Mali : la procédure contre Boubou Cissé et Ras Bath annulée par la cour d’appel

| Par - à Bamako
Mis à jour le 02 mars 2021 à 16h13
L’activiste Ras Bath et l’ancien Premier ministre malien Boubou Cissé.


L'activiste Ras Bath et l'ancien Premier ministre malien Boubou Cissé. © Photomontage : Luc Gnago/REUTERS ; Vincent FOURNIER/JA

 

La Chambre d’accusation de la cour d’appel de Bamako a prononcé l’annulation des procédures visant sept personnalités poursuivies pour « complot contre le gouvernement », parmi lesquelles l’ancien Premier ministre Boubou Cissé et l’activiste Ras Bath. Ceux des prévenus qui étaient incarcérés seront remis en liberté.

« Aucun juge ne pouvait poursuivre un dossier pareil ! » Me Kassoum Tapo, avocat de l’ancien Premier ministre Boubou Cissé, le répétait depuis la reprise des audiences, ce matin du mardi 2 mars. À l’annonce de la décision de la Chambre d’accusation de la cour d’appel de Bamako, l’avocat s’est dit « soulagé » de l’annulation de la procédure et de la levée du mandat de dépôt sous lequel étaient placés l’activiste Ras Bath et quatre co-accusés. « C’était un dossier vide, pour lequel on a voulu instrumentaliser la justice. Aujourd’hui, c’est la démocratie qui gagne. Espérons que cette décision fasse jurisprudence pour que plus personne ne soit détenu illégalement par la Sécurité d’État [les services de renseignements] », a-t-il réagi dans les minutes qui ont suivi le prononcé de la décision de la cour d’appel.

« Complot contre le gouvernement »

Depuis le mois de décembre une information judiciaire avait été ouverte pour « complot contre le gouvernement et association de malfaiteurs », dans laquelle étaient notamment cités l’ancien Premier ministre Boubou Cissé, l’activiste Ras Bath, ainsi que Sékou Traoré, un temps secrétaire général de la présidence, Mahamadou Koné, trésorier payeur général, Vital Robert Diop, directeur général de la société PMU-Mali, Aguibou Tall, directeur général adjoint de l’AGEFAU, et Souleymane Kansaye, receveur général du district.

Après la vague d’arrestations, fin décembre, le procureur Mamadou Kassogué évoquait  des indices graves et concordants de faits laissant présumer l’existence d’une entreprise criminelle ». Il évoquait notamment « des contacts suspects soutenus entre certaines personnes mises en cause en des lieux et des heures laissant apparaître une volonté de tenir secrètes leurs activités », des « déplacements suspects à l’intérieur du pays auprès de certaines personnalités » ou encore « des actions de sabotage de certaines initiatives des autorités de la transition ». Outre les charges de « complot » pour lesquelles ils étaient poursuivis, s’ajoutait celle d’« outrage à la personne du chef de l’État » pour Youssouf Mohamed Bathily, dit Ras Bath.

Retournement du ministère public

Lors de son réquisitoire délivré mardi 16 février, Alou Nampé, l’avocat général, avait – en contradiction avec le réquisitoire écrit du procureur – demandé « l’annulation des procédures et la levée des mandats de dépôt » contre l’ensemble des personnalités citées dans le dossier. La cour d’appel, qui devait rendre son verdict le lendemain, avait cependant reporté son verdict à ce mardi, en raison d’une recomposition de la Cour. Outre l’avocat général qui avait requis l’abandon des charges, deux magistrats du siège, tous nommés à la Cour suprême, devaient en effet être remplacés.

Une recomposition de dernière minute qui avait fait craindre à certains avocats de la défense que le réquisitoire de l’avocat général, qui représente le ministère public, ne soit pas suivi. « Notre esprit de combat pour la bonne gouvernance et notre détermination à défendre la démocratie ne sortira que redoublé de cette décision », s’est réjoui Boubacar Yalcoué, secrétaire administratif du Collectif pour la défense de la République (CDR), également porte-parole du collectif pour la libération de Ras Bath. L’activiste et ses quatre co-accusés aujourd’hui détenus devraient être libérés dans le courant de la journée, ce mardi.

L’ex-Premier ministre Boubou Cissé, lui, se cache « en lieu sûr », selon ses avocats, depuis que, le 24 décembre dernier, des hommes « armés et encagoulés » se sont présenté à son domicile. Le 14 janvier dernier, il expliquait à Jeune Afrique ne pas être « homme à vouloir se soustraire à la justice de [son] pays », du moment qu’elle soit « impartiale et équitable ».