seraient selon plusieurs sources dans un centre tenu secret. Un centre où ces jeunes ont repris leurs études, indique une source officielle.

Nigeria : l’influent émir de Kano visé par une enquête pour corruption

Par AFP
 

L'un des dirigeants musulmans les plus importants du Nigeria, l'émir de Kano (nord), fait l'objet d'une enquête pour détournement de fonds, qui, selon ses partisans, viserait à lui faire perdre son poste après une série de déclarations sur la nécessité de réformes sociales.

Le trésorier et le secrétaire de la Cour royale ont été convoqués mardi 2 mai pour un interrogatoire.

Les enquêteurs anticorruption examinent les comptes de Muhammadu Sanusi II, deuxième dignitaire musulman du pays, à la suite d’accusations de mauvaise gestion des finances.

« Nous avons été assez loin dans cette enquête (…) pour sauvegarder l’honneur et le prestige du conseil de l’émirat » de Kano, a déclaré dimanche à l’AFP le chef de l’unité anticorruption de l’Etat de Kano, Muhyi Magaji.

Les enquêteurs se focalisent sur des dépenses de 6 millions de nairas (17 million d’euros) pour acheter des voitures de luxe, affréter des avions, payer des factures de téléphone et d’internet ainsi que d’autres frais personnels.

Le conseil de l’émirat de Kano a démenti toutes ces accusations. « Le conseil de l’émirat n’a jamais acheté de Rolls Royce pour l’émir, » a déclaré le trésorier, Mahe Bashir Wali. « Ces voitures sont des cadeaux d’amis après son élection en tant qu’émir ».

Ex-banquier et ancien gouverneur de la Banque centrale du Nigeria

M. Wali maintient que l’émir a toujours payé lui-même ses billets d’avion et que les autorités de l’Etat de Kano ont toujours approuvé ses dépenses.

Selon Nura Ma’aji, un militant anticorruption de Kano, « l’émir s’est exprimé sans ambages et à dit sa vérité au pouvoir (…). Le gouvernement de l’Etat utilise la commission anticorruption pour le discréditer ».

L’émir, qui fut avant sa nomination en juin 2014 banquier à Londres et New York, puis gouverneur de la Banque centrale du Nigeria et professeur d’université, incarne une nouvelle génération montante de chefs traditionnels au Nigeria et se pose en réformateur progressiste.

Emir réformateur

Dans l’Etat de Kano, où la charia a été réintroduite en 2000, il n’hésite pas à remettre en question des dogmes. Il ne dispose en théorie d’aucun pouvoir politique, mais exerce une grande influence.

Au cours des trois dernières années, l’émir a rompu avec la tradition, en se prononçant pour la nécessité de réformes sociales.

Une équipe de religieux et de juristes rassemblés par l’émir planche sur un projet de Code de la famille

Depuis plus d’un an, une équipe de religieux et de juristes rassemblés par l’émir planche sur un projet de Code de la famille, régissant mariage, divorce ou héritage et censé mettre fin aux abus au sein des nombreux foyers polygames.

Un projet qui suscite toutefois de nombreuses résistances des chefferies traditionnelles et un déferlement de critiques sur les radios locales.

L’émir avait provoqué des remous en dénonçant une fraude de 20 milliards de dollars au sein de la compagnie pétrolière d’Etat. Le président d’alors du Nigeria, Goodluck Jonathan, l’avait alors suspendu de ses fonctions de gouverneur de la Banque centrale.

 

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Nigeria

Burkina : 5 000 personnes pour le premier grand rassemblement de l’opposition

Par AFP
 

Près de 5 000 personnes se sont réunies samedi à la Maison du Peuple de Ouagadougou pour le premier grand rassemblement de l'opposition burkinabè recomposée depuis l'accession au pouvoir de Roch Marc Christian Kaboré en décembre 2015.

« Notre opposition est nouvelle, elle est plurielle (…) Elle comprend des libéraux, des sociaux-démocrates, des sankaristes (du nom de l’ancien président Thomas Sankara), des centristes, des communistes, et des gens sans appartenance politique (…) Nous ne sommes pas d’accord sur tout mais nous tous sommes d’accord sur quelque chose : c’est que le MPP (Mouvement du peuple pour le Progrès, au pouvoir) gère mal le Burkina Faso », a déclaré le chef de l’opposition Zephyrin Diabré, soulevant les acclamations de la foule.

Cette nouvelle plateforme de l’opposition comprend un trentaine de formations mais surtout l’Union pour le progrès et le changement (UPC de Zephyrin Diabré) et le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP, l’ancien parti de Blaise Compaoré).

M. Diabré a été pendant des années le principal opposant à Blaise Compaoré qui a été obligé de quitter le pouvoir après 27 ans à la tête du pays et l’insurrection d’octobre 2014.

Celle-ci a porté au pouvoir après un an de transition et une élection démocratique des anciens barons du régime Compaoré passés peu avant dans l’opposition et qui ont créé le MPP.

« Attention »

« Nos amis en face ont peur de la colère du peuple, peur d’une nouvelle insurrection. C’est normal. Comme on dit dans la tradition : ‘L’assassin sait que le coup de gourdin fait mal’ (…) Qu’ils fassent attention! », a lancé M. Diabré.

Le mot d’ordre « attention » a été repris à maintes reprises par les militants. Ce cri était justement un des principaux slogans pendant l’insurrection d’octobre 2014. M. Diabré a « rappelé que le peuple a faim, que les jeunes sont au chômage, que l’argent ne circule pas, que les soins ne sont pas gratuits (…) que les femmes sont dans la misère ».

« La corruption est repartie de plus belle au pays des hommes intègres (Burkina Faso) », a-t-il estimé.

M. Diabré et l’ensemble de l?opposition ont présenté un programme commun ainsi qu’un « questionnaire de 200 marqueurs » pour suivre la politique du gouvernement.

Par ailleurs, le chef de l’opposition a évoqué la préparation d’une motion de censure.

La pouvoir aura « en face de lui une opposition +caillou+ (dure) (…) qui mènera son combat (…) dans la presse, dans l’hémicycle et s’il le faut dans la rue ».

 

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