Égypte ancienne : Néfertiti et Akhenaton enfin photographiés !

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Mis à jour le 27 février 2021 à 16h39
Portraits de Néfertiti et Akhenaton par Bas Uterwijk

Portraits de Néfertiti et Akhenaton par Bas Uterwijk © © Bas Uterwijk

Le photographe Bas Uterwijk a tenté de reconstituer les visages d’Akhenaton et de Néfertiti, roi et reine de l’Égypte ancienne. Des portraits modernes bluffants, réalisés grâce à l’intelligence artificielle.

À la fin de la XVIIIème dynastie, Akhenaton et Néfertiti étaient roi et reine d’Égypte. D’eux, on ne sait pas grand chose. Une célèbre statuette représentant le couple, datant du XIVème siècle avant Jésus Christ, avait été découverte lors de fouilles à Tell el-Amarna en 1912. L’objet est magnifique, extraordinairement bien conservé, la peinture a résisté au temps et dévoile des parures multicolores.

D’ailleurs, la reine fut dès lors baptisée « reine colorée ». On la surnomme aussi « La belle est venue », traduction littérale de Néfertiti. Mais à quoi ressemblait-elle vraiment ? La question n’a cessé de hanter les scientifiques, les égyptologues, les amateurs d’art et les touristes visitant le Louvre, où le précieux buste de calcaire des époux est conservé. Jusqu’à ce qu’arrive une potentielle réponse, celle de l’artiste néerlandais Bas Uterwijk.

Intelligence artificielle

L’homme est photographe et s’illustre dans le portrait. Son compte Instagram regorge de visages qui nous sont familiers, sans forcément comprendre pourquoi au premier coup d’oeil. L’un fait étrangement penser à la Jeune fille à la perle de Vermeer, l’autre a la grâce de la Venus de Botticelli, un troisième a le regard et la rousseur de Vincent Van Gogh. Ils ont les traits communs de quelqu’un que l’on croise dans la rue, dont on sait qu’on l’a déjà vu quelque part.

En réalité, ils sont fraîchement extraits de célèbres œuvres d’art, grâce à un logiciel appelé « GAN » (generative adversarial network). Une forme d’intelligence artificielle qui permet d’analyser des portraits depuis divers supports (peinture, sculpture, gravure) et de transférer les données vers une interprétation photographique actuelle. « La méthode que j’utilise est souvent considérée comme scientifique, à cause de l’aspect très réaliste du rendu. Mais la plupart de mes portraits sont en réalité basés sur mes impressions et sont donc subjectives », avertit Bas Uterwijk.

Le 19 février dernier, l’artiste postait deux visages, crâne dénudé : celui d’Akhenaton et de Néfertiti. Comme sur la statuette, la reine a le teint plus clair que son époux, et elle est d’une beauté saisissante. Elle a les yeux bridés, le regard profond, l’arcade sourcilière parfaitement alignée, et une paire d’oreilles relativement grandes ! L’artiste a fait en sorte d’offrir un rendu plausible, tout en laissant transparaître sa vision.

« La plupart des travaux artistiques autour d’Akhenaton et de sa reine les font ressembler à des Nubiens ou du moins à des personnes de type subsaharien », estime-t-il. Les deux figures sont dépourvues de coiffes, pourtant présentes dans les représentations antiques. L’explication ? L’intelligence artificielle ne les reconnaît pas, explique le photographe, qui a donc choisi de les représenter sans cheveux. « J’ai lu qu’il s’agissait d’une pratique commune à cette époque. »

Photographier l’histoire

Mais pourquoi transformer une œuvre historique en photographie pseudo-réelle ? Bas Uterwijk n’est pas le seul à se lancer dans cette expérimentation, l’artiste Daniel Voshart a récemment proposé quelque chose de similaire avec le « Roman Emperor Project ». Dans cette série, il reproduit une sorte d’arbre généalogique d’empereurs romains dont les traits dessinés ont été mués en photographies d’identité.

Sur les réseaux sociaux, les travaux de Bas Uterwijk ont fait polémique. Ses détracteurs lui reprochent de s’attribuer une vérité qu’il ne possède pas. « Les gens se sentent parfois atteints lorsqu’on réinterprète leur héritage ou leur culture », rétorque-t-il.

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JE VOULAIS ESSAYER DE CAPTER LE CHARISME NÉFERTITI ET AKHENATON, QUE L’ON DEVINE DANS LES OEUVRES ANTIQUES »

Il faut dire que cette expérience contraste avec les us et coutumes artistiques… Depuis la nuit des temps, c’est le réel que l’on transforme en peinture, en sculpture, en gravure. Parfois même, « on utilise un cliché pour en faire une peinture », souligne le photographe.

Bas Uterwijk a voulu faire le chemin inverse, et tenter de capturer l’expression de personnalités nées bien avant l’invention de l’appareil photo, son outil de travail quotidien. « Pour moi, c’est une façon de photographier l’histoire, confie-t-il. Néfertiti et Akhenaton étaient un couple fascinant. Je voulais essayer de capter le charisme qu’on leur devine dans les oeuvres antiques. »