Actualités

[Chronique] Le bye-bye des « shithole countries » à Donald Trump

|
Mis à jour le 09 novembre 2020 à 16h44
 
 

Par  Damien Glez

Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.

Des pays africains seraient-il tentés d’accueillir le président déchu ?

L’issue de l’élection américaine ne changera pas la face du continent mais pour autant, l’Afrique ne se désintéresse pas du sort du fantasque Donald Trump. Avec, toutefois, une certaine ambivalence.

En meeting électoral le 16 octobre dernier, Donald Trump indiquait que perdre contre le « pire candidat de tous les temps » l’humilierait au point qu’il devrait peut-être quitter les États-Unis. Des pays africains seraient-il tentés d’accueillir le président déchu ? Censément pas les « pays de merde » (shithole countries) que le chef de l’État sortant montrait d’un doigt dédaigneux en janvier 2018. Quoique…

Les Africains ne condamnaient pas les sorties « trumpiennes » de manière systématique ou unanime. Pas plus que son ton franc et viriliste, que ne réprouvent pas nombre de citoyens africains chez leurs propres dirigeants, ni même le fond de la pensée trumpienne qui, dans le cas de la saillie contre les shithole countries, avait réjoui les plus martyrisés des opposants aux régimes du continent souffrant de mauvaise gouvernance.

Saluts protocolaires

Comme de bien entendu, les chefs d’État africains saluent protocolairement l’arrivée de Joe Biden, évoquant « sa vaste expérience » (Muhammadu Buhari), la promesse « d’unité, de sécurité et de prospérité » (Nana Akufo-Addo) ou encore la perspective d’un « accord commercial donnant aux nations africaines un accès en franchise de droits aux marchés américains » (Yoweri Museveni).

https://www.jeuneafrique.com/wp-content/themes/ja-3.0.x/assets/img/mondial2018/quote-article.png") left top no-repeat;">

OMAR TRUMP BONGO S’ACCROCHE AU POUVOIR COMME UN DICTATEUR AFRICAIN

Les internautes les plus satiristes évoquent, eux, le grognon « Omar Trump Bongo, qui s’accroche au pouvoir comme un authentique dictateur africain » et dont l’obstination pourrait justifier « une force d’interposition menée par l’armée de mer du Tchad, pays enclavé ».

État de grâce éphémère

Mais si des intellectuels comme Alain Mabanckou se réjouissent de la fin de « l’image risible affichée par les États-Unis ces quatre dernières années », la frange anticonformiste des politologues amateurs du continent n’accordera à Joe Biden qu’un éphémère état de grâce.

Quant à la popularité, en Afrique, de Kamala Harris, la première femme vice-présidente américaine – une simili-Africaine-Américaine au sang jamaïcain et indien –, elle donne l’occasion d’exhumer l’une de ses joutes oratoires avec Joe Biden lors des primaires, qui n’avait pas échappé aux Africains.

En plein débat télévisé, la colistière du nouveau président, alors opposée à ce dernier, avait accusé le septuagénaire blanc d’avoir entretenu des relations courtoises avec deux sénateurs ségrégationnistes et de s’être opposé, dans les années 1970, au « busing », qui visait à promouvoir la mixité raciale en transportant des élèves noirs dans des écoles majoritairement blanches.

Qu’importe. Les propos des primaires étant déjà aussi anachroniques que ceux des seventies, il reste de « Joe » l’image d’un « brave type » gaffeur, martyrisé par la vie et vice-président du premier chef d’État américain d’origine africaine, Barack Obama.

Trump, lui, tombera-t-il instantanément dans les oubliettes de l’indifférence africaine ou le continent continuera-t-il de scruter les tweets que le milliardaire envoie du fond de son lit parsemé de miettes de cheeseburger ?

 

Les dossiers brûlants qui attendent Joe Biden en Afrique

Des Nigérians découvrent les Unes de leurs journaux au lendemain de la victoire de Joe Biden aux États-Unis. Lagos, le dimanche 8 novembre 2020.

Des Nigérians découvrent les Unes de leurs journaux au lendemain de la victoire de Joe Biden aux États-Unis. Lagos, le dimanche 8 novembre 2020.
 AP Photo/Sunday Alamba
Texte par :RFISuivre
11 mn

Le nouveau président élu des États-Unis devra notamment se pencher sur la situation explosive en Éthiopie, la poursuite de l'accompagnement de la transition démocratique au Soudan et la gestion de la menace shebab en Somalie.

En Afrique de l’Est, le premier dossier brûlant qui arrivera sur le bureau de Joe Biden sera l’Éthiopie, rappelle notre correspondant à Nairobi, Sébastien Nemeth. Le 4 novembre, l’État fédéral a lancé une offensive armée contre le Tigré, une région du nord du pays en rupture avec le pouvoir. Impossible de savoir si les affrontements vont durer jusqu’à l’entrée en fonction officielle de Joe Biden le 20 janvier mais l’Éthiopie restera un dossier urgent à suivre.

Ce conflit menace de déstabiliser la région. L’Éthiopie est devenue une poudrière, avec des violences ethniques régulières et une élection très tendue prévue l’année prochaine. Le Premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed, a félicité Joe Biden et Kamala Harris pour ce qu’il a appelé « une victoire historique », disant « avoir hâte de travailler étroitement » avec eux.

Comment accompagner la transition au Soudan ?

Le Soudan comptera aussi parmi les sujets à examiner rapidement pour le nouveau président américain. Après la révolution, le pays poursuit sa transition, avec une grave crise économique et d'importantes tensions sociales. Restera à savoir comment Joe Biden continuera à soutenir cette transition, avec quelles aides et quelles contreparties.

Donald Trump avait annoncé la levée des sanctions contre Khartoum. Il avait enclenché le processus pour retirer le pays de la liste des États sponsorisant le terrorisme. Cette procédure se trouve devant le Congrès qui doit se prononcer début décembre. Comme les nouveaux élus américains n’entreront pas en fonction avant janvier, la mesure devrait passer facilement.  La levée de cette sanction devrait rapprocher davantage Washington et Khartoum, et pourrait bénéficier politiquement à Joe Biden, même s’il n’en est pas l’instigateur.

► (Ré)écouter : Chris Fomunyoh: «Avec Biden il y aura une remodulation de la politique américaine en Afrique»

En échange, Washington exigeait une reconnaissance d’Israël et les discussions sont en cours entre les Soudanais et l’État hébreu. Là encore, peu de chances que Joe Biden mette un coup d’arrêt à ces négociations qui se trouvent à un stade assez avancé. Là encore, il pourrait recueillir quelques lauriers politiques si la normalisation survient après sa prestation de serment.

Le Premier ministre soudanais ne s’y est pas trompé puisqu’hier soir, Abdallah Hamdock a indiqué avoir hâte de « continuer à rapprocher les deux pays, à renforcer l’amitié et la coopération entre Khartoum et Washington ». Mais la future administration Biden va devoir suivre de près la suite de cette transition encore loin d’être finie. Elle va rester fragile car la fin des sanctions ne devrait pas se faire sentir avant des mois. Sans compter qu’en 2022, le Soudan connaîtra des élections historiques mais probablement très incertaines et volatiles.

Un changement de stratégie dans la lutte contre les shebabs ?

L’Afrique de l’Est représente également une région que les Américains surveillent de près en raison de la menace terroriste que font planer les islamistes somaliens shebabs. Avec l’arrivée de Donald Trump, la stratégie militaire dans la région avait changé. En arrivant à la Maison Blanche, il avait choisi une stratégie de militarisation aérienne contre les shebabs. En 2017, le président américain avait ainsi signé une directive désignant plusieurs régions somaliennes comme des secteurs d’« hostilité active ».

Ce statut avait assoupli les procédures nécessaires avant de déclencher une frappe. Le nombre de bombardements par des drones a donc augmenté de façon exponentielle sous l’administration Trump, passant de 14 à 63 en quatre ans, un record. Mais les shebabs sont des maîtres dans l’art de s’adapter. Ils contrôlent encore environ 20% du territoire et commettent toujours des attentats. Il y a un an, ils ont même attaqué la base de Baledogle où les Américains forment les forces spéciales somaliennes.

Les shebabs sont donc toujours actifs et ces frappes ont entraîné une série de polémiques sur les victimes civiles. Joe Biden et son futur secrétaire d’État vont devoir réfléchir à la continuité de cette stratégie. La présence américaine dans la région ne devrait pas être remise en cause tant la menace shebab est encore forte. Mais ces dernières semaines, Donald Trump avait dit souhaiter carrément retirer les quelques 700 soldats américains de Somalie. Là encore, le nouveau président américain va devoir réfléchir à cette option, et y réfléchir vite, car il hérite du dossier somalien dans une période sensible. 

La Somalie a d’autant plus besoin de la coopération américaine que le départ des 20 000 soldats de la force africaine Amisom est prévu à la fin de l’année. Mogadiscio a donc rapidement félicité Joe Biden et Kamala Harris. « Nous leur souhaitons du succès dans leurs initiatives et sommes impatients d'établir une collaboration étroite et un partenariat », a déclaré Mohamed Farmajo. Le chef d'État somalien a au passage rappelé que les États-Unis étaient « un allié important et un partenaire dans les progrès et le développement » de la Somalie.

Pour affronter le terrorisme, les États-Unis vont devoir encore compter sur leur allié kényan dans la région. Washington a des soldats au Kenya qui forment l’armée kényane déployée en Somalie. Dans la région, le président kényan est probablement celui qui a félicité le plus longuement Joe Biden.

Ce 8 novembre, Uhuru Kenyatta a même parlé d'une « large victoire » du candidat démocrate. Nairobi ne tarit d'ailleurs pas d'éloges sur lui. « Les Américains ont parlé clairement en choisissant un leader hautement qualifié », a déclaré le président Kenyatta, qui décrit Joe Biden comme un « ami du Kenya ». Le démocrate s'était rendu dans le pays en 2010 par exemple, lorsqu'il était vice-président de Barack Obama, lui-même d'origine kényane.

Toujours dans la région de la Corne de l'Afrique, selon Yemane Meskel, le ministre érythréen de l'Information, « le président Afeworki a envoyé un chaleureux message de félicitation au président élu Joe Biden. Le chef de l'État érythréen exprime le désir d'Asmara de cultiver des liens bilatéraux chaleureux avec les États-Unis afin de faire avancer notre objectif commun de paix et de stabilité dans la région ».

►À lire aussi Joe Biden veut se démarquer de Donald Trump dans les relations avec l'Afrique

Quel positionnement au Sahel ?

Jusqu'ici, la doctrine américaine consistait à ne pas positionner au Mali et dans le Sahel des troupes comme le font les Français ou l’ONU, mais de former les armées locales, de mener des opérations militaires ponctuelles sur le terrain, comme ce fut par exemple le cas il y a quelques années au Niger, dans une opération antiterroriste, rappellenotre correspondant à Bamako, Serge Daniel.

 

Cela va-t-il changer avec le nouveau locataire de la Maison Blanche ? Joe Biden va-t-il décider d’avoir une coopération plus transversale avec les pays du G5 Sahel, par exemple ? Ou bien va-t-il, comme son prédécesseur, plutôt fournir aux forces internationales présentes au Mali et dans le Sahel des capacités importantes de renseignement, de surveillance, notamment grâce aux drones ?

Ces interrogations existent à Bamako et dans le Sahel, tout comme la question de la sécurité dans laquelle les Américains mobilisent actuellement au moins 50 millions de dollars par an. On devrait rapidement savoir si Joe Biden va diminuer ou augmenter cette somme.

En attendant, le président nigérien Mahamadou Issoufou a déclaré espérer un renforcement de la coopération qui a toujours existé entre les États-Unis et le Niger, où une base américaine contribue à la lutte contre le terrorisme jihadiste au Sahel.

De son côté, le président sénégalais Macky Sall a adressé sur son compte Twitter ses chaleureuses félicitations à Joe Biden et à Kamala Harris pour leur victoire. « Le Sénégal se réjouit de poursuivre ses excellentes relations d'amitié et de coopération avec les États-Unis d'Amérique », souligne ainsi le chef de l'État sénégalais.

Enfin, Alassane Ouattara a aussi adressé ses « chaleureuses félicitations » au président et à sa vice-présidente. « La Côte d’Ivoire continuera d'oeuvrer au renforcement des relations d'amitié et de coopération entre nos deux pays et nos deux peuples », a commenté le président ivoirien dans un tweet publié hier en fin de soirée.

La Saison Africa 2020 reste combative... et sans date d’ouverture

L'une des affiches officielles (détail) de la Saison Africa 2020, projetées pendant la présentation du programme par la commissaire générale N’Goné Fall.
L'une des affiches officielles (détail) de la Saison Africa 2020, projetées pendant la présentation du programme par la commissaire générale N’Goné Fall. © Saison Africa 2020
7 mn

D’abord prévue en juin, ensuite repoussée au 1er décembre, la Saison Africa 2020 se montre décidée à démarrer avant la fin de l’année. Dans le cadre de ce projet extraordinaire, plus de 450 événements sur tout le territoire français restent suspendus à l’évolution de la situation sanitaire. Entretien avec la commissaire générale N’Goné Fall qui a dévoilé ce mercredi 4 novembre le programme.  

La Saison Africa 2020 n’a rien à voir avec une simple saison culturelle. Plus de 200 événements prévus ambitionnent à faire entendre en France les voix de la société civile des 54 pays africains. Le programme souhaite rendre visible des enjeux majeurs du XXIe siècle dans tous les domaines, de l’économie jusqu’aux sciences, en passant par l’éducation. Et la culture y occupe une place importante. 

RFI : La vie culturelle en France est à l’arrêt, et cela pour au moins quatre semaines. Est-ce réaliste d’annoncer aujourd’hui une Saison Africa 2020 en France à partir du 1er décembre ?  

N’Goné Fall : Nous n’avons pas annoncé que la Saison Africa 2020 allait commencer le 1er décembre, ce qui était prévu avant le nouveau confinement. Il y a des projets qui sont en cours de montage et qui vont continuer à être montés. Donc, la Saison ouvrira courant décembre, et comme annoncé, de décembre 2020 à juillet 2021. 

Savez-vous déjà quel sera le ou les événements qui ouvriront la Saison Africa 2020 « courant décembre » 

Compte tenu de la situation actuelle, nous sommes en train de faire le point avec tous les partenaires qui avaient un projet en décembre. Et nous sommes en discussion justement avec la Conciergerie, puisque l’ouverture de la Saison devrait être avec l’exposition monographique d’El Anatsui [la première exposition personnelle en France de l’artiste ayant reçu le Lion d’or à la Biennale de Venise en 2015 et le prix Praemium Imperiale en 2017, ndlr], l’artiste ghanéen qui vit depuis plusieurs années au Nigeria. L’exposition est en cours de montage. En fonction du moment du déconfinement en France, nous allons décider à quel moment nous pourrons ouvrir ce projet.  

Parmi les ambitions affichées de la Saison Africa 2020 figurent, entre autres, les décisions de « cibler les jeunes » et de « connecter l’Afrique francophone et l’Afrique anglophone ». Comment allez-vous connecter les jeunes en France avec l’Afrique anglophone et francophone ?  

À travers les projets. Les jeunes Français, en tout cas, je l’espère, sont un peu plus polyglottes que leurs grands-parents. Et à travers les réseaux sociaux, les gens sont déjà connectés à l’échelle d’un continent. Aujourd’hui, il y a des logiciels qui permettent de traduire simultanément ce qu’on dit et ce qu’on écrit. Cela fait longtemps que les réseaux francophones, lusophones, arabophones et anglophones du continent sont liés et collaborent à distance. L'enjeu est justement que les jeunes en France aillent accès à ces réseaux et puissent échanger. Tous les projets qui sont portés par le ministère de l’Éducation nationale de la Jeunesse et du Sport, à travers des projets pédagogiques, se font en lien avec des classes et des élèves sur le continent africain, et pas uniquement avec des pays francophones. Il y a des professeurs d’anglais ou des professeurs de portugais en France qui ont monté un projet pédagogique avec un pays anglophone ou un pays lusophone.  

N'Goné Fall, la commissaire générale de la Saison Africa 2020.
N'Goné Fall, la commissaire générale de la Saison Africa 2020. © Siegfried Forster / RFI

Vous avez conçu Africa 2020 comme une « plateforme collaborative de partage ». Actuellement, beaucoup d’événements culturels sur le continent africain ont lieu, comme récemment les Récréatrales au Burkina Faso, pendant que les événements en Occident ont été annulés ou se sont transformés en édition numérique, comme Vues d’Afrique au Canada, le Festival du film d’animation d’Annecy ou le premier Festival numérique du Châtelet en France. Est-ce qu’il s’est posée à un moment la question de créer les événements en présentiel en Afrique pour les partager ensuite en numérique en France ?  

Cela n’aurait pas de sens. La Saison a plus de 450 projets. Chaque projet est panafricain par nature. Si l’on prend l’exemple d’un spectacle de danse ou d’une pièce de théâtre, on a des danseurs et des comédiens qui viennent de différents pays africains et qui sont en ce moment dans différents pays africains. Donc, je ne vois pas comment une pièce de théâtre avec des comédiens issus de six ou sept pays, voire trois ou quatre régions du continent, peuvent à distance jouer cette pièce ou jouer ce spectacle de danse. L’enjeu de toute cette Saison était de favoriser les rencontres et la mobilité. Demander à tous les partenaires – 183 en France, plus de 200 en Afrique – de basculer l’intégralité des projets qui auraient été conçus comme des moments de rencontres - je pense aussi aux 15 QG, ces Quartiers généraux, des sortes de centres culturels temporaires - en numérique, ce n’est pas possible.  

Parmi les projets évoqués, se trouve un incubateur photographique à Johannesburg. Market Photo Workshop promet un nouveau type de photographie. Pouvez-vous nous dire un peu plus sur ce projet ?  

 

C’est la photographie par les Africains. Si l’on pense à tous les imaginaires et toute l’iconographie de la propagande coloniale qui décrivait l’Africain comme un enfant voire comme un sauvage auquel il fallait apporter la lumière et la civilisation... La photographie comme médium existe sur le continent depuis la fin du XIXe siècle. Justement, cette fabrique de récits : Qui parle ? Qui parle au nom de qui ? Qui représente qui ? Pour dire quoi ? C’est là où la photographie a un rôle crucial à jouer. De plus en plus de jeunes se forment à la photographie et montrent une image d’eux-mêmes, de leur propre identité et de leur propre culture à travers un prisme africain et non pas à travers un prisme occidental entaché de clichés.  

On est en plein pandémie de coronavirus. La situation sanitaire en Afrique reste beaucoup mieux qu’en Europe. Dans quelle situation économique se trouvent actuellement les artistes et opérateurs africains avec lesquels vous travaillez ? Avez-vous dû annuler des projets à cause de la crise provoquée par le coronavirus ?  

Non, justement, l’objectif est de ne pas annuler des projets. Lors du premier confinement, on a dû annuler un projet, mais nous avons quand même tenu à verser aux artistes les cachets prévus. C’était un geste de solidarité. Nous ne laisserons tomber personne. 

► Le site officiel de la Saison Africa 2020 

► À lire aussi : Pierre Buhler de l’Institut français: «Africa 2020, on n’a jamais vu ça»

OMC: report de la réunion décisive du 9 novembre, Ngozi Okonjo-Iweala dans l'attente

  La candidate nigériane à la présidence de l'OMS, Ngozi Okonjo-Iweala le 15 juillet 2020 à Genève.
       
La candidate nigériane à la présidence de l'OMS, Ngozi Okonjo-Iweala le 15 juillet 2020 à Genève.
 AFP Photos/Fafbrice Coffrini
Texte par :RFISuivre
3 mn

L'Afrique devra attendre encore un peu avant de savoir si la Nigériane Ngozi Okonjo-Iweala sera ou non la prochaine directrice générale de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). L'organisation, qui a en charge la gestion des relations commerciales dans le monde, a en effet reporté la réunion du lundi 9 novembre au cours de laquelle ses membres devaient choisir entre la candidate nigériane et la Sud-coréenne Yoo Myung-hee. La position des États-Unis, opposés à Ngozi Okonjo-Iweala, complique tout.

PUBLICITÉ

L'OMC est une institution en crise, et c'est sans doute pour éviter d'appronfondir les divisions qu'elle a décidé, vendredi 6 novembre, de reporter la réunion du lundi 9, au cours de laquelle elle devait désigner son futur directeur général. Après un travail de six mois pour choisir parmi les huit candidats en lice, la majorité des 164 pays membres de l'organisation avait, sans réserve, soutenu la Nigériane Ngozi Okonjo-Iweala. C'était le 28 octobre dernier.

► À lire aussi : Ngozi Okonjo-Iweala, la dame de fer aux pieds d’argile

L'OMC attend le dénouement de la présidentielle américaine

Mais bien que la femme politique nigériane soit arrivée en tête lors du tour de scrutin précédent, les États-Unis s'étaient opposé à sa nomination, continuant de soutenir sa rivale, la Sud-Coréenne Yoo Myung-hee. Ce véto spectaculaire a eu l'effet d'un électrochoc dans une organisation qui désigne habituellement son directeur général par consensus et ne souhaite pas recourir au vote, de peur d'approndir les divisions. Surtout en ce moment, car l'OMC est le sous le feu des critiques de l'administration Trump, qui lui reproche d'être trop favorable à la Chine.

La crainte de l'organisation serait de voir les États-Unis se retirer. Certains observateurs pensent donc que les dirigeants de l'OMC préfèrent attendre prudemment que la situation politique s'éclaircisse à Washington, où Donald Trump et Joe Biden se disputent le fauteuil de président, avant de proclamer un vainqueur.

► À lire aussi : tous les articles consacrés à l'élection présidentielle américaine

Pour l'heure, l'organisation invoque « des raisons incluant la situation sanitaire et les événements actuels » pour justifier ce report. Les États-Unis continuent de soutenir la candidate sud-coréenne. Mais Ngozi Okonjo-Iweala ne se laisse pas abattre pour autant. L'ex-directrice générale de la Banque mondiale disait, fin octobre, croire encore à ses chances. 

[Chronique] Trump vs Biden : une élection « à l’africaine » ?

|
 
 

Par  Damien Glez

Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.

Damien Glez

Accusations de fraude, fake news, contestation des résultats… Les internautes africains qui suivent la présidentielle américaine s’amusent des dérives électorales que l’on attribue habituellement au continent.

« Élections américaines : la délégation de la Cedeao, avec l’appui de l’Union africaine, est en route pour Washington. Elle appelle au dialogue. » Parmi tant d’autres, la blague circule en Afrique via les réseaux sociaux, depuis que le processus de dépouillement des suffrages américains a pris des allures burlesques. Le scrutin de 2008 qui propulsa à la Maison Blanche un Kenyan de père, Barack Obama, n’aurait donc pas été la plus « africaine » des élections étasuniennes…

Sans illusion sur le fait que tel ou tel président américain de tel ou tel parti pourrait, par sa politique étrangère, changer la face du « continent noir », les Africains se sont passionnés pour cette campagne électorale. En témoigne la kyrielle d’éditoriaux et de micro-trottoirs produits par les organes de presse locaux.

Accusations de fraude et contestation des résultats

À l’occasion de ce millésime 2020 du reality-show politique made in USA, les observateurs effarés relèvent des tares que l’on attribue généralement aux Républiques dites « bananières » : l’annonce, par un candidat, de sa victoire avant la fin du dépouillement ; les accusations d’abus de pouvoir en période électorale ; la suspicion de fraude par l’évocation de présumés « bulletins surprise » apparus dans la nuit ; la diffusion massive de fake news ; les accusations mutuelles de corruption – dans l’exercice du pouvoir, selon les uns, au cours du processus électoral, selon les autres – ; la promesse ferme de contestation des résultats devant les juridictions compétentes ; les appels à peine voilés à la pression de la rue…

https://www.jeuneafrique.com/wp-content/themes/ja-3.0.x/assets/img/mondial2018/quote-article.png") left top no-repeat;">

LE COMPORTEMENT DE TRUMP NE JURE GUÈRE AVEC LA BIOGRAPHIE D’UN MARÉCHAL À TOQUE DE LÉOPARD

Bien sûr, et même si les imperfections du système électoral américain étaient connues depuis l’échec d’Al Gore, en 2000, les incongruités du feuilleton actuel sont d’abord le fait d’un homme dont le comportement ne jure guère avec la biographie d’un maréchal à toque de léopard. C’est bien Donald Trump qui, depuis son entrée fracassante en politique, a usé et abusé des « vérités alternatives », des méthodes corruptives, de la mauvaise foi et de la violence verbale.

Il est d’ailleurs remarquable que les attitudes virilistes du président américain sortant choquent moins l’opinion africaine que le fond de ses propos sur les présumés « shithole countries » du continent.

Pire que la fiction

Les scénaristes américains de séries en sont tétanisés, tellement le mandat de Trump a dépassé la fiction. Il ne manquerait plus qu’un climax digne de la série « House of Cards » et du nomadisme politique cher à certaines contrées africaines : le choix des grands électeurs ayant été plus serré que prévu, certains d’entre eux pourraient faire l’objet de tentatives de corruption ou de chantage d’ici l’élection proprement dite du président des États-Unis, le 14 décembre prochain.

Certes, le coup de théâtre semble improbable, même si des grands électeurs ont déjà trahi leur camp à 158 reprises dans l’histoire des États-Unis. Et même si Donald Trump, pendant son mandat, a orchestré l’inorchestrable. Et si l’armée effectuait un putsch, mettant les candidats en résidence surveillée ? C’est une autre blague qui circule sur les réseaux sociaux africains…