Signes d’espoir dans
une population souffrante

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Connu jadis comme pays de paix et de fraternité, le Mali vit aujourd’hui une situation malheureuse où son passé glorieux s’écroule.

Depuis 2012, le Mali subit une série de violences incessantes, lourdes et destructrices qui obligent son économie fragile et sa jeune démocratie
à s’incliner face à l’instabilité menaçante. Ces violences sont les fruit toxiques des multiples conflits armés qui ont lieu un peu partout sur le
territoire malien, et même au-delà. Selon certains experts, ces conflits ont pris l’ampleur actuelle à cause de la crise politique de 2012. D’autres
analystes politologues estiment, au contraire, que ces conflits sont lescauses directes de cette crise-là.
Quoi qu’il en soit, le fait est que cette crise politique a bouleversé le climat politique comme le prouve l’élection présidentielle d’avril de cette année-là. Le sommet de cette crise fut le renversement du processus électoral avec le coup d’Etat du général Amadou Haya Sanogo et de ses partisans. Pour l’opinion publique, ce renversement du processus électoral fut la véritable fissure d’où ont jailli, de façon explosive, les opérations des groupes armés qui, jusque-là, utilisaient d’autres voies plus passives. Le plus important parmi ces groupes est le Mouvement National de Libération de l’Azawad (MNLA). C’est le nouveau visage de la rébellion touarègue qui, depuis longtemps, lutte pour l’indépendance de l’Azawad (L’Azawad est le territoire désertique au nord du Mali peuplé par les Touaregs.). C’est à ce groupe géant que, selon certains analystes politologues, sont alliés d’autres groupes, tels les Salafistes et les Djihadistes desquels
naissent sans cesse d’autres groupes du même genre.

Ces différents groupes armés plongent le pays dans des conflits incessants et violents. Ils existent sous de multiples formes et portent de nombreux qualificatifs : intercommunautaires, interconfessionnels, ethniques, économiques, politiques, parmi d’autres. Peu importe leurs qualificatifs, ces conflits perturbent la vie quotidienne au Mali à tous les niveaux et jette la majorité de la population malienne dans la peur, la confusion et l’incertitude. Les conséquences sont multiples et graves ; il y a tant de pertes de vie et de bien matériel. La cohésion sociale est brisée faisant place à la colère, ainsi qu’à la haine et à la vengeance.
Petit à petit, la confiance mutuelle et la fraternité cèdent la place à la méfiance et au préjugé. Tout finit par déraciner la paix : la guerre règne. Le désespoir et la souffrance se sont désormais installés ! Jusqu’à quand et par quels moyens ces conflits finiront, on n’en sait rien. La guerre est loin d’être finie ; les souffrances demeurent !

Un seul désir : la paix.

Face à cette situation angoissante, une seule valeur est recherchée : le retour de la paix au Mali. Les plus touchés par ces conflits la désirent et la cherchent, comme on cherche le pain quotidien. Par ce qu’on vit, voit et entend, la paix vaux mieux que tout, en ce temps que nous vivons
au Mali

Nous, missionnaire d’Afrique, qui travaillons spécifiquement dans la région de Kayes, ce cri pour la paix de la population malienne en général, et dans notre région en particulier, retentit chaque jour à nos oreilles et dans nos cœurs, et nous secoue. Face aux groupes armés, auteurs de ces évènements malheureux, nous nous sentons toujours impuissants d’agir concrètement pour restaurer la paix immédiatement. Nous nous sentons également impuissants d’apporter de l’aide matérielle aux affectés afin de les soulager et de les réconforter.

Malgré tout cela, nous ne sommes jamais découragés d’apporter notre petite pierre pour la reconstruction de la paix. Fortement convaincus de la puissance de la prière, nous nous y mettons toujours, implorant la miséricorde de Dieu sur ses enfants. Nos messes dominicales et quotidiennes sont donc très souvent offertes pour la restauration de la paix au Mali et pour le soulagement de la population souffrante.
Régulière
ment, des groupes de militaires de religions diverses viennent nous demander de prier pour eux et de les bénir avant qu’ils ne partent en mission. Nous le faisons toujours avec tout le sérieux que cela requiert,
car nous croyons qu’en ce moment de guerre, notre rôle spirituel est de fortifier les esprits de ces hommes qui mettent leur vie en jeu pour protéger la population.

 

Toute l’Église est engagée...

Ce fait de la prière n’est pas uniquement le nôtre. L’Eglise du Mali en a fait un moyen indispensable pour la restauration de la paix dans le pays. Ainsi, à travers sa Commission liturgique, elle a formulé une prière nationale pour la paix au Mali à l’usage de chaque fidèle. C’est à nous, agents pastoraux, qu’est confiée la responsabilité de la diffuser et de sensibiliser les fidèles à la prier quotidiennement.

Dans notre communauté chrétienne, nous avons perdu des militaires chrétiens dans les attaques djihadistes, laissant leurs familles sans abris.
Quel message portons-nous aux veuves ? Par extension, quel message pouvons-nous donner aux survivants des villages saccagés par ces djihadistes ? Des fois, nous ne savons pas quoi dire si ce n’est que de leur adresser quelques mots d’encouragement afin de leur rendre l’espoir.

Nous prenons consciemment sur nous-mêmes la responsabilité d’être des « signes d’espoir » parmi la population souffrante. Nous nous voyons porteurs de l’espoir à travers notre qualité d’accueil, d’écoute et de proximité à la population.

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L’objectif est toujours de stimuler les gens à croire que tout n’est pas fini. Que Dieu reste toujours maître de l’univers et qu’il interviendra en son temps pour tout renouveler. Nous visitons aussi les autorités civiles, les leaders traditionnels et les responsables des institutions de sécurité pour soutenir et encourager les efforts qu’ils fournissent pour rebâtir la paix. A travers les rencontres personnelles nous essayons de faire comprendre aux gens que la lutte pour la paix doit toujours commencer par soi-même ; d’où la nécessité de la cohabitation pacifique sur place.
Quant à nos fidèles, notre message en ce moment de désarroi est celui de saint Jacques : « Prenez de très bon cœur, mes frères, toutes les épreuves par lesquelles vous passez, sachant que le test auquel votre foi est soumise produit de l’endurance... » (Jc 1, 2-3). Nous sommes convaincus que l’endurance aidera nos fidèles à être les « levains » d’espoir et de courage dans leur milieu de vie. Nos chrétiens sont donc appelés à être des « chemins nouveaux pour un Mali nouveau », comme le recommande la Conférence épiscopale du Mali. C’est dans ce cadre que, malgré les dangers des attaques, nous osons toujours parcourir de longues distances à la rencontre de nos fidèles pour célébrer avec eux l’Eucharistie, le signe parfait de l’espérance. Nous profitons aussi de ces quelques fidèles après une messe.

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Parmi ces fidèles, un militaire meurt lors d’une attaque djihadiste quelques mois après ces rencontres pour donner diverses formations adaptées pour la consolidation de leur foi chrétienne.

En collaboration avec l’Eglise locale, nous unissons nos efforts aux siens afin de rendre l’espoir à la population. C’est dans ce cadre que nous nous unissons à l’évêque du diocèse de Kayes et à tous les autres agents pastoraux, chaque année, lors des journées diocésaines pour formuler les thèmes appropriés pour mieux vivre l’année pastorale. La détérioration de la paix au Mali a fort influencé le thème de cette année.

 

Pour la construction de la paix.

Nous voulons donc vivre cette année en focalisant nos efforts sur la construction de la paix, de la justice, de l’unité par la cohabitation pacifique. Le thème est formulé ainsi : « Baptisés et envoyés, soyons des artisans de paix, de justice et d’unité dans le diocèse de Kayes ». Nous vivons ce thème à tous les niveaux dans les détails de la vie quotidienne, tels nos rencontres personnelles les uns avec les autres. En ce temps conflictuel et violent, nous sommes conscients de l’importance de chaque geste que nous posons, car nos gestes peuvent réconforter et soulager, ou accabler et détruire.

 

Cletus Atindaana

 

 
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