Mali : six mois après, quel espoir de libération pour Olivier Dubois ?

Mis à jour le 8 octobre 2021 à 13:13


Manifestation de soutien à Olivier Dubois, le 8 juin 2021, à Paris © SEVGI/SIPA

Alors que le ton monte entre Paris et Bamako, certains s’inquiètent de possibles répercussions sur les négociations en vue de la libération du journaliste français, otage des jihadistes.

C’est sur le terrain qu’il aimait donner à voir et à entendre. C’est aussi là qu’il se sentait le mieux. Comme lors de chacun de ses déplacements, juste avant de se rendre à Gao où il a été enlevé le 8 avril, Olivier Dubois a laissé un protocole de sécurité à Déborah Al Hawi Al Masri, son épouse. Il lui demandait d’alerter les autorités si elle n’avait pas de ses nouvelles au plus tard le 10 avril à 17h. Il était prudent, mais n’aurait jamais imaginé voir un jour son nom inscrit sur la liste des Français pris en otage à l’étranger.

Voilà maintenant six mois que ce journaliste hyperactif, collaborateur notamment de Jeune Afrique, est otage, laissant sa compagne et ses deux enfants dans un état d’angoisse… mais aussi d’espoir. L’espoir de le voir un jour revenir et reprendre le cours de sa vie.

« Je ne suis informée de rien »

À l’annonce de son enlèvement, un comité de soutien baptisé #FreeOlivierDubois s’est très vite constitué, et multiplie depuis les actions à Paris comme à Bamako. Surtout, ne pas oublier Olivier Dubois, alors même que de nombreuses interrogations demeurent. Où se trouve-t-il ? Comment se porte-t-il ? Comment les États français et maliens œuvrent-ils pour qu’il soit libéré le plus vite possible ? Les questions fusent dans la tête de ses proches, sans réponse. Ils affirment ne rien savoir d’éventuelles négociations. « Je ne suis informée de rien, confie sa compagne. Je ne sais pas si des discussions ont été entamées parce que le Mali et la France travaillent dans une totale discrétion. »

Les jours passant, cette mère de famille éprouve une certaine frustration et un sentiment d’impuissance. Mais elle veille à ne pas laisser leurs enfants dans l’ignorance : « Olivier est omniprésent dans nos pensées et sa situation n’est pas un tabou. On en parle régulièrement. Je préfère leur répondre plutôt que d’engendrer des angoisses chez eux ». Le dernier message de leur père date du 5 mai, c’est une courte vidéo de 20 secondes. Habillé en tunique traditionnelle avec une barbe de trois jours, l’otage confirmait son enlèvement à Gao, par le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM), la nébuleuse sahélienne d’Al Qaïda dirigée par le Malien Iyad Ag Ghaly.

Le 29 septembre dernier, le journaliste Wassim Nasr, spécialiste des réseaux jihadistes, a affirmé avoir été en contact avec une source « propre » du GSIM. Contrairement au scenario avancé jusqu’alors, celle-ci affirme qu’Olivier Dubois n’a pas été attiré dans un piège ou « trompé » et que son cas « peut être ouvert à la discussion ».

Crispation

Si c’est le cas, la France – qui a officiellement pour doctrine de ne pas négocier avec les terroristes – accepterait-elle d’ouvrir des négociations ? La récente crispation des relations entre Paris et Bamako va-t-elle entraver l’avancée du dossier du seul otage français au monde ? « Je n’ai pas de craintes par rapport à la situation d’Olivier parce que les deux États m’ont affirmé qu’il est une priorité, veut croire Déborah Al Hawi Al Masri. Les problèmes géopolitiques ne seront pas un frein. » 

Depuis la fin septembre, le ton est monté d’un cran entre les deux pays. Paris n’apprécie guère que Bamako ait entamé des discussions avec des sociétés de sécurité russes de la nébuleuse Wagner. Et Emmanuel Macron a vivement réagi aux propos du Premier ministre malien, Choguel Maïga, qui a qualifié « d’abandon » le retrait progressif des troupes de Barkhane dans le nord du Mali.

Journaliste indépendant et spécialiste des questions de sécurité, Walid Ag Menani estime toutefois que ce changement de dispositif militaire n’aura pas de réel impact sur le dossier Dubois. Selon lui, cela ne veut pas nécessairement dire que la sécurité et la libération du journaliste seront compromises. « Sophie Pétronin [enlevée à Gao en 2016 et libérée en octobre 2020] a été arrêté dans une ville où des soldats français étaient présents et elle a été libérée à quelques kilomètres d’une base de l’armée française », rappelle-il. Autrement dit, la présence des troupes françaises dans la zone n’a pas empêché ce rapt.

« Il est très compliqué de tirer des conclusions, nuance Marc de Boni, membre du comité de soutien à Olivier Dubois. Il est certain que cette crispation est un facteur d’angoisse pour tous. Mais Quand Sophie Petronin a été libérée, les relations entre la France et le Mali n’étaient pas au beau fixe non plus. » Six mois après l’enlèvement d’Olivier Dubois, l’espoir est toujours aussi grand.