Face à l’épidémie de coronavirus, les pays africains adoptent des mesures de prévention

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Des travailleurs du secteur de la santé, en Chine, à Wuhan , le 27 janvier 2020.

L’épidémie de pneumonie virale qui s’est déclenchée fin décembre en Chine s’est répandue dans le monde, contaminant plus de 2 700 personnes. L’Afrique, qui entretient d’importantes relations commerciales avec la Chine, surveille avec attention l’évolution de la situation.

Après la Chine, les États-Unis, le Japon ou la France, l’épidémie du nouveau coronavirus va-t-elle s’étendre au continent africain ? Apparue fin décembre à Wuhan, en Chine, elle s’est rapidement répandue à travers le monde et touche désormais 13 pays. Plus de 2 700 personnes étaient contaminées dimanche en Chine, où 80 personnes ont déjà perdu la vie.

En Afrique, une attention particulière est portée à l’évolution de l’épidémie, d’autant que le continent entretient un important flux d’échanges avec la Chine. Selon Pékin, le commerce entre l’Afrique et la Chine a augmenté de 2,2% en 2019, pour atteindre 208 milliards de dollars (189 milliards d’euros), et le continent a accueilli 121 millions de visiteurs chinois en 2017 contre 31 millions en 2005.

« L’Éthiopie, le Kenya et l’Afrique du Sud constituent les principaux pays accueillant des flux de voyageurs en provenance de Chine. Dans ces pays, nous avons recommandé aux autorités de renforcer le contrôle des voyageurs aux aéroports, à travers notamment la prise de leur température corporelle », explique à Jeune Afrique le Dr Ambrose Talisuna, épidémiologiste et conseiller régional de l’OMS pour la sécurité sanitaire en Afrique. L’Organisation mondiale de la Santé préconise la mise en place de salles de quarantaine dans les aéroports, ainsi que la préparation d’hôpitaux pour recevoir d’éventuels patients.

Avec 35 vols de passagers par semaine, directs et quotidiens, et 15 vols cargo, la Chine constitue le plus gros marché hors Afrique de la compagnie Ethiopian Airlines. Elle dessert les villes de Pékin, Shanghai, Canton, Hong Kong et Chengdu.

Un cas suspect à Abidjan

Plusieurs pays ont donc renforcé les mesures de prévention dans les aéroports. C’est ainsi que la Côte d’Ivoire communiquait ce dimanche sur un premier cas suspect de coronavirus. « Le ministère de la Santé et de l’Hygiène publique a été alerté par les autorités aéroportuaires d’Abidjan de la présence d’un malade dans un aéronef de la compagnie Turkish Airlines en provenance de Pékin, à destination d’Abidjan », peut-on lire dans un communiqué du ministre ivoirien de la Santé, le Dr Eugène Aouélé Aka. « Il s’agit d’une étudiante Ivoirienne de 34 ans résidant à Pékin depuis cinq ans, qui a présenté un syndrome grippal avec toux, éternuement, écoulement nasal et difficulté respiratoire, qui a débuté le 22 janvier 2020 à Pékin », détaille le communiqué.

La patiente a été transférée à la cellule de pandémie de l’aéroport Félix Houphouët-Boigny d’Abidjan. Dans l’attente des résultats d’analyse, il s’agit du premier cas suspect de coronavirus sur le continent.

Face à la pandémie, un nombre grandissant d’États africains ont adopté des mesures. Le 23 janvier, le Centre nigérian de contrôle des maladies (NCDC) a ainsi annoncé le « renforcement des mesures de surveillance sur les ports d’entrées ». « Les voyageurs en provenance de Wuhan sont soumis à de nombreuses questions à leur arrivée, sur des symptômes possibles de la maladie et sur leur circuit de voyage », détaille-t-il.

Une mesure similaire a été mise en place à l’aéroport de Nairobi, au Kenya. L’Algérie, le Maroc, le Burkina Faso, le Togo, le Niger, le Mali et le Sénégal ont également annoncé la mise en place d’une surveillance accrue dans les aéroports.

Multiplication des numéros verts

Outre les campagnes d’information à l’attention des agents de santé, plusieurs pays ont mis en place des numéros verts à destination des populations. Au Sénégal, le ministère de la Santé et de l’Action sociale recommande ainsi de « se rendre auprès de la structure sanitaire la plus proche dès qu’on présente une maladie respiratoire de survenue brutale », et de contacter le 800 00 50 50, numéro gratuit d’information. Les autorités togolaises, elles, invitent toute personne ayant récemment séjourné en Chine à contacter le 22 22 20 73. Le ministre ivoirien de la santé a pour sa part « invité les populations à ne pas céder à la panique et à appeler le 143 (numéro vert gratuit) pour toute information ».

La Guinée équatoriale s’est exprimée le 27 janvier sur l’impact que cette épidémie pourrait avoir sur le marché pétrolier. La veille, le prince Abdulaziz bin Salman Al-Saud, ministre saoudien de l’Énergie, avait exprimé « sa confiance dans la capacité des autorités chinoises à contenir et à éradiquer le nouveau coronavirus », tout en ajoutant que le royaume serait prêt à réagir en cas de « facteurs psychologiques affectant les prix du pétrole ».

« En tant que membre de l’Opep, la Guinée équatoriale adhère à la déclaration de l’Arabie saoudite et est pleinement prête à engager une action de coordination avec l’organisation si les futures évolutions du coronavirus devaient affecter la stabilité du marché mondial du pétrole », a déclaré Gabriel Mbaga Obiang Lima, le ministre des Mines et des Hydrocarbures.

« Une nouvelle souche encore en étude »

Rabat a annoncé samedi la mise en place d’« une cellule de crise au profit des membres de la communauté marocaine établie en Chine, pour suivre leur situation ». Des dizaines d’étudiants du royaume sont en effet mis en quarantaine dans la ville de Wuhan.

Pour l’heure, l’OMS n’a pas déclaré la maladie comme une urgence de santé publique de portée internationale. Pour le Dr Ambrose Talisuna, le taux de mortalité – environ 4 % – reste faible. « Parmi les morts, beaucoup avaient plus de 50 ans ou étaient déjà atteints d’autres maladies », ajoute-t-il.

Pour l’instant, le traitement consiste à soigner les symptômes

De la famille des coronavirus, cette maladie se manifeste par les symptômes de la grippe, pouvant aller jusqu’à des syndromes respiratoires sévères. « La singularité de ce virus, c’est qu’il s’agit d’une nouvelle souche encore à l’étude. Pour l’instant, le traitement consiste à soigner les symptômes », explique le Dr Ambrose Talisuna.

L’OMS a communiqué une liste de laboratoires qualifiés dans le monde. Selon Ambrose Talisuna, le seul laboratoire en mesure de confirmer les cas de coronavirus sur le continent est établi en Afrique du Sud.

L’organisation internationale a également émis une liste de recommandations à destination des populations pour se protéger du virus. Parmi celles-ci, le respect des règles de base en matière d’hygiène des mains et d’hygiène respiratoire, « en adoptant des pratiques alimentaires saines et en évitant si possible tout contact étroit avec les personnes présentant des symptômes de maladie respiratoire, tels qu’une toux ou des éternuements. »