Guinée : Mamadi Doumbouya devient officiellement chef de l’État

Par Jeune Afrique
Mis à jour le 1 octobre 2021 à 17:57


Mamadi Doumbouya, ici le 5 septembre, a été investi président de la transition en Guinée le 1er octobre. © JOHN WESSELS/AFP

Devant sa femme et des personnalités politiques guinéennes, mais en l’absence de représentants étrangers de haut rang, le putschiste a été investi président de la transition ce vendredi 1er octobre.

Mamadi Doumbouya, a prêté serment vendredi 1er octobre comme président d’une transition à la durée et au contenu toujours inconnus. Le commandant des forces spéciales qui a renversé le président Alpha Condé le 5 septembre, en uniforme d’apparat beige, portant béret rouge et lunettes noires, a juré devant la Cour suprême « de préserver en toute loyauté la souveraineté nationale », de « consolider les acquis démocratiques, de garantir l’indépendance de la patrie et l’intégrité du territoire national ». Sa mère et son épouse, une officier de gendarmerie française, et de nombreuses personnalités politiques guinéennes étaient présentes. Cellou Dalein Diallo (UFDG), Sidya Touré (UFR), Faya Millimouno (BL), Siaka Barry ou encore Ousmane Kaba avaient fait le déplacement au palais Mohammed-V de Conakry.

S’octroyant un grade supplémentaire de colonel, Mamadi Doumbouya s’est de nouveau engagé au respect par la Guinée de tous ses « engagements nationaux et internationaux ». Il a par ailleurs assuré que, comme prévu par la « charte » de la transition, sorte d’acte fondamental publié lundi 27 septembre et entré en vigueur immédiatement, ni lui ni aucun membre de la junte ou des organes de transition ne serait candidat aux futures élections.

Culte de la personnalité

Avant de lui faire prêter serment, le président de la Cour suprême, Mamadou Sylla, a comparé la tâche du colonel Doumbouya au pilotage d’un navire « chargé de beaucoup d’événements douloureux, d’exigences nombreuses et d’attentes immenses et urgentes ». Il l’a appelé à ne pas se laisser dérouter « par la force des vagues de la démagogie et la tempête du culte de la personnalité ». Après deux coups de force au Mali voisin, le colonel Doumbouya a conduit le troisième putsch en un an en Afrique de l’Ouest, réalisé en quelques heures au prix d’un nombre indéterminé de vies humaines, les médias faisant état d’une dizaine à une vingtaine de morts.

Ce putsch a été largement condamné par la communauté internationale qui réclame la libération d’Alpha Condé, toujours aux mains des putschistes. Si les présidents de la Cedeao avaient été invités à cette cérémonie d’ouverture, aucun n’a fait le déplacement. Le président de la transition malien avait tout de même envoyé Malick Diaw, le président du Conseil de transition pour représenter son pays. Dans l’assistance figuraient les ambassadeurs de Chine et de Russie. Plusieurs pays occidentaux avaient limité leur présence à des diplomates de rang moindre mais le représentant du système des Nations unies était présent.

Durée indéterminée

Le colonel Doumbouya a assigné pour mission à cette transition une « refondation de l’État », la rédaction d’une nouvelle Constitution, la lutte contre la corruption, la réforme du système électoral, l’organisation d’élections « libres, crédibles et transparentes » et la « réconciliation nationale ». La junte a dit qu’elle rendrait le pouvoir aux civils après des élections à la fin d’une période de transition. Mais elle n’a jamais précisé la durée de cette transition, qui doit encore être fixée d’un « commun accord » entre les militaires et les forces vives du pays, ni précisé ses plans.

Le colonel Doumbouya, colosse aux manières posées, toujours protégé de près par ses hommes et apparaissant toujours en public en treillis et coiffé de son béret, semble résolu à se laisser du temps, malgré les pressions internationales, conviennent les analystes. La Cedeao a réclamé des élections présidentielle et législatives sous six mois. Elle a décidé de geler les avoirs financiers des membres de la junte et de leur famille et de les interdire de voyage.

Depuis son avènement, celui que les communiqués officiels désignaient déjà comme président de la République avant même son investiture, a multiplié les propos rassurants envers les investisseurs et des partenaires étrangers. Il a garanti le respect des contrats miniers et fait rouvrir toutes les frontières aériennes et terrestres. La « charte » de la transition confirme le colonel Doumbouya comme le nouvel homme fort de la Guinée, « chef de l’État et chef suprême des armées », qui « détermine la politique de la Nation » et qui « peut prendre des ordonnances ». Le président Doumbouya nommera par décret un Premier ministre de transition, qu’il pourra révoquer.