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Célibat des prêtres : le Guinéen Robert Sarah
publie un livre controversé coécrit avec Benoît XVI

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Le cardinal Robert Sarah publie "Des profondeurs de nos cœurs", un ouvrage défendant le célibat des prêtres, en collaboration avec le pape émérite Benoît XVI.

Défendant avec ferveur le célibat des prêtres dans un livre qu’avait initialement cosigné Benoît XVI, le cardinal guinéen prend ouvertement le contre-pied du pape François.

De passage en France, en ce mois de mai 2019, pour la promotion de son livre, Le soir approche et déjà le jour baisse, Robert Sarah se rend à Notre-Dame de Paris. Il voit dans les voûtes effondrées de la cathédrale, qui a brûlé quelques semaines plus tôt sous les yeux du monde, « un symbole de la situation de la civilisation occidentale et de l’Église en Europe ». « La foi est comme un feu, ajoute-t-il. Il faut être soi-même brûlant pour pouvoir la transmettre. » Si l’Église catholique a pu reprocher au cardinal guinéen certains de ses traits de caractère, à commencer par son intransigeance, la tiédeur n’en a jamais fait partie.

Charismatique leader de l’aile la plus conservatrice de la curie, connu pour ses positions énergiques séduisant les intégristes, Robert Sarah se retrouve, à 74 ans, au cœur d’une polémique qui agite les plus hautes sphères du Vatican. En cause, Des profondeurs de nos cœurs, un ouvrage écrit en collaboration avec le pape émérite Benoît XVI, dont les premiers extraits ont été révélés le 13 janvier par le quotidien français Le Figaro.

Petit séisme

Les deux hommes y défendent avec ferveur le célibat des prêtres, « menacé » par la possibilité offerte à certains évêques amazoniens d’ordonner des hommes mariés pour pallier le manque de ministres du culte dans leurs communautés. Évoquée lors du Synode sur l’Amazonie, en octobre 2019, la demande a trouvé une oreille attentive auprès du pape François, qui devrait – sauf grande surprise – officialiser la mesure, à titre exceptionnel. Son prédécesseur et Robert Sarah ont beau clamer leur « filiale obéissance » au souverain pontife, la parution de l’ouvrage apparaît de facto comme un acte de défiance inédit.

« L’ordination d’hommes mariés n’est pas une exception, mais une brèche », prévient Robert Sarah, qui alerte sur « les mauvais plaidoyers », « les mensonges diaboliques » et « les erreurs à la mode » visant à « dévaloriser le célibat sacerdotal ». Si la virulence du texte ne surprend personne, puisque le cardinal n’a jamais caché son aversion pour toute tentative de modernisation de l’Église, c’est sa collaboration avec Benoît XVI qui a provoqué un petit séisme dans le monde catholique. Avec ce texte, le pape émérite a-t-il consciemment défié l’autorité de son successeur ? Ou le nonagénaire, réputé fragile, a-t-il été utilisé par le cardinal guinéen lors des visites que ce dernier lui a rendues au monastère Mater Ecclesiae ?

À la suite de la publication des premiers extraits de l’ouvrage, le secrétaire particulier de Benoît XVI s’est empressé d’indiquer qu’il avait demandé « de retirer [son] nom comme coauteur du livre », au motif qu’il n’aurait « approuvé aucun projet pour un livre à double signature, ni n’avait vu et autorisé la couverture », où figurent les deux hommes. Un simple « malentendu », tempère toutefois l’entourage de Benoît XVI. Robert Sarah, lui, évoque « une polémique abjecte » et calomnieuse.

Si, au sein de l’Église, beaucoup se refusent à jeter la pierre au Guinéen et évoquent un homme plus mystique que politique, certains observateurs n’hésitent pas à parler de « manipulation » et à évoquer ses ambitions politiques. « Il a réussi son coup médiatique », estime ainsi Christian Terras, rédacteur en chef de la revue bimestrielle Golias Magazine, connue pour ne pas prendre de gants avec l’Église catholique. « Depuis que le pape François a été élu, le cardinal Sarah est en ordre de bataille contre son pontificat, avec le soutien de l’aile ultra-droite de la curie », assure l’éditeur, qui évoque les « puissants réseaux » du dignitaire africain de par le monde.

Fils de l’Afrique

Robert Sarah le conservateur vise-t-il, in fine, la tête du Saint-Siège ? De nombreux évêques africains, plus proches idéologiquement de Benoît XVI que de son successeur, pourraient être sensibles au parcours de celui qui se définit comme un « fils de l’Afrique ».

Né dans une famille animiste à Ourouss, un petit village du nord de la Guinée, Robert Sarah a connu une ascension rapide dans l’Église. Nommé archevêque de Conakry par le pape Jean-Paul II à tout juste 34 ans, il sera créé cardinal en 2010 par Benoît XVI. Il est aujourd’hui à la tête de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements, une instance majeure de la curie, où les visages africains sont encore rares. 

Robert Sarah n’hésite d’ailleurs pas à jouer de cette corde africaine. Dans Des profondeurs de nos cœurs, il estime que la « radicalité » est nécessaire pour évangéliser le continent. « On ne peut proposer [aux peuples d’Amazonie] des prêtres de “deuxième classe” », martèle-t-il également, se présentant comme un rempart moral face à un Occident sur le déclin. Dans le texte introductif de l’ouvrage, le cardinal se réclame de saint Augustin : « Je ne peux pas me taire », lance-t-il. Benoît XVI ayant fait marche arrière, il lui faudra désormais assumer seul cette prise de parole.

Réforme du franc CFA : comment la fracture sur l’eco a éclaté au grand jour
au sein de la Cedeao

| Par - avec Nadoun Coulibaly, Baudelaire Mieu, Aurélie M’Bida, Nicholas Norbrook et Matthieu Millecamps
Bruno Le Maire, ministre français de l'Économie, et Romuald Wadagni, ministre béninois de l'Économie et des Finances, le 22 décembre à Abidjan.

L’annonce du remplacement du franc CFA par l’eco avait-elle vraiment reçu l’aval de l’ensemble des pays de la sous-région ? La réaction des pays anglophones, le Nigeria en tête, laisse penser le contraire. Certains pointent une intervention du président français Emmanuel Macron.

Il y a un mois encore, les formes étaient maintenues. « Briefés » à Abuja par le président Alassane Ouattara, le 21 décembre 2019, les chefs d’État de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) avaient « pris acte des transformations importantes en cours au niveau de la zone monétaire de l’Union monétaire ouest-africaine (Umoa) ». Ce brief avait eu lieu quelques heures avant l’annonce, à Abidjan, par le chef de l’État ivoirien et son homologue français, Emmanuel Macron, du remplacement du franc CFA par l’eco.

Deux jours plus tard, le compte-rendu officiel nigérian du tête-à-tête entre le président ivoirien et Muhammadu Buhari annonçait déjà les contours d’un profond malentendu entre Abidjan et Abuja sur les contours exacts de cette « réforme ». « Le président ivoirien s’est dit heureux d’annoncer qu’il a reçu le plein soutien du gouvernement français, sous la présidence de M. Macron, et que les États d’Afrique de l’Ouest sont libres de quitter l’union et de rejoindre l’eco : la nouvelle monnaie désignée pour la côte Ouest », affirmait la présidence nigériane.

« Rejoindre l’eco », une monnaie désignée pour « la Côte Ouest ». La nuance est passée inaperçue à l’époque, mais elle a pris tout son sens avec la publication, en fin de journée jeudi 16 janvier, d’un sévère communiqué des ministres des Finances et des gouverneurs des banques centrales de la Zone monétaire de l’Afrique de l’Ouest (ZMAO), qui réunit les pays de la Cedeao non membres de la zone CFA, dont le Ghana, le Nigeria et la Guinée.

Une annonce prématurée ?

S’ils « félicit[ent] l’Uemoa pour sa décision de se départir du CFA », ces décideurs dénoncent la décision « unilatérale » de « renommer le franc CFA ‘eco’ d’ici à 2020 », rappelant que cette dénomination avait déjà été adoptée par l’ensemble des pays de la Cedeao comme celui « d’une monnaie unique indépendante de la [Communauté] ». Autrement dit, l’Uemoa, sous le leadership du président ivoirien, est accusée d’avoir usurpé à ses propres fins et selon son propre agenda la future monnaie commune de la Cedeao.

Les « transformations importantes » indiquées à Abuja correspondaient-elles exactement au contenu des annonces d’Abidjan ? Le doute est permis.

C’est le président Macron qui nous a imposé cet agenda. Il a tenu à parler du franc CFA à Abidjan

« Le timing arrêté à Abuja était que l’annonce intervienne en mars 2020, après l’évaluation des performances financières des huit pays par les ministres des Finances. L’idée étant que l’Uemoa adopte la monnaie unique en bloc », explique à Jeune Afrique un haut cadre de la Banque centrale des États d’Afrique de l’Ouest. « C’est le président Macron qui nous a imposé cet agenda. Macron a tenu à parler du franc CFA à Abidjan. Il y avait déjà un mur entre les anglophones et nous (Uemoa), cette décision creuse le fossé qu’il va nous falloir gérer », déplore notre source. « Je comprends que les initiatives prises pour la mise en place de l’eco, dans les conditions que j’ai entendues, pour les pays de l’Uemoa, suscite des réactions », décrypte, pour sa part, un familier des instances de gouvernance de la zone CFA.

Pression politique

Du côté des autorités d’Abidjan, on minimise la portée du désaccord. Une source à la présidence rappelle notamment que ces décisions de politiques monétaires « appartiennent aux chefs de l’État et non aux ministres » et que « le chef de l’État ivoirien est revenu d’un sommet de la Cedeao avant de faire l’annonce ». Autrement dit : la Cedeao avait été prévenue.

Cette lecture est loin de faire l’unanimité. Une semaine après l’annonce d’Abidjan, le gouvernement du président Nana Akufo Addo avait « applaudi chaleureusement cette décision » et affirmé la volonté du Ghana de se « joindre bientôt aux États membres de l’Uemoa dans l’utilisation de l’eco », il s’était empressé de rappeler les autres exigences validées durant la rencontre d’Abuja : « l’adoption d’un régime de taux de change flexible, la mise en place d’un système fédéral pour la banque centrale de la Cedeao » ainsi que le respect des « critères de convergence connexes convenus ». Une source informée des discussions entre décideurs anglophones de la région notent que « plusieurs d’entre eux ont été pris de court » et soupçonnent Paris « d’essayer d’imposer ses conditions ».

La polémique n’est pas sur le fond, mais sur la forme

Pour une autre source impliquée dans les négociations de l’Uemoa sur le remplacement du franc CFA, un travail d’importance sur le fond a été réalisé. « Nous avons lancé une réforme de fond, très importante, sur la fermeture du compte d’opérations, sur la prise en charge de la gestion des réserves de changes, sur la gouvernance des organes de gestion… Et nous l’avons fait, par ailleurs, dans un cadre et un calendrier qui avait été convenu au sein de la Cedeao. [Dans le communiqué] personne n’est venu remettre en cause ce travail. La polémique n’est pas sur le fond, mais sur la forme ». Il ajoute : « nous avons travaillé de manière indépendante, très sérieusement, et nous n’avons à aucun moment senti la moindre pression politique ».

Querelle de leadership

« Je ne suis pas surpris qu’ils soient frustrés. Les pays anglophones réclamaient depuis un certain temps une indépendance monétaire complète dans la région, et ils comprennent que c’est loin d’être le cas », analyse Guy-Bertrand Njoya, directeur financier de MAX.ng, une plateforme électronique de transport et de logistique à Lagos. Aux dires de plusieurs observateurs, au-delà des divergences sur la calendrier et les modalités d’évolution vers la monnaie unique de la Cedeao, cette bataille de communiqués traduit aussi, profondément, une querelle de leadership entre la Côte d’Ivoire et le Nigeria, poids lourds de l’Uemoa et de la ZMOA.

« C’est la guerre de leadership au sein des instances de la Cedeao entre Buhari et Ouattara qui continue », regrette un officiel ivoirien, qui s’interroge sur une possible « fixation sur le nom », et sur le fait « que ces pays n’étaient pas présents au moment de l’annonce d’Abidjan ». Pour Guy-Bertrand Njoya, au contraire, « la dispute sur le nom est un faux-fuyant. L’intérêt du Ghana et du Nigeria est d’avoir une souveraineté monétaire pour toute la région, car cela libérera le commerce. Il faut débloquer des ressources financières en mettant en commun les risques et les capitaux, pour financer, par exemple, les routes rurales entre la Côte d’Ivoire et le Ghana – et ce genre de projet est beaucoup plus facile dans le cadre d’une monnaie commune », décrypte l’ancien de Standard Chartered Bank.

« La question se joue désormais au niveau des politiques. Nous attendons que les chefs d’État campent le décor pour gérer la suite », explique notre interlocuteur à la BCEAO. Si Abidjan s’est gardé pour le moment de réagir au communiqué des ministres des Finances de la ZMAO, du côté de l’exécutif, on assure que « le président Ouattara poursuivra les discussions avec ses homologues des zones monétaires de la Cedeao. Il n’est pas exclu des rencontres bilatérales et multilatérales en marge du sommet UK-Africa du 20 janvier à Londres ». Dont acte.

Mali: Christophe Bigot, en mission pour la France au Sahel, évoque «l'après Pau»

Des soldats de l'armée française dans le village de Gorom-Gorom au nord du Burkina Faso, le 14 novembre 2019 (image d'illustration).
© AFP/Michèle Cattani

Christophe Bigot, l'envoyé spécial de la France pour le Sahel, séjourne à Bamako. Dans la capitale malienne, il assistera notamment, dimanche 19 janvier, à la réunion de « relance » du comité de suivi de l'accord de paix d'Alger.

Le vendredi 17 janvier, l'envoyé spécial de la France pour le Sahel, Christophe Bigot, a rencontré la presse nationale et internationale à Bamako pour parler notamment de « l'après Pau ». En, d'autres termes, les actions en cours pour lutter efficacement contre le terrorisme au Sahel après la rencontre de Pau, une ville du sud-ouest de la France, entre le président français et ses homologues sahéliens.

« Lutter avec détermination contre le terrorisme »

« Tous ensemble, dit Christophe Bigot, nous allons lutter avec détermination contre le terrorisme. Aujourd’hui, l’armée malienne a réceptionné treize véhicules blindés de transport de troupes offerts par l’Union européenne. Donc, le renforcement des capacités militaires, c’est de la formation, c’est de l’équipement, c’est de l’armement, c’est très important. Il faut construire des routes, il faut construire des hôpitaux, et ça c’est l’alliance Sahel dont l’assemblée générale va se tenir à Nouakchott en février sous l’autorité de Jean-Yves Le Drian, mais qui vise essentiellement à faire plus, mais aussi à faire mieux pour répondre aux besoins des populations. »

« La situation est grave »

« Donc, c’est tout cela qui va être mis en œuvre après Pau, explique l'envoyé spécial de la France pour le Sahel. Les ministres des Affaires étrangères et des Armées doivent se réunir dans trois mois, puis, ensuite, dans six mois est prévu à Nouakchott un sommet des chefs d’États. On ne perd pas de temps, et on a un calendrier extrêmement serré. Pourquoi ? Parce que la situation est grave », conclut-il.

Sommet de Pau: Paris et le G5 Sahel resserrent les rangs contre les jihadistes

La publication du dernier numéro de cette revue qui est publiée tous les six mois.

 

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La dernière édition de ce bulletin du diocèse de Ségou au Mali

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