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Après la loi de bioéthique

Dominique Greiner,
le 30/06/2021 à 16:18

                                         Après la loi de bioéthique
                    Dominique Greiner, rédacteur en chef/BRUNO LÉVY

Le projet de loi de bioéthique adopté mardi 29 juin en France autorise les couples de lesbiennes et les femmes célibataires à recourir à la PMA, comme c’est déjà le cas dans dix autres pays de l’Union européenne. Au cours des dernières années, l’Église catholique a largement fait part de ses préventions sur le sujet : le déploiement de la technique dans le champ de la procréation, pour des raisons non médicales, nous fait quitter le registre de l’engendrement pour celui de la fabrication d’êtres humains.

On peut aussi lire cette évolution législative à la lumière de Laudato si’. Dans son encyclique, le pape François invite à prendre conscience que le développement technologique, soutenu par la recherche de profits économiques, échappe tôt ou tard au contrôle de l’homme (1). C’est ainsi que les verrous éthiques existants sautent les uns après les autres sous la pression des groupes d’intérêts. Aujourd’hui, la PMA, demain la GPA ? La technique est porteuse de tant de promesses : pourquoi donc s’en priver, surtout si cela permet de répondre à la souffrance de certaines personnes ?

Au-delà de l’extension de la PMA, c’est cette incapacité de l’homme à résister à la fascination du progrès qui est inquiétante. La technique évacue le questionnement éthique : ce qu’elle permet tend à s’imposer tôt ou tard comme la norme de ce qui est bien. Sans autre discussion. Et c’est bien ce qui s’est passé ces dernières années : il n’y a pas eu de véritable débat sur la PMA, car la mentalité technicienne déteste la contradiction. Le dialogue se conjugue mal avec l’autosuffisance.

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(1) § 105. On a tendance à croire « que tout accroissement de puissance est en soi ‘progrès’, un degré plus haut de sécurité, d’utilité, de bien-être, de force vitale, de plénitude des valeurs », comme si la réalité, le bien et la vérité surgissaient spontanément du pouvoir technologique et économique lui-même. Le fait est que « l’homme moderne n’a pas reçu l’éducation nécessaire pour faire un bon usage de son pouvoir » parce que l’immense progrès technologique n’a pas été accompagné d’un développement de l’être humain en responsabilité, en valeurs, en conscience. Chaque époque tend à développer peu d’auto-conscience de ses propres limites. C’est pourquoi, il est possible qu’aujourd’hui l’humanité ne se rende pas compte de la gravité des défis qui se présentent, et « que la possibilité devienne sans cesse plus grande pour l’homme de mal utiliser sa puissance » quand « existent non pas des normes de liberté, mais de prétendues nécessités : l’utilité et la sécurité ». L’être humain n’est pas pleinement autonome. Sa liberté est affectée quand elle se livre aux forces aveugles de l’inconscient, des nécessités immédiates, de l’égoïsme, de la violence. En ce sens, l’homme est nu, exposé à son propre pouvoir toujours grandissant, sans avoir les éléments pour le contrôler. Il peut disposer de mécanismes superficiels, mais nous pouvons affirmer qu’il lui manque aujourd’hui une éthique solide, une culture et une spiritualité qui le limitent réellement et le contiennent dans une abnégation lucide.