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De Senghor à Macky Sall, le Sénégal meilleur allié africain des Palestiniens ?

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Mis à jour le 20 mai 2021 à 17h05
Des Sénégalais manifestent à Dakar leur soutien à la Palestine lors de la guerre de 2014 (Archives).
Des Sénégalais manifestent à Dakar leur soutien à la Palestine lors de la guerre de 2014 (Archives). © Jane Hahn/AP/SIPA

Dakar manifeste depuis dix jours son soutien au peuple palestinien. Tout en tâchant de préserver au maximum ses relations avec Israël. Un équilibre parfois difficile à tenir pour le président sénégalais.

De telles manifestations de soutien, Safwat Ibraghith n’en avait jamais fait l’expérience. « Je n’ai jamais vécu ça, assure à Jeune Afrique l’ambassadeur palestinien au Sénégal. Nous sommes submergés de messages et de visites. » Représentants de la majorité et de l’opposition, organisations de la société civile, dignitaires religieux ou simples quidams… Depuis le 10 mai, de nombreux Sénégalais se sont rendus à la résidence de l’ambassadeur, dans le quartier des Almadies, pour manifester leur soutien au peuple palestinien. Et l’ONG islamique Jamra et le collectif citoyen Noo Lank ont appelé à descendre dans la rue, ce vendredi 21 mai, pour protester contre les frappes israéliennes contre la bande de Gaza.

Un devoir pour le Sénégal

Pour Safwat Ibraghith, cela ne fait pas de doute, ce sont les images de l’attaque de la mosquée Al-Aqsa par les forces de sécurité israéliennes – scène « impensable pour les Sénégalais » – qui ont déclenché ces manifestations de soutien « spontanées et naturelles ».

Les faits remontent au 8 mai dernier, à quelques jours de la fin du mois de Ramadan. Des dizaines de milliers de fidèles étaient rassemblés sur l’esplanade des Mosquées quand ont éclaté des heurts entre Palestiniens et la police israélienne. Des affrontements ont également eu lieu à quelques pas de là, dans le quartier de Cheikh Jarrah. Deux jours plus tard, le lundi 10 mai, les forces de sécurité israéliennes envahissaient les lieux pour évacuer les fidèles rassemblés pour la prière du matin. Armés de cartouches de gaz lacrymogènes, de grenades assourdissantes et de balles en caoutchouc, ils ont donné l’assaut jusque dans la mosquée Al-Aqsa, faisant plusieurs centaines de blessés.

Diffusées en temps réel sur les réseaux sociaux, les vidéos amateurs de la mosquée assiégée et de ces fidèles attaqués ont ébranlé le monde musulman. Au Sénégal, les prêches de la prière du vendredi suivant étaient « tous consacrés à la Palestine », précise l’ambassadeur. Le 13 mai, à l’occasion de la célébration de la Korité, le président sénégalais a lui aussi manifesté son soutien au peuple palestinien.

« C’est le [moment] de prier pour la paix, la paix en Palestine et en Israël, a lancé Macky Sall. Nous profitons de l’occasion pour lancer un appel à la désescalade, pour que la paix revienne, pour que des discussions saines et sérieuses puissent être engagées entre ces deux communautés dans le respect du droit international. » Le chef de l’État a expliqué que le Sénégal avait le « devoir » de lancer cet appel.

À l’instar d’autres pays du continent, comme l’Afrique du Sud, le Sénégal est depuis des décennies un soutien indéfectible du peuple palestinien. En 1971, le président Léopold Sédar Senghor avait ainsi participé avec ses pairs nigérian (Yakubu Gowon), camerounais (Ahmadou Ahidjo) et zaïrois (Mobutu Sese Seko) à une mission de médiation en Israël au nom de l’Organisation de l’unité africaine (OUA).

Depuis 1975 et sans interruption, le Sénégal préside le Comité pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien, créé par l’Assemblée générale des Nations unies. C’est aussi l’un des premiers pays du continent où l’État palestinien a ouvert une représentation diplomatique, en 1989, soit un an après sa proclamation d’indépendance.

Équilibre et modération

C’est encore Dakar qui a porté, en décembre 2016, aux côtés de la Nouvelle-Zélande, de la Malaisie et du Venezuela, la résolution 2334 auprès du Conseil de sécurité de l’ONU. Un temps parrainée par l’Égypte, qui avait ensuite fait volte-face, la résolution était passée grâce à l’abstention des États-Unis : elle condamnait, pour la première fois, la colonisation israélienne dans les territoires occupés. La prise de position du Sénégal avait alors entraîné des mesures de rétorsion de la part d’Israël et la détérioration des relations diplomatiques entre les deux pays – normalisées en 2017.

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RECONNAÎTRE ISRAËL NE DOIT PAS NOUS EMPÊCHER D’ÉLEVER LA VOIX POUR APPELER AU RESPECT DU DROIT INTERNATIONAL

« En tant que membre non-permanent du Conseil de sécurité, le Sénégal avait estimé qu’il était de son devoir de porter cette résolution. C’est à l’aune de ces principes que le Sénégal est jugé et apprécié », explique le président du Comité pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien, Cheikh Niang. Le représentant de son pays auprès des Nations unies, qui préside le comité depuis 2018, l’assure aujourd’hui : « Reconnaître Israël ne doit pas nous empêcher d’élever la voix pour appeler au respect du droit international ».

Soutenir l’État palestinien tout en maintenant de bonnes relations avec Israël, qui dispose lui aussi d’une représentation diplomatique à Dakar, c’est la ligne de crête sur laquelle s’est toujours tenu Dakar et qui lui vaut, estime l’ambassadeur sénégalais, la confiance de la communauté internationale. « Le Sénégal est réputé pour être un pays attaché à la modération. Les États lui ont toujours fait confiance pour conserver cette posture diplomatique d’équilibre et d’ouverture. » « La vocation de mon pays est d’être ami de tous les pays et de n’avoir aucun ennemi », disait Macky Sall lui-même.

Cheikh Niang rappelle que le Comité qu’il préside est l’une des premières instances de l’ONU à avoir alerté au sujet de « l’intensification de la force par Israël dans la bande de Gaza » et de « la détérioration dramatique et continue de la situation dans le Territoire palestinien occupé » dès le 10 mai, alors que les membres du Conseil de sécurité peinent à proposer ne serait-ce qu’une déclaration commune.

Un message qui passe mal

Cette position « modérée » d’ami de l’un et de partenaire de l’autre s’est traduite dans un communiqué du ministère des Affaires étrangères du 12 mai. « Le gouvernement condamne le retour à la violence sous toutes ses formes et appelle à la retenue et à la désescalade », insiste le texte, tout en rappelant que le Sénégal « réitère son attachement à l’avènement d’un État palestinien viable coexistant avec l’État d’Israël ».

Un communiqué qui a « déplu » aux autorités palestiniennes. « Le texte n’était pas à la hauteur de nos attentes. Considérant la gravité de la situation, on ne peut pas accepter qu’il traite de la même façon les opprimés et les oppresseurs. La politique de la carotte ne peut fonctionner et nous avons besoin de messages diplomatiques forts », dénonce Safwat Ibraghith.

L’ambassadeur, qui a sollicité un entretien avec la ministre des Affaires étrangères, Aïssata Tall Sall, en déplacement à Paris pour le sommet sur le financement des économies africaines, espère être prochainement reçu. D’ici là, il dit attendre du Sénégal, « ce pays frère », qu’il continue de « tracer le chemin dans lequel les autres pays africains peuvent s’engager » afin de « mettre Israël face à ses responsabilités ».

Certaines personnalités politiques et représentants de la société civile ont également appelé à fermer l’ambassade d’Israël à Dakar – laquelle se trouve sous protection policière depuis quelques jours – et à boycotter les produits venus des territoires colonisés.

Parmi eux, le militant Guy Marius Sagna, représentant du Front pour une révolution anti-impérialiste populaire et panafricain (FRAPP). Reçu par l’ambassadeur le 13 mai dernier, il appelle à la mobilisation contre la « colonisation sioniste et le rayonnement résolument raciste d’Israël », fustigeant le « communiqué scandaleux » du gouvernement sénégalais, « qui met dos-à-dos la chèvre et le chou quand la chèvre est en train de dévorer le chou. »

« Le Sénégal qui se targue d’une position privilégiée dans la ummah, ne peut pas rester insensible et garder la tête baissée comme tant d’autres pays marqués par la peur de se voir sanctionnés », exprimait pour sa part le collectif Noo lank, qui a appelé à manifester vendredi.

Franc-maçonnerie en Côte d’Ivoire : au cœur du réseau de Sylvère Koyo,
Grand maître de la GLCI

| Par Jeune Afrique
La garde rapprochée de Sylvère Koyo.

Successeur par intérim d’Hamed Bakayoko à la tête de la Grande loge de Côte d’Ivoire, cet avocat d’affaires peut compter sur d’influentes connexions maçonniques.

Depuis fin avril, l’avocat d’affaires Sylvère Koyo est le successeur par intérim de Hamed Bakayoko, le Grand maître de la Grande Loge de Côte d’Ivoire (GLCI), décédé le 10 mars. Il assurera cette fonction durant un an et aura la lourde charge de réformer les textes, afin de revenir sur la durée du mandat, qui n’est plus limitée dans le temps.

Institution maçonnique la plus influente de Côte d’Ivoire, la GLCI compte, parmi ses 2000 membres, des ministres influents, des magistrats, des hommes d’affaires ou encore des officiers généraux, comme des anonymes.

Franco-ivoirien, Sylvère Koyo connaît les rouages de l’État pour avoir conseillé plusieurs gouvernements, dans le cadre de réformes sectorielles. Ancien Grand maître de la province du sud-est, il avait été promu en 2017 député Grand maître (soit le numéro deux de la GLCI), après le décès de Pomelie Coffie en novembre 2016. Il s’est ainsi tissé un important réseau, sur lequel il s’appuie dans le cadre de ses nouvelles fonctions

.Le ministre des Eaux et Forêts, qui a occupé le portefeuille de la Défense, est un intime de Sylvère Koyo. Il est devenu député Grand maître de la GLCI, après que l’intérim de ce dernier ait été officialisé.Après le décès de Hamed Bakayoko le 10 mars dernier, le nouveau Grand maître avait tenté de convoquer une réunion d’urgence au domicile d’Alain-Richard Donwahi à Marcory Résidentiel, située non loin de la polyclinique Farah.

Sylvère Koyo est suspecté par certains « frères de lumière » de préparer le terrain pour Alain-Richard Donwahi, qui n’a pas renoncé à son ambition de succéder à l’ex-Premier ministre. Ses relation avec Hamed Bakayoko s’étaient tendues au moment où ce dernier a audité sa gestion au sein du ministère de la Défense.

Président du Groupement du patronat francophone depuis 2018, Jean-Lou Blachier cultive une proximité avec le Grand maître par intérim de la GLCI. Sylvère Koyo est ambassadeur de cette structure, notamment en Côte d’Ivoire.

En cette qualité, le Grand maître par intérim est un facilitateur de l’ombre des contrats et marchés, grâce à sa connaissance des acteurs étatiques.

 

Cet homme d’affaires compte parmi les bras droits de Sylvère Koyo au sein de la GLCI. Grand secrétaire, il gère les questions administratives.

Tahar Ben Mourad a été mandaté par Sylvère Koyo pour annoncer officiellement le décès d’Hamed Bakayoko aux « biens-aimés frères » maçonniques.

Ce propriétaire du laboratoire Longchamp, l’un des plus huppés du pays – les « frères de lumières » qui ne peuvent se rendre en Europe lui confient leurs analyses -, avait un temps été pressenti pour prendre la succession de l’ancien Grand maître Clotaire Magloire Coffie, décédé en 2017,

Quand Hamed Bakayoko a été hospitalisé en FranceAlbert Pitte a assuré son intérim à la GLCI, gérant les affaires courantes avec Koyo. En dépit de sa proximité avec ce dernier, ses chances d’être désigné Grand maître sont infimes.

Ce professeur de médecine à l’Université de Cocody a été un homme clé durant le mandat de Clotaire Magloire Coffie. David Mignosin est aujourd’hui très proche de Sylvère Koyo, qu’il conseille dans la maîtrise des rites maçonniques.

De nombreux frères l’accusent de privilégier les loges de son pays d’origine, le Bénin.

L’ancien tout-puissant directeur de cabinet du président Ali Bongo Ondimba, « frère » de la Grande loge du Gabon, est très écouté par Sylvère Koyo. Les deux hommes entretiennent par ailleurs des relations d’affaires.

Après sa disgrâce à Libreville, Accrombessi a effectué des séjours réguliers à Abidjan, où le Grand maître Hamed Bakayoko lui avait recommandé de discuter avec Koyo des opportunités d’affaires. Ce dernier l’a aidé à s’orienter dans l’immobilier en Côte d’Ivoire, un secteur en forte expansion.

Cet homme d’affaires français est le patron de Constructions métalliques ivoiriennes (CMI). Il est proche de Sylvère Koyo depuis de nombreuses années, qui le conseille souvent sur l’orientation de ses affaires.

Suspecté d’être lié au pouvoir de Laurent Gbagbo, Bernard Derrien avait eu maille à partir avec la justice ivoirienne. Il avait reçu le soutien de Koyo, qui l’avait appuyé auprès de Bakayoko.

Il fut également proche de Charles Koffi Dibyl’ex président du Conseil économique et social, décédé en 2019.

Cet avocat est l’associé de Sylvère Koyo au sein d’Inlawco – Koyo est par ailleurs associé et cofondateur, en 1989, de Bazie, Koyo et Assa.

Basé à Istanbul, Inlawco conseille les milieux d’affaires turcs en Afrique.

Koyo s’est appuyé sur Ozgur Asik pour faire entrer des groupes turcs en Côte d’Ivoire. Et ce dernier a par ailleurs introduit les francs-maçons turcs dans ce pays, par l’intermédiaire de Koyo.

Candidat à l’élection des Français de l’étranger, pour la circonscription de Côte d’Ivoire, Jihad Badreddine a convaincu Sylvère Koyo de figurer sur sa liste, tout comme Bernard Derrien.

Badreddine a récupéré la gestion des restaurants du casino du Sofitel Abidjan Hôtel Ivoire. Ce Franco-libanais doit son actuelle proximité avec Koyo à Hamed Bakayoko, dont il était un membre de l’entourage.

Blaise Compaoré : les fidèles parmi les fidèles de l’ancien président burkinabè

| Par Jeune Afrique
Mis à jour le 17 mai 2021 à 08h43
La garde rapprochée de Blaise Compaoré.

Pour préparer son retour au pays, l’ancien président burkinabè s’appuie à Abidjan sur ses proches également en exil et à Ouagadougou, et sur les caciques de son parti sur lequel il est resté très influent.

Près de sept ans après sa chute, l’ombre de Blaise Compaoré continue de planer sur la politique burkinabè. Son parti sur lequel il est resté influent, le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), est de retour au premier plan sur la scène politique depuis les élections de novembre 2020 et son nouveau patron, Eddie Komboïgo, est désormais chef de file de l’opposition.

Depuis son exil à Abidjan en 2014, en Côte d’Ivoire, l’ancien président est en outre au cœur du débat sur la réconciliation nationale souhaitée par Roch Marc Christian Kaboré. Alors que sa famille politique fait de son retour à Ouagadougou une condition sine qua non de ces discussions, la justice a annoncé à la mi-avril qu’il serait « bientôt » jugé dans l’affaire de l’assassinat de Thomas Sankara, le 15 octobre 1987. Après sa réélection à la tête du pays, le président a chargé Zéphirin Diabré du dossier.

L’ex-chef de file de l’opposition, désormais ministre de la Réconciliation nationale, s’est rendu en Côte d’Ivoire, afin d’échanger le 5 mai avec « Blaise » et les autorités ivoiriennes.

À Abidjan, Blaise Compaoré est très discret. Il reçoit les politiques burkinabè et entretient de bonnes relations avec le président ivoirien Alassane Ouattara. Dans une rare vidéo diffusée sur les réseaux sociaux à l’occasion de son 70e anniversaire le 3 février, l’ancien président était apparu amaigri. Il était entouré de son épouse, Chantal Compaoré et de quelques intimes. Voici les personnalités qu’il consulte presque quotidiennement et qui sont incontournables dans son premier cercle.

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René Émile Kaboré a pris part à la rencontre entre l’ancien président et le ministre burkinabè de la Réconciliation, Zéphirin Diabré, le 5 mai à Abidjan. L’ex-ministre des Sports est un proche collaborateur de Blaise Compaoré. Président du Rassemblement pour un sursaut patriotique (RSR), il vit lui aussi en exil à Abidjan, depuis 2015.

Jugé par contumace et condamné à 30 ans de prison dans le procès du putsch manqué de 2015, René Emile Kaboré porte un regard très critique sur la gestion de Roch Marc Christian Kaboré. En décembre 2019, il a publié un livre intitulé « Burkina Faso : et si enfin on se disait la vérité », dans lequel il livre sa version des faits de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014.

Le petit frère de l’ancien président est son confident. Sous le coup d’un mandat d’arrêt international émis par les autorités burkinabè qui souhaitent l’entendre dans l’affair>e de l’assassinat du journaliste d’investigation Norbert Zongo et ses compagnons, en 1998, il réside en France.

Ses avocats ont saisi le Conseil d’État après une décision de la justice française, donnant le feu vert à son extradition.

Ami de François Compaoré, le frère cadet de l’ancien président, Salif Lamoussa Kaboré a été emprisonné à Ouagadougou au lendemain de la chute du régime, puis libéré. Il est très proche de Blaise Compaoré. Une fidélité qui a lui valu d’être personnellement recommandé par ce dernier comme consultant sur les questions minières et énergétiques auprès de la présidence centrafricaine. Il vit à Abidjan et effectue des missions ponctuelles à Bangui.

L’ancien ministre des Mines, des Carrières et de l’Énergie et ancien directeur général de la Société nationale d’électricité du Burkina Faso (Sonabel) est par ailleurs régulièrement sollicité par Blaise Compaoré sur les questions économiques.


L’ancien patron du CDP, qui fut aussi directeur de cabinet de Blaise Compaoré, continue de jouer ce rôle auprès de l’ancien président depuis son propre exil ivoirien. En 2019, il confiait à Jeune Afrique se consacrer à l’écriture de livres sur l’histoire politique récente du Burkina, sur l’islam en Afrique de l’Ouest et sur la laïcité dans son pays.

L’ex-président le consulte également sur les questions religieuses. Pour cet historien de formation, la réconciliation ne peut se faire sans Blaise Compaoré.

Nommé directeur de cabinet de Blaise Compaoré en 2014, à la suite de Assimi Kouanda, Sanné Mohamed Topan avait déjà occupé plusieurs postes ministériels et diplomatiques par le passé. Il a été ambassadeur du Burkina Faso auprès du Mali, de la Guinée et du Niger, avec résidence à Bamako de 2002 à 2013.

Ce poids lourd du CDP a notamment été directeur national de campagne du parti pour les élections présidentielles et législatives de novembre 2020. C’est à lui que Blaise Compaoré a remis sa missive dans laquelle il exprimait clairement son soutien à Eddie Komboïgo, actuel président du parti, en tant que candidat à la présidentielle.

L’actuel président du CDP échange régulièrement avec le président d’honneur sur la vie du parti. Si sa volonté de renouveler les cadres a heurté certains caciques, Komboïgo conserve malgré tout la confiance de Compaoré. Il s’est rendu à Abidjan mi-mai pour échanger avec lui sur les conditions de son retour.

Cet ancien ministre continue, tout comme Assimi Kouanda, à défendre Blaise Compaoré. Cet enseignant en philosophie, qui mène des activités personnelles de consultant, a des liens de parenté avec l’ancien président.

Après la chute de ce dernier en 2014, il avait décidé de rester volontairement à Abidjan à la fin de sa mission d’ambassadeur. En dépit du fait qu’il n’était pas visé par des poursuites judiciaires à Ouagadougou.

 
 

Ouattara, Tshisekedi, Kagame, Sassou Nguesso… Quels chefs d’État assisteront au sommet sur les économies africaines de Paris ?

| Par Jeune Afrique
Mis à jour le 17 mai 2021 à 12h47
Emmanuel Macron à l’Élysée, le 16 novembre 2020.

Emmanuel Macron à l'Élysée, le 16 novembre 2020. © Francois Grivelet pour JA

 

Un sommet de soutien aux économies africaines, durement affectées par la pandémie de Covid-19, se tiendra en France le 18 mai. Voici la liste des invités confirmés.

L’objectif de ce sommet est de mettre en place un soutien financier massif aux pays africains, notamment à travers des droits de tirage spéciaux accordés par le Fonds monétaire international (FMI), et de poser les bases d’un nouveau cycle de croissance sur le continent (en récession en 2020, une première depuis vingt-cinq ans). La question de l’annulation de la dette des pays africains sera aussi abordée.

Les chefs d’État et de gouvernement africains et européens qui avaient publié une tribune appelant à un soutien international au continent dans Jeune Afrique et le Financial Times, le 15 avril 2020, seront pour la plupart présents à Paris. D’autres dirigeants le seront aussi. In fine, de nombreux chefs d’État du continent sont attendus à ce sommet, aux côtés d’Emmanuel Macron.

Dîner à l’Élysée

Seront présents : Félix Tshisekedi, Alassane Ouattara, Macky Sall, Muhammadu Buhari, Paul Kagame, Denis Sassou Nguesso, Roch Marc Christian Kaboré, Bah N’Daw, Nana Akufo-Addo, Cyril Ramaphosa, João Lourenço, Faure Essozimna GnassingbéFilipe Nyusi, Sahle-Work Zewde, Abdallah Hamdok, Kaïs Saïed ou encore Mohamed Ould Ghazouani. Tous ont été conviés à un dîner à l’Élysée la veille du sommet, le 17 mai. Pour le Tchad, c’est le Premier ministre Albert Pahimi Padacké qui représentera Mahamat Idriss Déby, le président de la transition.

Plusieurs représentants d’institutions continentales seront également de la partie, comme Moussa Faki Mahamat, le président de la Commission de l’Union africaine (UA), ou Akinwumi Adesina, le président de la Banque africaine de développement (BAD).

Côté européen, les Premiers ministres Pedro Sánchez (Espagne), Mario Draghi (Italie) et António Costa (Portugal) sont attendus, tout comme le président du Conseil européen, Charles Michel, et Ursula Von der Leyen, la présidente de la Commission de l’UE.

D’autres personnalités prendront part aux débats par visioconférence, comme Angela Merkel, Uhuru Kenyatta, ou encore de hauts représentants américain et japonais.

Voyage au Rwanda et en Afrique du Sud

Dans la matinée du 18 mai, Emmanuel Macron s’entretiendra en réunion bilatérale avec plusieurs de ses homologues africains qu’il n’a pas vus depuis longtemps : João Lourenço, Filipe Nyusi et Cyril Ramaphosa. Avec ce dernier, il devrait notamment peaufiner sa prochaine visite en Afrique du Sud, qui pourrait avoir lieu fin mai, dans la continuité de son déplacement attendu au Rwanda. Et avec Nyusi, Emmanuel Macron abordera essentiellement la question des réponses à apporter à l’insurrection jihadiste dans le nord du Mozambique.

La veille, le 17 mai, se tiendra aussi une conférence internationale d’appui à la transition soudanaise, en présence du Premier ministre Abdallah Hamdok. Selon une source élyséenne, cette transition « mérite une attention particulière car elle est considérée par beaucoup comme un exemple de transition démocratique en Afrique ».

Les évêques du Nigeria s’alarment de l’insécurité dans le pays

Explication 

Dans une lettre ouverte rendue publique mi-mai, les évêques nigérians ont appelé le gouvernement à agir pour mettre fin au climat d’insécurité dans le pays.

  • Rachel Notteau, 
Les évêques du Nigeria s’alarment de l’insécurité dans le pays
 
Une voiture criblée de balles sur le site d'une attaque à Maiduguri, au Nigéria, mercredi 24 février 2021.JOSSY

Dix fidèles enlevés dans une mosquée au nord-ouest du pays le 10 mai, sept policiers tués dans des attaques au sud-est et 17 villageois assassinés dans le centre. Des faits qui s’ajoutent au meurtre et à l’enlèvement de deux prêtes le 30 mars.

Au Nigeria, l’insécurité fait rage. C’est pourquoi la Conférence des évêques du Nigeria (Cbcn) a lancé un nouvel appel au gouvernement pour qu’il endigue ce phénomène qui sévit partout dans le pays. Dans leur lettre ouverte, rendue publique mi-mai, la Conférence épiscopale souligne : « l’échec de l’exécutif par rapport à l’obligation constitutionnelle de protéger la vie et les biens des Nigérians ».

→ À LIRE. Au Nigeria, un prêtre tué, un autre enlevé

Depuis plusieurs années, le Nigeria doit faire face à plusieurs défis majeurs, notamment sur le plan sécuritaire. Depuis 2009, le mouvement terroriste Boko Haram est actif dans le nord-est du pays. Les attaques et les enlèvements se sont multipliés depuis 2018. De nombreux affrontements ont également lieu au centre du pays entre des agriculteurs et des éleveurs « faisant désormais bien plus de victimes que l’insurrection de Boko Haram », dévoile l’ONG Crisis Group dans un rapport publié en 2018.

Une violence qui touche l’ensemble de la population

Dans ce contexte, l’Église catholique du Nigeria appelle à un sommet sur la sécurité avec le gouvernement pour prôner « l’unité, la paix, la justice, le progrès et la protection des Nigérians ».

→ RELIRE. Au Nigeria, l’épiscopat alerte le gouvernement sur les risques de sécession

Dans ce pays de 220 millions d’habitants, dont environ de 50 % de la population est musulmane et 45 % chrétienne, la violence vise tous les Nigérians. La population chrétienne est prise pour cible par Boko Haram, qui sème notamment la terreur dans le nord du pays. D’après l’ONG Portes ouvertes, 3 530 chrétiens ont été tués au Nigeria en 2020. Un triste bilan qui place le Nigeria en tête des pays où le nombre d’assassinats de chrétiens est le plus élevé, pour la sixième année consécutive.

« Nous ne voulons pas que le Nigeria s’effondre »

Les musulmans sont également victimes de meurtres et d’enlèvements. Le 10 mai, des hommes armés sont entrés une mosquée, près de la frontière avec le Niger. Ils ont enlevé quarante fidèles. Les forces de sécurité ont pu sauver trente otages mais les dix autres sont restés entre les mains des ravisseurs. La majorité des enlèvements au Nigeria sont organisés par des groupes armés motivés davantage par l’appât du gain que pour des raisons idéologiques.

Les évêques du Nigeria ont ainsi appelé tous les chefs religieux à se mobiliser afin de rester « unis dans la lutte au nom du peuple ». Et de faire ainsi pression sur le chef de l’État Muhammadu Buhari, issu de l’APC (All Progress Congress), à la tête du pays depuis 2015. Ils visent notamment les dirigeants de l’APC au pouvoir, accusés de passer plus de temps à réprimer les voix d’opposition plutôt que d’assurer la sécurité des Nigérians partout dans le pays. L’épiscopat se veut solennel et tire la sonnette d’alarme : « Nous parlons parce que nous ne voulons pas que le Nigeria s’effondre ».