Côte d’Ivoire: ouverture du procès des disparus du Novotel d’Abidjan

Le 4 avril 2011, 4 hommes étaient enlevés à l'hôtel Novotel d'Abidjan.
© Jacques Yves Gucia / Accor
 

Dix personnes, dont huit militaires, comparaissent à partir de ce mardi devant la cour d'assises d'Abidjan à l'occasion du procès des « disparus du Novotel ». L’enlèvement et l’assassinat de quatre hommes, dont deux Français, avaient défrayé la chronique en 2011 en pleine crise postélectorale.

La plupart étaient militaires pendant la crise postélectorale. Tous étaient des fidèles de l’ancien président Laurent Gbagbo. Dix hommes sont attendus dans le box des accusés dont Bruno Dogbo Blé, alors patron redouté de la garde républicaine.

Les faits remontent au 4 avril 2011, alors que les combats sont violents. A Abidjan, un commando fait irruption dans le Novotel. Situé à 500 mètres de la présidence, l’hôtel est au cœur d’un des derniers bastions tenus par les forces de Laurent Gbagbo. A l’intérieur, une cinquantaine de personnes ont trouvé refuge dont des journalistes. Le commando embarque le patron du Novotel, Stéphane Frantz Di Rippel, Yves Lambelin, directeur général de Sifca, la plus grande entreprise privée du pays, et deux de ses collaborateurs, le Béninois Raoul Adeossi et le Malaisien Chelliah Pandian. Selon l’enquête, les quatre hommes sont alors conduits à la présidence, torturés et tués.

Les familles espèrent enfin des réponses

Bientôt six ans donc que les familles des victimes se posent des questions essentielles sans obtenir de réponse. Qui a donné l'ordre de tuer ? L'ordre venait-il du président Gbagbo ou de son épouse ? Quel était le mobile ? Et quels ont été les derniers instants des victimes ?

Pour maître Pierre-Olivier Sur, l'avocat de la famille de Frantz Di Rippel, ces audiences doivent permettre la manifestation de la vérité : « Ce décès mérite, pour sa mémoire et pour ses enfants, qu’on sache exactement quel a été le déroulé du drame. On sait qu’il a été torturé, on sait qu’il a été chargé dans un pick-up pour être sans doute jeté à la lagune, mais on n’est pas certain de tout cela. Et il faut que ceux qui l’ont fait aient le courage de le dire, de le dire les yeux dans les yeux ».

Pour l'instant, seul le corps d'Yves Lambelin a été identifié. La mort des autres a été établie sur la base de témoignages et d'indices. Maître Ange Rodrigue Dadjé est l'un des avocats des accusés et selon lui, l'enquête a été bâclée : « Dans ce dossier, il n’y a eu aucune analyse de la justice. Il y a eu une autopsie de complaisance, il n’y a pas eu de véritable autopsie. On n’a pas fait l’enquête comme il fallait. On ne sait pas qui les a tués. L’instruction a fonctionné par soupçons et par déduction. C’est tellement grave de tromper l’opinion en faisant croire que Bruno Dogbo Blé aurait tué cette personne, alors qu’il n’en est rien. Nous fonctionnons avec une justice aux ordres du pouvoir ».

Pour maître Dajdé, les kidnappeurs n'étaient pas de la garde républicaine et les victimes ont été tuées dans un bombardement de l'armée française. Une théorie révisionniste et honteuse, pour maître Pierre-Olivier Sur.

 
Sur le même sujet