Quand les Peuls, stigmatisés, font entendre leur voix

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Une femme peule et son enfant, dans la région du Lac Tchad, au Tchad, en 2015.

Lobbying, manifestations, rapports… Des associations peules dénoncent, en Afrique comme en France, la discrimination et les amalgames dont leur communauté fait l’objet.

Qu’elles soient locales, nationales ou internationales, de plus en plus d’associations peules dénoncent la stigmatisation et les violences dont leur communauté fait l’objet au nom de la lutte contre le jihadisme dans le Sahel. Elles publient des rapports, organisent des manifestations et font du lobbying, notamment auprès de la France, présente dans la région avec la force Barkhane et fer de lance du partenariat européen avec les pays du G5 Sahel.

« Devant le silence assourdissant des autorités face aux graves violations des droits humains, il devenait nécessaire d’en parler et d’attirer l’attention sur les violences commises envers notre communauté », confie Abou Sow, président de Tabital Pulaaku Mali.

Créée dans les années 1990, cette association de promotion de la culture peule dispose d’un vaste réseau sur le continent africain, en Europe et aux États-Unis. Elle participe aux initiatives locales de médiation pour résoudre les conflits intercommunautaires dans le centre du Mali. Et peut compter sur le soutien de l’Association malienne des droits de l’homme, qui saisit les autorités chaque fois que des massacres ou des exécutions extrajudiciaires ont lieu.

Au début de juin, Abou Sow a dressé devant la presse une liste de civils, tués dans le Centre, selon lui en raison de leur appartenance ethnique.

Signalements

L’Observatoire Kisal pour la protection des droits humains au Sahel s’est, lui, fait remarquer grâce à la présence active des membres de son bureau de Paris dans les médias internationaux. Représentée au Mali, au Burkina, au Bénin et au Niger, l’organisation projette de créer un bureau au Togo et en Guinée.

Nous interpellons également les autorités françaises à propos de ce qui se passe dans le Sahel. »

« Des équipes nous font remonter les informations du terrain. Nos signalements et rapports ont toujours été corroborés par d’autres organisations. Cela nous confère une certaine crédibilité et nous ouvre des portes lorsque nous voulons aborder le sujet des exactions avec des institutions internationales, explique Binta Sidibé-Gascon, vice-présidente de Kisal. Nous interpellons également les autorités françaises à propos de ce qui se passe dans le Sahel. Nous sommes, par exemple, en contact avec la députée La République en marche Sira Sylla et avons échangé en janvier avec le diplomate Jean-Marc Châtaigner. »

Au Burkina, la lutte est menée par le Collectif contre l’impunité et la stigmatisation des communautés (Cisc), qui regroupe plus d’une trentaine d’associations culturelles et d’ONG. Pour Daouda Diallo, son secrétaire général, « le massacre de Yirgou, en janvier 2019, a été un choc dans la conscience collective. Mais il ne faut pas en faire une question uniquement peule. Cela concerne tout le monde, et tout le monde doit s’engager dans la lutte ».