Dialogue interreligieux

« Lorsque nous travaillons pour les âmes, nous ne pouvons user que de persuasion et d'amour... Nous ne pouvons rien faire tant que nous n'avons pas persuadé les gens autour de nous qu'ils sont aimés... » (Cardinal Lavigerie, 1885)

« Nous croyons qu'en toute religion il y a une secrète présence de Dieu, des semences du Verbe qui reflètent un rayon de sa lumière... » (Chapitre 1967)

« Nous célébrons et partageons cette vie avec Dieu lorsque nous allons à la rencontre des cultures et des religions... nous réjouissant de la foi vivante de ces croyants et les rejoignant dans leur quête de la Vérité, cette Vérité qui nous rend tous libres. » (Chapitre 1998)

Missionnaires, nous sommes appelés à faire les premiers pas pour rencontrer les personnes, qu'elles que soient leurs convictions, leur religion.

Au Burkina Faso, cette réalité se traduit surtout dans la rencontre respectueuse et évangélique avec les adeptes des religions traditionnelles et avec les musulmans.

Dans cette rubrique, nous étudierons divers aspects de ces religions, particulièrement de l'islam.

Enseigner la Shoah : une mission impossible ?
The Conversation

« On n’enseigne plus la Shoah » dans de nombreux collèges et lycées. Telle est l’antienne souvent répétée par des éditorialistes, des pseudo-spécialistes, des essayistes pressés et de nombreux responsables politiques lorsque des actes antisémites sont commis en France. L’accusation autorise à mettre en cause les enseignants qui, pour ne pas heurter certains élèves, renonceraient à traiter de la destruction des Juifs d’Europe en cédant ainsi à des pressions inacceptables.

Olivier Le Cour Grandmaison, Université d’Evry – Université Paris-Saclay

Au-delà des professeurs, l’institution elle-même est quelquefois visée par celles et ceux qui estiment que la situation empire d’année en année. Selon la formule employée par le chœur éploré des nostalgiques d’un passé scolaire et académique mythifié, « c’était mieux avant. » Singulière affirmation. Rappelons aux membres de cette cohorte hétéroclite qu’il a fallu attendre près de quarante ans pour que la « Solution finale » soit enfin enseignée dans les établissements secondaires de l’Hexagone.

Ajoutons, et ceci a quelque rapport avec le retard de cette trop lente évolution, que, sur ce sujet, la France s’est longtemps distinguée par un provincialisme scientifique et éditorial remarquable. À preuve parmi beaucoup d’autres possibles : l’ouvrage majeur, aujourd’hui un classique, de Raul Hilberg, La Destruction des juifs d’Europe.

Ce politiste, devenu historien, a commencé ses recherches en 1948, dans l’indifférence générale. Et il a publié cette somme exceptionnelle pour la première fois aux États-Unis en 1961 dans un contexte où, dans les universités comme dans le champ politique, ils n’étaient pas nombreux ceux qui s’intéressaient à cet événement et jugeaient indispensable de lui consacrer des livres, des articles et des enseignements. Quant à la traduction française, elle n’a été réalisée qu’en 1988.

Enfin, et c’est pour partie une conséquence de cet état de fait longtemps persistant, les femmes et les hommes nés dans les années 1960 n’ont pas appris ce qu’ils savent sur le génocide perpétré par les nazis et la collaboration du régime de Vichy dans les établissements secondaires et supérieurs mais au gré de rencontres et de lectures personnelles.

Stigmatisation et généralisation

Les accusations précitées, parfois implicites, sont tout à fait explicites sous la plume de l’historien Georges Bensoussan, par exemple, qui n’hésite pas à écrire dans Les Territoires perdus de la République : « c’est cet antisémitisme que l’immigration arabo-musulmane dans notre pays a introduit au sein de la République », qui conduit des professeurs à faire l’impasse sur cette histoire.

Les jeunes héritiers de l’immigration postcoloniale et leurs parents sont ainsi doublement stigmatisés. D’une part, à cause de leur haine supposée des Juifs qui serait liée à leurs origines ethniques comme à leur religion réputée hostile à ces derniers. D’autre part, en raison de la capacité imputée à ces élèves d’empêcher que les cours relatifs à la « Solution finale » aient lieu.

Ces accusations sont d’une extrême gravité. Les « jeunes d’origine maghrébine » deviennent, sous la plume de cet auteur, l’incarnation d’une dangerosité polymorphe, morale, sociale et politique qui ruine des principes démocratiques majeurs, met en échec l’institution scolaire et la République elle-même, dont l’autorité serait sévèrement ébranlée. Sorte de cinquième colonne, cette immigration ferait peser sur la France une menace quasi existentielle.

« Sauvageons » dénoncés hier par Jean‑Pierre Chevènement (1999), « racailles » qu’il faut traiter au Karcher, selon les propos délicats de celui qui était ministre de l’Intérieur en 2005, Nicolas Sarkozy, qui fustigeait ainsi des atteintes jugées réitérées à la sécurité des biens et des personnes, antisémites désormais ; tels sont donc ces collégiens et ces lycéens, selon Georges Bensoussan et les nombreux adeptes de cette thèse qui fait florès parmi la droite et l’extrême-droite, comme au sein d’une certaine gauche.

On est en droit d’exiger d’un historien qui prétend étudier des phénomènes complexes et contemporains qu’il produise les éléments d’enquêtes significatifs permettant d’étayer ses analyses sur des fondements solides. Il n’en est rien. Des témoignages auxquels succèdent une généralisation hâtive, des affirmations simples et péremptoires servies par des formules hyperboliques suffisent pour établir un bilan sans appel : la situation serait catastrophique.

Bilans sur le terrain

En 2006, le Mémorial de la Shoah a lancé une enquête sur le sujet qui dément une telle conclusion. Si des incidents sont parfois constatés, ils demeurent limités, comme le note Laurence de Cock dans une contribution synthétique et informée (« “On n’enseigne plus la Shoah”, retour sur les usages politiques d’une doxa » in Transmettre la criminalité de masse du nazisme. Des mémoires à inscrire dans l’histoire).

Douze ans plus tard, le rapport de la mission d’étude en France sur la recherche et l’enseignement des génocides et des crimes de masse – élaboré par Vincent Duclert, Anouche Kunth et Hélène Dumas, avec le concours d’une équipe internationale de 65 chercheurs et professeurs – le confirme. Fort de 1 700 pages, ce rapport, qui a nécessité deux ans de travail, a été immédiatement publié par le CNRS.

On y découvre que « le bilan de l’enseignement » consacré à la destruction des Juifs d’Europe « s’est révélé positif ». Entre autres, parce qu’il intègre de nouvelles méthodes pédagogiques, qu’il s’inscrit désormais dans une approche pluridisciplinaire et qu’il s’est enrichi grâce à l’étude d’autres génocides perpétrés au XXe siècle : celui des Hereros et des Namas dans la colonie allemande du Sud-Ouest africain (actuelle Namibie), commis en 1904 par les troupes du général Lothar von Trotha, celui des Arméniens (1915) et celui des Tutsi (1994).

Des approches transversales

Relativement aux universités, de tels enseignements, nourris par les recherches nationales et internationales menées sur les génocides, les crimes contre l’humanité et les violences coloniales extrêmes employées par de nombreux États européens, dont la France – notamment à la suite de la Conférence de Berlin (15 novembre 1884-26 février 1885) qui a favorisé « la course à l’Afrique » – doivent être développés plus qu’ils ne le sont aujourd’hui.

Eu égard aux disciplines existantes, ces enseignements pourraient trouver leur place en histoire, sciences politiques, droit, philosophie, anthropologie, littérature, etc. Cela favoriserait le développement d’approches comparatives et multiples permettant aux étudiant·e·s de saisir au mieux les origines complexes de ces événements de nature diverse, leur surgissement catastrophique dans des contextes différents et les nombreux problèmes qu’ils posent toujours aux contemporains que nous sommes.

Si grâce au travail pionnier de Georges L. Mosse – De la Grande Guerre au totalitarisme. La brutalisation des sociétés européennes – nous en savons davantage sur les voies qui ont conduit au surgissement de ce dernier régime, l’œuvre de Hannah Arendt, consacrée à l’impérialisme et à l’avènement de la domination totalitaire, demeure féconde et en France trop peu explorée (cf. L’Impérialisme in Les Origines du totalitarisme).


Le 6 mars 2019, l’université d’Evry-Val-d’Essonne organise une journée d’étude intitulée « Génocide(s), vérité et justice » qui abordera les génocides à travers les yeux des témoins directs.

Olivier Le Cour Grandmaison, Professeur de sciences politiques, Université d’Evry – Université Paris-Saclay

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Calendrier interreligieux: mars 2019 |Agora

 

Ven. 1 Journée mondiale de prière – Initiée en 1887 par des chrétiennes de différents continents.

Sam. 2 Jeûne du mois de ‘Ala (du 2 au 20 mars) – Dix-neuf jours de jeûne, vécus d’une manière avant tout spirituelle.

Mar. 5  Mardi Gras – Dernier jour où, traditionnellement, l’on consommait de la viande avant le temps du Carême. C’est à cette période que se déroulent les carnavals.

Mar. 5 Mahashivaratri – Nuit du Grand Shiva: sa danse cosmique crée, maintient et détruit l’univers de manière cyclique.

Mer. 6 Mercredi des Cendres – Après Mardi Gras, ce jour marque pour les catholiques le début du Carême qui prend fin le Samedi saint (20 avril).

Dès le IVe siècle, le dimanche correspondant au quarantième jour (en latin quadragesima dies, origine du mot Carême) avant le Vendredi saint marque le début d’une période pénitentielle de jeûne préparant la Semaine sainte. Ce chiffre fait référence aux quarante années de l’Exode (de la sortie d’Égypte du peuple Hébreu à son installation en «Terre promise») et, surtout, aux quarante jours de jeûne dans le désert qui marquent le début du ministère de Jésus (Luc 4,1-2). L’usage voulait cependant que l’on ne jeûne pas les dimanches. Dès lors, pour que la pénitence corresponde bien à quarante jours effectifs, on en est venu à avancer le début du Carême au mercredi précédent, appelé Mercredi des Cendres. Le nom de cette fête vient d’une coutume, instaurée au Xe siècle, qui veut que les prêtres marquent de cendres le front ou la tête des fidèles en disant: «Tu es poussière et tu retourneras à la poussière» ou «Convertissez-vous et croyez à l’Évangile». Les cendres sont un symbole, déjà chez les Hébreux, de la misère physique et morale: allusion à la condition de pécheurs et de mortels des fidèles qui cherchent le pardon de Dieu.
Cette période de jeûne, qui consiste à «faire maigre», c’est-à-dire à renoncer à la viande et aux graisses, est suivie essentiellement par les Églises orthodoxes et catholiques, avec des prescriptions et des coutumes différentes. Les protestants, considérant que le jeûne n’est pas nécessaire pour obtenir le salut (la foi seule y conduit), ou que la pénitence du cœur suffit, ne pratiquent pas le jeûne du Carême, période qu’ils dénomment «temps de la Passion».
Par ailleurs, certains ont choisi d’actualiser le Carême en en faisant un temps de solidarité avec les plus démuni-e-s et en organisant, souvent sur le plan œcuménique, diverses actions et manifestations (sous l’égide de l’Action de Carême pour les catholiques et de Pain pour le Prochain pour les protestants).

Ven. 8 Journée internationale des femmes (instituée par l’ONU en 1975) – Journée en faveur de l’égalité des sexes et de la défense des conditions de vie et de travail des femmes.

Lun. 11 Grand Carême orthodoxe (calendrier julien: du lundi 11 mars au vendredi 19 avril)

40 jours d’abstinence pour préparer Vendredi saint et Pâques. Cette période de jeûne commence, chez les orthodoxes, le Lundi Pur et se termine le vendredi précédant la semaine sainte.

Mer. 13  Kasuga Matsuri (fête du singe) – Fête des ancêtres de la famille Fujiwara (sanctuaire Kasuga, Nara).

Jeu. 14 Nouvel An sikh – Premier jour de l’an 550 du calendrier sikh qui débute en 1469, année de naissance de Guru Nanak.

Dim. 17 Saint-Patrick – Fête d’origine chrétienne qui célèbre le saint patron de l’Irlande. Elle est l’occasion de grands défilés (notamment au Canada et aux États-Unis) et de soirées festives dans les communautés irlandaises du monde entier. Devenue très populaire, la Saint-Patrick a perdu considérablement de sa vocation religieuse au profit de symboles séculiers de l’Irlande: le vert, les trèfles et la bière.

Jeu. 21 Holi – Fête des couleurs qui célèbre la venue du printemps et rend hommage au dieu Vishnou ainsi qu’à Krishna et à sa parèdre Radha.

Associée originairement à la fertilité de la terre et aux moissons abondantes, Holi est connue aujourd’hui comme la fête des couleurs qui célèbre la venue du printemps et rend hommage au dieu Vishnou ainsi qu’à Krishna et à sa parèdre Radha. Le nom de cette fête dérive, pour certains, de Holika, démone déchue de ses pouvoirs par Prahlad, ardent dévot de Vishnou.
La veille de la fête, des feux de camp sont allumés et des images de Holika sont brûlées. Le jour de Holi, dans une atmosphère de carnaval et d’allégresse, les gens s’aspergent d’eau et de pigments de couleurs vives (jaune, rouge, violet, vert, etc.) considérées comme fastes. Cette fête submerge la population dans une ambiance de jovialité comparable à celle qui règne entre le dieu Krishna et les vachères (gopi) dans la forêt mythique de Vrindavan. Pour finir, tout le monde se lave et, habillé en blanc, rend visite à sa famille et ses amis, mettant fin à une abolition temporaire des frontières qui séparent d’ordinaire les membres de la société. Holi est également l’occasion de partager des mets festifs.

Jeu. 21 Nouvel An baha’i – Now Rouz: Nouvel An baha’i 176 après la proclamation du Bab en 1844.

Jeu. 21 Pourim * – Fête des sorts. Joyeux festival de printemps évoquant la délivrance des juifs dans le livre d’Esther. Épouse juive du roi perse Xerxès, c’est elle qui sauva son peuple des mains d’Aman, vizir du roi. * Les fêtes juives débutent toujours la veille à la tombée de la nuit.

Cette fête commémore la délivrance des juifs, qu’Aman, premier ministre du roi perse Assuérus (ou Xerxès), voulait exterminer, selon le livre biblique d’Esther.
Le terme Pourim est le pluriel hébraïque du mot pour qui signifie «sort». Un sort qui fut favorable aux juifs, puisque Aman ne put mettre à exécution son funeste plan d’extermination que le hasard des dés avait arrêté en date du 13 adar (6e mois du calendrier juif). Au contraire, ce sont les ennemis des juifs qui furent massacrés et Aman condamné à la pendaison. Le nom même de la fête de Pourim souligne l’idée maîtresse du livre d’Esther: Dieu conduit les événements par la providence.
Pourim est considéré comme une fête «mineure» du calendrier juif, puisqu’il n’est pas obligatoire, mais seulement recommandé, de s’abstenir de travailler. La veille de la fête, les fidèles jeûnent en souvenir du jeûne proclamé par la reine Esther. Le jour de Pourim, le livre d’Esther est lu à haute voix à la synagogue; et chaque fois que le nom de Aman est prononcé, les enfants et les adultes – le plus souvent déguisés – font du bruit, en tapant des pieds ou en agitant des crécelles pour effacer son nom. Il est également prescrit de donner au moins deux portions de nourriture à des connaissances, des voisins ou des amis, et de faire l’aumône au moins à deux personnes. Cet échange de cadeaux et ces dons sont, pour les juifs, une manière de témoigner de leur solidarité dans l’adversité.

Jeu. 21  Now Rouz (22 août pour les parsis indiens) – Nouvel An mazdéen 1388 après le couronnement de Yazgdegerd III en 632.

Jeu. 21 Taishang Laojun – Fête en l’honneur de Laozi divinisé, patriarche du taoïsme et auteur présumé du Livre de la Voie et de la Vertu.

Ven. 22 Gudi Padva / Ugadi – Nouvel An hindou 1941 de l’ère shaka selon le calendrier national indien luni-solaire shalivahan.

Lun. 25  Annonciation (25 mars: cal. grégorien; 7 avril, cal. Julien) – Fête catholique et orthodoxe de l’annonce faite à Marie de la naissance de Jésus.

La fête de l’Annonciation commémore l’annonce faite à Marie, par l’archange Gabriel, de sa maternité divine. Jésus, «conçu de l’Esprit de Dieu» et «né de la Vierge», est aussi considéré par les chrétiens comme «vrai homme» et «vrai Dieu». L’Annonciation marque ainsi l’incarnation de Dieu dans l’histoire humaine. Venue de la tradition orientale, où elle est toujours célébrée, cette fête a gagné, au VIIe siècle, l’Église de Rome. En 1969, elle a été définitivement placée neuf mois avant Noël, le 25 mars, pour rappeler l’événement de la conception du Christ dans le sein de Marie. Les liturgies d’Occident consacrent également un dimanche de l’Avent à l’Annonciation, à savoir le quatrième, quelques jours avant Noël.

Mar. 26 – Khordad Sal (27 août pour les parsis indiens) – En Iran, les mazdéens fêtent la naissance de Zarathoustra.


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Un monde sans priants, sans artistes et
sans amants serait invivable | The Conversation

Dans un petit livre important (La foi chrétienne, hier et aujourd’hui), Joseph Ratzinger retrace avec virtuosité l’histoire de la rationalité. Car – et cet énoncé surprend souvent dans notre contexte où la raison se ramène au calcul – il y a bien une histoire de la rationalité. Après le long moment de la métaphysique inauguré avec la philosophie grecque, deux tournants récents et décisifs sont indiqués par Joseph Ratzinger, auxquels on peut ajouter un troisième.

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Harald Giersing 1881-1927 Denmark Three ladies in block 1922 Aarhus Kunstmuseum Denmark. jean louis mazieres on Visualhunt, CC BY-NC-SA

David Sébastien Sendrez, Collège des Bernardins

Trois tournants récents dans l’histoire de la rationalité

Le premier est l’abandon de la question concernant le sens profond des choses (car celui-ci nous serait inaccessible) au profit de l’historicisme (car l’histoire est le domaine de l’agir humain, et l’homme ne connaît que ce qu’il fait lui-même). Puis vient le tournant techniciste, lié, bien sûr, aux progrès scientifiques, mais aussi à l’installation de la pensée dans le primat du faire (tendance permanente de la raison, comme le signalait Bergson). Préséance est alors donnée aux évaluations mesurables (efficacité, rentabilité). Pour Joseph Ratzinger, c’est le passage du factum historique au faciendum technicien.

Il me semble que l’on peut discerner un troisième tournant inscrit dans l’évolution du précédent. Pour Joseph Ratzinger, le passage du factum au faciendum est celui de l’orientation vers le passé à celle vers l’avenir. Or, cela aboutit à l’instauration d’une sorte de mythologie futuriste dont le but espéré est une humanité reconstruite et configurée par nos soins. Dans les deux premiers tournants, on réduit le champ de la raison au quantifiable et le point d’aboutissement est un arrêt de l’histoire comme source de nouveauté imprévisible, comme lieu d’un avènement transcendant, tout étant, à terme, appelé à se plier à la raison prédictive, aux mécanismes de la production et de l’économie (ultra-libéralisme ou marxisme) et à l’ingénierie, que celle-ci relève de l’industrie ou de l’administration (technocratie). Dans le troisième, on restitue à la raison contemporaine l’orientation vers une sorte de transcendance, mais dominée par le mesurable (transhumanisme).

Les richesses de la raison

Cette histoire brièvement exposée montre en creux des richesses de la raison que la raison dominante aujourd’hui néglige et délaisse. La protestation peut ici se faire slogan : l’homme ne vit pas seulement dans le domaine du quantifiable. Il ne vit même pas seulement dans le domaine du dicible. Vouloir ramener l’homme à la mesure, fût-ce à la mesure du discours logico-déductif, étouffe l’humain. Cette protestation n’est pas elle-même d’abord de l’ordre du dire ou du raisonnement mais elle s’exprime, tout simplement, et son expression rassemble des destins, des individualités, des desseins très différents et pourtant liés. Un monde sans priants, sans artistes et sans amants serait invivable. Mais prier, créer et aimer, est-ce encore se situer dans le domaine rationnel ? À cette question il faut répondre que la prière, la création et l’amour élargissent le champ de la raison et restituent à celle-ci son ampleur humaine (sans laquelle la raison sombre dans la seule intelligence, artificielle ou non).

Le mot grec logos et le mot latin ratio nous mettent sur la voie de ce dont il s’agit. Le mot logos (verbe) renvoie à la parole en tant qu’elle est porteuse d’un sens (elle est donc structurée grammaticalement) et en tant qu’elle donne sens (elle est donc structurante, autrement dit, elle communique une vision du monde). Le mot ratio ne renvoie pas seulement au calcul statique mais aussi aux proportions, à l’harmonie observée, aux rapports entre les formes, à l’analogie. Ainsi, comprendre logiquement et rationnellement, ce n’est pas seulement calculer mais c’est aussi savoir voir une harmonie, saisir des proportions, s’inscrire dans une structure, déployer une vision, parler en visant plus loin que ce que l’on peut dire. Les priants, les artistes et les amants renouvellent le langage en l’approchant de l’indicible.

Leur « langage » demeure néanmoins un langage, c’est-à-dire une transmission, selon les voies du logos et de la ratio. Nous avons besoin de ce renouvellement, sous peine de nous enfermer dans un monde étouffant. La raison n’est elle-même que si elle est tendue – délibérément ou non, peu importe ici – par un dynamisme qui fait brèche, qui ouvre notre expérience et notre compréhension. Le besoin qui vient d’être énoncé concerne les théologiens. Il leur arrive d’étouffer la flamme vive sous la cendre. Le caractère souvent prescriptif de leur discours et la virtuosité spéculative de leurs concepts leur font parfois oublier ce qu’ils visent et qui est indicible.


L’exposition « Trace et témoignage », Vincent Fournier, au Collège des Bernardins, du 18 janvier au 2 mars 2019. Colloque « L’artiste, entre la trace et le témoignage »](https://www.collegedesbernardins.fr/content/lartiste-entre-la-trace-et-le-temoignage) au Collège des Bernardins, le 9 février.

David Sébastien Sendrez, Théologien, Enseignant à l’École cathédrale, co-directeur du groupe de recherche « Beauté et vérité » de la Faculté Notre Dame, Collège des Bernardins

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Croisades : quand l’histoire déforme la réalité
et nourrit la haine |The Conversation

Pour voir l'article complet et les videos, se rendre sur le site de l'ARCRE : https://www.arcre.org/understanding-the-crusades-from-an-islamic-perspective-the-conversation/

(Version anglaise: Understanding the Crusades from an Islamic perspective) Et si l’on racontait l’histoire des croisades du point de vue des Arabes ? C’est exactement ce que la station Al-Jazeera TV a fait en 2016. La chaîne télévisée a publié un documentaire en quatre parties sur les croisades, et la bande-annonce présente la série avec la phrase suivante (traduite de l’anglais) :

« Dans l’histoire des conflits entre l’Est et l’Ouest, la plus grande bataille entre le christianisme et l’islam ; une guerre sainte au nom de la religion. Pour la première fois, l’histoire de la guerre des croisades d’une perspective arabe. »

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Représentation du XXème siècle de Saladdin, victorieux, avec Guy de Lusignan après la bataille de Hattin en 1187.
Said Tahsine (1904-1985 Syria)/Discover Syria

Suleiman Mourad, Réseau français des instituts d’études avancées (RFIEA)

Les réalisateurs de cette série ont en effet voulu montrer les croisades comme un épisode pris dans un conflit continu entre deux civilisations : l’Islam/l’Orient et le Christianisme/l’Occident. Le documentaire d’Al-Jazeera était inspiré par deux documentaires précédents très diffusés : The Crusades : Crescent and the Cross (History Chanel, 2005), et The Crusades (BBC, 2012).

Ces trois documentaires ont en commun le même message de clash de civilisations alimenté par les idéologies religieuses de guerre sainte et de djihad, à la seule différence qu’Al-Jazeera prétend raconter l’histoire des Croisades « pour la première fois » d’une perspective arabe. En d’autres termes, faire dire aux musulmans non pas une histoire différente, mais leur version du fameux clash de civilisations.

Les croisés, ces chrétiens barbares

Ce n’est en fait pas la première fois que les musulmans racontent « leur version » des croisades. Dans l’imaginaire musulman contemporain, les croisés sont des chrétiens barbares médiévaux qui ont attaqué le monde musulman et ont massacré des dizaines de milliers d’innocents avant que les forces musulmanes réussissent – grâce au djihad – à les chasser. Ces derniers sont aussi perçus comme étant les ancêtres des Occidentaux colonialistes et impérialistes.

Ce qui est omis dans cette narrative contemporaine – diffusée par les Européens du XVIIIe et XIXe siècle, par exemple, dans L’Histoire des Croisades de Joseph-François Michaud (premier volume paru en 1812) – c’est que les croisés, loin d’être les fanatiques présentés par les historiens et vulgarisateurs, avaient de bonnes relations avec les musulmans.

Le pèlerin Ibn Jubayr (m. 1217), par exemple, lors de ses voyages au nord de la Palestine en 1184, décrit maints villages agricoles habités par des musulmans et qui lui semblaient vivre en parfaite harmonie avec les croisés. Mais ce qui l’irrita le plus n’était pas le fait que les croisés soient pacifiques mais que les musulmans se mêlent à ces « cochons et saleté chrétiens ».

Une réalité d’alliances ignorée

Portrait idéalisé d’Ibn Yubair par Guillermo Muñoz Vera.
Aroconchichon/Wikimedia, CC BY-NC

Effectivement, les sources médiévales musulmanes présentent une histoire différente des croisades. Sans doute, ils parlent de nombreuses batailles, mais ils décrivent aussi d’innombrables alliances politiques et militaires, de partage systématique des lieux sacrés, de relations commerciales, d’échange d’idées et des sciences, entre musulmans et croisés. L’historien et chroniqueur musulman Ibn Wasil (m. 1298) a ainsi passé deux ans au sud de l’Italie pour une mission diplomatique, temps durant lequel il a écrit un livre sur la logique qu’il a dédié à l’empereur Manfred Hohenstaufen.

Le père de Manfred, l’empereur Frederick II, correspondait déjà régulièrement avec les savants musulmans et leur demandait des informations scientifiques. Et lorsqu’il mena la sixième croisade en 1228-1229, il négocia la paix avec le Sultan al-Kamel qui a permis ensuite aux musulmans et croisés de partager Jérusalem. Les chrétiens avaient alors un contrôle absolu de leurs sites religieux et les musulmans maintenaient leurs sites sacrés dans la ville et les villages environnants.

L’empereur Frederick II, (gauche) rencontre al-Kamil Muhammad al-Malik (droite), extrait d’un manuscrit des Nuova Cronica, entre 1341 et 1348 environ.
Vatican Library/Wikimedia

Cette réalité complexe est généralement ignorée, et si certains historiens contemporains l’admettent, c’est seulement  pour souligner son anomalie. L’attention sur la violence a dominé l’intérêt moderne sur les croisades (le sujet le plus étudié tourne autour des ordres militaires des croisés et de la guerre sainte/djihad).

En d’autres termes, les chercheurs (ainsi que les médias), ont involontairement pour la majorité, mis à la disposition des terroristes et groupes haineux contemporains un récit très convenable que ces derniers utilisent à leur avantage pour affermir et répandre le discours d’un inévitable clash de civilisations. Cette narration a nourri l’islamophobie et le sentiment d’hostilité envers les immigrants en occident, et a permis à une profonde « ouestophobie » et paranoïa de se développer dans le monde musulman.

Une source d’inspiration pour les djihadistes

Se croyant adhérents et protecteurs du « véritable » islam, les djihadistes modernes sont inspirés par une lecture sélective de sources et textes fondateurs (Qurʾan, Sunna, etc.), ainsi que l’histoire, et par des griefs relatant au colonialisme direct ou indirect et la subjugation hégémonique du monde musulman.

Pour eux, la période des croisades n’est pas différente des conflits contemporains entre le monde islamique et l’occident chrétien. Certains académiciens musulmans ont adopté ce discours déjà au siècle passé. Ceci est très clair dans l’ouvrage influent de Said Ashur sur l’histoire des Croisades (publié en 1963), et le livre populaire d’Ahmad Halwani sorti en 1991, dans lequel il examine le rôle d’Ibn ʿAsakir de Damas (m. 1176) dans la promotion du djihad contre les croisés.

Ces deux intellectuels établissent un parallèle entre les luttes des musulmans durant la période des croisades et celles menées aujourd’hui. Des chefs de guerre et politiciens comme Nur ad-Din et Saladin, ainsi que les lettrés comme Ibn ʿAsakir et Ibn Taymiyya sont ainsi vénérés aujourd’hui par certains parce qu’ils ont combattu et propagé le djihad contre les croisés et leurs acolytes musulmans.

Il n’est donc pas surprenant que les récits de ces héros et les ouvrages des lettrés de la période des croisades soient très populaires dans le monde arabe, surtout parmi les militants, comme en témoignent les articles de Dabiq, le magazine en ligne de Daech.

Statue équestre de Saladdin dans la citadelle à Damas, Syrie, 2008.
Graham van der Wielen/Wikimedia, CC BY-SA

Réexaminant notre approche comme historiens

Si nous, historiens, avions fait notre devoir correctement, nous n’aurions pas présenté comme des anomalies les innombrables preuves témoignant de la cohabitation des croisés et musulmans. Si les médias avaient fait leur tâche correctement, ils n’auraient pas valorisé la violence.

Le récit des Croisades doit être présenté comme un épisode complexe dans l’histoire médiévale durant laquelle des peuples se sont affrontés mais se sont aussi tolérés.

Mais, parce que les historiens modernes ont souvent tendance à examiner le passé avec la perspective du présent (théories, hypothèses, conventions, préjugés, etc.), beaucoup n’ont pas pu voir cette réalité complexe du temps des croisades.

L’époque des Croisades n’est pas la seule période faussement représentée dans l’imagination et le savoir contemporain. La façon dont nous considérons l’islam aussi est gouvernée par un agenda moderne, à tel point que chaque perspective demeure une émanation de nos réflexions contemporaines.

Souvent nous omettons de comprendre que ce qui est invariablement présenté comme « l’islam » est une opinion collective d’une classe affluente d’hommes privilégiés (pour la plupart sunnites) dont les avis ne correspondaient pas à la façon dont d’autres groupes comprenaient et pratiquaient l’islam (chiites, soufis, les femmes, les masses populaires, etc.).

Déchiffrer les couches complexes

Nous avons aussi tendance à valoriser certains groupes, pensant qu’ils sont les plus convenables à « coller » aux images modernes que nous entretenons. Par exemple, beaucoup glorifient les soufis (les mystiques) dont l’idée de djihad dit spirituel et pacifique concernerait avant tout une lutte intérieure individuelle afin que chacun puisse devenir une meilleure personne. Ce n’est pourtant pas ainsi que les soufis médiévaux, et les musulmans en général à cette époque comprenaient le djihad. Le concept était entendu comme un acte belliqueux à l’encontre des ennemis de l’islam. Et les soufis en particulier, insistaient afin que cet acte prenne aussi une dimension religieuse destiner à couronner de succès leur effort dans ce monde et dans l’au-delà.

Saladdin avait aussi dans son armée une brigade de soufis qui exigeaient que les captifs croisés leur soient remis pour qu’ils les exécutent. L’armée ottomane elle aussi disposé de ces bataillons soufis. Ces derniers ont continué de pratiquer certains rituels armés, y compris de nos jours. Mon objectif n’est pas de démontrer la violence des soufis mais plutôt que ce courant de l’islam a une histoire et un héritage très complexe.

Cela ne veut pas dire non plus que le djihad était important pour tous les musulmans. En fait, historiquement, la majorité des musulmans refusaient de contribuer au djihad, et ce même lorsqu’ils étaient attaqués. On retrouve ainsi des textes accusateurs tels le Livre du djihad d’al-Sulami (1105) pointant du doigt tout ceux qui n’auraient pas accompli le djihad.

En tant qu’historiens, nous ne pouvons peut-être pas nous libérer complètement de nos préjugés modernes. Mais au moins pouvons-nous essayer de mieux écouter ce que l’histoire a à nous dire ; elle est toujours beaucoup plus complexe que les conclusions que nous en tirons.


Suleiman A. Mourad est l’auteur de « La mosaïque de l’islam » (Fayard).

Cet article a été traduit de l’anglais par Rana Knio. Il est une version modifiée de celui qui a été publié dans le numéro 41 de Fellows n°41, « Islamic interpretation of past Holy wars », publication du Réseau français des instituts d’études avancées (RFIEA) qui a accueilli plus de 500 chercheurs internationaux depuis 2007. Il a été publié en collaboration avec Aurélie Louchart.

Suleiman Mourad, Professeur au Smith College, et Membres Associé à l’IEA de Nantes, Réseau français des instituts d’études avancées (RFIEA)

This article is republished from The Conversation under a Creative Commons license. Read the original article.

[JOURNÉE D'ÉTUDE]
Maurice Borrmans figure du dialogue islamo-chrétien

Publié le 5 février 2019Mis à jour le 14 février 2019

Le père Maurice Borrmans, prophète du dialogue islamo-chrétien
pour notre temps ?

Date(s)

le 10 mai 2019  de 9h à 17h

 
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Lieu(x) :Campus Carnot
Campus Carnot, Amphi K202
Journée d'étude organisée par le Centre d'Études des Cultures et des Religions (CECR)


Maurice Borrmans est né en 1925 et s’est éteint il y a tout juste un an, le 26 décembre 2017. Sa longue vie correspond à un tournant dans les relations entre chrétiens et musulmans. En 1945, il s’engage dans la société des Missionnaires d’Afrique (les Pères Blancs), et fait son noviciat en Tunisie où il apprend la langue arabe. Après 20 ans en Tunisie, il accompagne en 1964 le déménagement de l’institut de formation (IPEO, Institut Pontifical d’Etudes Orientales, érigé en 1960 à Tunis, qui devient IPEA, Institut Pontifical d’Études Arabes et PISAI, Pontificio Istituto di Studi Arabi e Islamistica en 1966) qui s’installe désormais à Rome. L’Église est alors en plein Concile Vatican II, et cette proximité géographique lui permet de devenir expert pour les questions sur l’islam. Durant ses 40 ans à Rome, il enseigne au PISAI, fonde la revue Islamochristiana, intervient dans de nombreux colloques internationaux et assure un service auprès du Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux. En 2004, il s’installe à Ste Foy-les-Lyon pour une retraite bien méritée. Mais il multiplie les publications et les communications en Europe et hors d’Europe, toujours en lien avec le dialogue islamo-chrétien.

 

Cette journée est une invitation à se plonger dans son héritage intellectuel et à découvrir les perspectives qu’il propose pour bien comprendre l’islam et pour un véritable dialogue islamo-chrétien.


Intervenants

Geneviève Gobillot
Professeur émérite d'études arabes et islamiques à l'Université Lyon III. Elle est spécialiste de la mystique musulmane des quatre premiers siècles de l'Hégire, et particulièrement d'al-Hakîm al Tirmidhî. Ses recherches ont ensuite porté sur le Coran, par le biais d'une lecture interculturelle et intertextuelle.


Florence Javel

Titulaire d'une licence en histoire religieuse et d'une licence canonique en théologie, étudiante en doctorat de théologie, sous la direction de Michel Younès, ses recherches visent à appréhender l'œuvre de Maurice Borrmans à travers l'évolution du dialogue islamo-chrétien depuis Vatican II.


Emmanuel Pisani

Frère dominicain, Emmanuel Pisani est docteur en philosophie, docteur de théologie, titulaire d'un certificat d'islamologie (PISAI) et d'un DEA de sciences politiques (IEP de Bordeaux).
Il est directeur de l'ISTR à l'Institut Catholique de Paris et maître de conférences au Theologicum. Il dirige la revue MIDEO (Mélanges de l'Institut dominicain d'études orientales).
Il est l'auteur de : Le dialogue islamo-chrétien à l'épreuve. Père Anawati-Dr Baraka, une controverse au vingtième siècle, Paris, L'Harmattan, 2014.
Il est lauréat du Prix Mohamed Arkoun 2016 de la thèse d'islamologie pour sa thèse de philosophie et de théologie : Hétérodoxes et non-musulmans dans la pensée d'Abu Hamid al-Gazali, soutenue à l'UCLY en 2014.


Michel Younès

Il est professeur de théologie à l'UCLY, responsable du Centre d'études des cultures et des religions (CECR) et coordinateur de PLURIEL (Plateforme universitaire de recherche sur l’islam en Europe et au Liban).
Ses recherches portent sur la théologie des religions, l'islamologie, le dialogue islamo-chrétien, la théologie comparative islamo-chrétienne.