Vu au Sud - Vu du Sud

Guinée: la société civile condamne
les interdictions de manifester

Un manifestant des forces sociales de Guinée, lors d'une manifestation à Conakry, le 6 août 2018.
© Carol Valade/RFI

A Conakry, l'Organisation guinéenne de défense des droits de l'homme et du citoyen (OGDH) a condamné, lundi 6 août, l'interdiction des manifestations en Guinée. Si le gouvernement nie avoir pris une telle mesure, le fait est que, depuis la marche du 10 juillet dernier organisée par les « forces sociales » (une coalition de la société civile formée contre l'augmentation du prix du carburant), aucune manifestation n'a reçu d'avis favorable. Les autorités invoquent tour à tour le « contexte sécuritaire », ou le « bon déroulement du pèlerinage à la Mecque », mais pour la société civile, ces décisions sont prises en toute illégalité.

La polémique est née d'une lettre. Aux forces sociales qui l'informent de leur intention de manifester aujourd'hui, le gouvernorat de Conakry répond en rappelant la « mesure » du ministre de l'Administration territoriale interdisant « les manifestations de rues sur l'ensemble du territoire ».

Une « inquiétante violation de la Constitution », selon Me Hamidou Barry de l'OGDH. « D’abord, le régime en Guinée, c’est le régime déclaratif. On informe. Ce n’est pas une autorisation. Deuxièmement, si les mairies n’interdisent pas, une autre autorité ne peut pas interdire. Nulle part, il est mentionné dans le Code pénal qu’un ministre peut intervenir. Ce n’est pas légal », explique-t-il.

Le ministre Bouréma Condé, ministre de l'Administration du territoire et de la décentralisation reste sibyllin sur cette question. « La prise de décision pour interdire ou organiser une marche, c’est au niveau communal », estime-t-il.

RFI: Est-ce que vous avez décidé d’interdire les manifestations sur l’ensemble du territoire ?

« Quand je le fais, tout le monde sait que je le fais. Rien ne m’empêche d’être devant la radio-télévision nationale pour annoncer ».

RFI: Vous n’avez pas pris une telle décision ?

« Je vais m’arrêter là par rapport à votre question », a-t-il répondu.

Quoi qu'il en soit, les forces sociales maintiennent leurs appels à manifester. Elles ont assigné le gouverneur devant le tribunal de Kaloum qui doit rendre sa décision mi-septembre.

 

Mali: l'opposition continue de dénoncer
le scrutin du premier tour

Un meeting des candidats d'opposition s'est tenu, au palais de la culture de Bamako, au Mali, le 7 août 2018.
© REUTERS/Luc Gnago

Le Front républicain, qui regroupe 18 candidats à la présidentielle ou leurs représentants, ne démord pas : le scrutin présidentiel du premier tour est « un coup d'Etat électoral ». Ils étaient regroupés mardi 7 août à Bamako avec quelques milliers de leurs partisans.

Dans la principale salle du palais de la Culture de Bamako, toutes les 3 000 places sont occupées. Les 18 candidats ou leurs représentants galvanisent le public. « Je pense et je suis convaincu aujourd’hui que le changement est possible avec ce que je vois », estime Mohamed Ousmane Ag Mohamedoun, vice-président du parti La Convergence pour le développement du Mali (Codem), qui a présenté un candidat à la présidentielle

Originaire du nord du Mali, et par ailleurs président d’un groupe armée, Mohamed Ousmane Ag Mohamedoun révèle ce qu’il considère comme un cas de fraude avérée dans une localité de la région de Tombouctou lors du scrutin du premier tour de la présidentielle. « Les urnes ont été bourrées à Goundam. Et je défis n’importe quel juge constitutionnel de m’apporter la preuve qu’il y a eu une élection », lance-t-il.

« Une dictature de la fraude »

« La rencontre d’aujourd’hui, c’est à la demande du peuple malien. Ces élections, les résultats proclamés ne représentent pas la voix du peuple. Le peuple veut qu’on lui restitue son résultat. Là où il y a eu du bourrage d’urnes, il y a eu de la manipulation des résultats. Des bourrages d’urnes, des achats de conscience à ciel ouvert. Ce sont des pratiques qui peuvent amener notre démocratie à régresser. Donc nous nous levons aujourd’hui comme un seul homme pour dire que nous aimons notre pays. Ce que nous avons en commun, c’est la patrie, c’est le Mali. Et le Mali aujourd’hui connait la démocratie depuis 1991. Ce sont des Maliens qui ont donné leur vie pour que nous puissions connaître la démocratie. On ne saurait permettre à un régime de venir mettre en péril cette avancée démocratique. C’est l’objet de la rencontre du jour. Aussi alerter la communauté internationale pour dire que les élections qui se sont passées au Mali le 29 juillet ne se sont pas passées dans les conditions de transparence requise », estime Abdramane Diarra, président de la jeunesse de l'Union pour la République et la démocratie (URD), membre de la coalition.

Dans son discours, Soumaïla Cissé, arrivé second au premier tour de la présidentielle, a dénoncé « une dictature de la fraude » lors du scrutin. L'opposition demande en outre le départ du ministre de l'Administration territoriale et de la décentralisation, Mohamed Ag Erlaf, chargé d'organiser ces élections, ainsi que la publication des résultats, bureau de vote par bureau de vote, pour pouvoir vérifier les chiffres. Plusieurs recours ont été déposés devant la Cour constitutionnelle.

La majorité se défend d'avoir commis des fraudes 

Mais pour Mahamadou Camara, porte-parole du candidat Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), ces accusations de fraude ne sont pas justifiées.

« Nous avons assisté à l'une des élections les plus transparentes de toute l’histoire démocratique du Mali. Nous avons une nouvelle loi électorale qui est une coproduction de l’opposition et de la majorité. Nous avons un fichier qui a été audité par un organisme indépendant qui a été accepté par tous, donc un fichier consensuel. Nous avons de nouvelles cartes d’électeur qui ont été produites et mises à disposition des citoyens sur la base de ce même fichier. Nous avons accepté la présence d’observateurs internationaux au moment de la centralisation. Et je rappelle que dans chaque bureau de vote, l’opposition est représentée par des assesseurs et des délégués qui ont signé des PV de dépouillement. J’ajouterai pour finir sur ce point que la Céni est présidée par un membre de l’opposition et a des membres en son sein. Par conséquent, je ne vois pas où est la fraude. Il s’agit de manœuvres dilatoires. Les gens sont de mauvaise foi. Ils essaient de déstabiliser le pays. Et cela, je pense que les Maliens ne l’accepteront pas et sauront le leur dire clairement lors du vote le 12 », estime le porte-parole.

Quoi qu'il en soit, les organisateurs du meeting ne le cachent pas, ils ont aussi le regard tourné vers la Cour constitutionnelle qui doit proclamer les résultats définitifs du premier tour de la présidentielle. Ce qui fait que dans le public, certains pensent déjà aux batailles futures : « Les batailles, c’est qu’il faut que la loi soit respectée, il faut que les votes s’organisent normalement », déclare l'un d'eux. « On souhaiterait qu’il y ait des bonnes élections bien entendu le 12. Il y a des pratiques qu’il ne faut jamais reprendre », estime un autre. Le meeting s’est déroulé sans incident, avec un service de maintien d’ordre très professionnel.

 

Côte d'Ivoire : Simone Gbagbo
a été remise en liberté

Simone Gbagbo, près de son domicile après sa libération, à Abidjan en Côte d'Ivoire, le 8 août 2018.
© ISSOUF SANOGO / AFP

En Côte d’Ivoire, à Abidjan, le procureur a signé l'ordre de mise en liberté de Simone Gbagbo. L'ancienne première dame, amnistiée par le président Ouattara, il y a 2 jours, comme 800 autres personnes était incarcérée depuis 7 ans. Elle avait été condamnée en 2015 à 20 ans de prison pour atteinte à la sûreté de l'Etat pour son rôle dans la crise postélectorale de 2010- 2011.

Simone Gbagbo est rentrée chez elle, ce mercredi 8 août, en tout début d'après-midi, à sa résidence familiale de Riviera 2. Une arrivée triomphale effectuée à la sortie du 4x4 qui la transportait. Elle est arrivée souriante et était entourée d’une nuée de photographes.

Une foule très nombreuse de partisans était présente, une haie d’honneur lui était dressée. Elle est apparue vêtue d'une robe violette, le bras en l’air bien sûr. Elle est arrivée avec son beau-fils, Michel Gbagbo. Des affiches à son effigie l’ont accueilli.

Plus revenue depuis 2011

Il était même difficile de l’apercevoir tellement il y avait de monde autour d’elle. Une espèce d’hystérie heureuse et joyeuse régnait devant son domicile. Tout le monde semblait extrêmement heureux. Simone Gbagbo était vraiment escortée, quasiment soulevée par les hommes des forces de l’ordre qui l’accompagnaient. L'ambiance était incroyable. Elle n'avait plus revu sa villa à Cocody Riviera depuis 2011, date de son arrestation.

Après avoir brièvement saluée la foule, elle s'est immédiatement isolée à l'intérieur de sa maison pour une réunion avec sa garde rapprochée. Elle devrait s'exprimer bientôt devant la presse et ses soutiens.

 

Sécurité routière : Au Togo, les accidents de la circulation ont coûté la vie à 286 personnes à fin juin 2018

 | 
La majorité des accidents au Togo, notamment ceux mortels d'entre eux, impliquent les deux roues. 
Au Togo, de janvier à juin 2018, les accidents de la route ont été à l'origine de 286 morts et 3.817 blessés. Selon le ministre togolais de la sécurité et de la protection civile, le général Damehame Yark, les accidents sont en hausse si l'on s'en tient aux chiffres enregistrés à la même période l'an dernier, par son département.

Les conséquences des accidents de la route au Togo ont empiré durant le premier semestre 2018 par rapport à la même période en 2017. C'est ce qu'a affirmé ce vendredi 3 août 2018 le ministre togolais de la sécurité et de la protection civile, le général Damehame Yark. Selon le responsable qui a présenté un rapport sur la sécurité à la presse, de janvier à juin 2018, les accidents de la route ont tué 286 personnes et causé la blessure de 3.817 personnes. S'exprimant en présence de son collègue en charge des transports, Ninsao Gnofam, et du commissaire général de l'Office togolais des recettes (OTR), Kodjo Adédzé, le général-ministre a précisé que 63% des accidents en question sont occasionnés par les engins à deux roues.

« La plupart des accidents sont dus à l'excès de vitesse, au manque d'entretien des véhicules et plus généralement au non-respect du code de la route », a ajouté le ministre togolais. Il appelé les usagers au respect scrupuleux du code de la route et à la limitation de la vitesse sur les routes.

Abordant la question des braquages, vols à main armée, enlèvements, meurtres, lynchages, cambriolages, assassinats, et autres type de crimes, le général Yark a estimé que la criminalité est toujours aussi en hausse dans le pays. Cependant, a tenté de rassurer le ministre, « le Togo occupe le deuxième rang dans l'Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) en matière de sécurité des populations et de leurs biens ».

Côte d'Ivoire-UE : le rapport qui dénonce les pratiques du régime Ouattara

 | 
 
Un rapport confidentiel de l'Union européenne dénonce des dérives et pratiques anti-démocratiques du régime du président Alassane Dramane Ouattara en Côte d'Ivoire. A la base de ce document, les décideurs de l'organisation européenne s'interrogent sur la pertinence de continuer à apporter de l'aide au pays ouest-africain.

C'est le début d'une tourmente diplomatique pour le régime du président Alassane Dramane Ouattara en Côte d'Ivoire. Alors que la gouvernance semble exemplaire dans ce pays avec des résultats économiques encourageants, un rapport confidentiel de l'Union européenne (UE) cité par l'AFP pointe du doigt ce qui semble être des «écarts» du pouvoir en place. «La Côte d'Ivoire affiche l'image rassurante d'une stabilité retrouvée, portée par des taux de croissance élevés», mais «les indicateurs sociaux stagnent (taux de pauvreté à 46 % en 2015)», indique le document datant de juillet 2018. «La population s'interroge de plus en plus ouvertement sur cette croissance qui ne lui semble pas ou peu bénéfique», et «tolère d'autant moins les largesses financières dont bénéficient les cercles du pouvoir», «dont l'enrichissement ces dernières années est parfois spectaculaire», ajoute le rapport.

L'UE dénonce également ouvertement une bonne image en trompe-l'œil que véhicule la Côte d'Ivoire. Le rapport des diplomates européens parle de «failles politiques importantes de la reconstruction» après la décennie de crise politico-militaire des années 2000, et de «fragilités non résorbées d'un pays peut-être moins solide et démocratique que sa bonne image pourrait le laisser penser». Des accusations déjà très graves de l'Union auxquelles s'ajoutent d'autres, portant sur la restriction de la liberté d'expression.

Un pouvoir hermétique aux critiques

Pour les ambassadeurs européens, «face à ces difficultés, les autorités se montrent hermétiques aux critiques internes et externes, et semblent désireuses de ne laisser aucun lieu de pouvoir leur échapper». «La confrontation entre un pouvoir qui restreint progressivement les espaces d'expression, et une contestation sociale grandissante, n'augureraient rien de bon pour l'échéance de 2020», indiquent les diplomates européens.

En ce qui concerne les questions politiques ou électorales, selon le rapport, les initiatives du pouvoir d'Abidjan laissent entrevoir une tentative d'éliminer toute opposition afin de s'assurer une «réélection systématique» lors des échéances électorales de 2020. «Sur le plan politique, la création, voulue par le président Alassane Ouattara, d'un "parti unifié"» et «annoncé [e] comme la solution à l'instabilité passée [...] a été dès le début compris [e] par tous comme une manière pour la coalition au pouvoir de s'assurer une réélection systématique, en reléguant les éventuels mouvements d'opposition à la périphérie du jeu politique», révèle le rapport.

Un dialogue inexistant entre l'UE et la Côte d'Ivoire

Mais les dysfonctionnements relevés par l'UE ne s'arrêtent pas au plan interne. Le rapport va jusqu'à dénoncer une «relation de l'Union européenne avec la Côte d'Ivoire affectée par le manque de dialogue politique». Cette «situation n'est pas compatible avec la relation forte entre [Bruxelles et Abidjan], dont témoigne notamment le haut niveau de soutien politique et financier apporté par l'Union européenne», relèvent les ambassadeurs européens avant de conclure qu'«au vu de ce constat» ils incitent à «une réflexion sur le soutien de l'UE à la Côte d'Ivoire».

Signalons qu'une suspension de l'aide européenne à la Côte d'Ivoire pourrait avoir beaucoup de conséquences sur l'économie du pays. Pour la période 2014-2020, cette aide, sans compter les aides bilatérales allemande et française par exemple, s'élève à 273 millions d'euros, soit quelque 178,8 milliards de francs CFA.