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En Guinée, bataille de positions autour du couplage des législatives et du référendum

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Une électrice guinéenne lors de la présidentielle guinéenne, en octobre 2015 (Illustration).

L’annonce du couplage des législatives avec le référendum constitutionnel, le 1er mars prochain, a provoqué une nouvelle levée de boucliers au sein de l’opposition. La Commission électorale nationale indépendante, dont le président affirme ne pas avoir été consulté, se dit cependant prête à tout mettre en œuvre pour relever le défi.

« En tant que président de la Ceni, personnellement, je n’ai pas été consulté sur la question. » Devant les journalistes, mercredi soir, Salifou Kébé, qui préside la Commission électorale nationale indépendante, avoue avoir appris la publication du décret du couplage des législatives et du référendum constitutionnel que « tard dans la nuit », la veille. La commission se dit cependant prête à organiser les deux scrutins à la date fixée, le 1er mars prochain. « Le plus difficile est en train d’être fait », assure Salifou Kébé.

« Nous serons prêts »

« L’acheminement des urnes dans les différents centres de vote a déjà commencé et nous allons mettre les bouchées doubles pour tout organiser comme il faut », affirme à Jeune Afrique Djenabou Touré, directrice du département « Fichier électoral » au sein de la Ceni.

Elle se veut par ailleurs rassurante sur l’effectivité de la distribution des cartes d’électeurs, « qui devrait commencer la semaine prochaine ». « Nous avons demandé à la Cour constitutionnelle une prolongation pour mener à bien cette distribution des cartes d’électeurs dans de bonnes conditions, mais nous serons prêts », affirme Djenabou Touré.

Cela va réduire le temps d’organisation, éviter deux campagnes électorales, et éviter un doublement des dépenses

Le couplage des deux scrutins, défi technique pour la Ceni, était notamment nécessaire pour des raisons financières, insiste Papa Koly Kourouma, directeur de campagne du RPG Arc-en-ciel, le parti présidentiel. « Cela va permettre de réduire le temps d’organisation, afin d’éviter deux campagnes électorales, et ainsi éviter un doublement des dépenses », se félicite-t-il.

À ceux qui craignent que les électeurs ne soient déroutés par le couplage, il répond que « les gens voteront dans le même bureau de vote, certes, mais il y aura deux urnes différentes : une pour les législatives, dans laquelle ils voteront pour leur candidat, et l’autre pour le référendum, dans laquelle ils glisseront le blanc pour dire « oui », ou le bulletin rouge pour dire « non ». La confusion est impossible. »

La stratégie du boycott

Pas de quoi convaincre les opposants à la réforme constitutionnelle au sein des rangs du Front national pour la défense de la démocratie, qui organise des manifestations contre la réforme constitutionnelle depuis plusieurs mois, lui reprochant d’ouvrir la voie à une possible candidature d’Alpha Condé à un troisième mandat présidentiel.

Le FNDC « usera de tous les moyens » pour bloquer la tenue du scrutin

Avec cette décision de coupler les deux scrutins, « Alpha Condé a décidé de défier le peuple de Guinée », vitupère Sékou Koundouno, coordonnateur du Balai citoyen et responsable « stratégies et planifications » du FNDC. Le mot d’ordre du mouvement n’a pas bougé d’un iota, si ce n’est l’ajout d’une date, depuis les premiers appels à manifester : « Il n’y aura pas de référendum constitutionnel le 1er mars ». Et Sékou Koundouno d’affirmer que le FNDC « usera de tous les moyens, dont la mise en place de stratégies constitutionnelles » pour bloquer la tenue du scrutin.

Même son de cloche du côté des partis d’opposition, également membres du FNDC. L’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG, de Cellou Dalein Diallo), tout comme l’Union pour la République (UPR, de Sidya Touré), qui boycottent d’ores et déjà les législatives, ont tous deux annoncé leur intention d’appeler leurs partisans à ne pas se rendre aux urnes pour le référendum. « Le fichier électoral est corrompu », estime Aliou Condé, secrétaire général de l’UFDG. « Il n’est pas équilibré car l’enrôlement des électeurs n’a pas été effectif dans certaines zones du pays », affirme-t-il, disant par ailleurs craindre « des actes de fraudes et des amalgames sur les urnes des deux scrutins ».

Le seul souverain, c’est le peuple

« C’est dans les urnes que l’opposition doit dire ce qu’elle pense. C’est comme cela que ça marche dans toute démocratie qui se respecte », rétorque Papa Koly Kourouma. Une ligne défendue également par Amadou Damaro Camara, président du groupe parlementaire RPG Arc-en-Ciel. « Nous acceptons leur position, mais nous n’acceptons pas la violence », prévient-il, avant de conclure : « Le seul souverain, c’est le peuple ».

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Burkina Faso : la présidentielle fixée au 22 novembre

| Par Jeune Afrique avec AFP
Dans un bureau de vote de Ouagadougou lors de l'élection présidentielle, le 29 novembre 2015.

L’élection présidentielle au Burkina Faso aura lieu le 22 novembre et sera couplée aux législatives, a annoncé mercredi le ministre de l’Administration territoriale, Siméon Sawadogo.

« Le Conseil des ministres a adopté deux décrets importants portant fixation des dates des élections présidentielle et législatives », a déclaré Siméon Sawadogo, à l’issue de la réunion hebdomadaire du gouvernement au palais présidentiel. « La convocation du corps électoral est donc prévue pour le 22 novembre 2020 pour ces élections couplées ».

« Cette date est importante parce la Constitution précise que les élections présidentielles devront avoir lieu au moins 21 jours avant l’expiration du mandat présidentiel ou tout au plus 40 jours » de cette échéance, a  poursuivi le ministre de l’Administration territoriale.

Le Conseil a retenu cette date prenant en considération les délais de recours pour « avoir une proclamation définitive des résultats pour qu’enfin le président élu puisse entrer en fonctions dans les délais », a-t-il ajouté.

Selon lui, cette « date est très importante pour la clarté et la transparence des élections mais cela rentre aussi en droite ligne avec les conclusions du dialogue politique national qui a voulu qu’on ait des élections couplées et transparentes ».

Municipales en 2021

Cette décision permet « dès à présent à la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) de travailler pour la confection des listes électorales », a indiqué le ministre.

Ces listes seront établies pour les élections couplées du 22 novembre 2020, mais aussi pour les municipales qui se dérouleront en 2021, a-t-il souligné.

Candidat à sa propre succession, le président Roch Marc Christian Kaboré, devrait être opposé à de nombreux anciens proches de Blaise Compaoré, dont l’ancien Premier ministre Kadré Désiré Ouédraogo et Gilbert Noël Ouédraogo, président de ‘ancien principal parti allié du régime Compaoré, renversé en 2014 après 27 ans au pouvoir.

Gilbert Ouédraogo avait tenté de se présenter à la présidentielle de 2015, organisée après un an de transition, mais sa candidature avait été rejetée en vertu d’une loi excluant les proches de Compaoré ayant soutenu la modification de la Constitution qui avait déclenché l’insurrection.

Tahirou Barry, un ministre démissionnaire du premier gouvernement du président Kaboré, a également annoncé sa candidature à la présidentielle de 2020.

Côte d’Ivoire : un boom immobilier « réservé » aux happy few

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Dans certains quartiers prisés comme celui de la Riviera, les prix du mètre carré se sont envolés ces dernières années.

Les groupes immobiliers locaux Kaydan et Batim comme les marocains Addoha et Alliances multiplient les projets à Abidjan et dans sa périphérie. Mais, faute d’un marché du crédit adapté, ces logements restent inaccessibles pour un segment important de la population.

Dans le taxi qui la ramène de l’aéroport d’Abidjan, cette habitante confie avoir désormais du mal à se repérer dans cette ville où elle vit depuis quarante ans. En particulier dans le quartier de la Zone 4, Marcory, prisé des ressortissants français et de la communauté libanaise, ou encore celui de la Riviera, aux Deux-Plateaux, ou d’Angré, dans la très huppée commune de Cocody.

C’est là qu’ont surgi, en seulement quelques années, ces nouvelles zones résidentielles destinées plus particulièrement aux classes supérieures et moyennes. Alors que le marché immobilier connaît depuis 2011 une croissance annuelle de 18 % dans le pays (reflétant principalement la tendance d’Abidjan), les besoins sont tels que la frénésie gagne aussi la périphérie.

Croissance des agglomérations

De grosses opérations ciblent aujourd’hui les villes de Grand-Bassam, Bingerville et Songo (près de la commune populaire de Yopougon), avec des produits plus accessibles. La construction de ponts et de voies rapides par les autorités a stimulé la croissance de ces agglomérations, qui se trouvent désormais à 30 minutes du centre d’Abidjan. À la fin de 2018, les revenus du secteur s’élevaient à 513 milliards de F CFA (808 millions d’euros – 41 % de l’industrie du BTP), selon les chiffres d’une étude à paraître du Groupement ivoirien du bâtiment et des travaux publics (GIBTP), dont Jeune Afrique a pris connaissance.

Si l’on s’attend aussi à d’importants investissements dans la construction hôtelière et dans l’immobilier commercial et de bureaux, où le mètre carré manque, l’immobilier résidentiel est celui où les besoins sont les plus importants. Parmi les plus gros promoteurs se partageant le marché figurent des ivoiriens comme Batim, qui fut successivement une filiale des compagnies d’assurance Colina et Saham avant de tomber, en 2015, dans l’escarcelle du fonds Phoenix Africa Partners Holding (PAPH), de Michel Abrogoua, la société Les Lauriers, détenue par une famille d’origine libanaise, les Marcos, mais aussi Kaydan.

RCI

Le groupe présidé par Alain Kouadio travaille actuellement sur trois programmes, comme Symphonia, à la Riviera. Aujourd’hui, dans ce lotissement clôturé de 5 hectares plébiscité par des cadres supérieurs et des entrepreneurs, sur les 120 maisons haut de gamme (250 000 euros) qui seront livrées en mars, il n’en reste que trois sur le marché.

Ayant développé sur la route de Grand-Bassam un programme de 500 villas (70 000 à 120 000 euros), qui jouera le jeu d’une plus grande mixité sociale, le groupe Kaydan commencera en avril le chantier de 112 appartements dans un quartier fermé de 2,5 ha, à Cocody. « Il y a beaucoup plus de projets structurés qu’il y a cinq ans », note Stéphane Affro, le directeur général de Kaydan, qui, depuis 2017, déploie une stratégie B to C, alors qu’il travaillait jusque-là pour le compte d’investisseurs, au gré des opportunités qui se présentaient.

Seul 1 % des logements sociaux promis ont vu le jour

Si son concurrent marocain Alliances Développement Immobilier est présent dans les logements économiques, qui forment 90 % de la demande, Addoha, le groupe d’Anas Sefrioui, s’est aussi positionné, en avril 2019, face à Kaydan, dans le haut standing, avec Prestigia, plus rentable, comme à Locodjro, sur la lagune Ébrié. « Une façon pour lui de créer un effet de levier sur son investissement », analyse Hamed Traoré, directeur exécutif du GIBTP.

À la différence des acteurs ivoiriens, dont la mauvaise expérience avec les syndics de copropriété les incite plutôt à construire des maisons basses, les opérateurs marocains préfèrent construire des immeubles, dupliquant un modèle éprouvé chez eux. Mais pas de quoi satisfaire entièrement la demande. Le GIBTP estime même entre 400 000 et 600 000 la pénurie de logements à Abidjan.

« Un déficit qui se creuse de 50 000 à 60 000 unités d’habitation par an, ce qui représente un manque à gagner de 50 milliards à 80 milliards de F CFA pour le secteur », poursuit Hamed Traoré. « Les autorités n’ont pas réussi à construire en huit ans les 50 000 logements sociaux par an qu’elles avaient annoncés. Seuls 4 000 sont sortis de terre. Ce qui crée beaucoup de frustrations dans la population », regrette Stéphane Affro.

Des conditions d’accès aux crédits excluantes

Car si les promoteurs n’arrivent pas à répondre entièrement à la forte dynamique du marché, c’est qu’ils rencontrent de nombreuses entraves. D’abord, le besoin de sécuriser le foncier, alors que le droit coutumier octroie souvent la propriété d’un terrain à une famille, à une communauté, plutôt qu’à un individu. « Les droits coutumiers doivent être purgés avant que s’exerce le droit latin, et c’est souvent une source de contentieux. Le droit latin ne définit pas ce qu’est une famille africaine ! », souligne Stéphane Affro, qui s’évertue à bien étudier en amont l’historique du foncier avant de lancer une opération.

Autre difficulté : la nécessité pour les promoteurs de viabiliser les terrains, c’est-à-dire de réaliser les adductions d’eau et les branchements électriques. Des tâches autrefois entreprises par l’État et qui renchérissent aujourd’hui de 15 % à 30 % le coût de construction des entreprises. Dans ces conditions, il est très difficile pour les opérateurs de s’orienter vers le logement social, comme le souhaiterait l’État.

Mais pour les aménageurs, le principal obstacle réside dans les conditions d’accès aux crédits pour les acquéreurs. Conséquence : même si la classe moyenne ivoirienne est importante, seule une niche de la société peut accéder à des financements. « Des crédits payables sur des périodes comprises entre trois et cinq ans et qui s’apparentent donc davantage à un crédit à la consommation, alors qu’ils devraient normalement s’étaler sur quinze à trente ans. Il n’y a pas de crédit immobilier sur une période longue. Une fois payé un apport de 30 % à 40 %, il est très difficile de s’acquitter du solde dans un laps de temps de trois ans », regrette Hamed Traoré.

Des conditions qui excluent de cette dynamique les populations les plus modestes de Yopougon et d’Abobo, qui composent les trois quarts de la ville, et qui ont engendré une véritable flambée des prix dans toute l’agglomération.

Les prix se sont envolés dans la Zone 4, où le mètre carré est le plus élevé de la ville, où il se négocie entre 400 000 et 600 000 F CFA. Tandis que dans la commune de Cocody les prix des terrains ont triplé, voire quadruplé, en moins de dix ans, constate Hamed Traoré. Des logements de moyen standing qui valaient entre 20 et 30 millions de F CFA il y a vingt ans s’échangent aujourd’hui à plus de 80 millions. Mais les promoteurs ont déjà les yeux rivés sur Anyama, à 10 kilomètres d’Abidjan, où le stade olympique accueillera la CAN 2023, et où doivent être construites de nombreuses infrastructures. Le lieu où, pour eux, des affaires restent à faire.


Kaydan se convertit à la gestion d’actifs

Afin de proposer des solutions de financement plus faciles et sans recourir aux banques, le groupe Kaydan a mis en place sa filiale Asset Management. L’objectif : gérer de l’immobilier papier. « Nous vendrons des titres qui permettront aux particuliers de prendre des parts d’une société immobilière, mais pas le bien actif dans leur propriété », assure Stéphane Affro, le directeur général. Kaydan a déjà obtenu l’agrément OPCVM du régulateur, mais attend que ce dernier définisse les règles de gestion des fonds. Il prévoit un démarrage sous peu.

Mines en Afrique : le grand bouleversement

Du défi de la sécurité pour les miniers au Sahel, en passant par les changements à l'œuvre dans la filière diamant en Angola, où la commercialisation des pierres a été libéralisée, ainsi qu'à Madagascar, où le gouvernement veut faire le ménage pour défendre ses intérêts, avec un nouveau code minier, Jeune Afrique s'arrête sur les grandes tendances du secteur, en commençant par le point de vue de Mark Bristow, figure de proue du secteur aurifère.

Selon la BAD, la croissance africaine résiste

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Akinwumi Ayodeji Adesina Président de la BAD.

Dans son rapport 2020 sur « Les perspectives économiques en Afrique » qu’elle a publié le 30 janvier, la Banque africaine de développement (BAD) se montre relativement optimiste sur la santé du continent malgré les secousses qui perturbent le commerce mondial.

Certes, la Banque africaine de développement a dû revoir à la baisse le taux de croissance pour le continent dont elle espérait l’an dernier qu’il atteindrait 4 % en 2019. Le ralentissement des « cinq grands » (Algérie, Egypte, Maroc, Nigeria et Afrique du Sud) l’ont fait stagner à 3,4 % (+3 5 % en 2018). Elle espère un sursaut, soit +3,9 % en 2020 et +4,1 % en 2021.

Le rapport se félicite que, pour la première fois depuis une décennie, l’investissement a plus tiré la croissance que la consommation privée, ce qui laisse espérer un renforcement et une diversification de la base productive de l’Afrique, ainsi qu’une amélioration de la productivité de sa main d’œuvre.

Investir dans le capital humain

Le classement régional réalisé par la Banque est le même que les années précédentes. Première, l’Afrique de l’Est avec un score de +5 % en 2019. Deuxième, l’Afrique du Nord avec +4,1 %. Troisième, l’Afrique de l’Ouest avec +3,7 %. Quatrième, l’Afrique centrale, avec +3,2 %. Enfin, l’Afrique australe avec 0,7 % en raison des dégâts causés par les cyclones Idai et Kenneth.

La BAD profite de ce rapport pour lancer un cri d’alarme au sujet du capital humain africain dont « la quantité et la qualité (..) sont beaucoup plus bas que dans les autres régions du monde ». Il faut, dit-elle, que les États investissent plus dans l’éducation et dans les infrastructures éducatives afin d’optimiser à long terme les bénéfices de la croissance. Elle souligne l’urgence qu’il y a à faire coïncider les besoins de l’industrie et la demande d’emplois.

Pour cela, il convient d’améliorer les compétences de la main d’œuvre notamment dans les domaines technologiques et scientifiques. « L’emploi des jeunes doit devenir notre priorité, a déclaré Akinwumi Adesina, président de la BAD. 12 millions de diplômés entrent sur le marché du travail chaque année mais seulement trois millions d’entre eux trouvent du travail et le chômage des jeunes ne cesse de croître ». L’éducation a une autre vertu : elle permettra de faire reculer la pauvreté et les inégalités dans les trente pays africains (sur 48 analysés) qui n’y parviennent guère.