Côte d'Ivoire: Aqmi dévoile les objectifs de son attentat à Grand-Bassam

Un soldat ivoirien à Grand-Bassam, le 13 mars 2016, jour de l'attaque.
© REUTERS/Luc Gnago

Par RFI Publié le 15-03-2016 Modifié le 15-03-2016 à 14:33

Lundi soir, au lendemain de l'attentat de Grand-Bassam, en Côte d'Ivoire, al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) a diffusé sur Internet un deuxième communiqué de revendications, plus détaillé que le premier diffusé le soir même de l'attaque, dimanche 13 mars 2016. Aqmi donne des indications sur les trois tueurs, envoyés en « représailles contre la France » et ses alliés dans la région.

« C'est un avertissement pour la Côte d'Ivoire », prévient Aqmi, et pour tous les alliés de la France ayant « participé aux combats contre les jihadistes ». En frappant Grand-Bassam, l'organisation affirme viser un pays lié aux opérations militaires françaises au Sahel. D'abord Serval, puis Barkhane. Aqmi les appelle à « se retirer de cette alliance satanique », sans quoi « les jihadistes les viseront jusque dans leurs repaires les plus fortifiés », menace l'organisation.

Le communiqué présente aussi l'attentat de Grand-Bassam comme « une vengeance » pour « nos frères récemment tués par la France ». Allusion sans doute à l'élimination, par les forces spéciales françaises, d'Abou al-Nour al-Andalusi, émir de la zone saharienne d'Aqmi. Le groupe terroriste évoque également la remise de prisonniers au Mali par la Côte d'Ivoire, en référence à l'extradition par Abidjan de sept jihadistes soupçonnés d'avoir participé aux attaques de Misseni et Fakola, sur la frontière ivoiro-malienne l'été dernier.

Plus généralement, cette attaque serait aussi, selon al-Qaïda, une réponse aux actes occidentaux en « Palestine, Afghanistan, Irak, Syrie, Yémen, Somalie, Libye, Mali et Centrafrique ». Enfin, Aqmi demande aux musulmans de s'éloigner des endroits fréquentés par les Occidentaux, pour ne pas être touchés lors d'une prochaine attaque. Quant aux trois tueurs, deux sont présentés comme des Peuls, le troisième comme « ansar », c'est-à-dire un local, peut-être Ivoirien.

 

Attaque à Grand-Bassam: Ouattara annonce une série de mesures sécuritaires

Alassane Ouattara, avant son discours au palais présidentiel d'Abidjan, le 14 mars, au lendemain de l'attaque meurtrière qui a frappé la station balnéaire de Grand-Bassam.
© SIA-KAMBOU / AFP

Par RFI Publié le 14-03-2016 Modifié le 15-03-2016 à 09:52

La Côte d'Ivoire est toujours sous le choc, après l’attaque, dimanche 13 mars, survenue dans la station balnéaire de Grand-Bassam, qui a fait au moins 18 morts et plusieurs dizaines de blessés, selon le dernier bilan officiel. L’attaque a été revendiquée par al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). Les autorités ont annoncé une série de mesures pour renforcer la sécurité sur l'ensemble du territoire après la réunion, ce lundi 14 mars à Abidjan, du Conseil national de sécurité suivie d’un Conseil des ministres extraordinaire.

A l’issue de ces réunions d’urgence, le ministre de l'Intérieur s'est exprimé pour annoncer certaines mesures nationales sur le renforcement de la sécurité. C’est sur le perron du palais présidentiel, entouré de tout le gouvernement, que le patron de la Sécurité intérieure, Hamed Bakayoko, a lu un communiqué au sortir du Conseil des ministres extraordinaire. Aux côtés du chef de la police ivoirienne, se trouvait le président Alassane Ouattara, silencieux et la mine grave, de circonstance.

Le ministre Bakayoko a annoncé un nouveau bilan faisant état de 18 victimes au total, dont 15 civils et 3 forces spéciales. L’un des militaires qui a donné l’assaut, dimanche après-midi, contre les jihadistes est en effet décédé, cette nuit, des suites de ses blessures.

→ A (re)lire : Côte d'Ivoire: une attaque revendiquée par Aqmi frappe Grand-Bassam

Nouveau bilan également concernant le nombre de terroristes abattus. Ils sont trois à avoir été tués et non plus six, comme annoncé dimanche soir. Il s’agirait d’une erreur d’appréciation, semble-t-il, liée à la confusion qui régnait à Grand-Bassam.

« Hier évidemment, sur le théâtre des opérations, dans le feu de l’action, un certain nombre d’informations ont été données mais après, nous avons fait des recoupements et regardé exactement les personnes décédées et identifiées à la morgue. C’est sur cette base-là que nous donnons le chiffre exact. Il y a trois terroristes qui ont été tués dont les corps sont à la morgue », a affirmé le ministre de l’Intérieur.

Annonce également concernant le plan national de lutte anti-terroriste qui est passé au niveau d’alerte rouge. Ainsi, les lieux dits sensibles comme les écoles, les hôtels, les ambassades ou les grands commerces vont voir aussi leur sécurité renforcée. Trois jours de deuil national ont par ailleurs été décrétés à compter de ce lundi.

Le président ivoirien Alassane Ouattara (5e à gauche) a tenu une minute de silence, au cours d'une réunion spéciale de son cabinet, le 14 mars 2016, au lendemain de l'attaque de Grand-Bassam. © SIA KAMBOU / AFP

Ouattara veut rassurer les Ivoiriens

Après l'attaque, la colère des Ivoiriens
15-03-2016 - Par Isidore Kouadio

Le président Ouattara s'est adressé ce lundi soir à la nation par le biais d’un message lu à la télévision nationale. « La Côte d'Ivoire ne se laissera pas intimider par des terroristes », a affirmé lundi le président ivoirien. « Nous ne permettrons pas que des terroristes freinent notre marche vers l'émergence » économique, a poursuivi M. Ouattara dans une déclaration radiotélévisée, soulignant que le pays aller « continuer » sa « collaboration » avec ses partenaires régionaux, continentaux et internationaux « afin de renforcer (la) coopération pour combattre ces terroristes ».

→ Lire aussi : Attaque de Grand-Bassam: le plan de lutte anti-terrorisme renforcé

Au niveau national, le président ivoirien a annoncé le renforcement de la sécurité dans tout le pays, notamment sur la côte et aux frontières. « Nous mettons tout en oeuvre afin d'assurer la sécurité de tous les Ivoiriens et de tous ceux qui vivent sur notre territoire », a-t-il assuré, demandant « à toutes et à tous de ne pas céder à la peur ». « Nos forces contrôlent la situation et la sécurité est assurée sur toute l'étendue du territoire national », a promis le président ivoirien. Un peu plus tôt dans la journée, les autorités avaient annoncé le renforcement des mesures de sécurité dans les lieux sensibles ou stratégiques recevant du public, comme les écoles, les hôtels et les ambassades.

La Côte d'Ivoire est une grande nation. Face à ces actes, le peuple ivoirien uni ne se laissera pas intimider.
Alassane Ouattara, président de la Côte d'Ivoire
14-03-2016 - Par RFI

Une intervention saluée par la classe politique ivoirienne

La classe politique et l'ensemble des responsables religieux du pays ont unanimement condamné l'attaque de dimanche. Joël N'Guessan, porte-parole du RDR (Rassemblement des républicains de Côte d'Ivoire), de la majorité, a salué l'intervention du président ivoirien qui a selon lui « rassuré » les Ivoiriens. « Nous sommes fiers, nous sommes mobilisés, [...] nous n'allons jamais nous plier face au terrorisme », a-t-il clamé au micro de RFI. Le secrétaire exécutif du PDCI (Parti démocratique de Côte d'Ivoire), Maurice Kakou Guikahué, a quant à lui estimé qu'Alassane Ouattara avait trouvé les bons mots. « On retient la fermeté et la promptitude du président et sa volonté de protéger le peuple ivoirier », commente-t-il. Pour lui, cette attaque est « un tournant », qui prouve que la Côte d'Ivoire n'est « pas à l'abri » du terrorisme. Il appelle les Ivoiriens à être désormais « plus vigilants ».

Le président Alassane Ouattara a également reçu le premier responsable du Front populaire ivoirien (FPI), parti d'opposition, pendant une trentaine de minutes pour évoquer le drame. Pascal Affi N’Guessan en avait fait la demande. Il s'était préalablement rendu sur les lieux du drame et a manifesté son entière solidarité envers le gouvernement dans la lutte contre le terrorisme.

→ Le point sur l'enquête de l'attaque de dimanche

« C’est la première fois que la Côte d’Ivoire subit une telle agression. C’est le pays qui est attaqué. Ce sont des Ivoiriens, des amis de la Côte d’Ivoire qui ont été massacrés. C’était important qu’en tant que premier responsable du Front populaire ivoirien, j’apporte ma solidarité et de la compassion aux familles de toutes les victimes mais aussi que nous manifestions, au gouvernement notre disponibilité pour engager, ensemble, la lutte contre cette menace terroriste et que, par cette rencontre avec le chef de l’Etat, nous puissions dire à la face du monde que le peuple de Côte d’Ivoire reste mobilisé et debout pour faire face à toute sorte d’agression », a-t-il déclaré à RFI.

Il rappelle également que le FPI témoigne son appui au gouvernement « dans toutes les initiatives qu’il compte prendre pour assurer la sécurité des personnes et la sécurité des institutions de la République », a souligné Pascal Affi N’Guessan. Il insiste néanmoins sur le fait que la réponse ne doit pas être uniquement sécuritaire. Il faut « aussi avoir une réponse politique, une réponse économique et une réponse sociale, parce que nous considérons que ce sont les meilleures garanties contre le terrorisme. »

Ce mardi, le président recevra, dans la matinée, le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault et le ministre français de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve qui iront spécialement à Abidjan. Une visite d’autant plus importante que l’on sait désormais que le bilan s’est alourdi, côté français, avec quatre décès.