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Afrique du Sud: réactions politiques
au discours du président Cyril Ramaphosa

Le nouveau président sud-africain, Cyril Ramaphosa, accompagné de son épouse, Tshepo Motsepe. Il s’est exprimé devant les parlementaires, le 16 février 2018, au lendemain de son élection.
© REUTERS/Nasief Manie/Pool
 

En Afrique du Sud, le nouveau président, Cyril Ramaphosa, a présenté, vendredi 16 février, ses orientations politiques lors de son très attendu discours sur l’état de la Nation. Il a multiplié les promesses et les projets pour relancer la croissance et l’emploi. Ce plan d’urgence pourrait néanmoins se heurter rapidement aux limitations budgétaires auxquelles l’Afrique du Sud doit faire face. L’opposition et la population ont réagi à ce premier discours.

Le discours sur l’état de la Nation a été accueilli positivement par de nombreux Sud-africains qui saluent, d’abord, la forme de cette intervention sur les réseaux sociaux.

La jovialité de Cyril Ramaphosa a particulièrement séduit, tout comme ses interactions avec l’opposition. Une situation bien inhabituelle en Afrique du Sud.

Du côté de l’opposition, les promesses du nouveau président de la république sont reçues avec plus de précaution. Julius Malema a néanmoins salué certaines annonces.

« Nous sommes favorables à l’expropriation des terres sans compensation et nous saluons la réduction de la taille du gouvernement. De cela, nous sommes satisfaits. Nous saluons aussi sa prise de position sur l’indépendance de la police anti-corruption. Il faut qu’il fasse arrêter ses collègues, ce sont eux les corrompus », a-t-il déclaré.

Julius Malema estime pourtant que Cyril Ramaphosa n’a pas « de plan réel » pour mettre en œuvre son programme. Cette opinion est partagée par Mmusi Maimane, chef de file de l’Alliance Démocratique.

« Son discours allait souvent dans le sens du programme mis en place sous l’administration de Monsieur Zuma. Il a annoncé un grand nombre de sommets alors que les Sud-africains ont besoin d’une mise en œuvre ferme et immédiate », a-t-il souligné.

La nomination du futur gouvernement est maintenant très attendue en Afrique du Sud.

Nord-est du Nigeria:
un attentat suicide dans un marché fait 19 morts

La ville de Maiduguri et ses alentours, au nord-est du Nigeria, sont régulièrement la cible d'attaques de Boko Haram, comme ici, le 15 mars 2017 (photo d’illustration).
© STRINGER / AFP
 

Au Nigeria, trois kamikazes se sont fait exploser sur un marché dans la ville de Konduga, à une trentaine de kilomètres de Maiduguri, capitale de l'Etat de Borno, dans le nord-est du pays, tuant 19 personnes et faisant 70 blessés. La nouvelle a été annoncée, ce samedi 17 février, par la Civilian joint task force, une milice qui combat, aux côtés de l'armée, les groupes jiadistes nigérians. Pour cette milice, il n’y pas de doute. Cette attaque est le fruit de Boko Haram.

C'est le mode opératoire de l'attaque qui fait dire à la Civilian joint task force que les islamistes de Boko Haram sont les auteurs de cet attentat. Les événements ont eu lieu, vendredi soir, sur le marché aux poissons de Tashan Kifi, aux abords de Konduga. Il s'agit d'un marché très populaire où l'on trouve également des restaurants.

Vers 20h30, deux hommes se sont fait exploser et quatre minutes plus tard, un troisième kamikaze a frappé à proximité. D'après la presse nigériane, le commissaire de la police de l'Etat de Borno, Damian Chukwu, a confirmé le bilan faisant état de 19 morts et près de 70 blessés.

Trente-huit attentats

Cette attaque ressemble, en effet, aux attentats menés par le groupe Boko Haram dans la région. Le groupe islamiste a multiplié les attaques suicide, ces derniers temps. Trente-huit attentats de ce type ont été menés, l'année dernière, soit plus du double de l'année précédente. Maiduguri est vraiment le fief de Boko Haram.

Bien que le gouvernement nigérian assure que le groupe islamiste a été battu sur le plan militaire, Boko Haram a multiplié les attaques qui ont fait près de 1 000 morts, dans le Nord, en 2017.

Liberia: le suspect d'un massacre commis
durant la guerre civile retrouvé

Des Libériens fuient Paynesville, en banlieue de Monrovia, le 10 août 1990, lors de combats entre partisans de Samuel Doe et de Charles Taylor.
© Pascal Guyot / AFP
 

Le Centre pour la justice et la responsabilité (CJA), une organisation internationale, a identifié un ancien colonel des forces armées du Liberia, 28 ans après les faits. Son nom, Moses Thomas, un proche de l’ancien président Samuel Doe. L’homme, qui vit aujourd’hui aux Etats-Unis, est accusé d’être l’un des auteurs du massacre de l’église luthérienne de Saint-Pierre de Monrovia, l’une des tueries les plus importantes de la guerre civile libérienne, qui avait causé la mort en juillet 1990 de plus de 600 personnes. Le 12 février, une plainte a été déposée contre lui pour crime contre l'Humanité, et il doit prochainement être auditionné par un juge américain.

Le 29 juillet 1990, en pleine guerre civile, environ 2000 hommes, femmes et enfants, se réfugient dans l’église luthérienne Saint-Pierre de Monrovia. Ces personnes sont en grande majorité des Mano et des Gio, deux ethnies perçues par le gouvernement comme des soutiens de Charles Taylor. « Beaucoup de personnes de ces ethnies Mano et Gio ont estimé que l’Eglise serait un sanctuaire », témoigne Hassan Bility, président de l’Association Global Justice and Research Project, qui traque au Liberia les criminels de guerre.

« Ce jour-là, les soldats ont pénétré dans l’enceinte de l’église. Ils se sont mis à tirer et à tuer environ 600 personnes. Sur la base de nos preuves et de ce que nous ont dit les témoins, nous sommes convaincus que Monsieur Thomas est celui qui a conduit les troupes dans l’enceinte et qu’il est complice de ce massacre », ajoute-t-il.

Au nom de quatre rescapés, une plainte pour meurtres, tortures, crimes de guerre et crimes contre l’humanité a été déposée lundi contre cet ancien colonel des Forces armées du Liberia. L’homme, qui vit aujourd’hui aux Etats-Unis, sera prochainement entendu par un juge. S’il était reconnu coupable, il devrait toutefois éviter la case prison. Mais selon Hassan Bility, le but de la démarche est surtout de faire entendre la voix des victimes.

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Tchad: les mises en garde du procureur
contre les manifestants

La police patrouille dans une rue de Ndjamena en juin 2015.
© BRAHIM ADJI / AFP
 

Le procureur de la République près le tribunal de grande instance de NDjaména a tenu un point de presse hier pour faire le point des manifestations qui secouent le pays depuis plusieurs semaines. Fonctionnaires, militants de la société civile et étudiants sont vent debout contre les mesures d'austérité du gouvernement. Plusieurs dizaines de personnes ont été arrêtées au cours des manifestations et hier, le procureur a rappelé qu'il n'aura aucune tolérance contre ceux qui vont à l'encontre de la loi.

Premier point de la communication du procureur, le verdict contre la quarantaine de personnes interpellées pendant les manifestations contre les mesures d'austérité. « Le tribunal a relaxé trois [personnes, ndlr] sur la base de vice de procédure. Il y en a treize que le tribunal a relaxées au bénéfice du doute. Donc il en reste 33, 34. Ceux-là ont écopé chacun de quatre mois d'emprisonnement ferme », détaille Mahamat Saleh Youssouf.

Ensuite viennent les mises en garde : « La justice n'est pas censée réguler une manifestation. Et dans la manifestation, on a en face de nous une foule. Dans la foule, on peut trouver le diable. Pour manifester, encore faut-il être autorisé par l'autorité compétente et que ceux qui organisent la manifestation prennent les risques à s'en prendre aux biens de l'Etat, à troubler l'ordre public, nous allons les traduire devant les juridictions compétentes, et nous allons requérir les peines qui doivent être à la hauteur de l'acte opposé », prévient le procureur.

Le procureur ajoute qu'en raison de la surpopulation à la maison d'arrêt de Ndjamena, causée par la grève des magistrats, les prochains condamnés pourront être envoyés en province pour y purger leur peine.

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Afrique du Sud: réactions partagées
après la démission du président Zuma

Manifestation anti-Zuma en mars 2017 au Cap, après que le président sud-africain eut démissionné le ministre des Finances Pravin Gordhan, provoquant une crise financière.
© REUTERS/Mike Hutchings
 

En Afrique du Sud, le président Jacob Zuma, poussé vers la sortie depuis plusieurs semaines, a fini donc par jeter l'éponge mercredi soir. C'est la fin d'un feuilleton qui tenait en haleine les Sud-Africains. Les réactions vont de l'amertume au soulagement.

A Soweto, les habitants sont soulagés de la fin de cette guerre ouverte à la tête de l’ANC. Soulagés également du départ du très controversé Jacob Zuma. Mais à l’image de Joe Mamasela, un des vétérans de l’ANC et combattant de la liberté contre l’apartheid, les citoyens sud-africains vont rester très attentifs aux premiers pas de Cyril Ramaphosa.

« Je ne suis content, ni déçu, confie t-il à notre correspondant. C’était un long processus politique dont la décision était attendue… En revanche, en tant que citoyen sud-africain, je me sens abusé. Car nous vivons dans une démocratie et Jacob Zuma a été démocratiquement élu par nous, le peuple sud-africain. Si L’ANC voulait que cela change, il aurait pu demander au peuple,via un référendum. Il faut laisser les gens voter ! pour dire 'oui' ou 'non' au départ de Zuma... Et nous aurions pu voter avec notre cœur et notre cerveau !».

Même amertume chez un autre citoyen interrogé à Johannesburg. « En tant que citoyen sud-africain, je me sens abusé. Car nous vivons dans une démocratie et Jacob Zuma a été démocratiquement élu par nous, le peuple sud-africain. Si L’ANC voulait que cela change, il aurait pu demander au peuple, via un référendum !»

«Personnellement, sa démission ne me rend pas heureux...»
15-02-2018 - Par Noé Hochet-Bodin
 
 

C’est quand même le deuxième président de l’ANC à être suspendu dans l’histoire, remarque un autre Sud-Africain, partagé entre la satisfaction des meilleures chances d'une victoire de l'ANC à la présidentielle de l'an prochain et le regret de la démission forcée de Jacob Zuma: «personnellement, sa démission ne rend pas heureux. Il avait été élu pour cinq ans, il aurait dû aller au terme de sa présidence».

Les accusations de corruption pesant sur le président sortant reviennent souvent dans les réactions. « Personne n’aime Zuma, car il a 783 charges de corruptions contre lui. Et il n’y a aucune action de la justice », confie encore une autre personne.

Ecoutez ce microtrottoir réalisé dans le quartier de classes moyennes de Melville à Johannesburg
15-02-2018 - Par Noé Hochet-Bodin
 
 

Mais certains préfèrent retenir que grâce à la présidence Zuma, le nombre de millionnaires a explosé en Afrique du Sud. Nous sommes trop focalisés sur ses scandales et pas assez sur ses actions positives, regrette un homme. 

Qu'attendre de Cyril Ramaphosa ?

« Même Cyril Ramaphosa a les mains salies par les scandales, nous déclarait Joe Mamasela. Il le sait. Tout le monde le sait. Le scandale de Marikana il y a 5 ans. Et ces affaires vont ressurgir et le hanter car lorsque vous êtes au pouvoir vous êtes exposé et critiqué. Donc il va être critiqué. Et croyez-moi, il ne va pas rester dix ans au pouvoir car ils continueront à se destituer les uns les autres ».

Cet autre Sud-Africain est plus mesuré: « Ce qui me rend heureux à propos du futur président Cyril Ramaphosa, c’est qu’il ne vient pas d’une grande tribu comme Jacob Zuma qui était Zulu. Il est Venda, une petite minorité et il a grandi à Soweto, donc il peut négocier avec tout le monde ».