Justice et Paix

" Je suis homme, l'injustice envers d'autres hommes révolte mon coeur. Je suis homme, l'oppression indigne ma nature. Je suis homme, les cruautés contre un si grand nombre de mes semblables ne m'inspirent que de l'horreur. Je suis homme et ce que je voudrais que l'on fit pour me rendre la liberté, l'honneur, les liens sacrés de la famille, je veux le faire pour rendre aux fils de ces peuples l'honneur, la liberté, la dignité. " (Cardinal Lavigerie, Conférence sur l'esclavage africain, Rome, église du Gesù)

 

NOS ENGAGEMENTS POUR LA JUSTICE T LA PAIX
S'EXPRIMENT DE DIFFÉRENTES MANIÈRES :

En vivant proches des pauvres, partageant leur vie.
Dans les lieux de fractures sociales où la dignité n'est pas respectée.
Dans les communautés de base où chaque personne est responsable et travaille pour le bien commun.
Dans les forums internationaux pour que les décisions prises ne laissent personne en marge.

Dans cette rubrique, nous aborderons différents engagements des Missionnaires d'Afrique, en particulier notre présence auprès des enfants de la rue à Ouagadougou et la défense du monde paysan.

 

L'Egypte prend désormais à bras le corps
l'émigration clandestine

 
media Bateau transportant des migrants intercepté par la marine égyptienne, port de Rosetta, septembre 2016. AFP

L’Egypte a commencé à appliquer des mesures draconiennes pour lutter contre l’émigration clandestine. Cinq passeurs viennent d’être condamnés à la prison à perpétuité par la cour d’assises d’Alexandrie. Des peines sans précèdent. Par le passé, ces dernières ne dépassaient pas les sept ans de prison.

De notre correspondant au Caire,

Aujourd’hui, l’accusation pour les passeurs en Egypte comprend le trafic d’êtres humains et la mise en danger de la vie d’autrui. Un durcissement des peines visant à les dissuader d’utiliser l’Egypte comme point de départ vers l’Europe.

Le phénomène avait commencé à prendre des dimensions alarmantes depuis 2011, après les désordres politiques qui ont suivi le soulèvement contre l’ex-président Hosni Moubarak et l’insécurité en Libye.

En plus des Egyptiens qui cherchaient à rejoindre « l’Eldorado européen », des milliers de personnes venues de la Corne de l’Afrique et du sud du Sahara affluaient vers l’Egypte.

Modernisation et achats

Une situation jugée dangereuse pour la sécurité du pays après l’arrivée au pouvoir en 2014 du président Abdel Fattah al-Sissi. Aussi, des mesures concrètes sont désormais prises pour lutter contre l’émigration clandestine.

La marine égyptienne a intensifié ses patrouilles le long des 1 000 kilomètres de côtes méditerranéennes. Ses moyens ont été renforcés grâce à l’achat de bâtiments de France, d’Allemagne et des Etats-Unis, parallèlement à la modernisation du vieux matériel russe.

L’aviation a augmenté les avions et hélicoptères de reconnaissance aérienne au-dessus des eaux territoriales. La police, soutenue par l’armée, s’est attaquée aux fiefs des passeurs et contrebandiers sur les grands lacs de la côte égyptienne.

Coopération avec l'Europe

Les efforts ont drastiquement réduit l’émigration clandestine, sans pour autant l’éradiquer. En 2017, les garde-côtes ont empêché 239 tentatives d’émigration, qui comptaient plus de 6 000 clandestins égyptiens, syriens mais aussi d’Afrique de l’Est et subsaharienne.

Il y a une coopération avec les pays du nord de la Méditerranée dans ce domaine. La chancelière allemande Angela Merkel a accordé à l’Egypte une aide de 500 millions d’euros pour faire face à l’émigration clandestine. Des accords de coopération ont aussi été conclus avec la France et la Grèce.

Et les relations, qui étaient tendues entre l’Italie et l’Egypte après le meurtre au Caire du doctorant Giulio Regeni début 2016, ont été normalisées en 2017 grâce notamment à la coopération des deux pays dans la lutte contre l’émigration clandestine jugée vitale par Rome.

Drame migratoire en Egypte : 56 personnes condamnées

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Des survivants du bateau ayant fait naufrage en septembre 2016 au large de Rosette. MOHAMED EL-SHAHED / AFP


En Egypte, le tribunal correctionnel de Rosette a infligé des peines allant jusqu'à 14 années de prison à 56 personnes jugées coupables d'avoir provoqué la pire catastrophe maritime de l'histoire de l'émigration clandestine égyptienne. En septembre 2016, un bateau transportant plus de 400 émigrés clandestins vers l'Europe avait chaviré au large de Rosette en Méditerranée.

Avec notre correspondant au Caire,  Alexandre Buccianti

Pour les familles des victimes, les peines infligées sont trop faibles. On estime à près de 200 le nombre de disparus dans le naufrage. Il s’agissait majoritairement d’Egyptiens et d’Africains avec parfois des familles entières et des dizaines de mineurs. Les survivants ont raconté que les passeurs leur avaient conseillé de jeter leurs papiers en Italie et de prétendre qu'ils étaient Syriens ou du Darfour.

L'Egypte est devenue un point de départ de l'émigration clandestine vers l'Europe à cause des violences que connaît la Libye et du fait des failles sécuritaires en Egypte qui ont suivi la chute de l'ex-président Hosni Moubarak. En 2010, les autorités avaient empêché 500 personnes d'émigrer clandestinement ; l'année dernière plus de 5 000. Ceux qui sont passés sont probablement dix fois plus nombreux. Plusieurs pays européens, dont la France, l'Italie et l'Allemagne, coopèrent avec l'Egypte pour tenter de juguler le phénomène.

Alors la réponse judiciaire peut-elle dissuader les réseaux criminels qui organisent les dangereuses traversées de la Méditerranée ? Oui, en partie, estime Amnesty International.

C'est une réponse que les Etats doivent apporter, mais ce n'est pas la seule réponse car si le trafic de migrants se développe, c'est parce qu'il y a un problème en amont, à savoir la possibilité ou l'insuffisance patente de voies légales permettant à ces réfugiés avec l'aide des Etats de trouver un abri.
                                  Jean-François Dubost Responsable du Programme Protection des populations

Mali : les grèves se poursuivent
dans le secteur de l’Education

Des adolescentes dans une salle de classe à Bamako. (Photo d'illustration)
© Getty Images/The Image Bank/CommerceandCultureAgency
 

Au Mali, la crainte d’une année blanche pour les écoliers se fait de plus en plus sentir. Les vacances de fin d'année sont terminées mais les enseignants du primaire et du secondaire des établissements publics ont lancé un nouveau préavis de grève, en ce début d’année. Un appel au boycott des cours pour faire pression sur le gouvernement accusé de « ne pas tenir ses engagements ».

Depuis neuf mois, les cours dans l’enseignement public, primaire et secondaire riment avec grèves des enseignants maliens. Selon leur propre décompte, ils ont, au total pendant cette période, boycotté pendant trois mois les cours afin d’obtenir gain de cause.

« Nous avons décidé de durcir le ton parce que le gouvernement n’a pas respecté ses engagements. L’État malien n’accorde aucun intérêt à l’école publique. Aujourd’hui, nous sommes engagés, mobilisés partout dans le pays pour que l’État malien puisse honorer ses engagements afin d’adopter le statut du personnel enseignant de l’enseignement fondamental secondaire préscolaire », explique à RFI Adama Fomba, porte-parole des six syndicats de l’Enseignement qui lancent un nouveau mot d’ordre de grève.

 

L’adoption de ce nouveau statut des enseignants va coûter 5 milliards de francs CFA par an à l’État. Or, dit-on, il n’y a pas de «cagnotte». Pour soutenir les enseignants grévistes du public, l’Association des élèves et étudiants du Mali (AEEM) vient de provoquer une grève de 72 heures dans les écoles privées qui fonctionnent normalement. Au Mali, le spectre de l’année blanche plane, encore une fois, sur la tête des élèves des écoles publiques.

 

Dadone

La soeur Lucienne Dadone, qui a fêté en 2010 ses 50 ans d'engament missionnaire à Boulsa,

(photo prise ce jour là) au Burkina Faso,

a envoyé sa "lettre aux partenaires" à l'occasion de Noël 2017.

La soeur Lucienne est présentement à Montpellier depuis déjà quelques annéees,

même si elle va régulièrement au Burkina.

(lire la suite)

 

 

[Reportage] Algérie: à Oran,
les départs vers l’Europe continuent à augmenter

media Vue aérienne de la ville d'Oran.Wikipedia
 

En Algérie, des milliers de personnes ont quitté le pays sur des canots pneumatiques vers l’Europe cette année. Le nombre de harragas arrêtés par les forces de l’ordre a été multiplié par trois. A Oran, le point le plus proche de la côte espagnole, des centaines de jeunes de la ville ont pris la mer depuis le début de l’année.

De notre correspondante à Alger,

L’un des points de départ est à l’est de la ville d’Oran. La mer est juste de l’autre côté de la colline. D’ici, beaucoup de jeunes sont partis en Espagne pendant l’année. « Ils disent qu’on ne veut pas travailler. Où est le travail ? J’ai demandé un boulot dans un chantier, alors que ce n’est pas ce que j’ai étudié, mais même là ils ont refusé de m’embaucher, regrette Samir. Il n’y a pas de place. J’ai déposé mon CV dans une usine de brique, mais visiblement ils ont utilisé mon CV pour emballer les cacahuètes. C’est pour ça qu’on n’a pas de raison de rester ici. La solution c’est l’Europe. »

Samir, 23 ans, pense la même chose : « Les gens vont en Espagne juste pour entrer en Europe. Si la France était plus proche, ils iraient en France. Tous les jeunes du quartier, ils sont en Allemagne maintenant. »

Ceux qui sont partis cette année mettent en avant les conditions de vie qui se détériorent, et un malaise dans la société algérienne. Houari, 27 ans, a pris la mer trois fois. A chaque tentative, il a été arrêté, par les Algériens ou par les Espagnols.

Oran, une immense salle d’attente

« Cette année, ce n’est pas comme l’année dernière. Les gens du pays, au fond de leur cœur, ont décidé qu’ils veulent partir. Les gens sont fatigués, témoigne Houari. Tu demandes dans les autres quartiers si quelqu’un est parti, et c’est comme ça qu’on te met en contact. Tu vas acheter ton gilet, ton moteur, le GPS, la boussole, l’essence. Tu remplis le moteur et puis il faut trouver un guide. Des guides, il y en a beaucoup. »

Houari vit dans le quartier d’Oran surnommé Petit-Lac. Ici, les habitants racontent en riant qu’ils vivent dans une immense salle d’attente, qu’il n’y a rien à faire. Redouane, l’un des amis de Houari, a vu de nombreux voisins partir. « Dans mon quartier, il y en a qui sont morts, d’autres ont disparu, d’autres ne sont jamais revenus. C’est un deuil. Tout le quartier reste endeuillé plusieurs années. Mais ce deuil n’empêche pas les départs, car la situation ici est exécrable », explique Redouane.

« Mieux vaut être mangé par les poissons que par les vers »

Au-delà des conditions socio-économiques, d’autres facteurs renforcent la migration des Algériens. D’abord, le fait que le passage soit de plus en plus simple. De plus, tout le monde connaît désormais quelqu’un qui a réussi à entrer en Europe. « La plupart des jeunes de notre quartier sont partis. Mes amis et mes voisins sont partis en bateau. Tu payes ta place, tu attends que la météo se calme pendant trois jours et tu pries Dieu, la boussole et le GPS. Mon père veut partir en Europe. Il n’y a pas que les jeunes », raconte Enzo, 23 ans.

« On dit qu’il vaut mieux être mangé par les poissons que par les vers, témoigne Nabil, son ami. C’est mieux de partir, peut-être que Dieu décidera que tu peux avoir une meilleure vie là-bas. On a un beau pays, mais on a trop de voleurs. »

La chaîne Canal+ a-t-elle censuré
un reportage sur l'opposition à Gnassingbé?

Le propriétaire de Canal+, Vincent Bolloré, entretiendrait d'excellents rapports avec le président du Togo, Faure Gnassingbé.
© ERIC PIERMONT / AFP
 

En France, le numéro deux de Canal+ International a-t-il été évincé suite à un reportage sur le Togo ? C’est ce qu’avance le site d’informations français Les Jours. Au sein de la chaîne cryptée, certains s’interrogent sur la concomitance de deux évènements : la récente éviction de François Deplanck, le numéro deux de Canal+ International et la diffusion en novembre dernier d’un sujet sur les manifestations de l’opposition au Togo. Et ce alors que le groupe de Vincent Bolloré, l’actuel patron de Canal+, a réalisé en 2017 plus de 5 milliards de chiffre d’affaires.

L’histoire pourrait prêter à sourire si elle n’évoquait pas un cas probable de censure. Le 15 octobre dernier, la chaine cryptée diffuse en France un reportage sur les manifestations de l’opposition togolaise contre le président Faure Gnassingbé.

Mais rapidement, « il y a eu des instructions en interne à Canal+ de l’enlever du replay Canal, de l’enlever de la chaine YouTube de L’Effet papillon pour que plus personne ne puisse le visionner, c’est totalement inhabituel, c’est un véritable cas de censure », explique Jean Baptise Rivoire, rédacteur en chef à Canal+ et élu du personnel au comité d’entreprise et membre du bureau de la société des journalistes de la chaîne cryptée.

La raison : la direction n’a pas apprécié que le reportage critique Faure Gnassingbé, un président avec qui Vincent Bolloré, le propriétaire du groupe Canal+, entretient d’excellents rapports. C’est notamment lui qui lui a accordé en 2010 la concession du port de Lomé pour 35 ans.

Dans l’entourage de Faure Gnassingbé, on reconnait s’être ému de ce reportage qu’on ne trouvait « ni objectif, ni professionnel ». Un reportage qui malgré les consignes passées en interne va se retrouver une nouvelle fois à l’antenne au mois de novembre, cette fois sur Canal+ Afrique.

Quelques jours plus tard, une programmatrice de la chaîne et François Deplanck, numéro de deux de Canal+ International, sont débarqués, tout sauf un hasard pour Jean-Baptiste Rivoire qui se souvient d’une phrase prononcée le 23 novembre dernier en comité d’entreprise. « La direction a lâché une phrase lourde de sens puisqu’elle a dit "ce n’est pas très adroit d’attaquer un chef d’État africain quand on veut faire du business avec lui" donc tout était dit », déplore le journaliste.

Des accusations graves auxquelles la direction de Canal+ n’a pas réagi, et ce malgré nos demandes répétées d’interview. Reporters sans frontières appelle le comité d'éthique de Canal+ à se saisir de ce « cas de censure », selon les mots utilisés par l'ONG.