Guinée: des opposants politiques dans le collimateur de la justice

Un policier dans une rue de Conakry après des affrontements avec des manifestants le 24 octobre 2020.

Un policier dans une rue de Conakry après des affrontements avec des manifestants le 24 octobre 2020.
 RFI/Carol Valade

Texte par :
RFISuivre
3 mn

À Conakry, le procureur de la République du tribunal de Dixinn a fait le point, mardi soir, sur les procédures en cours après les violences post-électorales qui ont suivi la présidentielle du 18 octobre. Des violences qui ont fait une vingtaine de morts, dont des membres des forces de l’ordre, selon le gouvernement. L’opposition guinéenne a recensé, elle, 46 civils tués lors de ces violences. 

Avec notre correspondant à ConakryCarol Valade

Dans un message lu à la télévision nationale, mardi soir, le procureur de la République près du tribunal de première instance de Dixinn a annoncé que plusieurs personnalités de l’opposition et de la société civile étaient « activement recherchées » dans le cadre d’une commission rogatoire. Le ton était incisif, presque menaçant, lorsque le Sidi Souleymane Ndiaye a fait cette mise au point, annonçant d’abord une « information judiciaire pour détention et usage d’armes légères et de guerre » qui a donné lieu à des perquisitions. Selon le procureur, « 78 personnes ont été présentées au juge » et des armes ont été saisies.

D’autres individus sont donc désormais recherchés. Et le procureur a cité les noms de hauts cadres de l’UFDG, le principal parti d’opposition. Mais aussi de l’un des leaders du Front national de défense de la Constitution, Sékou Koundouno, figure de la société civile. Ce dernier est issu de la cellule guinéenne du Balai citoyen. Ces personnes ont, selon le procureur, « proféré des menaces de nature à troubler la sécurité et l’ordre public ».

Cette année, plusieurs membres du FNDC ont été condamnés à de la prison ferme pour des faits similaires. Plusieurs figures du FNDC ou de l’UFDG sont actuellement sous les barreaux. Signe du climat délétère, alors que la déclaration était retransmise en direct sur les réseaux sociaux, ce fut une pluie d’insultes à caractère ethnique qui a déferlé dans les commentaires.

« Nous répondrons devant n’importe quelle autorité »

Les personnes mises en cause n’ont pas tardé à réagir, que ce soit dans la presse ou via des communiqués. Ousmane Gaoual Diallo, conseillé politique et chargé de la communication de l’UFDG, s’étonne de n‘avoir reçu aucune convocation. « Il parle comme si nous étions des fugitifs, dit-il. Nous sommes ici et nous répondrons devant n’importe quelle autorité. »

« On me recherche activement, mais je suis chez moi à Conakry », renchérit Chérif Bah, le vice-président de l’UFDG. « Le tyran a décidé de décapiter mon parti », écrit Cellou Dalein Diallo sur sa page Facebook. Il accuse les forces de l’ordre d’avoir tué 48 personnes depuis le jour du scrutin. « Le procureur devrait plutôt trouver les assassins [...] des sympathisants du FNDC », affirme Sékou Koundouno, dont le domicile a fait l’objet d’une descente de police ce matin. « Ils ont tout mis à sac, dit-il, et menacé ma famille. »

Dans un communiqué, le FNDC dénonce une « chasse aux opposants » visant à « éliminer toutes les voix dissidentes ».