Vu au Sud - Vu du Sud

Mali: la question de la présence des groupes armés
à Gao au cœur des tensions

Une rue de la ville Gao, dans le nord du Mali, le 22 juillet 2016.
© REUTERS/Souleymane Ag Anara
 

Les membres des différentes communautés de Gao, les notables, les jeunes, les femmes ou encore les forces de sécurité doivent discuter de mesures d'apaisement ce vendredi matin 2 mars. Depuis plusieurs semaines, la tension entre communautés est forte à Gao. Le meurtre mercredi soir, 28 février, d'un garde du tribunal a fait monter la pression d'un cran. Jeudi matin, une manifestation spontanée de jeunes qui réclamaient le départ des groupes armés a failli tourner à l'affrontement avec les hommes de la Plateforme. Aujourd'hui, l'heure est aux négociations et le point épineux, justement, est celui de la présence de groupes armés dans la ville.

C'est un cri de colère que les jeunes de Gao ont poussé jeudi. Pour eux, pas de doute, les armes sont la cause de l'insécurité qui ronge la ville. Une colère que comprend Djibril Diallo, chef d'état-major adjoint de la Plateforme à Gao. Mais pour lui, au contraire, les groupes armés ont un rôle à jouer pour protéger les populations et apaiser les tensions communautaires.

« Les jeunes de Gao, c’est normal qu’ils soient en colère car ce qui s’est passé est vraiment horrible, reconnaît le chef d’état-major adjoint. Les gens accusent. D’autres disent que c’est les Arabes, d’autres disent que c’est les Songhaï etc. Donc pour éviter tout cela, nous avons dit qu’à partir de maintenant jusqu’à à peu près un mois, les groupes armés, sous la conduite et la collaboration des forces armées et de sécurité, nous allons essayer de patrouiller dans la ville de Gao, de contrôler tout véhicule étranger qui rentre à Gao parce qu’il y a eu une infiltration à l’intérieur de Gao. »

Une solution inenvisageable pour Issa Boncana Touré, président de la Fédération des organisations de la société civile de Gao : « Ce sont des choses qui sont vraiment inacceptables. On continue à laisser ces groupes armés se promener partout. On n’arrive pas à les désarmer. Il n’y a rien qui se fait dans ce cadre-là. Tout le monde est armé, on ne sait pas qui est qui. C’est trop compliqué. Dans les solutions, nous allons demander que ces groupes armés puissent sortir de la ville. Tous nos problèmes sont liés à ces groupes armés. Donc on ne peut pas leur faire confiance. On l’a dit plusieurs fois. Ils ne peuvent pas protéger la population. »

Cela fait deux ans que les groupes armés discutent avec le gouvernement malien des modalités de la cession de leurs armes. Le processus de désarmement quant à lui, est au point mort.

Côte d'Ivoire: la création du Sénat se précise

L'Assemblée nationale ivoirienne, le 18 décembre 2015, lors d'un discours de son président Guillaume Soro.
© SIA-KAMBOU / AFP
 

A Abidjan, le prochain et premier scrutin sénatorial du pays se précise. Pour la première fois de son histoire, la Côte d'Ivoire va se doter le 24 mars prochain d'un Sénat, conformément à sa nouvelle Constitution. Ce 1er mars, la Commission électorale indépendante (CEI) a apporté devant la presse ivoirienne quelques précisions sur l'organisation et le déroulement de cette élection au suffrage indirect.

On ne sait pas encore vraiment où ils siégeront faute de Sénat mais leur élection est fixée au 24 mars 2018. La première génération de 66 sénateurs ivoiriens sera élu au scrutin universel indirect.

Les grands électeurs, c'est-à-dire les conseillers régionaux et municipaux, désigneront par vote les élus dans les 31 régions et deux districts de Côte d'Ivoire.

Campagne express

Il y aura deux élus par circonscription et un tiers des sénateurs seront nommés directement par le président de la République, comme le spécifie la Constitution. Au total, 99 sièges sont à pourvoir.

Difficile de savoir si ces élections mobiliseront les quelques 7 000 grands électeurs. A une semaine de la clôture des candidatures le 9 mars, aucun candidat n'a déposé sa profession de foi auprès de la Commission électorale indépendante (CEI).

On aura d'ailleurs à peine le temps de se rendre compte que l'on est en campagne puisque celle-ci durera officiellement quatre jours, du 19 au 22 mars.

Le HCR fait le point sur le phénomène de l'apatridie
en Afrique de l'Ouest

Une campagne de lutte du Haut-commissariat aux réfugiés (HCR) contre l'apatridie (image d'illustration)
© RFI/Claire Bargelès
 

Il y a trois ans, la déclaration d'Abidjan était adoptée par les 15 Etats membres de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao). Dans cette déclaration, les Etats se sont engagés à mettre fin à l'apatridie d'ici 2024. L'apatridie ou le fait de ne pas avoir de nationalité, empêche les gens d'avoir accès à l'école, aux soins ou à un travail faute de papiers d'identité. C'est la cause de grandes inégalités et de vulnérabilité pour la population. Le HCR a publié ce dimanche 25 février 2018 une note pour faire le point sur les évolutions du phénomène dans la zone.

Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés constate que quelques progrès ont été effectués ces derniers temps dans certains pays d'Afrique de l'Ouest. Romain Desclous, le porte-parole du HCR dans la région, explique qu'il y a eu des avancées au Sierra Leone, au Burkina Faso ou en Côte d'Ivoire, par exemple.

« En Sierra Leone, en 2017, la législation a été amendée pour permettre aux femmes, donc aux mères, de pouvoir transmettre la nationalité à leurs enfants. Jusqu’à présent, seul le père le pouvait, rappelle Romain Desclous. Il y a également  le Burkina Faso qui, la semaine dernière, a initié la distribution d’actes d’état civil et d’actes de naissance à des enfants et à des jeunes adultes qui n’en avaient pas. En Côte d’Ivoire, l’année dernière au moins 8 000 personnes qui étaient apatrides se sont vues remettre un certificat de nationalité, au terme d’une procédure spéciale qui avait été mise en place. »

Le porte-parole du HCR en Afrique de l'Ouest estime que les problèmes d'apatridie sont essentiellement liés à des problèmes « de lacunes administratives et législatives ». S'il considère qu'il y a « des progrès », il reste du chemin à parcourir, souligne-t-il.

« Parmi les efforts qui restent à faire dans la région, il s’agit d’une part d’améliorer la qualité des données qui nous permettent de savoir exactement combien de personnes sont apatrides. Il convient aussi de s’assurer que tous les Etats de la région accèdent aux conventions internationales sur l’apatridie, note Romain Desclous. Donc il y en a douze pour l’instant dans la région qui ont accédé à ces textes, trois autres sont en cours. Accéder aux textes internationaux, c’est une chose, mais il faut aussi que leur législation nationale soit en phase avec ces recommandations et avec ces textes internationaux. »

► La note du HCR sur l'apatridie en Afrique de l'Ouest

 
 

L'avenir du lac Tchad au cœur d'une
conférence internationale au Nigeria

                  Le lac Tchad représente de nombreux enjeux pour les pays de la région (photo d'illustration).
                  © The Asahi Shimbun via Getty Images
 

Une conférence pour le lac Tchad s'ouvre ce lundi 26 février à Abuja au Nigeria pour trois jours. Ce lac, bordé par 4 pays, le Tchad, le Niger, le Nigeria et le Cameroun est au centre de multiples enjeux, à la fois environnementaux, économiques, politiques et sécuritaires, puisque c'est également devenu une base de repli des terroristes de Boko Haram. L'objectif est donc de lancer un projet de préservation de la région.

La conférence internationale sur le bassin du lac Tchad a démarré ce lundi 26 février avec un discours d'ouverture du vice-président nigérian Osinbajo. Pendant trois jours, experts scientifiques, politiques et investisseurs du monde entier tenteront de mettre en route un plan de « sauvetage » de cet espace menacé par la sécheresse et l'insécurité.

En 40 ans, le lac a perdu 90% de sa surface en eau. Ce qui a entraîné une fragilisation des populations, une pénurie de nourriture. Les petits agriculteurs et les pêcheurs ont fini par nourrir les rangs des combattants du groupe Boko Haram, ou les rangs des milices qui s'y sont opposées, plongeant la région dans une grande instabilité. Selon les Nations unies, 2 millions de personnes ont dû quitter leur foyer dans la région et 10,7 millions dépendent de l'aide alimentaire pour survivre.

C'est donc pour faire face à cette crise que les élites politiques de la Commission du bassin du lac Tchad se réunissent pour imaginer des solutions et relancer leur projet de sauvetage. L'enjeu : conjurer la menace terroriste en relançant une économie régionale pour l'heure exsangue.

Enrayer la disparition du lac

L'objectif premier de la conférence est de créer une conscience globale sur les défis socio-économiques et environnementaux de la région. L'objectif second est d'élaborer un plan d'action détaillé pour préserver le lac de sa disparition. D'ores et déjà, les Nations unies se sont engagées à financer des programmes de recherche et de conservation pour 6,5 millions de dollars soit plus de 5 millions d'euros.

La conférence doit ouvrir un dialogue mondial entre les pays de la Commission du bassin du lac Tchad, l'Unesco, des experts internationaux et les éventuels bailleurs de fonds. Tables rondes et sessions plénières devraient ouvrir des pistes de réflexion. Parmi les options de restauration, un colossal projet de transfert d'eau du fleuve Congo vers le lac Tchad. Une étude signée par la société chinoise PowerChina.

Une réunion de haut niveau est prévue le troisième jour. Elle verra la participation de tous les chefs d'État des pays membres de la Commission du bassin du lac Tchad.


Une vue aérienne du lac Tchad. © Nasa/Domaine public

Burkina Faso : Kaboré sur la voie de la relance économique ?

 

Deux ans après son élection, le chef de l’État burkinabè affiche des résultats encourageants. Malgré un contexte social et sécuritaire tendu qui l’oblige à des entorses budgétaires, il entend appliquer le plan d’investissement présenté en 2016.

Roch Marc Christian Kaboré l’admet : la tâche pour transformer l’économie de son pays s’avère plus délicate que prévu. Dès sa prise de fonctions, le 29 décembre 2015, le président a été confronté à des vents défavorables, notamment les grèves dans le secteur public, les attentats et les tentatives de déstabilisation attribuées à l’ancienne garde rapprochée de Blaise Compaoré, renversé en octobre 2014 après vingt-sept années à la tête du pays.

« De mon point de vue, le bilan économique du chef de l’État est satisfaisant. Nous avons redressé l’économie en créant les conditions d’une reprise forte et durable. Je considère 2016 comme une année de transition qui nous a permis d’éponger les arriérés à hauteur de 40 milliards de F CFA (environ 60 millions d’euros) », explique à Jeune Afrique le Premier ministre, Paul Kaba Thiéba. L’agence de notation Fitch était venue conforter le travail du gouvernement en fin d’année en maintenant la notation du Burkina (B ­–/B avec une perspective positive).

Projets structurants

Pour Kaba Thiéba, la relance de l’économie a véritablement démarré en 2017 avec la mise en place du dispositif Sylvie (Système de liaison virtuelle pour les opérations d’importation et d’exportation, qui vise l’allègement des formalités de dédouanement), la loi sur les partenariats public-privé (PPP) et un vaste programme d’investissement public de l’ordre de 1 200 milliards de F CFA. Ces ressources sont placées dans des projets structurants en matière d’énergie, d’agro-industrie, d’infrastructures hydroagricoles, etc. « Nous avons l’ambition de créer une centrale d’achat des intrants agricoles et de construire des usines de production d’engrais et de montage de tracteurs », assure l’ancien haut fonctionnaire de la Banque centrale.

À la fin de novembre, le président Kaboré a inauguré, en présence de son homologue français, Emmanuel Macron, la plus grande centrale solaire d’Afrique de l’Ouest, à Zagtouli, en banlieue ouest de la capitale. Construite sur une superficie de 60 ha, la ferme solaire, dotée d’une capacité maximale de production de 33 MW, pourrait couvrir jusqu’à 5 % des besoins énergétiques du pays, estimés à 270 MW.

Quelques jours plus tard, à Houndé, dans l’Ouest, il a lancé l’entrée en production du gisement aurifère détenu par le groupe Endeavour Mining. Ce projet minier, dont l’État détient 10 % des parts, a mobilisé 300 millions de dollars (environ 285 millions d’euros) d’investissement et devrait générer quelque 20 milliards de F CFA de recettes publiques par an. Avec une dizaine de mines, le Burkina a vu sa production annuelle d’or bondir de 36 à 45 tonnes au cours des douze derniers mois. Pour cette année, le pays espère une production aurifère de 50 t.

Feuille de route

Et la croissance du secteur, qui a drainé au cours des dix dernières années plus de 1 400 milliards de F CFA d’investissements, devrait se poursuivre avec la mise en chantier de quatre nouvelles mines, confortant l’importance du secteur aurifère, principale source d’exportation (devant le coton), qui génère désormais plus de 20 % des recettes fiscales de l’État.

En lançant des travaux dans les régions, le chef de l’exécutif affiche sa volonté de mobiliser l’ensemble de la population dans un contexte politique, social et sécuritaire tendu (procès du général Diendéré à la suite du coup d’État manqué de septembre 2015, risque terroriste). « Le président sait où il va. Il demande seulement qu’on lui laisse le temps de tenir ses promesses », glisse un dirigeant de société bien introduit au palais de Kosyam.

"La reprise n’a pas encore eu de répercussions sur la vie des populations, qui ressentent d’une manière générale une relative morosité économique"

« Après les attentats d’août 2017, le gouvernement a pris des mesures telles que les patrouilles sur l’avenue Kwame-Nkrumah pour nous rassurer. On a l’espoir que la reprise s’accentue », estime Narendra Matta, administrateur général de l’hôtel Bravia de Ouagadougou, un établissement haut de gamme qui revendique désormais un taux de remplissage de 70 %. Le propriétaire indien, après un investissement initial de 8 milliards de F CFA, annonce vouloir investir dès l’an prochain entre 3 et 4 millions de dollars dans la construction d’un autre hôtel.

Grèves à répétition

Le retour au vert des indicateurs macroéconomiques, amorcé en 2016 (PIB en hausse de 5,9 %), s’est confirmé avec des projections de croissance de 6,7 % pour l’année qui vient de s’achever. « Cette reprise n’a pas encore eu de répercussions sur la vie des populations, qui ressentent d’une manière générale une relative morosité économique », souligne l’universitaire Idrissa Ouédraogo.

L’accélération de la reprise aurait encore pu être meilleure sans les attentats de Ouagadougou et les attaques répétées contre l’armée dans le Nord, qui ont fait en deux ans au moins 133 morts. Mais ce sont surtout les grèves dans le secteur public, comme la fronde des agents des finances et du fisc, qui ont limité la croissance.

« En satisfaisant les magistrats à l’entame de son mandat, le gouvernement a commis une grosse erreur. Cela a donné un signal négatif aux syndicats, d’où ces manifestations qui ont induit un ajustement budgétaire au détriment des dépenses d’investissement », observe le professeur d’économie à l’université de Ouagadougou. Selon lui, le coup de pouce salarial de l’État a ainsi fait dégringoler la part des investissements de 13,6 % du PIB en 2013 à 8,6 % en 2016. Avec les efforts gouvernementaux, cette dernière a néanmoins rebondi l’an dernier à 10,3 %.

Une croissance de 7,4 % attendue en 2018

Après le trou d’air de 2014 et 2015 (4,2 % et 4 % de croissance du PIB), le ministère de l’Économie, dirigé par Rosine Sori-Coulibaly, salue toutefois la bonne orientation de la mobilisation des recettes publiques et une nette amélioration dans l’exécution de la dépense publique. À la fin de 2017, les recettes propres ont atteint plus de 1 400 milliards de F CFA, contre quelque 900 milliards engrangés un an plus tôt.

Et l’entrée en vigueur du nouveau code des impôts au mois de décembre devrait booster la mobilisation des ressources propres. En 2016, les recettes fiscales avaient déjà connu un rebond de 15,6 %. Sa bonne résilience à la suite de la crise connue en 2014 fait du Burkina Faso, troisième économie de l’Uemoa derrière la Côte d’Ivoire et le Sénégal, un pays régulièrement cité en exemple par les bailleurs de fonds.

« En 2018, les perspectives sont bonnes. Nous avons l’ambition de réaliser une croissance d’au moins 7,4 % », assure Paul Kaba Thiéba. « Tous les voyants sont au vert avec une gestion rigoureuse des finances publiques. On projette même une croissance comprise entre 8 % et 10 % », ajoute pour sa part Stéphane Ouédraogo, conseiller spécial économie et finances du président du Faso. Cette embellie est dopée par le rebond des grands secteurs d’activité comme les télécoms et la production de ciment.

Déficit budgétaire

Difficile pourtant de verser dans un optimisme béat. Pour contenter les partenaires sociaux, le gouvernement Thiéba consacre 55 % des recettes fiscales aux dépenses de fonctionnement, dont une grande partie aux salaires des fonctionnaires, contre 35 % en moyenne dans l’Uemoa.

Des dépenses qui ont creusé le déficit budgétaire. Il atteindrait 6,9 %, selon nos informations. « Mais on ne peut pas demander à un gouvernement de faire face aux défis sécuritaires que lui imposent les attentats et en même temps lui exiger de réduire ses dépenses », plaide Facinet Sylla, économiste à la Banque africaine de développement.

« La stratégie du président consiste à briser les freins à la croissance comme le manque d’énergie, d’infrastructures ou encore la cherté des facteurs de production dans l’industrie » déclare Paul Kaba Thiéba

Néanmoins, le déficit budgétaire croissant constituerait l’un des points d’achoppement des négociations en cours avec le FMI pour un nouveau programme d’aide, même si l’institution indique dans sa note de juillet 2017 que la dette publique du pays (stable, autour de 30 % du PIB avec une inflation demeurée faible à 0,3 %) reste bien inférieure aux autres pays de l’Uemoa.

« Le diagnostic du président part du principe qu’il faut mener une politique de croissance intelligemment alignée avec une politique sociale en vue d’endiguer les inégalités », défend le chef du gouvernement. Et d’ajouter : « La stratégie du président consiste à briser les freins à la croissance comme le manque d’énergie, d’infrastructures ou encore la cherté des facteurs de production dans l’industrie. »

Un New deal à 15 400 milliards de F CFA

Depuis deux ans, et alors qu’il est confronté à la pression de ses concitoyens, de plus en plus impatients, le chef de l’État, tout en lâchant du lest, tente d’appliquer le programme consigné dans le Plan national de développement économique et social (PNDES). Le président rappelle sa feuille de route à chaque décision d’investissement et associe le secteur privé lors de ses voyages pour créer des liens avec les groupes internationaux.

S’il reconnaît un retard à l’allumage quant à sa volonté de réformer l’administration dès sa prise de fonctions, le chef de l’État ne fait plus mystère de sa volonté d’aller de l’avant. Il annonce la création d’un Haut Conseil pour le dialogue social, chargé de répondre aux nombreuses attentes des syndicats.

Ce new deal, au coût évalué à 15 400 milliards de F CFA, avait été plébiscité l’an dernier à Paris par les bailleurs et les privés internationaux, avec des promesses et des intentions de financement estimées à 28 milliards d’euros. à la fin de 2017, l’exécutif indique sur la base des accords déjà signés avoir pu mobiliser environ 30 % du montant recherché (plus de 5 520 milliards de F CFA), soit un peu plus de 1 720 milliards de F CFA.

Encore des lourdeurs dans la commande publique

« Le fait d’avoir un outil de programmation autour duquel le gouvernement a su mobiliser les partenaires nationaux et étrangers est une bonne chose », salue Facinet Sylla. L’ancien directeur de la Banque centrale de Guinée exhorte lui aussi à lever les goulets d’étranglement (lourdeurs et lenteurs administratives, prestataires défaillants, etc.) liés à la commande publique.

« Un questionnement subsiste toujours sur la pertinence du PNDES. Pour nous, le problème de ce plan réside dans la capacité de l’État à le réaliser et à pouvoir disposer des fonds promis à Paris, souligne un homme d’affaires appartenant à l’entourage du chef de l’État. On ne voit pas venir la mise en œuvre des projets phares » – comme la boucle ferroviaire ouest-africaine, la grappe des huileries de Bobo‑Dioulasso ou encore l’autoroute Abidjan‑Ouaga, au coût d’environ 1 200 milliards de F CFA.

« Même si la croissance a repris, il faut préciser que le retard dans la mise en place des institutions par le nouveau pouvoir a entraîné un attentisme fort chez certains opérateurs économiques locaux », martèle un banquier. Une façon de dire que le pari est encore loin d’être gagné.


Les artisans de la relance

  • Rosine-Sori Coulibaly

À 60 ans, la ministre de l’Économie, des Finances et du Développement est la cheville ouvrière de la stratégie de Roch Marc Christian Kaboré. Son franc-parler et sa rigidité dans l’arbitrage budgétaire lui valent le surnom de « Madame Rigueur ».

  • Stéphane Ouédraogo

Diplômé d’un MBA en finance, ce quadra officie depuis mars 2016 comme conseiller économique auprès du président et pilote les investissements structurants.

  • Mahamadi Savadogo

Surnommé « Kadhafi » parce qu’il a fait ses études en Libye, le patron du groupe diversifié Smaf œuvre à la tête de la Chambre de commerce et d’industrie du Burkina en véritable relais du chef de l’État auprès du secteur privé.