Cardinal Sako : « Je veux croire que le voyage du pape
sera une nouvelle étape dans l’histoire de l’Irak »

Entretien 

Le patriarche de l’Église catholique chaldéenne, le cardinal Louis Raphaël Ier Sako, a largement contribué à l’organisation du voyage du pape en Irak, du 5 au 8 mars prochain. Plus qu’un simple événement, il voit cette visite comme un « avènement », un signe encourageant pour l’avenir après deux décennies de guerre et de destructions.

  • Recueilli par Mélinée Le Priol, 

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                                                        Cardinal Sako : « Je veux croire que le voyage du pape sera une nouvelle étape dans l’histoire de l’Irak »
 
                                    Le cardinal Louis Sako en décembre 2017 à Bagdad.KHALID MOHAMM

La Croix : Qu’attendent les Irakiens de ce voyage ?

Cardinal Louis Sako : Ce voyage ne suscite pas seulement l’attente et l’intérêt des Églises locales : le gouvernement fédéral, ainsi que les Irakiens musulmans, font aussi preuve d’un enthousiasme extraordinaire ! Je m’en rends compte lorsque je reçois des chefs religieux ou des responsables du gouvernement, mais aussi quand je vois la manière dont les médias irakiens semblent déjà curieux de couvrir cette visite. Tout le peuple irakien attend le message que le pape François va lui adresser.

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Le pape vient pour être parmi nous et nous encourager à espérer, alors que nous avons tant entendu le bruit des armes et des explosions depuis 2003 (année de l’invasion américaine et de la chute de Saddam Hussein, NDLR.). Avec impatience, nous attendons de lui un message sur la paix, la réconciliation et la reconstruction de notre pays.

Pour moi, cette visite n’est pas seulement un événement, c’est un avènement. Je veux croire qu’elle constituera une nouvelle étape dans l’histoire de l’Irak, mais aussi de la Syrie, la Libye, le Yémen - ces pays du Moyen-Orient qui ont connu la guerre et la destruction ces dernières années. Il nous faut sortir de tout le malheur que nous avons vécu.

À cet égard, le passage par Mossoul, dont Daech avait fait la capitale irakienne de son « califat » en 2014, constitue un moment clé du voyage…

Card. L. S. : Bien sûr. La ville est ravagée, comme a pu l’être Hiroshima. Ici, les destructions sont le résultat des fondamentalismes et du terrorisme. À Mossoul, dimanche 7 mars au matin, le pape devrait prononcer un message pour condamner cette idéologie.

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Les chrétiens d’Irak ont payé le prix cher pour rester fidèles à leur foi, parfois de leur propre vie. Le pape va les encourager à persévérer, à espérer, mais aussi à reconstruire la confiance avec leurs voisins, notamment musulmans, pour préparer un avenir meilleur.

Le dialogue interreligieux sera justement un des grands enjeux de ce voyage. Attendez-vous des avancées concrètes sur ce plan ?

Card. L. S. : Pour préparer ce voyage, une délégation vaticane est venue trois fois en Irak au cours des derniers mois. Or, la ville de Nadjaf (haut lieu de pèlerinage chiite à 200 km au sud de Bagdad, NDLR.) n’était initialement pas inscrite au programme. Mais j’ai insisté pour l’ajouter.

Le pape a en effet vécu, en février 2019, à Abu Dhabi, un moment très fort de dialogue avec le monde sunnite, par l’intermédiaire du grand imam d’Al Azhar. Pour que tout l’islam soit engagé dans ce dialogue, le monde chiite doit aussi y prendre part. C’est capital, car l’islam vit aujourd’hui une crise, avec la présence de l’idéologie fondamentaliste partout dans le monde.

Cela dit, et contrairement à ce qui s’est passé à Abu Dhabi il y a deux ans, il n’est pour l’heure pas question d’un document ou d’une déclaration que le pape signerait avec l’ayatollah Al Sistani ; seulement d’une rencontre en tête-à-tête. Mais nous savons que François est un pape des surprises ! D’une manière ou d’une autre, je m’attends donc à être surpris.